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| | Fédor Dostoievski [Russie] | |
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Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: pour oxymoron Lun 02 Nov 2009, 14:11 | |
| je ne sais pas la date de tes analyses sur Dostoievsky, je suis tombée sur le fil aujourd'ui 2novembre 2009. Tes commentaires sont magnifiques, j'ai lu beaucoup de Dostoievsky, mais quand je fais appel à ma mémoire, en lisant ce que tu as écrit, j'ai envie de relire tout. je n'ai pas lu "le joueur", lui même a été un joueur compulsif, donc dans ce livre les émotions , les regrets, les misères du joueur doivent se montrer dans la crue réalité. un grand merci et mes compliments | |
| | | Prince d'Aquitaine Animation
Nombre de messages : 2948 Age : 34 Localisation : Maromme, Seine-Maritime Date d'inscription : 29/05/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 14:22 | |
| Oh je n'ai pas grand mérite puisque ce sont les analyses de mon professeur de littérature comparée, Mr Kahn, que je livre ici. Et comme tout le monde a l'air d'apprécier, je continue | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 14:26 | |
| j'attends d'avoir l'esprit libre et je m'y mets. Ce qui me chagrine, c'est de ne pas oser me replonger dans un bon gros volume de D. | |
| | | poeme pilier
Nombre de messages : 1290 Age : 50 Date d'inscription : 26/10/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 14:36 | |
| tu as le merite de nous le faire partager le prince et pourquoi tu n'oses pas rotko ? moi je recherche apres avec mon demenagement mes livres sont partout et nulle part je recherche egalement et si c'etait vrai pour pouvoir mettre mon extrait sur le post et je ne le retrouve pas et pourtant je cherche | |
| | | Prince d'Aquitaine Animation
Nombre de messages : 2948 Age : 34 Localisation : Maromme, Seine-Maritime Date d'inscription : 29/05/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 15:23 | |
| Crevette, j'approuve totalement ce que tu dis. Le mal comme tu le dis est plus présent dans la scène du pauvre cheval, pleine d'injustice et provoquant un véritable dégoût de toute cette violence gratuite. Comme le dit Porphyre, Raskolnikov est une victime du pourrissement de la société et des hommes; ce n'est pas un être malfaisant, son délire vient de la pauvreté, de la misère, de son manque de nourriture... Bon, je continue avec mes cours - Spoiler:
pp.83-91 Première partie, chapitre VII
Raskolnikov a beaucoup réfléchi depuis plusieurs semaines et a fait des visites de reconnaissance. Dostoïevski va montrer qu’il n’y a pas de maîtrise de Raskolnikov lui-même et que le seul à avoir du pouvoir est Dieu. Raskolnikov va imaginer la facilité du meurtre pour avoir une vie plus facile, mais le problème est que c’est l’inverse qui se passe; il n’est pas un criminel-né mais un criminel par accident, par idéologie.
Extrême réalisme de la scène
Le chapitre s’ouvre sur la métonymie des « yeux de la vieille » + focalisation sur les mains. Cf. p.86 : la « mare de sang » est un détail visuel très caractéristique du style extrêmement efficace de Dostoïevski. (Faulkner n’a pas un si grand réalisme dans la scène du meurtre, pareil pour Camus. Plus de points communs avec Jelinek, sorte de proximité avec plus d’une interprétation.) « fragment de peigne » p.85 + description de sa chemise extrêmement précise + description de Lizaveta p.85. Précision également du dialogue initial p.84, la vieille remarque le tremblement des mains qui traduit l’hésitation du passage à l’acte. Importance des objets avec série de gros plans sur le verrou, la hache, la clé, le leurre qu’il a fabriqué, le savon… qui ancre véritablement la scène dans une réalité quasiment photographique. Précision des meurtres surtout p.88 avec la phase de ses gestes et sa très grande minutie + la description du cadavre de la vieille; l’horreur est extrêmement importante. Saturation du visuel, Dostoïevski ne fait pas du panthéon du surréalisme car André Breton va lui reprocher de trop insister avec un excès de réel, quie st un héritage du roman de Balzac et Dickens. Eléments d’hyper-réalité + mysticisme chrétien; ce sont ces deux pôles qui animent Dostoïevski. Ce réalisme lui est nécessaire pour appuyer sa réflexion morale, sa philosophie des événements.
Portrait de son acte : essai de caractérisation de l’acte même du meurtre
Le portrait de son passage à l’acte permet de comprendre le monde qui sépare l’idée qui est concevable et le passage à l’acte. La totale maîtrise de Raskolnikov arrive à l’assassin sans le vouloir.
1) Son sang froid
p.83 : « il commit une faute qui faillit tout gâter », cela est très subjectif, le problème est que si véritablement la faute avait eu des conséquences la vieille aurait été sauvée, donc le point de vue est seulement attribuable à Raskolnikov à ce moment précis. Le manque de tout gâter est la dernière chance de le sauver, il ne passerait pas à l’acte mais rattraperait sa faute. La faiblesse de ses maines + l’abandon de ses forces montrent que le personnage de Dostoïevski n’est pas un criminel-né, c’est quelque chose qui lui échappe et cela nous le rend plus sympathique. Au final, Raskolnikov frappe la vieille de toutes ses forces + acharnement sur le cordon de la bourse + obstination sur le coffre + bourrage de ses poches d’objets précieux.
2) Dégoût de Raskolnikov
Le deuxième meurtre est celui de Lizaveta et est différent de celui de la vieille. Pour Raskolnikov, il n’y a pas de circonstances atténuantes, il s’est coupé de l’humanité de manière définitive. Il va connaître la rédemption par la croix, ce qui est très loin du modèle napoléonien. Pour Raskolnikov, il n’y a pas de sang-froid mais une adaptation aux circonstances.
Indices de la très grande maîtrise de Dostoïevski
En revanche, beaucoup de sang-froid de la part de Dostoïevski, on a l’impression d’être avec un narrateur omniscient mais en fait on est dans une focalisation interne; « les lèvres de la malheureuse se tordirent en une de ces grimaces qu’on remarque chez tout petits enfants » (p.87) atteste de la présence du narrateur donc maîtrise de Dostoïevski. Prolepse p.85 : organisation de la temporalité, maîtrise de Dostoïevski + au fond de cela théorie des fourches temporelles avec le jeu du destin. Si Raskolnikov n’avait pas entendu chez le marchand que la vieille serait seule le lendemain, il n’y aurait pas eu de crime. Après le crime, si le concierge avait été dans sa loge, il aurait été arrêté immédiatement. Ces différentes bifurcations installées par Dostoïevski sont autant d’effets de réel; technique du roman policier. Le surgissement de Lizaveta dans l’appartement fait partie de ecs circonstances imprévues qui montrent que Raskolnikov ne maîtrise absolument rien.
Ce passage paroxystique nous montre un personnage complètement perdu au moment même où il devrait être maître de lui; pour autant sa responsabilité n’en est pas atténuée. Le roman passe par la revendication de son acte qu iest une condition pour la rédemption.
- Spoiler:
pp.96-115 Deuxième partie, chapitre I
Problème des traces que Raskolnikov a laissées + peur qu’il éprouve lorsqu’il est convoqué au commissariat. Son importance + l’évanouissement au commissariat correspond à une sorte d’aveu au niveau psychologique. En même temps, Dostoïevski va décrire un certain nombre d’hommes de manière extrêmement réaliste et insiste sur le fait que le crime a totalement isolé Raskolnikov des autres humains. Ce passage contient quatre couches concentriques : - le délire; - le raisonnement logique et la volonté de dissimulation; - la perception de la vie du commissariat; - le traumatisme psychologique et son corollaire, la tentation de l’aveu. A cause de ses remords, il ne semble trouver d’issue que dans le moment de l’aveu. Raskolnikov réussit à dissimuler les traces; nous sommes à l’époque pré-scientifique, il n’y a ni ADN ni empreintes digitales à l’époque de Dostoïevski. Raskolnikov va réussir malgré tout à dissimuler les traces. Il est pris entre sauver sa peau et la tentation de l’aveu qu ilu permettrait de retrouver la société humaine. Questionnement propre à Dostoïevski. Le dilemme de Raskolnikov réside dans l’aveu. C’est le seul moment du texte où cela se passe. Cela est essentiel car corollaire du mysticisme de Dostoïevski, la foi va permettre à Raskolnikov d’être sauvé par l’intermédiaire de Sonia; il est le seul à pouvoir échapper au châtiment. p.97 : on est au lendemain du crime, très grande précision de Dostoïevski dans le traitement du mental d’un criminel. Raskolnikov ne devient pas fou ou l’impulsion de son acte mais celui-ci l’a profondément modifié. Ce passage aborde quatre points : - le délire; - les traces; - la vie du commissariat = scène de genre; - l’évolution psychologique du personnage.
Le délire
Ce phénomène entraîne une dilatation du temps, Raskolnikov est marqué physiquement (forte fièvre p.96) + suspension du temps. Thème de la folie : « il crut devenir fou » (p.96), « fou d’angoisse » (p.97), « la conviction que tout l’abandonnait, depuis la mémoire jusqu’à la plus simple faculté de raisonner. » (p.98). Il est amené à considérer que la raison ne l’a pas abandonné mais son état est près de la folie. p.99 : l’adverbe « longtemps » montre une sorte de demi-sommeil, de cauchemar éveillé. Au moment de la conversation, il est incapable de raisonner. Le paroxysme se situe à la p.103 avec son terrible malaise au commissariat; il n’a pratiquement aucun contrôle sur ses pensées et ses actes. Il éprouve une sorte de joie animale quand il comprend la cause de la convocation. Le délire de Raskolnikov est caractéristique des grands personnages de Dostoïevski, qui a au fond besoin de ce climat paroxystique. Il va en oppostion à la conception napoléonnienne du contrôle et de la rationalité et met en avant la complexité de la nature humaine. Pour Dostoïevski, l’être humain ne se maîtrise pas lui-même, ce qui est une idée relativement récente à son époque, la part de l’inconscient est très importante. On est dans la preuve que Raskolnikov n’est pas un criminel-né et que son être répugne à ce qu’il a fait. Volonté de sa part d’échapper à son châtiment même s’il est dans l’aveu. Raskolnikov va jouer une espèce de match avec la justice, avec Porphyre. Provocation avec la police où il avoue son crime mais se reprend aussitôt avec la dissimulation des épreuves avec une très grande vraisemblance. p.111 : narrateur omniscient avec son commentaire, qui est peut-être de Dostoïevski lui-même.
Les traces
Volonté humaine d’échapper à la justice. p.97 : nettoyage du sang, la bourse et les objets sont dissimulés dans le mur puis sous une pierre; démarche d’un criminel qu iveut récupérer son butin. p.98 : il enlève le nœud coulant et nettoye/arrache des bandeaux de sang car tous ses vêtements comportent des taches révélatrices; il s’endort avec ces lambeaux de vêtements tachés. L’idée de Dostoïevski est que le crime laisse des taches matérielles mais aussi psychiques; pensée très moderne et début d’une littérature : le roman policier, qui n’existait pas avant 1830 et Poe. A chaque fois, Raskolnikov a de la chance, les indices pour lui n’en sont pas pour les autres. Cela permet de montrer que Raskolnikov n’est pas un criminel endurci, il ne pense pas aux pièces à conviction, il est pris dans une improvisation. Dostoïevski mélange des scènes de genre, comme celle du commissariat. Il détache Raskolnikov dans une vie autour de lui donc foisonnement de personnages secondaires (même chose chez Faulkner).
La vie du commissariat
Dans les années 1860, satire à la Gogol - Dostoïevski a commencé par l’imitation de Gogol. La dame tient une maison close et on lui reproche l’altercation entre un client et elle : scène de vie quotidienne et de personnages à la Gogol. On ne retrouve pas ce personnage dans le roman. p.103 : apparition des secrétaire, lieutenant et commissaire. p.104 : détails assez précis. Grande part accordée au dialogue, levée du mystère avec le provocation. p.108 : Dostoïevski va régler ses comptes avec ses collègues littérateurs par l’intermédiaire du lieutenant et se moquer d’une organisation caricaturale. A l’époque, beaucoup d’habitants de Pétersbourg sont des Allemands et des Polonais, auxquels va s’en prendre Dostoïevski. La scène du commissariat permet l’analepse.
L’évolution psychologique du personnage
On apprend que Raskolnikov a failli épouser la fille de la logeuse, qui apparaît pour disparaître aussitôt, et qu’il concevait ce mariage comme un sacrifice. Technique du contre-point parallèle, étude de la conscience de Raskolnikov et de son évolution psychologique. Dès le départ, tentation de l’aveu avec l’évanouissement. Trahison du corps + articles + fait matériel + il est le seul à ne pas se manifester quand les autres laissent quelque chose en gage; tout cela amène la méfiance de Porphyre, qui n’a pas de mérite car il est le double de Raskolnikov. C’est une succesion de faits qui n’amène pas à la certitude de la culpabilité de Raskolnikov mais la montre indirectement. Ce qui va sauver Raskolnikov est qu’il est le maître de son destin, c’est lu iqui va choir l’aveu ou non; malgré toutes les preuves, il peut toujours échapper au châtiment. Présence de l’aveu dès le début car porphyre n’a qu’à le faire accoucher de l’aveu (cf. p.102). Il a conscience de son infinie solitude. pp.111-112 : passage capital sur sa solitude, l’enfermement de sa vie.
Raskolnikov est entre dissimuler toutes les traces et la tentation de l’aveu, et en ce moment il erre dans la ville comme il erre dans sa propre conscience en étant un mystère pour les autres qui eux continuent leur propre vie. Et ces personnages annexes s’occupent de leur vie car ils ont leur propre détermination. Cette polyphonie est au cœur de l’œuvre de Dostoïevski.
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| | | poeme pilier
Nombre de messages : 1290 Age : 50 Date d'inscription : 26/10/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 15:24 | |
| c'est une des raisons pour laquelle l'homme doit expier ses crimes pour devenir pur apres non? | |
| | | Dindon pilier
Nombre de messages : 2737 Date d'inscription : 20/07/2008
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 16:25 | |
| - rotko a écrit:
- Ce qui me chagrine, c'est de ne pas oser me replonger dans un bon gros volume de D.
En folio, il y a 2 volumes de 500 pages chacun en comptant les notes. Donc, psychologiquement, c'est moins dur à aborder pour toi. (Dis, tu n'as pas honte ? ) | |
| | | Dindon pilier
Nombre de messages : 2737 Date d'inscription : 20/07/2008
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 16:54 | |
| Prince d'Aquitaine : à propos de son crime et des curieuses coïncidences qui semblent faciliter Raskolnikov à passer à l'acte (le fait de trouver facilement la hache, ou d'entendre l'heure de sortie de la soeur, etc...), j'ai immédiatement pensé au fatum.
Son libre arbitre est en effet bien "orienté" par ces inflexions du destin, qui finalement l'acculent à tuer et balaient ses hésitations.
En d'autres termes, ce personnage pourrait bien être le héros d'une tragédie antique.
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| | | Prince d'Aquitaine Animation
Nombre de messages : 2948 Age : 34 Localisation : Maromme, Seine-Maritime Date d'inscription : 29/05/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 17:38 | |
| Exactement. Un critique parle d'ailleurs de "tragédies romanesques". Mais en même temps, je dirais que comme chez Racine le destin est une bonne excuse pour faire le mal. Raskolnikov pourrait refuser de tuer la vieille, changer ses plans; on sait qu'il a commencé à penser au crime au mois de mai, donc destin oui mais aussi responsabilité.
Enfin je n'arrive pas à voir en lui une victime du destin, tant son cynisme et son sadisme vont loin. Car chez les tragiques antiques, le héros ne veut pas faire le mal, Œdipe n'a rien demandé. Au contraire, Raskolnikov a un penchant pour le mal. Et puis s'il était victime du fatum, il n'y aurait pas de rédemption possible. C'est parce que Raskolnikov a une psychologie qu'il peut réintégrer la communauté humaine. Je crois que la Providence divine finale est un parfait contre-pied à une interprétation fataliste. Mais la question fatalité/hasard est quand même très importante. | |
| | | poeme pilier
Nombre de messages : 1290 Age : 50 Date d'inscription : 26/10/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 17:43 | |
| bonsoir le pirnce je pense que oedipe subit le destin et il ne peut le changer tantdis que raskolnitov est maître de son destin. Cest lui qui décide de son acte et en est responsable. Dis moi si tu es d'accord stp? | |
| | | Prince d'Aquitaine Animation
Nombre de messages : 2948 Age : 34 Localisation : Maromme, Seine-Maritime Date d'inscription : 29/05/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 17:49 | |
| Oui, c'est ce que je pense Raskolnikov choisit de tuer la vieille usurière. D'ailleurs, son prétexte est qu'il fait partie de ces hommes supérieurs qui peuvent se permettre de transgresser les lois, au moment où ils le désirent. Désir donc de montrer sa puissance en transgressant les lois, la justice humaine. Il le fait parce qu'il est persuadé qu'il a une force en lui, c'est un acte à motivation idéologique donc psychologique. Je crois que Dostoïevski, en exposant les ambiguïtés de la conscience humaine pose la responsabilité de l'homme face à ses actes. Mais ce n'est pour le coup que mon interprétation... | |
| | | poeme pilier
Nombre de messages : 1290 Age : 50 Date d'inscription : 26/10/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 18:30 | |
| je suis de cet avis aussi ce n'est pas comme dans les tragédies où le héros etait l'instrument du destin. Là en revanche l'auteur montre que chaque homme est responsable de ses actes. Il veut montrer le danger de certains actes irréfléchis sous le coup de la jeunesse. Il veut aussi peut etre démontrer les conséquences d'un acte quand le héros croit trop en sa force. Par conséquent pour l'auteur il faudrait mesurer et réflechir à nos actes au lieu d'agir aveuglément sous l'égide d'une doctrine quelconque | |
| | | Constance pilier
Nombre de messages : 1650 Date d'inscription : 01/10/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 18:47 | |
| Ce qui pose la question du libre arbitre; libre arbitre auquel je ne crois pas ... | |
| | | poeme pilier
Nombre de messages : 1290 Age : 50 Date d'inscription : 26/10/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 19:20 | |
| le libre arbitre pose la question du destin en fait : peut on vraiment le maîtriser. Pour ma part je dirait qu'en général non on ne peut pas. Même si dans certaines situations c'est à lêtre humain de savoir faire les bons choix et prendre la bonne direction | |
| | | cafeine pilier
Nombre de messages : 351 Age : 49 Localisation : sud ouest rose et ensoleillé Date d'inscription : 31/10/2008
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 19:37 | |
| Poeme a écrit : - Citation :
le libre arbitre pose la question du destin en fait : peut on vraiment le maîtriser. Pour ma part je dirait qu'en général non on ne peut pas. Même si dans certaines situations c'est à l'être humain de savoir faire les bons choix et prendre la bonne direction libre arbitre et destin ne vont pas vraiment ensemble, si j'osais j'aurai tendance à croire qu'ils s'opposent. Lorsque j'ai lu Dostoïevski, je n'ai pu m'empêcher d'avoir à l'esprit la situation particulière dans laquelle se trouvait alors l'Europe et la Russie et les changements fondamentaux à laquelle au moins idéologiquement elles faisaient face. Le fait que la naissance ne se présentait plus comme une évidence de sort, le serf naissait serf et mourrait de même à quelque chose près. | |
| | | Constance pilier
Nombre de messages : 1650 Date d'inscription : 01/10/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 19:50 | |
| Tout à fait, cafeine ... il me semble que dès qu'on doit faire un choix, donc peser le pour et le contre, on n'est plus en position d'exercer son libre arbitre puisqu'on est soumis à des éléments indépendants de notre volonté ... de plus, n'est-ce pas plutôt une obligation de négocier avec soi-même, tout en influant sur son entourage, donc en le privant de son libre arbitre ? | |
| | | poeme pilier
Nombre de messages : 1290 Age : 50 Date d'inscription : 26/10/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 19:59 | |
| je comprends mieux la théorie de caféine avec les explications de Constance. Mais au départ, quand on pèse le pour et le contre c'est bien nous qui faisons un choix , selon ce qui résulte de notre réflexion.? Après c'est vrai que le libre arbitre sans réflexion préalable revient aux agissements du héros de Dostoiewski | |
| | | Constance pilier
Nombre de messages : 1650 Date d'inscription : 01/10/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 20:08 | |
| Si le choix est raisonné, nos décisions sont-elles réellement dépendantes de notre volonté ? Ne seraient-elles pas plutôt dictées par notre inconscient, puisque nous sommes le produit de notre éducation, et de nos expériences personnelles ... ? | |
| | | poeme pilier
Nombre de messages : 1290 Age : 50 Date d'inscription : 26/10/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Lun 02 Nov 2009, 20:54 | |
| j'avoue que tu as raison. On est tous dictés par des lois qu'elles soient sociales ou provenant de notre éducation. J'avais pas vu la chose sous cet angle. Pour moi c'etait prendre des décisions mais c'est pas notre inconscient qui les prend mais notre raison. Raison forgée par ce que l'on nous a inculqué et aussi par les règles sociales. | |
| | | Prince d'Aquitaine Animation
Nombre de messages : 2948 Age : 34 Localisation : Maromme, Seine-Maritime Date d'inscription : 29/05/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Sam 28 Nov 2009, 19:47 | |
| Bon, je termine de poster mes cours - Spoiler:
Bakhtine, très grand critique du XXe s., mal vu par les autorités soviétiques et exilé maintes fois, a publié deux textes importants : François Rabelais et Problèmes de la poétique de Dostoïevski, très intéressante sur deux points : le principe de dialogisme et la carnavalisation qu iest une forme d’accès sur le changement, le renouvellement; toutes les sociétés connaissent le carnaval sous une forme ou sous une autre. Le développement du capitalisme provoque la rencontre entre l’homme et les idées. Dostoïevski est le dernier réalisateur d’un genre ancien, il fait preuve d’un dialogisme satirique (cf. Ve s. av.J-C), socratique, qui trouve ses racines dans le carnaval; phénomène de longue durée.
Le carnavalisme
Il y a plusieurs carnavalisations dans Crime et châtiment : - le destin des gens oscille entre émotions et idées, tout est poussé au paroxysme, rien n’est stable. On ne sait pas si le couple Razoumikhine/Dounia continue, on s’en doute mais le passage est inachevé. Idée aussi que le carnaval est un mouvement frénétique. Le lieu même de l’action est à la frontière entre l’existence et la non-existence, le Pétersbourg de Dostoïevski est à la frontière entre réalité et fantasmagorie. Influence de Balzac, du roman d’aventure et de La Dame de pique de Pouchkine. L’épisode du repas de funérailles de Marmelade le rendez-vous chez Raskolnikov montrent où l’on change de niveau de réalité. p.295 : on est dans la logique fantastique du rêve avec le fait de se rencontrer mort et de rire. - renvoi à l’image du rire moqueur du peuple quand le roi est détrôné. La place est le symbole du peuple. Bakhtine fait la remarque sur l’espace du roman : bas/haut/escalier/seuil/entrée/palier; ce sont des lieux où vont avoir lieu la crise/le changement radical. Ce sont des points de passage où se situe l’action. La scène du scandale a lieu dans l’espace intérieur de la maison, qui remplace la place publique; il n’y a pas d’espace intime. Chez Dostoïevski, le temps inscrit est stable, il y a des crises qui sont préparées par la rencontre entre des personnages dans des pièces conçues pour eux. Dostoïevski s’inscrit sur le seuil et dans des place dans lesquels le temps va se dilater à l’infini. On a l’impression que Raskolnikov vit sur le seuil et qu’en sortant il ne ferme pas la porte. Sa chambre est quasiment un cercueil dans lequel ne peut être vécue qu’une crise. C’est du seuil qu’il voit mourir Marmeladov et qu’il vit un moment épouvantable, sur le seuil où il a tué la vieille. C’est ce qui fait que l’espace du roman n’est jamais stable.
Les dialogues
Bakhtine commente le monologue de Raskolnikov pp.49-50 comme un dialogue. On est à la veille du meurtre, donc avant sa décision finale. Lettre de sa mère qui lui raconte l’épisode de sa sœur et de son séducteur, forme de mariage qui est totalement méprisable, c’est comme si Dounia allait se prostituer - figure de la jeune fille innocente. Le dialogue intérieur est très monologalisé. On parle chez Dostoïevski de polyphonie, surtout dans la conscience de Raskolnikov puisque les paroles et les pensées internes apportent leurs vérités. Tous les dialogues sont bivocaux : les paroles de Dounia avec une intonation persuasive puis jouées avec ses propres intonations, marques de colère et d’ironie; les paroles tristes de Poulkheria Alexandrovna et de Raskolnikov; les paroles de Sonia et de Marmeladov. Dès la première partie du roman, on entend pratiquement toutes les voix qui se répondent, se reflètent. Rien dans le contenu du roman ne sera étranger à la conscience de Raskolnikov. Ce sont les scènes de dialogue qui organisent le roman. La vision de la ville et les pensées de Raskolnikov vont faire naître le dialogue, Dostoïevski ne cache rien. Le héros a une idée et la défend, il croit au droit ouvert par supériorité superposé à d’autres idées comme la fraternité, le Christ, l’égoïsme de la société. Les personnages vont participer à l’explosion de la personnalité de Raskolnikov qu ise révèle à lui-même. L’article de Raskolnikov n’existe pas sous une forme autonome, on le lit à travers le jugement de Porphyre qui va l’exposer de manière un peu provocante, ce qui va amener Raskolnikov à le formuler de manière polémique. Son article a une certaine tendance au fascisme, il est dans une logique pré-nazie. Cet article est pris dans le cadre d’un dialogue, zone où Porphyre et Raskolnikov affrontent leurs consciences. Leurs dires sont complexes et sont le dialogue de l’époque toute entière. Bakhtine relève un oxymore entre Raskolnikov, le penseur-criminel, et Sonia, la prostituée-sainte. Cela illustre l’idée de la polyphonie qui va de paire avec la constitution du temps et de l’espace; conception non-euclidienne.
- Spoiler:
Chronologie du déroulement des actions : le temps de Raskolnikov
Le début du roman est traditionnel et précis. L’été torride va accentuer la fièvre du personnage. Cette canicule est contemporaine du moment de rédaction : 1865. p.4 : lieu : Saint-Pétersbourg. L’incipit répond aux questions quand? Qui? Où? p.7 : quelqu’un s’adresse au personnage, dont on apprend le nom et le niveau social; les étudiants sont une petite minorité à l’époque. p.10 : rencontre avec Marmeladov. Chapitre 3 : lendemain, 1ère analepse p.31 : nombreux retours en arrière par Dostoïevski et même parfois des prolepses. La lettre de la mère de Raskolnikov entraîne une seconde analepse. Raskolnikov n’est plus étudiant au sens strict du terme + histoire de Dounia. p.56 : intervention en faveur de la fillette. Chapitre 5 : 1ère analepse de l’acte criminel, le projet date de la fin mai. p.67 : prolepse : vie du bagne ou après le bagne? Le destin fait qu’il apprend que la vieille sera seule. Chapitre 6 : nouvelle analepse : il y a six semaines, il s’est souvenu de l’adresse de l’usurière qu’on lui avait donnée l’hiver précédent. Idée à l’état embryonnaire. p.73 : il est immobile sur son lit + prolepse car sommeil très long, il est pris entre agitation et hébétude. p.74 : J+2, visite de Nastassia. p.75 : préparatifs. l p.80 : notation 7h10. l temps chronométré p.81 : 7h30. l pp.83-95 : temps du crime, extrêmement court. p.97 : J+3, lendemain du meurtre. p.114 : convocation au commissariat. p.126 : hallucination + évanouissement = dilatation du temps. p.127 : J+x, ce sont les paroles de Nastassia qui nous apprennent qu’on est à J+6, 4 jours après le meurtre. p.177 : il veut en finir. p.178 : aveu repris à la dernière minute. p.185 : rencontre avec Sonia. p.274 : évocation de l’article écrit 6 mois avant puis récit de l’assassinat en rêve et visite de Svidrigaïlov. p.345 : lecture de Lazare. p.350 : instinct vital de sauver sa peau. p.398 : repas de deuil. p.433 : aveux chez Sonia + passage de la folie de Katerina Ivanovna + mort de Katerina. p.450 : le soleil se couche. p.417 : certitude de Porphyre, le jeu du chat et de la souris s’arrête. p.488 : on apprend que toute l’action est enclose dans le mois de juillet. p.543 : visite chez sa mère et sa sœur. p.548 : arrivée chez Sonia. p.552 : il se prosterne face à la place et va se dénoncer au commissariat. p.565 : un an et demi après le crime, il est au bagne de Sibérie.
- Spoiler:
pp.263-284 Troisième partie, chapitre V
Le premier entretien entre Porphyre et Raskolnikov a quelque chose de fascinant, les deux personnages interagissent avec une complicité de milieu et de langage. La tâche de Porphyre est de faire advenir Raskolnikov à la vérité. Ce qui l’intéresse, c’est la possibilité de rachat; il s’occupe du châtiment et de la réinsertion. Raskolnikov est largement soupçonné dès ce premier entretien, la preuve est que les objets laissés l’engagent; à la différence des autres, il n’est pas venu les rechercher. Chapitre en focalisation interne, le narrateur n’entre pas dans la conscience de Porphyre au-delà des paroles qu’il prononce. Son portrait est intéressant, il apparaît commeune sorte de sphinx, de boule (cf. p.265). Technique que l’on retrouvera dans les personnages policiers du XXe s., par exemple Colombo. Si Raskolnikov répond tout de suite, il se trahit; mais il voit le piège. Double enjeux : jeu d’enquête, projection de la conscience de Raskolnikov, et cela permet à Dostoïevski d’exposer l’idée-clé (la supériorité de certains hommes) de Raskolnikov dans un dialogue. Porphyre est à la fois un opposant (il veut coincer Raskolnikov) et un adjuvant (c’est lui qui le fait accéder à la vérité). Face à lui, Raskolnikov s’y prend de manière adroite. Il vit en dehors du monde réel puisqu’il ne sait pas que l’article a paru, ce qui est dit par Porphyre, qui lui pense pourvoir tout expliquer par le milieu. Porphyre n’a pas de preuve matérielle, pas de trace de l’arme du crime, aucun témoignage oculaire fiable, et a un motif tiré par les cheveux. Raskolnikov pourrait échapper à la justice. L’invitation montre que Porphyre sait que Raskolnikov est coupable.
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| | | Prince d'Aquitaine Animation
Nombre de messages : 2948 Age : 34 Localisation : Maromme, Seine-Maritime Date d'inscription : 29/05/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Sam 28 Nov 2009, 19:51 | |
| Et enfin - Spoiler:
pp.350-370 Quatrième partie, chapitre V
Deuxième entretien entre Porphyre et Raskolnikov. Allusion à une arme secrète, qui est un témoin qui accuse Raskolnikov. Celui-ci est sauvé par le peintre innocent qui s’auto-accuse du crime, il fait tout ce qu’il faut pour échapper au châtiment mais il est tenté par l’aveu; ces deux tendances le rendent malade. Pertinence de l’analyse psychologique. Portrait moral de Porphyre et goût pour les anecdotes générales. Napoléon fascine les Russes car il leur a amené leur première grande guerre, il est l’incarnation de la puissance démiurgique. Porphyre insiste sur leur complicité de classe, ils appartiennent au même milieu. Confrontation qui tourne momentanément à l’avantage de Raskolnikov.
Les signes extérieurs et corporels de Raskolnikov Raskolnikov est dans l’attente et se prépare à une nouvelle lutte. Tous les détails de la pièces sont enregistrés. Mystère de l’attitude de Porphyre qui semble occupé. Suite du portrait esquissé au premier entretien : Porphyre parle sans s’arrêter. Rituels d’accueil, d’hospitalité. p.356 : recherche de la proximité physique, presque à se toucher; création d’une complicité. p.369 : Porphyre jous le rôle à lui tout seul du gentil et du méchant. p.356 : autoportrait ironique. Technique de la digression. Personnage dans la dérision de soi avec le détail trivial des « hémorroïdes ». Comportement inquiétant qui rappelle les caricatures grotesques de Gogol. Face à lui, Raskolnikov n’est pas à l’aise. pp.354-355 : jeu avec casquette, objet sur lequel il passe sa nervosité, son embarras = symptôme corporel. Montée paroxystique de ces symptômes au fur et à mesure de la digression jusqu’à ce qu’il donne un coup sur la table. Tremblements, fièvre… Partie d’échecs qui tourne à la confusion pour Raskolnikov : frisson glacé, tressaillement visible pour Porphyre. Impossibilité du corps de ne pas révéler la culpabilité; système sémiotique qui commence à s’affoler.
Eléments du dialogue
Fonction maïeutique de Porphyre (« c’est un art »).
1) L’amabilité
Porphyre utilise des éléments phatiques, discussion sur la difficulté de vivre à Pétersbourg. Deux individus complices, du même monde. Flatteries sur l’article. Porphyre se dévalue lui-même, Raskolnikov reste sur ses gardes. Réaffirmation de son amitié pour Raskolnikov même après le coup du poing sur la table. Cette amitié est-elle seulement feinte? Malgré l’horreur que pourraient inspirer les actes de Raskolnikov, Porphyre ne lui retire pas son estime. Relation juge/suspect plus répandue qu’on ne le croit? (Pas de complicité dans L’Etranger.) Hypothèse d’une amitié non feinte.
2) Prétérition
Dire de ne pas faire ce que l’on dit.
3) Allusion
p.357 : Porphyre détruit l’illusion de Raskolnikov, à savoir qu’on ne le croit pas coupable. Raskolnikov comprend qu’il est l’individu dont parle Porphyre. Jeu de suppositions et d’allusions claires. Raskolnikov ne peut pas échapper à St-Pétersbourg, la ville-piège. Métaphore du papillon attiré par la flamme. p.362 : individu qui s’évanouit au mauvais moment ou qui cherche à mystifier; raskolnikov comprend qu’il est plus que soupçonné.
4) Explication
Porphyre dit savoir pour la visite de Raskolnikov sur les lieux du crime en pleine nuit et tente de le rassurer.
5) Dénégation
Le lecteur ne peut qu’admirer le travail de reconstitution de Porphyre.
Défense de Raskolnikov par le dialogue et le monologue
1) Défense dans le dialogue
Il se défend à chaque fois mais s’enfonce toujours plus. Son mutisme est souvent souligné. Il refuse l’idée du délire et accuse Porphyre de mentir. Il insiste pour savoir s’il est soupçonné.
2) Monologue intérieur parallèle
Raskolnikov se juge lui-même dans sa défense. Jeu entre la focalisation interne et le narrateur omniscient. Méfiance simple jusqu’à l’affolement et le désespoir. Raskolnikov pressent que Porphyre attend quelqu’un. Il oscille sans arrêt entre son effroi et l’espoir que Porphyre n’a pas de preuve. Dimension du duel entre deux consciences. Métaphore du chat et de la souris. Multiplication de signes physiologiques : accélération du rythme cardiaque, lèvres sèches…
Construction d’un personnage qui reste sympathique d’un bout à l’autre, Dostoïevski réussit à rendre Raskolnikov sympathique aux yeux du lecteur. Axe central du triptyque de l’œuvre. Porphyre incarne la nécessité d’une loi, auréolé d’intelligence et de vivacité. En faisant passer Raskolnikov par tous les stades de l’angoisse, il le prépare à l’aveu dans le plan de la Providence. Dostoïevski serait le véritable criminel. Tour de force, affrontement presque documentaire entre juge et assassin.
- Spoiler:
Le personnage d’Arkadi Ivanovitch Svidrigaïlov
Un personnage clé pour la compréhension de l’œuvre
Roman polyphonique, le personnage porte la signification du roman presque autant que Raskolnikov, il concourt à faire la signification telle qu’elle est portée sur Raskolnikov; il est nécessaire pour la compréhension finale que va dégager le lecteur. Il a plus de la cinquantaine, c’est une sorte de père de quelque un qui a mal tourné. C’est le seul personnage avec Raskolnikov dont Dostoïevski nous donne les pensées. p.534 : monologue intérieur ou des cauchemars qu’il fait. On ne sait rien de sa vie de jeune homme. Il est amoureux fou de Dounia comme Raskolnikov qui au fond éprouve un amour incestueux. Svidrigaïlov dispose d’une masse textuelle très importante, le chapitre VI de la sixème partie lui est consacré pour une bonne part. Il sait tout sur Raskolnikov car il a entendu sa confession à Sonia à travers la cloison de l’appartement (p.453). Phrase révélatrice : « Quand je vous disais que nous sommes deux têtes sous le même bonnet. », il est persuadé de cette très grande proximité entre lui et Raskolnikov. Destin lié car Raskolnikov apprendra son suicide avant qu’il ne se dénonce au commissariat.
Portrait physique et moral
p.259 : 1ère apparition, Dostoïevski donne une description assez précise et très large en même temps. Côté diable, contradiction entre apparence étrange, « barbe fourchue », air assez diabolique + élégance + richesse. p.396 : deux traits physiques avec métonymie. p.492 : il insiste sur le visage de Svidrigaïlov qui ressemble à un masque, connotation de l’élégance du personnage + bon état de conservation + antipathique soit en lui-même soit pour Raskolnikov pour la raison qu’il est amoureux de sa sœur. Partie six chapitres 3, 4, 5, 6 lui sont consacrés + quatre dialogues avec Raskolnikov. Passé trouble dans lequel le lecteur n’aura aucune certitude, notamment sur sa responsabilité dans le suicide d’une fillette, dans la mort de sa femme; il répond par une formule ambiguë p.301 « n’aime pas croire que j’ai à redouter des suites de cette affaire », deux hypothèses, les ambiguïtés qui sont maintenues de bout en bout sont une caractérisation du personnage. C’est un aristocrate qui possède des terres, situation analogue au père de Dostoïevski lui-même, c’est un homme très intelligent mais qui croit aux fantômes (cf. p.303). Personnage pas si antipathique, pp.508-524, scène avec Dounia et lui explique que Raskolnikov est un assassin; il espère la gagner en lui proposant d’organiser la fuite de son frère mais il tire un coup de revolver car c’était la dernière personne qui le séparait de la mort. p.535-538 : dernière nuit de Svidrigaïlov avec son cauchemar, thème de la cité maudite de St-Pétersbourg. La petite-fille est l’allégorie de l’enfance, en ce que l’univers a de beau. Elle se transforme en prostituée, ce qui constitue l’amour vénale, sans lendemain et sa grande histoire avec Dounia, authentique, est un échec qui le mène au suicide. La déchéance de la prostituée est irréversible mais Sonia est une figure paradoxale de la prostituée qui est sainte car elle sauve Raskolnikov qui est au fond un saint. A la fin du XIXe - début XXe, sujet très important du romancier avec la prostituée qui est en même temps indéfiniment séduisante. Svidrigaïlov est un libertin, un cynique, un débauché esclave de sa sensualité, il ne peut pas se passer des femmes. Sa technique de séduction est de faire miroiter Dounia - qui semblent croire sincères ses sentiments - comme il a exploité sentimentalement sa femme. C’est le seul personnage qui fait le bien de manière extrêmement concrète, il aide Sonia, sa sœur et son frère; il faut nuancer l’image qu’on a du personnage. Dans une lecture allégorique, Dounia serait la Russie et Svidrigaïlov la tentation de l’Occident, monde de vie civilisée, par opposition à Raskolnikov qui lui va être régénéré en Sibérie au contact de la terre natale russe comme punition.
- Spoiler:
La ville de Pétersbourg
p.4 : juillet, odeur désagréable; Pétersboug est une ville séduisante et maudite. p.27 : le logement locatif de Marmeladov est un immeuble où l’on entasse les gens. p.132 : les maisons portent le nom de leur propriétaire. p.167 : rue étouffante. p.182 : eau noire du canal. p.333 : maisons du canal où vit Sonia. p.489 : cabaret. p.512 : pont, on ne voit pas Sonia avec Svidrigaïlov. p.527 : logement de la fiancée. p.529 : Nevski. p.552 : place aux foins où Raskolnikov se met à genoux. Ce qui revêt au fond l’aspect d’une boucle entre le début du récit et la fin du récit.
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| | | Prince d'Aquitaine Animation
Nombre de messages : 2948 Age : 34 Localisation : Maromme, Seine-Maritime Date d'inscription : 29/05/2009
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Sam 28 Nov 2009, 19:52 | |
| Et je conseille de lire cette analyse de Backès chez Gallimard "folioplus" : | |
| | | Dindon pilier
Nombre de messages : 2737 Date d'inscription : 20/07/2008
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Mer 30 Déc 2009, 09:57 | |
| Prince, puis-je abuser ? Je suis en train de lire Les frères Karamazov. Aurais-tu des cours à nous poster aussi ? | |
| | | Harelde pilier
Nombre de messages : 7283 Age : 49 Localisation : Yvelines Date d'inscription : 18/09/2008
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Mer 13 Jan 2010, 15:23 | |
| Je viens de lire quatre nouvelles de Dostoïevski. Les Premières Miniatures réunit Le Bouffon, Le Voleur honnête, Roman en Neuf Lettres et Un Sapin de Noël et un Mariage.Quatre courts récits de moins de 30 pages chacun dans lesquels les personnages connaissent des destins fort douloureux. Peu de pages mais beaucoup de souffrance. Et une écriture que j'apprécie de plus en plus. Le Roman de 9 lettres met en scène la correspondance de 2 associés (un financier et un exécuteur). Cette correspondance polie au début s'envenime rapidement. Dans le Bouffon, c'est l'histoire de l'arroseur arrosé qui se retrouve le bec dans l'eau, pris à son propre piège. Le voleur honnête (le titre peu paraître oxymorique) est un pauvre diable qui se débat contre une spirale qui l'avale inexorablement et contre laquelle il ne semble rien pouvoir. Le Sapin de Noël diffère, selon moi, des trois autres. Car la victime est une vraie victime. Innocente, dont le bonheur à été sacrifié pour une grosse somme d'argent. Des contes de jeunesse que j'ai beaucoup aimé, qui se lisent très vite et que je n'hésite pas à recommander. | |
| | | cafeine pilier
Nombre de messages : 351 Age : 49 Localisation : sud ouest rose et ensoleillé Date d'inscription : 31/10/2008
| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] Mer 13 Jan 2010, 19:01 | |
| Je ne connaissais pas ces nouvelles qui paraissent très tentantes ! | |
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| Sujet: Re: Fédor Dostoievski [Russie] | |
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| | | | Fédor Dostoievski [Russie] | |
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