Louis Ferdinand Céline

rotko a écrit:

C'est pourquoi je suggérais l'ouverture d'un nouveau fil où l'examen serait littéraire, dégagé du contexte polémique.

Le seul fait que l'on puisse s'anathémiser à propos d'un auteur décédé voici cinquante ans démontre, tout détestable qu'il soit parfois, son importance dans le siècle littéraire. Mais plus on en parlera, plus il se survivra, au bonheur de certains, à l'ire de beaucoup d'autres.

Entre deux maux, il faut choisir le moindre,

Fermons donc la porte, et puis voilà...

Citation :

Fermons donc la porte, et puis voilà...

mais nous sommes sur un forum où, malgré tous mes défauts, on doit pouvoir échanger sur tout. Jamais je ne fais une attaque personnelle.

Pour rappel, le sujet "Céline" fut, dès qu'abordé, ie de principe, le motif de mon premier bannissement d'un forum où j'étais modérateur. La question coloniale, aussitôt posée, fut l'objet d'un autre bannissement, et à l'origine de la fondation de GDS*.

Parfois certains demandent encore mon exclusion, quand j'aborde le sujet Levaray.

je propose encore une fois un fil où chacun puisse parler de l'oeuvre de Céline. Jusqu'ici, le bilan n'est pas négatif, car beaucoup de points ont été abordés et éclaircis, mais des analyses plus précises seraient bienvenues.

Fermons la porte au cas où ces échanges n'incitent quelque psychopathe à occire son voisin... Non, décidément, on ne va pas s'entendre, Mile. Il en faut.
Je crois qu'on appelle ça de la censure, bien-pensante. Qu'en penses-tu, plus précisément?

Citation :

plus il se survivra, au bonheur de certains, à l'ire de beaucoup d'autres

Des statistiques? Un sondage d'opinions?
Si Céline t'es si désagréable, sache que personne ne t'oblige à le lire. Merci par contre de laisser la populace se faire un avis par elle-même, et apprécier son talent littéraire si elle le désire.
Libre à toi d'organiser quelques autodafés, virtuels ou réels. [passage censuré par Nestor]

Citation :

La question coloniale, aussitôt posée, fut l'objet d'un autre bannissement, et à l'origine de la fondation de GDS

Je serais curieux de connaître ton point de vue à ce sujet, rotko.

Pourquoi ne pas donc ouvrir un fil expressément dédié à l'analyse de l'écriture de Céline? Et de sa littérature.
On pourrait commencer, par exemple, par parler de son style oral, style ardu à maîtriser, et qu'il maîtrisait à la perfection?

Vous savez j'avais mis un post sur les citations de celine que j'avais mis dans mon roman.
Céline a écrit de très jolie chose et je trouve que c'est dommage de crucifier toute une oeuvre littéraire pour une croyance politique déplacée (le nazisme).
SI vous voulez je vais de suite un post sur Céline l'écrivain. (Si vous ne voulez pas je le mets quand même )

HonorédB a écrit:

cathyHu a écrit:

SI vous voulez je vais de suite un post sur Céline l'écrivain.

Je veux.

Citation :

(Si vous ne voulez pas je le mets quand même )

Je veux pas.




P.-S. Un roman qui a été publié?

c'est fait j'ai un post pour parler de l''oeuvre littéraire de Celine. Je ne suis pas au courant d'un récent roman de Céline

Réflexion inintéressante:

Souvent l'Histoire, le passage du temps, nous aide à y voir plus clair en ce qui concerne les écrivains choquants et novateurs. Le tour de force qu'a réussi Céline c'est de s'exonérer (lui ou sa littérature plutôt) de ce bienfait. D'ailleurs il a un peu fait le chemin inverse de beaucoup de grands auteurs: adulé de son vivant, ou à ses débuts, il est devenu contesté et contestable (point de vue historique car comme l'a relevé HonorédB, son époque était foncièrement antisémite) petit à petit. C'est un paradoxe Céline, un énorme paradoxe, lui, son écriture, sa pensée, sa réussite d'écrivain...

HonorédB a écrit:

Fermons la porte au cas où ces échanges n'incitent quelque psychopathe à occire son voisin... Non, décidément, on ne va pas s'entendre, Mile. Il en faut. Je crois qu'on appelle ça de la censure, bien-pensante. Qu'en penses-tu, plus précisément?

Ce n'est pas exactement le sens de ce que je voulais dire. Céline est pour moi le romancier du XX ème siècle. J'ai dû noter quelque part sur ce site que je tenais "Voyage au bout de la nuit" pour le roman du siècle. Je le possède d'ailleurs en plusieurs éditions, ainsi que "Mort à crédit", "Nord", "D'un château l'autre", "Rigodon", "Guignol's Band". J'ai parcouru les pamphlets mais ne les possède pas.

Il n'y a chez moi aucune volonté de censure mais je constate - notamment par les mentions ci-dessus - qu'on ne peut jamais -ici ou ailleurs- discuter de Céline sans que cela tourne au pugilat. Alors si les internautes ne sont pas assez raisonnables pour discuter calmement de l'oeuvre d'un auteur, mieux vaut fermer cette porte, et passer à un autre écrivain.

D’un Céline l’autre, édition établie par David Alliot, préface de François Gibault, Robert Laffont, coll. «Bouquins»,

un entretien détaillé de David Alliot sur cette page.

Art ou Artiste ? Et même Homme ou Artiste ? Avec Céline, il n'y a pas le choix, dissocier le bonhomme de son œuvre.. Et c'est là qu'intervienne la plupart des conflits : sur son antisémitisme... Souvent des réflexions de petits bourgeois qui s'insurgent devant cela mais l'on sait bien que le problème est autre : Céline démantèle tout, crache sur tout, refuse le voile que l'on place sur à peu près tout, c'est bien là qu'il est dérangeant, subversif comme personne. Et je crois que peu de gens peuvent justement supporter une forme d'art aussi totale comme l'a dit Ignatius. On ne lit pas Céline dans un semi-sommeil.

Voyage au bout de la nuit, je l'ai lu il y a longtemps et à l'époque pas très consciente de tout le débat qui entoure Céline, donc d'une certaine manière j'ai abordé l’œuvre sans a priori sur l'auteur. Je dois dire que l'écriture m'a marquée voire subjuguée, c'est un peu flou, lointain et peu précis (avec ma petite mémoire) mais c'est sans doute un des rares livres qui m'a de loin en loin laissé une forte impression.
Je me souviens vaguement d'une description dans la campagne au milieu de la guerre, du style sublime dans un contexte pourri.

On parle souvent du style Célinien à travers le Voyage... Mais c'est surtout avec Mort à Crédit que la révolution commence à mon avis !

MachineAlAver a écrit:

On parle souvent du style Célinien à travers le Voyage... Mais c'est surtout avec Mort à Crédit que la révolution commence à mon avis !

Bien sûr, c'est avéré, lui-même disait que le Voyage était encore un roman ''classique''. Du coup le Voyage et Mort à crédit sont les deux plus lisibles, là où son style explose sans plus aucune contrainte, c'est dans Nord, Féerie, Guignol's band, Rigodon (quoique je trouve que son style se soit presque "assagi" dans Rigodon, il est moins déroutant, "difficile à avaler" que dans les précédents -j'en ai fait la lecture de passages à des gens qui n'aiment pas trop Céline et ils ont bien apprécié)...

"Guignol's Band' a été ma première expérience disons 'purement' Célinienne... Au début, c'était quelque chose, presque repoussant, un calvaire j'ose le dire... Puis au bout d'une cinquantaine de page, la musique rentre, on comprend, on est envouté.

Juste pour le plaisir :

« Ah! trop belle... tout est trop beau! son regard! son sourire! ses cuisses! Je les vois quand elle saute ses cuisses... elle se gêne pas... musclées là roses et brunies... sa robe est trop courte... Ah! elle me tient bien compagnie... ou tout simplement elle me surveille... ça faut pas que j'oublie quand même... c'est des hypocrites... mais j'ai pas envie de m'en aller... je suis pris!... elle m'a pris!... Ah! j'ose plus bouger du tout... Elle aurait peut-être appelé « au secours » si j'avais bougé?... quel tête-à-tête! Je demeure bien sage... Je me fais charmer, je l'écoute, c'est des petits mots bien amusants, ses petites remarques merveilleuses à propos de tout... de rien... Je refuse les petits gâteaux... elle est pas contente... elle me gronde... je boufferais tout pour un sourire... tous les gâteaux, le plateau, la table... je suis déjà son prisonnier... dans la plus belle prison du monde!... Ah je resterais là bien immobile... Je fais :
« Oui! Oui! Yes!... Yes!... »
Je veux bien tout ce qu'elle veut. Elle veut que je reprenne du thé... Je me remplis, je me gave... mais c'est elle qui me fait lever... elle me fait venir à la persienne... Elle veut me faire voir quelque chose... là dans la persienne... dans le lierre... Ah! oui! je vois dans la lueur... l'interstice... le tout petit oeil du moineau... Ah! il guettait bien lui aussi!... couii!... coui.. si il la voit! ça c'est vraiment extraordinaire! un gros moineau ébouriffé et hardi en somme! comme elle!... il attendait... il épiait... il nous jetait son petit œil rond à travers le fente... minuscule œil tête... d'épingle... tout noir luisant et couic! couic! coui!...
« Il attend aussi »
Elle me renseigne... ça c'était pour que je comprenne... que je soye aussi patient que le piaf. Elle rit.
C'est drôle à tant de payes de distance, de l'autre siècle pour ainsi dire, j'y pense toujours à ce piaf... C'est elle qui me l'a fait voir... Quand je vois une persienne, du lierre, j'y pense toujours à son petit oeil... Ah! il vous reste pas grand chose, quand on réfléchit, de toute une vie de micmacs, foire et promesses à se rappeler, je veux dire de choses agréables... c'est infime en somme... les occasion fourmillent pas... Chacun peut se rendre compte... Moi ce petit piaf-là c'est quelque chose que je me souviens toujours heureux... je voudrais pas qu'il s'envole... il partira quand je serai plus... »

Louis-Ferdinand Céline --- Guignol's Band

Je tiens vraiment à me pencher sur son oeuvre. Ça m'agace les gens qui se contentent de le traiter de nazi.

Tout simplement le plus grand écrivain français du siècle dernier, aucun écrivain, pas même Proust à mes yeux, ne l'a égalé. Quant à ses opinions politiques (Qui sont en réalité bien plus complexes que ce qu'une poignée de personnes essayent de nous faire croire), je ne vois pas pourquoi on s'interdirait de lire Céline, tout en lisant des auteurs comme Gide, Voltaire ou même Victor Hugo...

À l'époque tous étaient antisemites et personnellement je m'en tamponne. Proust déchire alors j'ai hâte de lire.

Dans un souci de clarté et de rigueur, Nestor a séparé plusieurs fils consacrés à Céline.

Le fil Céline l'écrivain est consacré à son oeuvre littéraire proprement dite, objet d'une analyse personnelle.

Le fil consacré à Céline vivant repose sur des sources auxquelles ont participé des specialistes : il devrait mettre fin à beaucoup d'inexactitudes.

Sur le présent fil, généraliste, on voit à la fois des sources identifiées, des passages précis, et des opinions.

Il est évident que procéder à des affirmations non étayées ne fait pas avancer la connaissance du cas Céline.

Pour moi le sujet est fini, je n'ajoute rien de plus sur ce que j'avais dit auparavant

Si on souhaite se priver d'un grand écrivain à cause de ses propos ou de ses actes, il faut aller jusqu'au bout de ses idées, et arrêter de lire Victor Hugo, Voltaire, Rimbaud, Bloy, Rebatet et Dostoievski. Si on s'intéresse vraiment aux écrivains, on réalise que la plupart avaient d'énormes défauts, ce n'est pas une raison pour les occulter totalement...

Exactement. Moi cette polémique me donné encore plus de lire.

pour Gohel 50
excusez moi, s'il vous plait, mais comparer Céline avec Hugo, voltaire, Dostoïevski etc... est le comble de l'absurdité.

Tu ne lis pas Eluard alors ? Pro Staliniens, sachant que celui-ci a été bien plus meurtrier que les nazi... Et en musique tu refuses d'écouter Bertrand Cantat parce qu'il a tué sa femme ? Je respecte ce genre de point de vues, même si je ne les comprends pas.

Chacun comprend bien qu'il y a une différence entre une opinion, et une incitation au meurtre ou à la délation, dans un contexte mortifère.

L'échange sur GDS* ne consiste pas à affirmer gratuitement dans un sens ou dans un autre. En revanche si on parle d'un écrivain, il faut parler de son écriture, comme sur ce fil, avec un regard précis, sur un titre par exemple.

Amadak a écrit:

pour Gohel 50
excusez moi, s'il vous plait, mais comparer Céline avec Hugo, voltaire, Dostoïevski etc... est le comble de l'absurdité.

En quoi est-ce absurde ? C'est juste logique, Gide, Bloy, Hugo & Voltaire eux aussi ont écrits des textes qu'on pourrait qualifier d'antisémites. Voltaire était esclavagiste en plus. Mais bon, généralement c'est pas trop mal vu d'exploiter des gens, bizarrement, même si là on est dans l'acte... Aragon faisait l'éloge des goulags d'URSS, mais pareil, ça ne choque personne (Puisqu'on parle de contexte mortifère...). Parmi les "grands hommes" de l'histoire, on pourrait ajouter Napoléon et Cicéron aussi...

Mais parlons des faits, plutôt que de parler des paroles (Puisqu'en étant un peu objectif, on peut trouver de bonnes raisons de refuser de lire certains écrivains, même si on tomberait presque dans le délit d'opinion). Céline n'a jamais dénoncé personne. Durant l'Occupation, il y avait même un couple de résistants qui habitaient au dessus (Ou en dessous, je ne sais plus) de chez lui, il les connaissait très bien, et il ne les a jamais dénoncé. On sait même qu'il a soigné des juifs pendant la guerre... C'est dire. Lisez Bagatelles pour un Massacre si ce n'est pas déjà fait, et vous verrez que Céline s'inscrit dans une tradition d'antijudaïsme (A ne pas confondre avec antisémitisme), comme Hugo, Voltaire, Dostoievski, Shakespeare, etc...