Céline : l'écrivain

Ce post pour parler de littérature, de critiquer ses livres, son oeuvre littéraire immense.

Qui se jettera dans le grand bain? C'est un travail exigeant de commenter l'écriture de Céline, pas autant que l'était son écriture elle-même, mais tout de même.

Il faudrait que je me replonge dans un de ses livres. Je me souviens que j'ai détesté son style, beuglant et lourdingue. L'homme, je m'en fous ; l'écrivain je ne l'aime pas. Je ferais une analyse plus construite plus tard.

Mais il y a déjà un sujet consacré à Céline, non ?

Je n'ai lu que le Voyage, Mort à crédit, Casse-pipe et les Entretiens avec le professeur Y ; j'ai eu du mal avec son style au départ, le langage familier et argotique me gênait, et puis j'ai fini par plonger dedans, et alors là...
Cela dit, je n'ai pas particulièrement envie de lire les autres dans l'immédiat.

Oui mais il a été décidé que: le fil sur LFC étant parasité (ou dédié maintenant) au côté polémique de la personne de Céline -l'homme- un autre fil devait être ouvert pour n'être consacré qu'à ses écrits, d'un point de vue strictement littéraire.

Gageons que ce fil-là subira le même sort que le premier, car Céline est un maudit. Cela risque de donner beaucoup de travail à Nestor pour réinjecter les commentaires dans le fil correspondant.

A-t-ildéjà fait l'objet d'une lecture accompagnée ou suivie ?
J'ai beaucoup aimé Voyage au bout de la nuit, Nord , Mort à crédit
Je n'ai pas beaucoup de temps pour le moment, ce sont les vacances mais je compte bien les relire pour venir expliquer plus précisément pourquoi j'ai aimé son écriture

ignatius a écrit:

Oui mais il a été décidé que: le fil sur LFC étant parasité (ou dédié maintenant) au côté polémique de la personne de Céline -l'homme- un autre fil devait être ouvert pour n'être consacré qu'à ses écrits, d'un point de vue strictement littéraire.

Gageons que ce fil-là subira le même sort que le premier, car Céline est un maudit. Cela risque de donner beaucoup de travail à Nestor pour réinjecter les commentaires dans le fil correspondant.

Céline est un écrivain, je ne crois pas qu'il soit maudit plus qu'un autre. Il a été critiqué oui mais maudit, non. Et ce n'est pas le sens de ce post, parlons de ces livres.

D'un Céline l'autre

David Alliot
François Gibault (Préfacier)
Broché
Paru le: 30/03/2011Editeur : Robert Laffont Collection : bouquins ISBN : 978-2-221-11513-8 EAN : 9782221115138 Nb. de pages : 1184 pages Poids : 605 g Dimensions : 13,5cm x 19,5cm x 3cm
Prix Decitre : 28,50€
Prix éditeur : 30,00€ Expédié sous 3 à 5 jours

Les 200 témoignages que regroupe D’un Céline l’autre jalonnent l’itinéraire d’une vie entière : celle de l’écrivain Louis-Ferdinand Céline (1894-1961), depuis sa jeunesse passage Choiseul jusqu’à sa mort à Meudon.
Un portrait inédit de Céline émerge ainsi à travers le regard de ceux qui l’ont connu : famille de l’écrivain, amis intimes, admirateurs ou adversaires. La nature des témoignages est d’une grande variété : correspondances, journaux intimes, mémoires, etc. S’ils proviennent généralement de la sphère française, quelques voix étrangères résonnent : les danoises, qui dévoilent le Céline de l’exil entre 1945 à 1951, les allemandes, qui dévisagent le Céline de l’Occupation.
Certains textes tiennent en une ligne, d’autres s’étendent sur plusieurs dizaines de pages. Chaque témoignage est minutieusement introduit à la compréhension du lecteur à travers un appareil critique très exhaustif : notice biographique du témoin, origine du texte, contexte dans lequel il a été écrit. Enfin, l’ensemble du livre contient des annotations de nature à éclairer certains aspects de la vie de Céline.
Un tiers des témoignages est connu du grand public. Un deuxième tiers ne lui était pas accessible jusqu’ici. Le dernier tiers est totalement inédit. En effet, tantôt les témoignages ont été recueillis par l’auteur auprès des derniers témoins encore en vie, tantôt ils ont été découverts dans des archives encore inexplorées. D’un Céline l’autre est préfacé par Me François Gibault, biographe de Céline, avocat et homme de confiance de Mme Lucette Destouches, veuve de l’écrivain, qui a apporté son soutien au projet.
Le livre s’accompagne également d’une biographie synthétique de la vie de Céline, écrite par David Alliot, afin de livrer quelques repères au lecteur profane. Enfin, différentes annexes (chronologie, bibliographie et deux cartes) viennent compléter le contenu du livre.

cathyHu a écrit:

Ce livre m'intéresse beaucoup. Je pense que je vais l'acheter Au moins, il présente des documents nombreux et variés, pas mal pour nuancer la vision qu'on en a.

J'ai lu de cet auteur la période 32/44 de la vie de Céline. J'ai trouvé le livre très intéressant, par la richesse de documents et l'avis nuancé qu'il donne sur l'homme.

je l'ai feuilleté dans la librairie et je l'ai trouvé assez intéressant. J'attends vos critiques et commentaires

Bonjour

J'ai lu récemment "Voyage au bout de la nuit", j'ai trouvé ce livre fantastique, chaque scène m'a marqué. Par contre je n'ai jamais, mais vraiment jamais vu une oeuvre d'art aussi misanthrope. Le héros me donne l'impression d'être un dépressif qui aurait compris qu'au final c'est lui qui se rend dépressif parce qu'il aime ça, et qui se complaît dans son état pourri et dans sa descente aux enfers. Personnellement une semaine après avoir fini le livre j'avais une estime de moi très basse en tant qu'être humain, est ce que ce livre vous a fait le même effet ?

Le livre m'a tellement fasciné que j'ai regardé des interviews de Céline sur youtube, il dit avoir écrit ce livre pour payer son loyer, comme un truc qu'il aurait fait comme ça, parce qu'il s'ennuyait. Et je me suis dit qu'il y avait un truc bizarre dans ce personnage qui méprise en quelque sorte son oeuvre. En fait, après réflexion, Céline est quand même un sacré connard de dire ça, puisqu'il s'est présenté au prix goncourt avec son livre, c'est qu'il devait y croire à un moment et qu'il a du travailler beaucoup dessus. En méprisant une oeuvre que tout le monde adule, il se hisse un peu au rang d'un dieu. "vous aimez ce que j'ai fait ? boaf c'est pas exceptionnel je l'ai écrit comme ça".

Enfin voilà, je ne sais jamais trop si je dois conseiller ou pas ce livre. Il est fantastique, mais personnellement, je ne pense pas qu'il m'ait rendu meilleur ou m'ait mis des bonnes idées dans la tête. Qu'en pensez vous ?

totalchuck a écrit:

Bonjour

J'ai lu récemment "Voyage au bout de la nuit", j'ai trouvé ce livre fantastique, chaque scène m'a marqué. Par contre je n'ai jamais, mais vraiment jamais vu une oeuvre d'art aussi misanthrope. Le héros me donne l'impression d'être un dépressif qui aurait compris qu'au final c'est lui qui se rend dépressif parce qu'il aime ça, et qui se complaît dans son état pourri et dans sa descente aux enfers. Personnellement une semaine après avoir fini le livre j'avais une estime de moi très basse en tant qu'être humain, est ce que ce livre vous a fait le même effet ?

Le livre m'a tellement fasciné que j'ai regardé des interviews de Céline sur youtube, il dit avoir écrit ce livre pour payer son loyer, comme un truc qu'il aurait fait comme ça, parce qu'il s'ennuyait. Et je me suis dit qu'il y avait un truc bizarre dans ce personnage qui méprise en quelque sorte son oeuvre. En fait, après réflexion, Céline est quand même un sacré connard de dire ça, puisqu'il s'est présenté au prix goncourt avec son livre, c'est qu'il devait y croire à un moment et qu'il a du travailler beaucoup dessus. En méprisant une oeuvre que tout le monde adule, il se hisse un peu au rang d'un dieu. "vous aimez ce que j'ai fait ? boaf c'est pas exceptionnel je l'ai écrit comme ça".

Enfin voilà, je ne sais jamais trop si je dois conseiller ou pas ce livre. Il est fantastique, mais personnellement, je ne pense pas qu'il m'ait rendu meilleur ou m'ait mis des bonnes idées dans la tête. Qu'en pensez vous ?

J'ai aimé ce livre même si le style de Céline peut paraître difficile. C'est un auteur, comme Nimier, sans concessions... ce qui est très rare. J'ai toujours envie de le classer dans la boîte "anarchiste de droite" qui exècre la rue beuglante. C'est tellement bon que j'en frissonne

Je viens de finir d'un château l'autre, qui raconte une petite partie de l'histoire de France quand même assez méconnue, à Sigmaringen (où le gouvernement de Vichy est parti se réfugier).
Ce livre fait réfléchir concernant le "traitement" qu'a subi l'écrivain.

Attention... Dans "d'un chateau l'autre" Céline ne fait pas oeuvre d'historien.
Il part de fait historiques réels, puis se met à broder autour, et comme tout bon romancier, ses impostures paraissent plus vraies que la réalité.
En réalité, il a fait ça pour tous ses livres. C'est normal, c'est un écrivain... Et on ne doit pas attendre d'un écrivain autre chose qu'une vérité littéraire. C'est à dire, un vérité du "ressenti", dans laquelle il est totalement sincère...

Ce qui serait intéressant ce serait de parler d'oeuvres sur celine.

D'oeuvres sur Céline? comme Lucette par exemple?

ignatius a écrit:

D'oeuvres sur Céline? comme Lucette par exemple?

comme le livre de David aliot

oui, on trouve des livres de toutes sortes, sur un tel sujet.

Je pensais réserver ce fil aux oeuvres de Céline, et non à ses commentateurs, bienveillants ou malveillants.

Voilà un petit passage de Guignol's band que je trouve savoureux (souvent utilisé en quatrième de couverture du dit livre, comme quoi les éditeurs sont pas tous des cons)

« On est parti dans la vie avec les conseils des parents. Ils n'ont pas tenu devant l'existence. On est tombé dans les salades qu'étaient plus affreuses l'une que l'autre. On est sorti comme on a pu de ces conflagrations funestes, plutôt de traviole, tout crabe baveux, à reculons, pattes en moins. On s'est bien marré quelques fois, faut être juste, même avec la merde, mais toujours en proie d'inquiétudes que les vacheries recommenceraient... Et toujours elles ont recommencé... Rappelons-nous ! On parle souvent des illusions, qu'elles perdent la jeunesse. On l'a perdue sans illusions la jeunesse !... Encore des histoires !...

Pour le commentaire…

Voyage au bout de la nuit est une biographie romancée de Céline. Ferdinand Bardamu, héros du roman et double de l’auteur, raconte sa vie, ses vagabondages : l’engagement dans l’armée en 1914 : « c’est le révélateur de la bêtise humaine ». Ensuite, il découvre l’Afrique coloniale : « révélateur de la veulerie humaine » ; s’ensuit le séjour en Amérique qui deviendra le « révélateur de la misère humaine au milieu de l’abondance ». Céline a aussi dénoncé la déshumanisation : le travail à la chaîne dans les usines, le capitalisme. À Paris, il évoque le monde des boutiquiers, la misère des employés minables qu’il soigne dans son cabinet médical.
Ses romans sont marqués par le mélange des niveaux de langue.

L’évocation de la peur
Présence de la nuit, elle est comparée à un monstre : « nuit énorme », « bouffait », « la langue », « elle contenait des volontés homicides énormes », etc.
La ponctuation (interrogations et exclamations) signale la peur. Les personnages sont dans le flou ; ce qui reste concret est la nuit. Ils sont troublés : on note la récurrence de la conjonction de subordination que qui permet d’éviter l’inversion du sujet → phrases très lourdes.
Les phrases courtes proférées par les protagonistes témoignent aussi de la peur ressentie.
L’impératif de la première phrase de notre extrait, qui est un ordre donné par les officiers, signale la peur et l’agressivité.
Les nombreuses répétitions lexicales (« nuit », « là », « route », « escadron », etc.) traduisent l’angoisse des soldats et un malaise certain : ils cherchent leurs mots, le dialogue initial semble contaminer la narration.
Le mélange des niveaux de langue (familier : « bouffer », « pépère » ; grossier : « gueulait », etc. ; soutenu : emploi du subjonctif imparfait (« sacrifiât »), « inertie », « trépas », « homicide ») montre que les soldats sont affectés et le lecteur est généralement surpris par ce contraste important dans les niveaux de langue. La mort est évoquée au moyen de termes appartenant à la langue soutenue, contrairement à l’évocation de la vie.

La dénonciation de l’absurdité de la guerre

L’ignorance des soldats, lâches à cause des officiers et notamment de leur incompétence (« où que c’est Barbagny ? — C’est par là ! » → ils ne savent pas où c’est ; de même avec « dont il nous parlait d’ailleurs lui-même absolument au hasard »), énoncé qui signale la dénonciation narratoriale de la guerre : les officiers renvoient leurs soldats alors que ceux-là restent au campement.

Bardamu s’interroge : que va-t-il gagner à se battre ? C’est une révolte passive : « on luttait un peu avec lui à coups d’inertie » → oxymore. « C’était comme si on avait essayé […] de me donner l’envie d’aller me suicider. »
Enfin, la parataxe de la dernière phrase relève aussi de cette dénonciation de la guerre et de la vacuité du combat.


Lire la suite sur études littéraires.

J'ai terminé Voyage au bout de la nuit Lundi soir, et j'ai beaucoup aimé.
Céline écrit comme il parle et comme il pense, d'où 2 effets largement positifs : la lecture est plutôt aisée par la narration franche et prenante, et les réflexions de l'auteur sont détaillées au fur et à mesure du récit, des plus profondes aux plus anodines, ce qui donne beaucoup à réfléchir.
C'est de plus le roman d'une vie, s'étalant sur bon nombre d'années, par le biais des voyages dans le temps (nous permettant de voir l'évolution du personnage) comme dans l'espace (nous faisant découvrir d'autres contrées durant l'histoire).
Cela dépeint aussi l'homme à l'état brut, sentimental, instable, égoïste, résigné, conscient. Une oeuvre intéressante donc au point de vue sociologique.
L'ensemble nous donne à réfléchir sur l'état quotidien de nos relations avec le monde, les gens, les idées, l'avenir, la société.
Quelques passages très beaux, d'autres amusants, le tout reprenant souvent un cynisme achevé.
Un aspect négatif peut résider dans le fait que le livre confine à trop de nihilisme, mais cela a le don de donner une bonne leçon d'humilité au lecteur.
Enfin la fin m'a semblé un peu brutale, presque comme inachevée, mais cela ne porte pas vraiment préjudice à l'oeuvre, magistrale d'un bout à l'autre.

le livre que je présente est une étude sur l'oeuvre voyage au bout de la nuit qui, je pense, apporte un bon éclairage sur cet écrivain contreversé mais néanmoins excellent.