John Steinbeck

J'ai lu les Raisins de la colère, et Tendre jeudi (en français, je préfère lire en français ça m'a beaucoup aidé à me familiariser avec la langue de Voltaire). Tendre Jeudi est vraiment touchant... je me souviens..

Qu'en avez-vous pensé, vous?

Je ne connais pas Tendre jeudi...

Tu peux nous en parler un peu plus puisque tu as initié ce fil sur Steinbeck...et que tu as envie de parler pour vraiment "dire" des choses?
Ca nous intéressera.

J'ai lu beaucoup Steinbeck, tous sûrement pas et j'avais adoré, maintenant cela fait 30 ans alors il faudrait que je rafraîchisse ma mémoire.

Je me souviens de la fin (je pense les raisins de la colère?) où une femme a perdu son bébé et donne le sein à un vieil homme qui meurt de faim.
Cette image m'a marquée et m'avait profondément émue.

J'avais bien aimé A l'Est d'eden, Rue de la sardine, Des souris et des hommes, La perle, Tortilla flat, il me semble avoir lu des nouvelles aussi ?
Je me souviens d'avoir aimé les personnages de ses romans qui sont décrits de façon étonnante, ils deviennent tout de suite proches, on les aime ou déteste, on se retrouve vite immergé dans ces histoires.

Tu les lis en traduction française ?

Au lycée on le lisait beaucoup, avec Edgar Poe, Lautréamont, Dostoïevsky, Baudelaire et d'autres, c'était un peu une mode en tout cas on se repassait les bouquins et on lisait avec plaisir.

L'image finale des raisins de la colère est biblique, paraît-il. Actuellement Stinbeck connaît un petit purgatoire. On lui reproche d'avoir acclimaté Zola au nouveau monde, et d'adopter des formes romanesques classiques.
Sur un site on attribuait son relatif oubli à ses positions - inattendues, en faveur de l'intervention americaine au Vietnam.

Oui depuis quelques années, j'ai lu des articles pas sympa du tout à son sujet, ce qui me fait hésiter à le relire ... je n'ai pas gardé d'informations précises et justement j'étais en train d'en chercher à ce sujet !
Comme tu le sais je ne peux dissocier l'homme de l'artiste.

Certains critiques litteraires comme jacques Cabau le trouvent ringard.

coline a écrit:

Je ne connais pas Tendre jeudi...

Tu peux nous en parler un peu plus puisque tu as initié ce fil sur Steinbeck...et que tu as envie de parler pour vraiment "dire" des choses?
Ca nous intéressera.

Le "héros" est un type qui vient d'être démobilisé, Il revient dans sa ville et la trouve changée. Même ses amis le trouvent changé, le trouvent triste. Il a une but: écrire un article sur l'apoplexie chez les céphalopodes... Ce qu'il faut à Doc, c'est une femme, et ses amis se mettent en tête de le marier avec Suzy... Mais Doc ne sait pas ce qu'il veut... On y retrouve un Steinbeck tendre et gai.

Voilà Coline, j'espère que cela satisfera ta curiosité.

Citation :

Je me souviens de la fin (je pense les raisins de la colère?) où une femme a perdu son bébé et donne le sein à un vieil homme qui meurt de faim.Cette image m'a marquée et m'avait profondément émue

( Utopie).
Oui, cette image doit être biblique. C´est une scène reprise par les peintres classiques. Ici, le tableau que l´on peut trouver au Prado, par Alonso Cano((1601-1667) donc contemporain de Zurbaran et Velazquez.
La vierge presse son sein et le lait gicle en direction de la bouche de St Bernard.

J'ai lu des souris et des hommes il y a 4-5 ans et j'ai été très fortement marquée par ce livre (il faut dire que j'étais assez petiote) pourtant je n'arrive pas à savoir si je l'ai vraiment adoré. Quand j'y repense j'ai quelques images assez fortes très précises, des phrases, mais pas une impression d'ensemble. Peut-être que je le relirai dans quelques années.

Hm petite question, quand tu parles de la langue de Voltaire que veux-tu dire ?

Une periphrase pour dire le français ...

Ah d'accord :pirat:
Je croyais qu'il y avait une insistance quelque chose.

J'ai relu un peu par hasard Steinbeck cet été (" Tortilla Flat " ,)après l'avoir dévoré dans mes vertes années , et j'avoue que j'avais presque une appréhension ...

Bien que "Tortilla" diffère en beaucoup de points des autres Steinbeck ,ne serait-ce que par l'optimisme qui s'en dégage ,on y retrouve toute la tendresse de l'auteur pour ses personnages qui nous sont tout de suite familiers .
Ces "paisanos " dont le principal souci est de trouver un moyen de dérober un gallon de vin et de le partager dans cette maison où règne la bonne humeur ( agrémentée de quelques règlements de compte des plus jovials ) mais surtout une amitié sans égale m'a réjouie !

Une belle histoire d'hommes , simple et pleine d'humour , comme je les aime parfois , sans prétention mais où perce le style si particulier de Steinbeck.

Dans ce cas, Aérial, tu devrais lire Tendre Jeudi. C'est la suite de Rue de la sardine, mais ça peut se lire indépendamment.

ekwerkwe a écrit:

Dans ce cas, Aérial, tu devrais lire Tendre Jeudi. C'est la suite de Rue de la sardine, mais ça peut se lire indépendamment.

Oui , il est connu pour être le plus " gai " ,le plus léger en tout cas de Steinbeck ,je crois ..Mais il ne m'est jamais tombé sous la main .

Sans doute l'age ,mais j'ai envie de retrouver "mes anciens" auteurs en ce moment.
Juste pour voir ,du moins mesurer le temps ,dans ma perception de leurs écrits ..Je ne sais pas si c'est forcément une bonne chose??
J'ai repris Kérouac aussi cet été ( " Les anges vagabonds ") mais trop à lire , l'ai mis de côté pour l'instant...

Tendre Jeudi est mis en scène actuellement par Mathieu Bauer à Avignon avant de prendre un départ de tournée ça et là à travers la France.

Le théâtre, des vidéos, mais aussi musique pour donner un spectacle-concert : 9 comédiens pour donner cette chronique burlesque du petit village de pêcheurs de Monterey en Californie et en fond de scène, quatre musiciens qui jouent live une pop rock musclée, à guitares et cuivrée, avec batterie et xylophone.

La compagnie "Sentimental bourreau" était tout indiquée pour s'interesser à ce groupe d'exclus du système que sont les personnages de Tendre Jeudi

Hum... Je suis toujours partagée dans ces cas-là. En général, je suis déçue. Alors je préfère éviter les adaptations des livres que j'ai aimés.

On rejoint le problème de la traduction. Ici l'adaptation propose une lecture, et l'intervention de films, de musiques et de décors me paraît enrichissante.

Citation :

Steinbeck a sans doute une vision angélique et naïve de cette marginalité. Le monde contemporain est beaucoup plus violent et la misère est plus dure à vivre. Il ne faut donc pas se tromper et glisser des enjeux entre les mots de l’auteur. Cela étant, dans le roman, ce sont des marginaux qui ont choisi ce mode de vie parallèle, Doc en particulier,
qui veut travailler sur l’apoplexie chez les poulpes dans son laboratoire privé pour ne pas aller à l’université. Mais il y a une absence totale de misérabilisme qu’il me parait nécessaire de faire entendre dans la période que nous vivons.

texte complet de l'entretien.

Ce qui m'intéresse aussi est l'escalier. Les différents plans à des hauteurs différentes m'intriguent. Pour des mises en scène de tragédies, on voit des plateaux avec différents gradins : les acteurs s'élèvent en même temps que monte la tension dramatique.

Je vois cette escalade dans les hauteurs respectives des paravents de Genêt que je lis actuellement. Sans mise en scène, ce théâtre me paraît difficilement accessible, mais je tente ma chance.

Libé n'est pas enthousiaste sur le résultat :

Citation :

Mathieu Bauer a adapté le roman avec les moyens artistiques de la compagnie Sentimental Bourreau, mêlant musique (dont il signe la composition), théâtre, cinéma et vidéo.
Est-ce la multiplication de ces langages scéniques qui fait écran entre le public et l’œuvre et lui confère cette résonance quasi folklorique? On a vite le sentiment de se trouver face à un objet esthétique où tout est joué d’avance. D’autant que la minceur de l’intrigue - les subterfuges développés par Mac et ses amis pour rapprocher Doc et Suzie - laisse peu de surprise.

Ca alors ; Je n'ai pas posté le moindre petit message sur Les Raisins de la colère, qui est pourtant un véritable petit chef-d'oeuvre. Il faut dire que les mois de décembre-janvier-février de l'année dernière ont été peuplés de lectures fabuleuses !

Citation :

Expropriée de ses terres, une famille de fermiers traverse les Etats-Unis à la recherche d'un emploi. Mais dans ces années de crise, ils ne rencontrent que spoliation et injustice

Ce livre raconte avec une grande justesse l'exode de cette famille vers la Californie, représentée comme la terre promise, peuplée d'oranger et gorgée de soleil.
Le ton du récit, l'écriture en elle-même sont très beaux ; et les rebondissements sont attendus avec une impatience croissante à chaque page.
C'est aussi l'occasion de lire un témoignage très documenté sur cette période des Etats-unis où les paysans étaient chassés de leurs terres par les machines et les grands propriétaires.
Bref, j'ai beaucoup aimé malgré parfois quelques longueurs (il faut dire que le bouquin fait 640 pages !).

Les deux passages les plus extraordinaires sont à mon avis les toutes premières pages, qui décrivent le centre des Etats-unis sous un soleil de plomb et les toutes dernières dont je ne vous revelerai pas le contenu.

j'avais cru y voir l'influence de Zola. Le livre est long, oserai-je dire qu'il faut préférer le film de john ford avec henri fonda ?cf. la fiche du ciné club de Caen.

Pas vu le film... mais je ne vois pas pourquoi on devrait le préférer au livre.
Les descriptions de l'auteur - qui sont l'une des grandes richesses de ce livre - et son approche de l'histoire me semblent difficiles à percevoir sans lire ses mots.
Je ne suis pas sûre d'être claire. Il faudra que je repasse quand j'aurai vu le film.

rotko a écrit:

j'avais cru y voir l'influence de Zola. Le livre est long, oserai-je dire qu'il faut préférer le film de john ford avec henri fonda ?cf. la fiche du ciné club de Caen.

clic !

j'avais bien aimé le film et le livre aussi, bien que Moon a raison, pas mal de longueurs ...
le film est très bien reproduit alors parfois quand justement les descriptions sont assez longues, le cinéma va plus vite ...
Zola? oui? mais non pas vraiment .. du moins je ne me souviens plus bien?

J'ai adoré la construction du bouquin (je parle toujours des Raisins de la colère), cet aller-retour incessant de l'individuel à l'universel... Et l'histoire est particulièrement émouvante - d'ailleurs, je crois me souvenir que j'ai pleuré.

Par contre, une anecdote intéressante (c'est moi qui le dis!) à propos de la traduction. J'ai eu l'occasion de lire un chapitre en anglais, au moment même où je lisais le livre, en vf. L'écart à la traduction est... incroyable. C'est extrêmement bien écrit et agréable à lire en français, mais au niveau de la langue, du ton du roman, c'est un massacre. Bref, un beau texte français et une traduction exécrable.