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| | Mario Rigoni Stern (Italie) | |
| | Auteur | Message |
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rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Mario Rigoni Stern (Italie) Mar 05 Nov 2013, 13:39 | |
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Mario Rigoni Stern, est né en 1921 dans la province de Vicence, sur le plateau d’Asiago qui fut le théâtre de terribles combats lors de la Première Guerre mondiale (Fritz Lang et Robert Musil y participèrent). Il est un des romanciers italiens les plus populaires, tout en jouissant d’un large succès critique.
En 1938, il entre à l’École militaire d’alpinisme d’Aoste: il combattra, dans un régiment de chasseurs alpins, en France, en Grèce, en Albanie, en Russie. Fait prisonnier par les Allemands lorsque l’Italie signe un armistice séparé avec les Alliés (le 8 septembre 1943), il est transféré en Prusse orientale. Il finit par s’évader, gagne l’Autriche et parvient, à pied, à rejoindre son foyer le 5 mai 1945. Dès lors, revenu sur le plateau d’Asiago, il n’en bougera plus jusqu’à sa mort en juin 2008, habitant la maison qu’il a lui-même construite et devenant employé du cadastre avant de se consacrer entièrement à l’écriture à partir de 1970.
En 1953, Elio Vittorini a publié, dans sa célèbre collection I Gettoni des éditions Einaudi, le premier roman de Rigoni Stern, Le Sergent dans la neige (Il sergente nella neve), qui deviendra en Italie un véritable classique moderne, et qui relate, sur une base autobiographique, la retraite d’un groupe de soldats italiens sur le front russe.
Après ce premier livre paraîtront, avec une grande régularité, de nombreux romans et recueils de nouvelles, qui assureront à Rigoni Stern une place constante dans les lettres italiennes de ce second demi-siècle.
notice des éditions Verdier.
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| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Mario Rigoni Stern (Italie) Mar 05 Nov 2013, 13:50 | |
| Les saisons de Giacomo, Laffont, 1999 ; 10/18 « Domaine étranger », Paris, 2001 Après la Seconde Guerre mondiale, un homme retourne au hameau de la montagne vénitienne où il a passé son enfance. Si les pierres et les rues en ont été remodelées pour le transformer en un village de villégiature, les stigmates de l’horreur et le souvenir de ceux qui y vécurent sont demeurés bien vivaces.
Lorsqu’il passe devant l’ancienne maison de Giacomo, son ami d’école, il décide de raconter son histoire et celle des siens. Giacomo est un petit gamin d’une famille pauvre qui, de l’entre-deux-guerres à la campagne de Russie, traversa toutes les vicissitudes réservées aux montagnards italiensLes scènes sont très visuelles. Dans le village détruit, les cloches sont finalement hissées jusqu'au clocher, non sans mal, et les gamins y participent. Pour les petits campagnards, la vie scolaire est très concrète : identifier les branches d'arbre de la région, voilà la leçon de botanique qu'ils ont préparée. Pour aller au cinéma voir Tom Mix, giacomo récolte dans les tranchées des balles et des obus, déterrant des crânes à l'occasion... le récit a dela saveur, et les personnages, beaucoup de présence. Je suis ravi d'avoir mis la main sur ce livre de 220 p. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Mario Rigoni Stern (Italie) Mar 05 Nov 2013, 20:04 | |
| je viens de l'acheter, il n'est pas dans ma mediathèque ... Le Sergent dans la neige, mon premier livre, raconte : En 1938, j'avais 17 ans. J'étais un garçon assez romantique. J'avais lu Conrad, Stevenson, Verne. Je n'aimais que la montagne, ne rêvais que d'ascensions, d'escalade. J'étais exalté par des valeurs physiques très viriles, dépasser le froid, la peur, connaître la camaraderie dans l'épreuve. Ma famille était modeste. Il me fallait gagner ma pitance. J'ai quitté l'école à 14 ans. Puis je me suis engagé. Pour avoir des skis, il fallait faire partie des Jeunesses fascistes qui organisaient la vie du village, le patronage, la gym... Tout cela était très ordinaire, comme être catholiques ! La misère nous aveuglait. Vous pensiez alors faire une carrière militaire chez les chasseurs alpins.
Oui, et passer des examens pour devenir officier. Le 10 juin 1940, l'Italie entre en guerre contre la France et l'Angleterre. J'ai écouté le discours de Mussolini à la radio. J'étais tétanisé. J'avais peur. Et pourtant, j'obéissais. Je songeais toujours à devenir officier. Comme disait Napoléon, chaque soldat a un bâton de maréchal dans sa besace. J'ai combattu en Albanie, en Russie [de 1941 à 1943].
Mes chefs m'ont décoré de la "valeur militaire", le summum de ce que je pouvais prétendre avec mon peu d'éducation. J'ai refusé cette distinction. Dans l'armée, il faut s'assujettir. Dire oui à son supérieur. Mais pour la première fois, j'ai appris à dire non. Lors de la retraite de Russie, tant de mes camarades sont morts, pour de fausses raisons. Ils ont été trahis. En leur mémoire, je ne pouvais pas accepter cette médaille.extrait d'un entretien avec télérama. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Mario Rigoni Stern (Italie) Mer 06 Nov 2013, 14:50 | |
| Les saisons de Giacomo, 220 p. ce récit d’enfance est en même temps la chronique d’un village entre les deux guerres. A la fin un personnage dit - Citation :
- « Ça recommence exactement comme en 14 »
Entre temps on suit le narrateur et Giacomo à l’école, dans les cours d’histoire fortement imprégnés de l’actualité où l’instituteur et le curé se font les propagateurs de l’Elan italien avec le fascisme, les laudateurs du Duce. La réalité quotidienne n’incline pourtant pas à l’optimisme : on parle des disparus, des combattants épuisés qui voulaient rentrer chez eux, las d’une guerre qui n’en finissait pas . Dans la famille de Giacomo, certains partent en France, d’autres vers l’Australie, tellement la misère se fait sentir. Les émigrants permettraient avec leurs mandats de survivre, d’acheter de la laine pour les châles ou les chaussettes d’hiver… Les scènes sont incroyablement présentes, même si on ne connaît pas les lieux : on a le sentiment de les parcourir, à pied ou à bicyclette, de rencontrer des gens connus avec lesquels on échange quelques paroles, nourries des souvenirs de la génération précédente, et du repli pendant la guerre dans des villages proches. Les conversations sont naturelles comme chez Boris Pahor, elles traduisent la solidarité et la bonne humeur de qui partagent les mêmes difficultés et les mêmes préoccupations. Difficile d’analyser le charme prenant du récit : il ne repose pas sur des « effets », mais sur une situation immédiatement vécue : la joie des récupérateurs qui, dans les anciennes tranchées, trouvent des cartouches inutilisées, à re-bricoler pour les chasseurs, ou , s’il s’agit d’obus, à refourguer aux ferrailleurs. La vie dépend du prix du métal. La population croit sans trop d’espoir aux promesses du fascisme, elle est mobilisée pour la construction d’ossuaires monumentaux, censés honorer les « héros morts », et que viendront alimenter les actuels survivants : car les guerres multiplient en Afrique, en Abyssinie,, en Érythrée, et bientôt dans toute l’Europe, jusqu’en Russie. L’auteur/ narrateur n’alourdit pas son récit de commentaires : il donne la réalité brute, vécue avec les plaisirs et déplaisirs de tous les jours, dans un style concret qui aime les gens et les objets. Jusqu'aux paroles des chansons, et aux réflexions sur le terrain. C’est pourquoi on parle de lyrisme et de sensualité, chaque instant a son pesant d’âme, de sentiment, et de vie obstinée. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Mario Rigoni Stern (Italie) Dim 17 Nov 2013, 14:47 | |
| je viens de lire la première partie, l'avant-poste. Les Alpins sont face aux Russes qui multiplient les attaques. Dans des conditions difficiles,Rigoni stern et ses compagnons tâchent de garder le moral, vivement désireux de retrouver leurs maisons. Une solidarité de villages lie les hommes pour qui la polenta fabriquée avec les moyens du bord reste un ciment d'union. Pour tuer les poux, il faut les faire bouillir dans des casseroles, les rats fuient les paysages de neige et tâchent de se réfugier sous les couvertures. L'ordre de repli vient d'être donné. Le récit est sobre, comme dans la définition de Pétrarque : " exprimer l'essence même de tes oeuvres, en ôter tout artifice". | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Mario Rigoni Stern (Italie) Mar 19 Nov 2013, 06:47 | |
| - Citation :
- "Nous ne connaissions aucun nom des pays de l'arrière. Les télé phonistes, les scribouillards et les autres embusqués connaissaient tous les noms. Nous, on ne savait même pas celui du patelin où avait été notre avant-poste. Et c'est pourquoi je ne donne ici que les noms de camarades et de choses. Tout ce que nous savions, c'était que le fleuve devant notre avant-poste, c'était le Don, et que, pour rentrer à la maison, il y avait tant et tant de kilomètres..."
Observateur des effets de la guerre sur les comportements, Rigoberti parle d'un lieutenant manifestement fou, d'un capitaine qui parsesordres transforme ses hommes en cibles évidentes... Le hasard fait qu'il rencontre autour d'une gamelle des Russes et que la faim les réunit sans animosité. Le regard empathique de Rigoberti sur ses camarades alpins donne un ton authentique au récit, on sait aussi ceux qu'il revoit et de qui il déplore la perte. On comprend que cette relation d'une retraite/débandade ait été louée par Calvino et Levi. C'est la note humaine dans le grand chaos. | |
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