Victor Hugo

J'ai terminé L'homme qui rit. Les dernières pages méritent qu'on s'attarde dessus. Il y a d'une part le discours de Gwymplaine et ensuite l'auteur qui expose sa conception de la société et de la politique et d'autre part une fin extrêmement poignante où Victor Hugo fait référence à la mort de sa fille et de son gendre.
Bouleversant !

L'homme qui rit est en effet le roman de Victor Hugo qui m'a le plus marqué... Si je reprend mon livre une page sur deux est annotée, soulignée cornée ; et l'intéraction entre les événements, les faits, les descriptions... tout semble mouvant dans ce livre... Comme si l'ombre parlait à la lumière, comme si le gibet répondait aux comprachicos; tout s'avance et s'emmêle; et certains mots sont poignants à couper net la lecture.

Citation :

Le grain de sable dans le désert, le flocon d'écume dans l'Océan, sont des manifestations vertigineuses : la toute-puissance ne prend pas la peine de cacher son atome, elle fait la faiblesse force, elle emplit de son tout le néant, et c'est avec l'infiniment petit que l'infiniment grand vous écrase.

Mais contrairement aux travailleurs des mers ... ici la puissance de la mer se combat... c'est son répit qui devient mortel :

Citation :

Les vents sont une attaque de cosaques; tenez bon, cela se disperse. Le calme, c'est la tenaille du bourreau.

Que dire de la préface de Cromwell? On y trouve déjà le Hugo mégalomane, imbu de sa petite personne, de mauvaise foi... mais quel génie!!!! Texte par excellence de la révolution romantique, elle est aussi à part dans la production de l'époque, car Hugo est le premier à faire une analyse poussée du grotesque, non pas comme matériau littéraire, mais comme reflet de la civilisation. C'est aussi le plus grand réquisitoire contre le bastion classique des trois unités et l'imitation, il tire à boulets rouges contre les néo-classiques et sa figure de proue, La Harpe. C'est aussi un plaidoyer pour un théâtre de l'histoire et de la subjectivité, de la réalité et de la conscience. Un texte donc d'une rare puissance, avec notamment le fameux : "Mettons le marteau dans les théories, les poétiques et les systèmes. Jetons bas ce vieux plâtrage qui masque la façade de l’art!" J'adore!

Autant le seul roman de Hugo que j'ai lu (Notre Dame de Paris -pourtant lu sur le site même!) m'a paru verbeux, inexact historiquement, froid, mal construit, bref, ennuyeux au possible, autant je reste fasciné par sa poésie.
Grandiose, touchante, vivante, je succombe littéralement au charme de ce géant, qui savait géant, il est vrai.
J'ai lu les Orientales, Odes et Ballades, mais surtout aimé (quoique lu seulement en recueils d'extraits) Les Rayons et les Ombres, les Contemplations, quelques passages des Travailleurs de la mer.
Touché tout particulièrement par l'évocation de son enfance aux Feuillantines, de ses premiers amours, la perte de sa fille, noyés dans la Seine.
Mon poème préféré, peut être le Faune. On a presque la sensation de le sentir, de le voir et le toucher.
Etrange aussi mais les couleurs de l'automne m'évoquent immanquablement la poésie de Hugo.
Il y a tant de choses à dire sur lui...notamment ce qui est frappant c'est la sentimentalité qu'on lui a souvent reproché (mais un écrivain écrit ce qu'il veut, non?), lui qui fut aussi un grand homme politique. Le mélange des deux serait inconcevable à notre époque.

je ne vois pas en quoi Notre dame de Paris serait inexact historiquement. S'il y a des points à rectifier, voir la preface de Jacques Seebacher dans la préface pour le contexte historique de la parution.

Dans le livre de poche c'est Maurel qui montre les différents symboles visuels, sous forme d'horizontales, de verticales et de tourbillons.

Car dans tout livre de Hugo, on trouve des symboles qui se répondent, des enigmes qui se font écho. On n'en finit pas de creuser cet écrivain-là, y compris dans ses romans !!

Hors le fait que Victor Hugo ait été un immense poète et romancier, il fut le seul penseur qui témoigna de son siècle, et ce, sans fermer les yeux sur les iniquités et les horreurs de la misère, alors qu'il aurait pu se comporter comme la plupart des historiens courtisans de son époque, voire se désintéresser totalement de la condition des déshérités ... de plus, grâce à son regard critique et perçant, qui a vu se dérouler les guerres de l'Empire, il a analysé et rendu compte de ses victoires et ses désastres, comme il s'est attaché à le faire pour la Commune ... par son oeuvre, ce génie visionnaire, qui vécut deux révolutions, plusieurs insurrections, un coup d'Etat, une guerre européenne et la naissance de l'ère industrielle, nous a laissé une clef universelle de l'Histoire, dont l'humanisme est à la hauteur des plus grands philosophes ...

C'est bien dit ; Victor Hugo continue à frapper l'imagionaire à avoir des admirateurs; les misérables est une oeuvre grandiose de la détresse humaine; la légende des siècles est un hommage à des siècles; c'est la le génie de l'auteur où il nous emmène de plages en plages et nous invite à nous poser des questions; il est icontestablement le père du lyrisme.

Pour Notre-Dame de Paris, je parlais par exemple de son erreur sur le début de la construction de la cathédrale (ça fait dix ans que je l'ai lu alors les détails m'échappent) de l'ordre d'au moins un siècle, erreur importante même pour la connaissance historique du XIXème siècle.
Au niveau de la symbolique, je ne l'ai pas vu, mais une nouvelle lecture m'apprendra peut-être beaucoup de choses.
Pour le côté historique je me suis permis cette remarque étant donné que j'ai travaillé deux ans à notre dame et que j'ai lu pas mal de choses sur son histoire, discuté aussi beaucoup avec mes collègues, plus pointus que moi sur le sujet.

D'accord, j'ai toujours été surpris de lire les analyses sur hugo, toujours eclairantes. A vrai dire, je crois qu'on a besoin au début de ces intermédiaires.

Par la suite, fréquenter Hugo est rentrer dans un univers obsédant. C'est à la fois merveilleux, et insupportable car on en vient à penser comme lui, à notre échelle évidemment

les travailleurs de la mer en particulier m'ont beaucoup marqué, Quatre-vingt Treize aussi,

et l'homme qui rit m' a passé au-dessus !

Il y avait du lyrisme en littérature bien avant Hugo, dès l'Antiquité.

Bulma a écrit:

Il y avait du lyrisme en littérature bien avant Hugo, dès l'Antiquité.

certes, mais si j'en reste au roman (car je pense qu'Hugo romancier connaît une injuste méconnaissance), Hugo introduit en littérature une très large palette de personnages, depuis l'enfant de paris, jusqu'aux marmots bretons dans quatre-vingt-treize) jusqu'aux personnages grotesques (dans l'homme qui rit ou L'immanis dans quatre-vingt treize

Pour voir quelques symboles/métaphores dans quatre-vingt-treize voir cette page qui donne des exemples précis, mais il y en a plein d'autres chez Hugo, c'est un gouffre, un puits, une caverne d'Ali Baba !

Assurément, l'ouvrage "les misérables" reste un monument.L'art d'écrire est éminemment proche de l'imaginaire, la puissance du verbe, extraordinaire, les personnages sympathiques. La faim conditionne le comportement humain et Jean Valjean en est la meilleure illustration; autour de ce personnage se tissent les caractères humains; ainis par désespoir, il commet un acte illégal et la société n'était pas clémente en le punissant sévèrement par un long séjour au bagne sans commune mesure à son forfait.Cependant, il demeure un symbole de la misère en littérature qui ne l'a pas condamné.

je crois en avoir déja parlé, mais il est interessant d'etudier Valjean, avec un V comme Vidocq, cet ancien forçat devenu prefet de police, et qui a inspiré Balzac avec Vautrin.

La conversion de Valjean en M.Madeleine, mais aussi la confrontation de Valjean-Madeleine avec Champmathieu, arrêté par erreur car on lui attribue l'identité de jean Valjean disparu dans la nature.

A plusieurs reprises, le passé vient se rappeler à M. Madeleine, y compris lorsque la file des forçats dans la rue suscite indignation et dégôut chez Cosette qui se promène avec son père !!

Jean Valjean a aussi des traits communs avec son ennemi JaVert.

Rien n'est simple chez le père Hugo.

coucou pour moi victor hugo est un grand ecrivain et un grand poete mais je trouve dommage pour ma part qu'il soit surtout connu pour son roman les miserables les gens en oublient ses autres oeuvres. Moi j'ai adoré [b]l'homme qui rit[/b, c'est mon roman préféré.

Je n'avais jamais lu Victor Hugo.
Ou plus exactement, je n'avais jamais terminé une de ses oeuvres. Voici bien des années, j'ai échoué dans la lecture de Notre Dame de Paris, succombant au milieu de la fête des fous, avant l'élection de Quasimodo.

J'ai de nouveau tenté ma chance et fait une seconde tentative. Je me suis accroché et suis arrivé au bout, dans la cave du gibet de Montfaucon.

Magnifique histoire, très belle histoire d'amour, critique de cette époque sordide où l'Eglise est toute puissante et brûle et pend à tour de bras...
Mais l'écriture de Hugo est souvent fastidieuse ( ). Beaucoup de longueurs pendant lesquelles je me suis passablement ennuyé : la fête des fous qui manqua de m'être fatal une seconde fois, la description minutieuse de la cathédrale...

Mon ressenti est malgré tout positif et j'en garderai un souvenir agréable.
:cho:

Je vous trouve bien légers sur Hugo
Le livre de poche donne des prefaces de qualité, notamment sur Notre Dame de Paris, sans parler de la collection la Pleiade. Dans les bibliothèques, on trouve les oeuvres complètes de Victor Hugo, sous la direction de Jean Massin au Club Français Du Livre.

Hugo trompe son monde !

à le pratiquer comme un feuilleton on passe à côté de plein de choses. En revanche si on en fait une lecture attentive dans les collections que je cite, on approche d'un univers qui devient obsédant. Rien n'est gratuit chez lui, les misérables méritent bien mieux que leur bonne réputation.
Quant à autres romans, on n'en finit pas de les sonder. Les lycéens n'y ont pas accès car ils ne peuvent etudier des textes aussi longs.

Gardez Hugo pour vos loisirs de long terme, mais sachez qu'il vous aspire et que votre entourage en souffrira. L'ideal sera de le lire en prison quand vous écoperez d'une lourde peine

Il y a pas longtemps j'ai lu Derniers jours d'un condamné. Mis à part l'homme qui rit je n'avait pas lu d'autres oeuvres de cet auteur.
Dans Dernier jour d'un condamné, le style de l'auteur est engagé et lyrique à la fois. C'est un livre très émouvant qui pousse à réfléchir sur un sujet sensible. Hugo se montre d'ailleurs souvent ironique et cynique mais aussi réaliste.
En effet, il ne fait pas le procès des condamné, d'ailleurs on ne sait même pas pour quel délit, le condamné est jugé. Mais il veut montrer hors de la rhétorique et des tribunaux, ce qu'est la peine de mort et l'échafaud.
Hugo se borne à décrire l'angoisse sans se préoccuper du crime commis et des évènements extérieurs.
Ca ne l'empèche pas de réfléchir sur la condition humaine. Un passage m'a d'ailleurs interpelée à ce sujet :

Citation :

Les hommes sont tous condamnés à mort avec des sursis indéfinis" (p68)

Je rejoins rotko. J'ai déjà parlé de la préface de Cromwell, qui est un texte génial, même s'il s'agit uniquement d'une préface.

Mais je préfère son théâtre à son œuvre romanesque

Il est tout à fait possible que je n'ai pas pleinement apprécié Notre Dame de Paris et que je ne l'ai pas goûté à sa juste valeur. Mais, comme je vous l'ai dit, j'ai abordé ce livre d'une façon très particulière : comme un enfant qui a peur de l'eau se décide à se jeter dans le grand bain !
J'avais déjà échoué dans cette lecture. Je craignais donc ce livre. Un peu comme un cavalier dont le cheval vient de faire un refus : il fait une volte (la mienne à duré 15 ans) pour s'aligner de nouveau face à l'obstacle, un peu stressé que sa monture se dérobe de nouveau.

Cette fois, c'est passé. Mais du coup, n'étant pas aussi détendu que j'aurais dû l'être, je suis peut-être passé à côté de certaines choses.

Harelde, as-tu lu Hernani et Ruy Blas? Ce sont deux pièces de théâtre, certes, mais deux de ses chefs-d'œuvre, qui permettent d'appréhender l'esthétique hugolienne.

Et je répète la préface de Cromwell, trouvable en poche, qui éclaire parfaitement la production de Hugo. Peut-être est-ce le texte le plus fondamental de Hugo et ce malgré sa petitesse

Je crois n'avoir jamais vu de pièce de Hugo au théâtre, sinon une parodie de Ruy Blas avec la folie des grandeurs, Montand et De Funes

En revanche j'ai lu de près plusieurs de ses romans où il joue de différents objets et personnages symboliques (1) avec la même virtuosité que pour ses jeux de mots en français et en latin. Je cherche toujours le nom specifique donné au résumé énigmatique qu'il donne en début de chaque chapitre : "où l'on voit que" etc.

Prince, toi qui as des relations dans le monde des Lettres, tu pourrais sans doute trouver la réponse ou poser la question ...

(1) l'échelle et la tour par exemple dans quatre-vingt-treize, tous les problèmes de parenté, "aures habent" dans le même titre, "nix et nox" dans les travailleurs de la mer etc.

Hugo a devancé Freud sur bien des points, en cachottier génial et obsessionnel, louant ostensiblement dans notre Dame de Paris Hughes de saint Victor, qui préfigure Victor Hugo lui-même, amateur d'anagrammes et de chiffres, inventant des graffiti, des paysages verticaux qui se transforment en figures horizontales en passant par des tourbilllons... hanté dans ses dessins par les naufrages et les abîmes...

J'ai lu de Victor Hugo Derniers jours d'un condamné, Les Misérables, Notre-Dame de Paris, Ruy-Blas, La légende des Siècles et Choses Vues.
Je trouve que les romans de Victor Hugo sont des oeuvres profondes, puissantes et émouvantes. Hugo y dénonce avec panache la misère et l'injustice. J'ai un faible pour Les Misérables malgré la longueur de l'oeuvre.
Dans Dernier jour d'un condamné, Victor Hugo remet magnifiquement en cause le sujet difficile qu'est la peine de mort.
Je ne peux pas dire grand chose sur les pièces de théâtre car je n'en ai lu qu'une seule.

les miserables en musical. Après la version Hossein de 1980



Le Théâtre du Châtelet reçoit une nouvelle version musicale du roman de Victor Hugo par deux Français, Alain Boublil et Claude-Michel Schönberg, pour une série de 47 représentations, juqu'au 4 juillet.

une scénographie et des images animées en fond de scène inspirés de peintures de Victor Hugo. La mise en scène de Laurence Connor et James Powell, qui ne recule pas devant l'effet (la mort du sombre Javert, comme effacé dans l'obscurité) et le spectaculaire (combats sur les barricades), souligne l'efficacité d'une adaptation qui ne manque pas de souffle dramatique.

clic !

Face à Valjean, le magnanime sauveur de Cosette et de celui dont elle est éprise (Marius), les Thénardier sont de très drôles personnages de caractère, comme on en croise dans les opéras bouffes.

source : le Monde.

le spectacle d'une exécution in preface de 1832 au dernier jour d'un condamné :

Arrivé à l'échafaud, le bourreau prend [le condamné] au prêtre, l'emporte, le ficelle sur la bascule, l'enfourne, je me sers ici du mot d'argot, puis il lâche le couperet. Le lourd triangle de fer se détache avec peine, tombe en cahotant dans ses rainures, et, voici l'horrible qui commence, entaille l'homme sans le tuer. L'homme pousse un cri affreux. Le bourreau, déconcerté, relève le couperet et le laisse retomber. Le couperet mord le cou du patient une seconde fois, mais ne le tranche pas. Le patient hurle, la foule aussi. Le bourreau rehisse encore le couperet, espérant mieux du troisième coup. Point. Le troisième coup fait jaillir un troisième ruisseau de sang de la nuque du condamné, mais ne fait pas tomber la tête.

Abrégeons. Le couteau remonta et retomba cinq fois, cinq fois il entama le condamné, cinq fois le condamné hurla sous le coup et secoua sa tête vivante en criant grâce ! Le peuple indigné prit des pierres et se mit dans sa justice à lapider le misérable bourreau. Le bourreau s'enfuit sous la guillotine et s'y tapit derrière les chevaux des gendarmes. Mais vous n'êtes pas au bout.

Le supplicié, se voyant seul sur l'échafaud, s'était redressé sur la planche, et là, debout, effroyable, ruisselant de sang, soutenant sa tête à demi coupée qui pendait sur son épaule, il demandait avec de faibles cris qu'on vînt le détacher. La foule, pleine de pitié, était sur le point de forcer les gendarmes et de venir à l'aide du malheureux qui avait subi cinq fois son arrêt de mort.

C'est en ce moment-là qu'un valet du bourreau, jeune homme de vingt ans monte sur l'échafaud, dit au patient de se tourner pour qu'il le délie, et, profitant de la posture du mourant qui se livrait à lui sans défiance, saute sur son dos et se met à lui couper péniblement ce qui lui restait de cou avec je ne sais quel couteau de boucher. Cela s'est fait. Cela s'est vu. Oui.


toute la préface.

J'aime beaucoup le recueil des orientales de Hugo, et une exposition célèbre à la maison de Victor Hugo place des Vosges les peintres attirés par l'orient.

Le Monde propose un diaporama


Delacroix, chevalier arabe attaqué par un lion.