Don Delillo

La route, ne m'en parle pas !
J'ai tout planté et je n'ai tjs pas compris l'engouement autour de ce livre (culte ?).

Une fois n’est pas coutume, je ne donnerai pas d’avis. En effet, je ne pense rien de ce livre, parce que je n’y ai rien compris. Il ne m’a ni plu ni déplu. Je n’ai pas compris ce que l’auteur voulait dire, et de quoi il voulait parler.

C’est bien écrit, mais tellement déstructuré qu’on ne comprend rien. Les personnages arrivent comme ça, sans crier gare. On ne sait que tardivement qui ils sont et ce qu’ils font…ce qui obligent à retourner inlassablement en arrière pour tenter d’y voir clair.
C’est le chaos, le désordre…et je ne m’y retrouve pas, je perds pied.
J’en ai lu 130 pages…presque la moitié, et je suis incapable de dresser une trame à ce que j’ai lu.
En somme je n’ai pu qu’aligner des mots les uns derrière les autres sans pouvoir y donner un sens.
Dommage, j’y ai mis du temps, et de l’énergie.

Ce sentiment d'être dérouté me paraît être dans le droit fil de cette oeuvre : Devant cet événement inattendu, catastrophique, et meurtrier, on est en plein irrationnel. La question "qui a fait le coup ?" (on y reviendra plus tard) , on ne peut même pas la poser : cf. p 82

Citation :

Là, avec ces gens-là, on ne peut même pas l'imaginer. On ne sait pas quoi faire. Parce qu'ils sont à des millions de km de notre vie. Et puis qu'en plus, ils sont morts.

j'ai un besoin absolu de comprendre pour pouvoir lire...sinon, c'est comme me jeter dans le brouillard tous feux éteints un bandeau sur les yeux...c'est panique à bord...et j'arrête là

Crevette a écrit:

La route, ne m'en parle pas !
J'ai tout planté et je n'ai tjs pas compris l'engouement autour de ce livre (culte ?).

mon frère me l'a offert il y a je crois pas loin de 2 ans. ça fait 4 fois que je le commence (je n'arrive pas à accrocher)...
il est pour lui dans son TOP 10 (et pour lui ce n'est pas rien, comme pour vous, c'est un mangeur de livres et depuis des lustres).
il reste sur ma PAL mais je n'arrive pas à me motiver pour le ré-ouvrir.

besta lis Suttree

mais je n'ai pas abdiqué sur Mc carthy, j' ai même offert méridien de sang à mon frère qui me fait saliver par son résumé.
et je lirai jusqu'au bout La route, je veux lui dire pourquoi j'ai du mal. et finalement peut-être que ce livre va m'éblouir!

Sinon tu peux lire aussi No country for old men , c'est excellent !

Mimi, c'est seulement un sentiment d'incompréhension ou un sentiment de malaise ?
Si c'est le second cas, l'auteur a réussi son pari !

Natalia a écrit:

Sinon tu peux lire aussi No country for old men , c'est excellent !

C'est surtout dans ce livre-là que j'ai regretté la rétention des patronymes ou identifiants. Dans la route il ya si peu de personnages qu'on ne risque pas de s'y perdre ou d'hésiter.

Amadak a écrit:

Hammad

C’est Hammad, un des terroristes, qui a joué un rôle actif dans l’organisation du complot.

Puis elle a fait cette intéressante citation :

"C’est en Afghanistan, dans un camp d’entraînement, que Hammad avait commencé à comprendre que la mort est plus forte que la vie. C’est là que le paysage le consumait, des cascades détenues dans l’espace, et le ciel sans fin.

Tout n’était qu’islam, les rivières et les ruisseaux. Ramasse une pierre et tiens-la dans la paume de ta main, et c’est l’islam. Le nom de Dieu dans toutes les langues du paysage. De toute sa vie il n’avait jamais ressenti une émotion pareille. Il portait un gilet pour porter les bombes et savait qu’il était déjà un homme, un homme, enfin, prêt à mettre un terme à sa distance d’avec Dieu."

Les pages 99 à 104 rendent bien, à y regarder de près l'argumentaire terroriste :

haine de l'occident et anticommunisme sont les idées forces qui expliquent tout, des malfaçons des logements à la méconnaissance, voire à l'hostilité vis à vis de l'Islam. On voit un repli sur soi des futurs terroristes, nourri d'une paranoïa entretenue, et de la découverte de vérités absolues excluant le doute.

En même temps le phénomène de groupe est renforcé par des épreuves qui deviennent des rites d'appartenance : la participation à un meurtre ou le sacrifice public d'un chameau. S'y ajoutent le culte des martyrs, et l'espérance d'une récompense post mortem.

Interprétation qui est celle du romancier.

Auparavant on avait entendu la conversation p. 60/61 de Lianne, de Nina et de Martin, parlant d'un complexe d'infériorité et d'une panique, selon leurs propos.

p.60 " Un camp a le capital, la main d'oeuvre, la technologie, les armées, les agences de renseignements, les villes, les lois, la police et les prisons. L'autre camp a quelques hommes prêts à mourir".

En même temps, il est très difficile de démonter cette mécanique là. Celle d'hommes prêts à se suicider sur la croyance de discours mirifiques, émanant d'autres hommes. Le fanatisme religieux est trop souvent confondu avec l'hystérie. Eh non ! Les leaders qui envoient les terroristes sur le terrain sont souvent très onctueux, très modérés dans leurs propos. Parfois doux ?

Cette douceur qui recouvre la violence. Ca m'a toujours sidérée...

John Updike montre l'embrigadement dans terroriste. Au premier abord je trouvais que Don Delillo avait peu parlé des agents de l'action, mais en me rapportant à mes notes, je me rallie à l'avis de Nicyrle :

Citation :

Enfin, j’ai été frappée par le personnage de Hammad, le terroriste, parce qu’il tranche sur tous les autres personnages du livre : son évocation saisissante de l’Afghanistan, de sa joie aux commandes de l’avion, de sa ferveur grandissante à l’idée de rejoindre enfin son Dieu, en est d’autant plus terrifiante. Il porte la mort, il va au-devant de la sienne et, en quelque sorte, il chante la vie, il exulte, j’ai trouvé puissantes les pages consacrées par l’auteur à cette thématique

Oui, il y a une mystique du terrorisme, et c'est bien là le drame. Les terroristes en sont les premiers subjugués !

Ce livre dérange et je comprends très bien que certains aient la sensation de s'y perdre, voire l'abandonnent en cours de lecture. Il demande un réel effort d'attention, de concentration et peut-être - oserai-je le dire ? - de maturité. Une fois le roman achevé, je trouve qu'il demande à être "digéré", repris pour être feuilleté mais en prenant de la distance en quelque sorte. Alors apparaissent des habiletés d'auteur dans la construction, dans la conception et la présentation du moindre personnage, dans le style enfin, extrêmement dépouillé.
Pour ma part, j'ai été d'emblée ou presque saisie par les pages consacrées à Hammad, peut-être parce que j'y étais intellectuellement préparée car il me semblait incontournable que soit abordée la thématique du terroriste.
En revanche, ce n'est qu'après coup, en revenant sur le texte que j'ai perçu; entre autres, l'importance de Justin, l'enfant : inquiétant, semblant s'éloigner peu à peu de son père et de sa mère, il donne l'impression d'incarner un monde définitivement en perdition après le 11 septembre, comme si même un enfant, par définition innocent et surtout en devenir, porteur d’espoir pour ses parents et tourné vers l’avenir, n’avait justement d’autre perspective que celle de guetter indéfiniment dans le ciel, avec des jumelles, l’arrivée d’un homme dont il a mal compris le nom, qu’il déforme avec conviction.

J'aurais aimé être dérangée.......seulement voilà encore faut-il comprendre...et c'est là le problème pour moi: c'est comprendre , donner un sens à ce que je lisais.....J'ai eu l'impression d'avoir un texte en javanais: je lis, déchiffre, mais cela s'arrête là.

En tout cas, sans être pour ma part enthousiasmé, j'ai trouvé le livre interessant et c'est bien de l'avoir proposé.

Le fil sur Don DeLillo manque de lecteurs totalement convaincus, à ce qu'il me semble.

L'homme qui tombe
Une lecture intéressante et des passages absolument bouleversants sur la maladie d'Alzheimer (en particulier l'atelier d'écriture et le dernier message de Rosellen). Il est vrai que l'on se perd un peu sur les personnages au début, mais malgré tout, une belle description -ou en fait un beau rendu- d'un chaos, d'un monde qui s'écroule, de questions sans réponse, sur la vie, sur Dieu.
Il est vrai que Justin, l'enfant, donne une impression d'étrangeté, comme si une part de lui avait définitivement grandi et une autre part restait tout aussi solidement ancré dans l'enfance (son désir de ne parler qu'en monosyllabe, sa déformation du nom de Ben Laden...)
Et le personnage de Hammad est si précisément humain...

sur ma citation à propos de Hammad. Comme j'ai lu ce livre en espagnol, je me demande si je l'ai bien traduite, je ne sais pas si en français les mots sont les mêmes; mais je pense que l'essentiel est dit. Moi j'ai aimé le livre, peut-être parce que le terrorisme me fait paniquer. Et ce'n'est pas une histoire littéraire, c'est un poignant récit d'un massacre qui a bouleversé le monde.

Que ceux qui n'ont pas aimé L'homme qui tombe ne se découragent pas. C'est un de ses ouvres mineures selon moi.

marxou a écrit:

Que ceux qui n'ont pas aimé L'homme qui tombe ne se découragent pas. C'est un de ses ouvres mineures selon moi.

merci des encouragements...et selon toi, que faut-il lire de lui?

Je n'ai lu rien d'autre de Delillo, encore, mais celui là m'a bouleversé , parce que ce n'est pas une oeuvre d'imagination, c'est une description révélatrice de ce que le terrorisme est capable de faire, sans pitié et au nom de Dieu.
Après cela le monde n'est plus le même.

Great Jones Streer, 3e roman de Don DeLillo, traduit par Marinna Véron, paraît actuellement chez Actes Sud. Ce qui autorise le commentaire suivant dans le Monde des livres (Nils C Ahl) :

Une application évidente et un certain esprit de sérieux ralentissent indéniablement la lecture. La belle façon, l'exercice de style l'emportent parfois sur le plaisir du texte. Les digressions obscures renchérissent sur les dialogues abscons - des formes radicales qui sont également la marque et le style de DeLillo

J'ai lu le commentaire sur télérama, ce livre a été ecrit il y a longtemps Et d'après le critique les dialogues "font mouche" ( j'apprends Français) j'ai cherché dans le
Robert. La vie de cette star du Rock semble intéressante et n'est pas une exception, dans ce monde de réussite foudroyante et éphémère.

Don Delillo n'est pas un auteur facile ou constant. J'ai dévoré certains livres et vécu difficilement la lecture d'autres. Et j'ai renoncé à me plonger dans les plus volumineux, et donc intimidants, tel Outremonde.

Mais Don Dellilo laisse toujours dans ma tête des images. Parfois, j'ai du mal à retrouver le livre duquel elles émergèrent. Ainsi de cette scène dans un avion, ou des armes et des personnages froids et lisses comme le métal echangent entre eux quelques paroles...

Un livre est resté dans ma tête : "Bruit de fond" publié chez Babel. Ce livre mêle différents genres et nous plonge principalement dans une ambiance digne de la science fiction. La population baigne dans une lumière dorée. Les communications se font via la télévision et de nombreuses rumeurs qui bruissent de toute part et transportent des nouvelles inquiétantes. L'homme est seul. L'homme a peur. L'homme se construit mentalement des explications, des théories, des futurs possibles à l'aide de rien du tout, des cliquetis de la société de consommation, d'un bruit de fond permanent. La place des médias et la façon dont ils nous conditionnent est montrée de façon habile, directe et désespérante :
"Où sont les médias ? demande -t-elle.
Il n'y a pas de médias à Iron City.
Alors, ils ont vécu tout çà pour rien ?"

"La peur est contre nature. Les éclairs et le tonnerre sont contre nature. La douleur, la mort, la réalité sont des choses contre nature. Nous ne pouvons supporter ces choses telles qu'elles sont. Notre connaissance est trop grande. Aussi nous tournons-nous vers le refoulement, les compromis, les manipulations. C'est la manière de survivre dans cet univers. C'est le langage naturel des espèces.". L' homme est seul et refuse le monde tel qu'il est. La conscience des choses et de la fin des choses serait-elle un lent poison qui mine l'être humain toute sa vie et le conduit à inventer pour fuir, s'aveugler et ne plus voir ? Sans aucun doute, pour Don Dellilo et bien d'autres. S'aveugler oui, mais cela ne suffit pas, il faudrait être sourd pour échapper à ce bruit de fond... être mort pour échapper à la mort ?

Ce texte nous entraîne à peser et soupeser des questions vitales. Il le fait dans un cadre très souvent humoristique et haut en couleur. Bref, je crois que ce livre mérite d'être lu car il laisse en nous des traces indélébiles.