Caroline Eliacheff, Regards sur la famille

Anne Ancelin Schûtzenberger, Aîe, mes aieux,  La méridienne, Desclée de Brouwer.
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Le poids des ancêtres.
 
Portons-nous nos ancêtres sur notre dos ? A la lumière de la psychanalyse, l'auteure se penche sur la transmission "transgénérationnelle", sur un héritage dont nous ne sommes pas toujours conscients et qui pourtant affecte notre vie.
Authentique Candide :-), j'ai lu cet ouvrage et mon bilan est "globalement positif".

Certes les références aux différents courants de la psychanalyse sont au début pesantes pour le néophyte, mais l'auteure se situe et s'implique dans ce contexte, si bien que ses expériences personnelles, tant privées que professionnelles, - elle est psychothérapeute, groupe-analyste, enseignante à l'université de Nice, renseignent sur les racines de sa pensée. On découvre "les comportements hérités", et l'impact du regard de la famille, de la société, et de l'équilibre familial sur le développement et la santé d'une personne .
 
Qu'est-ce que notre identité ? "Je est un autre", disait Rimbaud qui confondait sa ville de naissance avec celle de son grand-père (Dole) et se croyait déserteur du 47é régiment d'infanterie - régiment de son père.
Certains s'identifient à un frère aîné décédé en bas-âge. Ces identifications sont facilitées par de nombreux facteurs dont le choix des prénoms, les dits et les non-dits, voire les secrets de famille.

Les "loyautés familiales" : les mythes familiaux exercent leur emprise sur l'individu, lui donnent des obligations, un rôle à jouer, mais aussi des dettes à solder.
Il faut donc connaître l'histoire (publique et privée, dite et non-dite) de notre famille pour se situer et s'assumer : ce sera le rôle du "génosociogramme" dont la méthode d'établissement est détaillée.

Un point largement développé est le "syndrome d'anniversaire" : comment se fait-il qu'une date précise joue un rôle si important pour plusieurs générations ? Dans le "Carnet rouge", Paul Auster raconte qu'un de ses amis C recherche inopinément sur le minitel, l'adresse de son père qui avait quitté le domicile familial quand C avait trois ans et demi. Or il fait cette recherche quand sa fille a trois ans et demi.

Les exemples donnés par l'auteure n'ont rien à voir avec la numérologie ! ils sont proposés, soumis à la réflexion, objets de constats et d'hypothèses, enjeux de nouveaux terrains de recherche.

Par moments, on est tenté de balayer d'un revers de main ce qui apparait comme des hasards, des coincidences, notions bien étrangères à la psychanalyse... Convaincu ou non, on cogite, et de cette lecture naissent, non des réponses, mais des interrogations fructueuses.

Comme toujours, on pense à certains comportements d'autrui, puis on en vient à notre propre cas, ce qui peut meubler "agréablement" nos insomnies !

Caroline Eliacheff, A corps et à cris, Editions Odile Jacob.

Comprendre la souffrance des tout-petits.

Certains viennent au monde avec un lourd handicap : abandonnés, fils de l'assassin de leur mère, etc...Ces bébés sont en cas de sequelles physiques ou psychiques persistantes, confiés à une psychanalyste, qui diagnostique leurs troubles de comportement pour les aider à accepter une vie que parfois ils refusent.

Regard sur la société, mais aussi compréhension des comportements infantiles, ce livre apporte beaucoup au lecteur : il voit les limites acceptées du rôle de psychanalyste, mais aussi les écueils que doivent éviter les "personnes de bonne volonté" dans des situations difficilement gérables.

Dans les meilleurs cas, on se trouve devant un puzzle, où, nouveau Sherlock Holmes - mais sans son cabotinage devant Watson, le consultant met au jour ce qui aurait dû nous sauter aux yeux. Mais souvent on tombe sous le charme d'une humilité prudente, d'une parole qui sait soigner sans mentir, et tenir compte du fait qu'un "bébé est une personne".

Ainsi se tissent avec le tout-petit des liens opérationnels, fondés sur l'accord de ce dernier, et qui se traduisent par une reconnaissance de son mal, et une volonté d'opter pour une vie assumée.

Sans jargon ou ni verbiage, Caroline Eliacheff décrit une attitude pleine de respect pour les protagonistes de ces histoires, mais souligne aussi les dysfonctionnements d'institutions parfois bien lentes à réagir.

Ici, c´est bien pareil, Rotko: on vient d´amputer 2 doigts à un bébé d´à peine un an qui s´etait brûle les doigts et que ni mère ni père n´avaient pris la peine de soigner... gangrène, en plein XXI s. Çà me rend dingue.
Vous comprenez pourquoi je ne peux que lire de BELLES CHOSES???
"La refugiée"

Qui sont les bons parents ? Quel nom de famille transmettre à ses enfants ? Peut-on divorcer sans douleur ? Anorexique ou boulimique ?...
Bien au-delà des apparences, Caroline Eliacheff interroge notre manière de vivre, à travers des thèmes trouvés dans sa pratique de psychanalyste et dans son existence personnelle. Coups de coeur ou coups de sang.
Sous son regard, les plus petites choses de la vie comme les questions de société les plus graves révèlent les contours de nouvelles mythologies : les nôtres.

Dans le JDD la fille de françoise Giroud, Caroline Eliacheff, dresse son panorama familial.

Grand merci de m'avoir acheminée vers ce fil. Je suis intéressée par plusieurs titres, notamment le premier !

Le livre d'Anne Ancelin est assez facile à lire, avec l'inconvénient, comme tout ouvrage de vulgarisation de simplifier, donc d'être peut être mal compris.
Il a tout de même l'intérêt de nous faire prendre conscience que nous ne sommes pas des électrons libres nés de nulle part, mais que nous appartenons à des chaines d'humains à qui nous sommes reliés, que ce soit nos contemporains, ou les gens qui nous ont précédé.

Daisybraille a dit au Bar, je la cite :
"Je viens d'entendre les derniers mots de "La roue de la Fortune" de Susan Howatch (pas sur GDS) : fameuse saga familiale qui s'étend sur plusieurs siècles, et qui met en évidence les dangers de certains secrets de famille, certains événements que l'ancêtre veut cacher, mais dont les petits-enfants subissent, sans le vouloir, sans le savoir, les conséquences."

Ceci m'a donné l'idée de créer un fil sur les secrets de famille...Donc, pas de fausse pudeur, allez y, dites ce que vous en pensez, si vous avez un secret à livrer et bien livrez le et qui sait peut être que cela fera du bien d'en parler entre amis...

Un auteur passionnant en ce qui concerne l'individu et la famille : Iván Böszörményi-Nagy, pionnier dans le domaine de la thérapie familiale et de la psychogénéalogie, créateur de l'approche contextuelle. Cette approche n'a pas été très développée en tant que telle mais a fortement influencé tant les thérapies systémiques que la psychanalyse, qui elles-mêmes avaient nourri son travail.

J'ai lu le livre que Magda Heireman lui a consacré : Du côté de chez soi, la thérapie contextuelle.

Fortement marqué par la seconde guerre mondiale puis par ses recherches sur les psychoses, Nagy met en évidence deux concepts essentiels dans le fonctionnement familial : la loyauté et l'éthique.

Quelques extraits du livre :

Nagy se distancie carrément des thérapeutes qui affrontent les symptômes à l’aide de toutes sortes de stratégies, qui aménagent leur champ de manœuvre comme une arène de jeux manipulateurs... Il s’était rendu compte qu’il était plus dangereux de supprimer sans plus les symptômes. En effet, des problèmes bien plus graves peuvent surgir : tel ce patient qui ne buvait plus et que devenait déprimé et suicidaire. Nagy s’insurge contre les thérapeutes qui imposent leur conception à la famille en la présentant comme la seule et unique structure ou la meilleure communication possible. Il refuse les thérapies qui imposent quelque chose de l’extérieur. Pour lui, le thérapeute valable est celui qui s’associe aux changements spontanés des patients.

Au début, [les membres de la famille] sont disposés tout au plus à apporter de l’aide à « leur » patient ou à être conseillés à propos de la façon dont ils doivent se comporter avec lui. Et même si certains sont motivés, il y en a d’autres qui veulent sauvegarder le statu quo : c’est le principe de l’homéostasie. Les pseudo-motivations en faveur d’une thérapie familiale sont souvent basées sur le désir d’afficher la maladie ou les attitudes des autres et non sur le besoin de les modifier… [de l'utilité de l'enfant "symptôme"]

Un domaine particulièrement intéressant : la nécessité, pour l'enfant, de se sentir associé au fonctionnement familial et d'être reconnu pour sa loyauté et ses efforts. Souvent, tout est fait pour "protéger" les enfants, c'est-à-dire les tenir éloignés des difficultés. Or, il est essentiel pour l'enfant de sentir qu'il peut être utile à ses parents, qu'il peut exprimer sa loyauté ainsi, à condition, bien sûr, que cette loyauté soit reconnue. Rien de pire, donc, que l'amour parental "sacrifice". Pour Nagy, l'enfant souffre bien sûr s'il a le sentiment d'une injustice à son égard, mais il souffre tout autant (voire plus) s'il se sent responsable d'une injustice en sa faveur.

Il dit : « Quand on choisit uniquement pour l’enfant, on choisit fatalement contre lui. »

Les conséquences constituent un aspect important d’une relation. Toutes les personnes liées par leur relation mutuelle sont les sujets des conséquences de cette relation. À long terme, celles-ci forment un lien plus significatif que les patterns transactionnels ou communicatifs… Les conséquences matérielles et psychologiques sont plus aisément décelables que les conséquences éthiques. L’injustice relationnelle [y compris en sa faveur] nuit à la capacité de l’enfant d’apprécier l’équité de ses relations ultérieures.


Il y aurait beaucoup à dire mais je ne vais pas faire trop long (déjà que ).

Une dernière réflexion, terriblement d'actualité : selon Nagy, la famille élargie crée des conditions de vie plus favorables. Elle offre des ressources plus nombreuses. La famille nucléaire actuelle est trop restreinte : il lui manque le soutien de la génération précédente.

le film de Claude Miller "Un secret" passé récemment à la télé a retenti fortement en moi car dans ma famille des secrets il y en a et en a eu des tonnes...Entre un grand père "Corse" né en Corse mais qui en fait était descendant d'Italiens par son père (ce qui pour moi n'est d'aucune gêne mais était caché par la famille qui se voulait pure Corse à tous prix..Une grand mère orpheline soit disant descendante des Comtes de Paris et donc des Rois de France, élevée par une riche tante qui lui faisait boire une coupe de champagne chaque soir alors qu'en fait elle tenait tout "simplement" une maison close en Afrique(la tante pas la grand mère) (ce qui pour moi est un peu plus génant. Et on vous sert tout cela entre la poire et le café au crépuscule de votre vie (il était temps), merci la famille..
je suis d'accord avec Luca pour dire qu'il vaut mieux une famille nombreuse qu'une famille riquiqui pour varier les plaisirs..Qui a dit familles je vous hais...?

Citation :

familles je vous hais...

Gide par cette formule désignait les foyers clos, recroquevillés sur eux-mêmes. Ce qui nous ramène au beau billet de Luca sur Iván Böszörményi-Nagy, au-dessus de vos têtes 1er étage et à l'eloge d'une famille élargie, voire recomposée.

une expérience personnelle.

l'an passé, pendant une discussion en groupe sur Maggie o Farell, une jeune femme a dit bien connaître les secrets de famille : elle sortait d'un hopital psy où elle était resté 18 mois ; la raison ? son mutisme.

Il s'agissait d'une liaison quasi incestueuse et qu'elle avait surprise. Etourdiment, elle avait lâché ce qu'elle savait et précipité toute sa famille dans le chaos. Très perturbée, et culpabilisée, elle était devenue muette.

Son intervention qui lui a valu une écoute très attentive, montrait qu'elle était guérie puisqu'elle en parlait maintenant ouvertement. Nous avions beaucoup apprécié sa franchise et sa confiance. un grand moment d'échange, inoubliable pour moi.

On distingue deux types de secrets. Ceux de la vie courante, nécessaires à la préservation de l’intimité, qui permettent par exemple d’éviter de donner des explications qui pourraient être mal perçues. Ils sont très importants car ils nous permettent de nous protéger.

Et puis il y a les autres : les secrets de famille qui préoccupent, qui pèsent dans la vie familiale et, par ricochet, dans celles des descendants...

un entretien avec Serge Tisseron.

Quelques types de secrets recensés sur ce blog.