Ingeborg Bachmann [Autriche]

Ingeborg Bachmann dont on joue actuellement Tout au théâtre de gennevilliers ; une histoire de haine du geniteur pour son fils, thème qui ouvre Ouest de Vallejo que je suis à lire.

Cette Autrichienne a écrit Malina unique roman publié de son vivant (Seuil). Elle fut la compagne de Paul Celan. Elle mena lds combats féministes et pacifistes. Elle choisira l'exil en Italie pour fuir l'Autriche sur laquelle elle portait le même regard que Thomas Bernard.


Ingeborg bachman est peu connue en France à cause de traductions trop rares ou imparfaites de son oeuvre poetique notamment.
bibliographie

Depuis que j'ai entendu anselm Kiefer parler d'ingeborg Bachman, je me renseigne.

je viens d'emprunter le passeur, 12 petites nouvelles parues chez Actes Sud. Parallèlement je remets en vie le fil Paul Célan, vous saurez bientôt pourquoi.

Pays de brouillard

En hiver ma bien-aimée est
parmi les animaux de la forêt.
Qu’avant l’aube je doive rentrer,
la renarde le sait et rit.
Comme les nuages tremblent ! Sur mon
col de neige tombe
une couche de glace brisée.

En hiver ma bien-aimée est
un arbre parmi les arbres et
invite dans son beau branchage
les corneilles infortunées. Elle sait
que le vent, au crépuscule, soulève
sa robe du soir bordée de givre
et me chasse chez moi.


En hiver ma bien-aimée est
parmi les poissons et se tait.
Enchaîné aux eaux qui agitent
du dedans le fil de leurs nageoires,
immobile sur la rive, je la regarde,
jusqu’à ce que le sol me déloge,
plonger, tourner, changer.


Touché à nouveau par le cri de chasse
de l’oiseau qui raidit ses ailes
au-dessus de moi, je m’abats en plein
champ : elle plume
ses poules et me jette un bréchet
blanc. Je le mets autour de mon cou
et m’en vais par le duvet amer.

Infidèle est ma bien-aimée,
je sais que parfois elle plane
sur ses hauts talons vers la ville,
dans les bars elle pénètre les verres
de longs baisers profonds sur la bouche,
et trouve les mots pour tous.
C’est un langage que je ne comprends pas.

Le pays de brouillard j’ai vu,
le cœur de brouillard j’ai mangé.

Ingeborg Bachmann. Traduit de l’allemand par Françoise Rétif.

Je l'étudie en littérature allemande et d'ailleurs mon partiel portait sur elle, tout à l'heure... Un poème dont j'ai déjà oublié le nom (il faut dire que je l'ai trouvé assez mauvais) dont chaque vers commence par un numéro... Littérature des ruines!

Je me souviens d'un roman qui m'avait beaucoup marquée, publié je crois de façon posthume : Franza

Les nouvelles du recueil "le passeur" sont parfois inachevées ou des fragments de romans laissés en friche.

On trouve pourtant des nouvelles révélatrices des relations difficiles dans le couple comme le passeur ou le boiteux, ou d'autres, plus mystérieuses mais attachantes comme la boutique des rêves ou la caravane et la résurrection.

Dans la boutique des rêves une jeune femme s'attarde devant une devanture, puise hasarde dans le magasin. Le commerçant y vend des paquets qui éveillent des rêves chez qui les contemple. La jeune fille voit ainsi une de ses anciennes amies lui demander secours. Comment se procurer ce rêve ?

-

Citation :

"Vous comptiez peut-être payer en argent, mais vous saurez que nulle part vous ne trouverez de rêves payable en argent. Il faut payer en temps. Les rêves coûtent du temps, beaucoup de temps pour certains. Nous avons ici un rêve pour lequel nous demandons toute une vie".

Certaines nouvelles, radiodiffusées, sont particulièrement bien construites, et assez sombres. La caravane et la résurrection met en scène des défunts perdius dans leurs regrets egoïstes et auprès desquels un jeune enfant ne trouve qu'indifférence. Très étrange

Nymphéa a écrit:

Je me souviens d'un roman qui m'avait beaucoup marquée, publié je crois de façon posthume : Franza

oui, inachevé et publié après sa mort chez Actes Sud.

Histoire d'une femme de Carinthie, venue vivre à Vienne qui s'est laissé plagier par son mari psychanalyste.

Citation :

" A une époque où tous les gouvernants étaient menacés [...] un certain souverain tomba en proie à l'inquiétude et à l'insomnie. Il ne se sentait pas, à vrai dire menacé par son peuple.
La menace venait d'en haut, elle était liée à certaines exigences, à certains ordres inexprimés qu'il se croyait tenu de suivre mais qu'il ne connaissait pas."

Le sphynx pose trois questions, auxquelles le peuple doit répondre à ses dépens, pour la tranquillité d'esprit du Roi. On devine (avec un sphynx difficile d'être précis !) que les réponses seront fatales.

Citation :

tous ces auteurs sont ici et tes avis seront les bienvenus, en particulier pour moi sur Ingeborg bachman qui m'interesse par l'entremise d'Anselm kiefer

J'ai commencé Trois sentiers vers le lac, recueil de nouvelles d'Ingeborg Bachmann. Je crois que j'en attendais une certitude vision, un peu désespérée peut-être, quelque chose comme Irène Némirovsky allemande et moderne ! J'aime sa façon d'écrire le regard de l'autre, une parenté avec Paul Nizon peut-être pour décrire le parcours d'un personnage, dans un univers qui lui est parfois étranger.

Mon prochain livre d'Ingeborg Bachmann sera les Lettres à Felician Traduit de l'allemand par Pierre-Emmanuel Dauzat qui en a fait la préface chez Actes Sud.

En attendant, je lis la mort viendra, in le passeur, un texte inachevé dont je donne quelques extraits :

Citation :

« Dans nos fermes ou nos appartements de la ville, nos albums-photos se referment sur des morts, nouveau-nés parfois, ou sur notre cousin Ernest et notre cousin Mottl, le premier avait vingt ans, le second trente-deux, cousin par alliance ; ils sont morts sur un champ de bataille ou par surprise, pendant une promenade, près d’une haie d’aubépines, d'une balle perdue, on ne sait pas au juste. »

Citation :

« Vint une époque où [notre famille] eut ses nazis et ses antisémites, ses esprits confus, ses pilleurs et ses assassins, et en même temps elle eut ses victimes, et ce furent parfois les mêmes.. »

Citation :

« Taisons-nous ! Notre famille s’est répandue sur terre comme humanité au milieu de créatures étrangères, notre famille a rendu le monde incurablement malade »

pour Félician

Quand je pense à toi
C’est comme un rêve
Poche et lointain
Je ne sais trop.

Le brouillard se dissipe
Si tel est mon souhait
Et dans le tumulte
Le calme se fait.

Devant mes yeux
Ne demeure aucun nuage
Tout ce qu’il y a
Porte à l’amour.

[…]

Quand je pense à toi
Je ne sais trop.
C’est comme un rêve
Proche et lointain.


Lettres à Felician.