Je croyais Christian Garcin uniquement voyageur et relatant des expéditions avec des photographes pour faire rêver les sédentaires.
Point du tout ! ce Monsieur a de la plume, un regard à la fois malicieux et désabusé.
Si je prends le titre du recueil «
la neige gelée ne permettait que de tout petits pas », outre qu’il m’amuse, j’y vois un symbole de prudence, qui excuse ou souligne un excès de précautions.
La nouvelle-titre retentit de résolutions fracassantes, celle d’un homme résolu à tuer sa femme. Or ce caractère bien trempé consacre dans le civil son énergie à conquérir …des cantines pour vendre ses denrées alimentaires. Grande stratégie avec argumentaire à la clé.
La réalité est plus prosaïque : compte tenu des situations et d’un manque d’audace congénital à l’être humain, les grands pas ne sont pas faits, les grandes décisions se diluent dans le vague à l’âme.
Plusieurs nouvelles traitent du
départ (
Trois valises) : l’épouse en a assez des mots croisés, des réactions convenues du conjoint, elle prend la tangente…
D’autres fois, c’est le compagnon qui se fait jeter par sa copine et trouve refuge chez son frère : désir de trouver un «
autre monde », expression malicieuse qui, pour ce frontalier, consiste à passer de « l’autre côté de la frontière, ou à s’exiler au Québec, ou à« trépasser » ou, revendication métaphysique, à « aller au fond de l’inconnu pour trouver du nouveau ».
«
Fuite intérieure » aussi, selon l’expression de l’auteur, où la radicalité initiale se dilue (
Passez votre chemin ), où la décision prise est différée ou amoindrie, devenue, comme sur la neige, « un petit pas prudent ».
Le recueil donc une unité de thème, traité selon les cas, avec humour, légèreté ou…à votre guise.