Mikhaïl Boulgakov [Russie]

Mikhaïl Boulgakov, Les oeufs fatidiques, livre de poche.



Un rire "hénaurme" et subversif.

Le professeur Persikov, spécialiste des batraciens, découvre fortuitement un rayon rouge qui favoriserait la reproduction de ses amphibiens. Pendant ce temps, la peste aviaire fait des désastres dans le pays.(1) Plus de poules ! Un joueur de flûte reconverti en responsable de sovkoz décide d'appliquer à des oeufs de poule importés la méthode persikov : les résultats dépassent toutes les espérances .

Boulgakov a l'art de placer des personnage extravagants dans des situations burlesques, et les entreprises les plus louables deviennent ubuesques. Mais au-delà de l'anecdote comique, tout un système politique est mis à mal. La mégalomanie et l'incompétence des bouvard et pécuchet au pouvoir entraînent cafouillages et désastres.

Quand l'idéologie veut mettre la science à son service, on tombe dans les hérésies de Lyssenko !

http://www.sciencepresse.qc.ca/scandales/Lyssenko.html

(1) la peste ou la grippe ?

D'abord, il me semble avoir lu là l'un des plus fabuleux romans d'amour qu'il m'ait été permis de lire.
Un amour immense dans sa forme gnostique d'abord avec cet humanisme immense qui ressort de l'image de Yeshua Ha-nosri par Boulgakov, c'est vrai qu'il semble habité par une sorte d'amour absolu, dépouillé de tout préjugé et de tout jugement. Cet amour est présent aussi chez Ponce Pilate qui, bien que conscient de la latence de sa lâcheté, juge avec amour et contre l'avis général ce prophète-philosophe qu'il considère avec respect et admiration.
Un amour d'amants ensuite avec cette relation entre le maître et Marguerite, lui désirant fuir sa bien aimée pour ne pas lui faire subir l'outrage de pauvreté, elle prête à pactiser avec le diable pour revoir son bien-aimé dans ce petit sous-sol moscovite.
Et cet amour onirique effectivement, celui du pardon, de la réconciliation de la lune et des ténèbres, du maître et de Ponce-pilate, de Moscou et Jérusalem, de la vie et de la mort enfin au travers de Marguerite au bal de Satan qui somatise la douleur des damnés qui s'abaissent à la saluer.

Ensuite, j'ai trouvé dans Le maître et Marguerite une intelligence exceptionnelle; cette utilisation du fantastique pour mieux dénoncer l'absurdité d'un régime totalitaire. Boulgakov se sert à merveille de Woland et sa troupe pour dénoncer les maux de son pays: disparitions multiples (directeur des variétés, vanioukhova etc....) pour représenter l'arbitraire des arrestations, appels incessants de la milice pour signifier l'encouragement à la délation et le théâtre burlesque mené par Woland pour dénoncer la confiscation des biens appartenant à chacun; Woland, Koroviev, Azazello et le chat Behemot n'apparaissant-ils pas comme des formes diaboliques du pouvoir en place ?

Enfin, j'ai ressenti au travers ce roman que Boulgakov cherchait malgré tout à régler ses comptes avec lui-même ; cette fameuse phrase qu'il attribue à Ponce-pilate: "la lâcheté n'est-elle pas le plus grand crime qui soit ?" ne serait-elle pas pour lui sa façon de se punir des concessions faites à Staline ? (tel le remords de Ponce-pilate concernant Yeshua). Son oeuvre (que je ne connais que très superficiellement pour le moment) doit s'en affranchir puisque Nicolaï Ivanovitch lui glisse dans le roman que "les manuscrits ne brûlent pas!!"; et ces derniers attestent sans doute des véritables positions de Boulgakov.
Non, les manuscrits ne brûlent pas dans ce chef d'oeuvre et c'est bien là la seule chose qui ne subisse pas les ravages de l'ignition; le siège du Massolit, l'appartement n°50 de la rue Sadovaïa, le magasin des étrangers, tout est ravagé par le feu, symbole du roman mais les écrits restent et attestent de la pensée de Boulgakov.

Pour le maitre et marguerite

un vrai petit bijou ! drôle poétique ! Fantastique ! Et puis en fond ! une satire du système politique russe sous de nombreuses allégories !

Pour ma part je pense que c'est un livre à relire plusieurs fois et avec encore plus d'intérêt car il y a plusieurs angles de lectures! Vu aussi les références de Faust je vais le relire.

Dans Adam et Eve, pièce ecrite en 1931, et refusée par le theâtre rouge de Leningrad, l'auteur imagine la planète dévastée par une arme fatale.
Ne restent que six survivants, dont un homme et une femme -Adam et Eve, mariés le matin même, qui se terrent dans les bois.
On y trouve des personnages et des situations que Boulgakov développera dans le Maître et Marguerite.
La pièce est jouée au Théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis Jusqu'au 6 avril.

Boulgakov a également écrit une magnifique biographie romancée de Molière...Bon, il loue un peu trop Molière à mon goût, on voit vraiment qu'il le vénère (normal, me direz-vous, s'il décide d'écrire sur lui, mais c'est un peu trop appuyé). Cependant on se laisse véritablement emporter par l'écriture

Je me suis décidée à lire Le maître et Marguerite, et décidément je ne suis pas déçue:D . Aucun temps mort, on se passionne pour les personnages, et j'apprécie que ceux-ci changent lors de chaque chapitre; le roman garde un rythme vraiment excellent grâce à ce sytème.Et puis ce que dénonce Boulgakov en toile de fond est réellement effrayant...

LE MAITRE ET MARGUERITE :

Boulgakov travailla sans relâche durant dix ans sur ce livre et continua à corriger inlassablement les pages dactylographiées jusqu'à sa mort ! Ce roman est écrit sur deux plans, l'un historique (Ponce Pilate procurateur de Judée qui juge Jésus) et l'autre qui montre le Moscou des années vingt avec une galerie de personnages... ceux-ci sous l'emprise de Satan qui se grime sous les traits de Woland, accompagné d'un échalas à lorgnon fêlé (Fahoth) et un gros chat qui parle et marche comme un homme (Béhémoth).

C'est difficile de commenter une oeuvre pareille... c'est une allégorie de Faust, un Moscou qui se meurt et qui se ridiculise ; fiction, poésie, satire, crimes, illusions, manipulations, tentations, perversités... Woland joue avec tous les acteurs qui peuplent ce monde socialiste en perte de vitesse. Ce livre est un écrin.

" le maitre et marguerite", avez-vous lu ce roman? j'ai beaucoup aimé, je trouve qu'il s'est beaucoup inspiré de Faust de goethe en adaptant la piece de theatre en roman et en l'étoffant.
Si vous aimez les histoires mêlant surnaturel, amour, le tout superbement écrit, n'hesitez pas !!!

Moon : J'ai fusionné les deux sujets étant donné qu'on avait déjà un fil sur Boulgakov.

je suppose qu'il s'agit du 1er Faust. Eh non, je n'ai pas lu le maître et marguerite, et tu as raison de signaler ce titre.

Bienvenue à toi, louiseattack :

si tu veux que les grains te connaissent et te disent un petit mot viens ici : ce n'est pas obligatoire mais pratique pour devenir une "bonne graine" (rire).

J'ai suivi ton conseil, il faut faire les choses dans le bon ordre

louiseattak a écrit:

" le maitre et marguerite", avez-vous lu ce roman? j'ai beaucoup aimé, je trouve qu'il s'est beaucoup inspiré de Faust de goethe en adaptant la piece de theatre en roman et en l'étoffant.
Si vous aimez les histoires mêlant surnaturel, amour, le tout superbement écrit, n'hesitez pas !!!

"Le maître et Marguerite" est tout simplement formidable. Il s'est certes beaucoup inspiré de Faust, mais l'oeuvre est bien loin d'une simple relecture du mythe. C'est un chef-d'oeuvre à part entière

Il est certainement un des plus beaux livres que j'ai pu lire, riche d'humour, de critique politique, d'amour, de colère, d'envie de se battre.
Boulgakov a mis plus de 10 ans à l'écrire dans une atmosphère politique qui a tenté de le bâillonner, il semble y avoir mis tout l'amour qu'il porte à la Russie et toute sa résistance politique et humaine.
Il suffit de lire l'absurdité des diverses disparitions, les internements et l'impunité dont jouissent Woland et son aréopage dantesque pour le rapprocher de la situation politique en vigueur dans le pays.

Mais c'est aussi une superbe histoire d'amour.

Voilà, voilà, tout ça pour dire que je suis d'accord avec toi, très bon livre.
Par contre Faust, que j'ai tenté de lire dans la foulée enthousiasmée que j'étais par les similitudes entre les deux oeuvres...pfou j'ai pas réussi à passer la quarantième page !

cafeine a écrit:

Par contre Faust, que j'ai tenté de lire dans la foulée enthousiasmée que j'étais par les similitudes entre les deux oeuvres...pfou j'ai pas réussi à passer la quarantième page !

Si tu butes sur le premier Faust, n'essaie pas le second qui est beaucoup plus difficile : une pièce qui n'a jamais été montée, c'est dire...

Je n'ai pas encore lu Le Maître et Marguerite (encore un des nombreux livres au programme...), mais par contre, j'ai lu il y a des années Le Roman de monsieur de Molière.

J'avais adoré. Je me souviens d'un livre drôle, écrit avec allant et ironie, et de surcroît assez juste quand à la vie même de Molière. Certes, la vision est romancée, les personnages sont hauts en couleur, le narrateur brode un peu, mais cela n'en demeure pas moins une belle apologie de notre illustre dramaturge, à la hauteur de son talent, et un ouvrage que je conseille vraiment pour un très agréable moment de lecture.

Rotko a écrit :

Citation :

cafeine a écrit:

Par contre Faust, que j'ai tenté de lire dans la foulée enthousiasmée que j'étais par les similitudes entre les deux oeuvres...pfou j'ai pas réussi à passer la quarantième page !


Si tu butes sur le premier Faust, n'essaie pas le second qui est beaucoup plus difficile : une pièce qui n'a jamais été montée, c'est dire...

Non, après analyse mon rejet de Faust tiendrai plus aux heures de torture vécues grâce aux "Leiden des jungen Werthers" dans le texte siouplait et au souvenir cuisant que j'en garde qu'à Faust lui-même !

Donc encore quelques années pour oublier mes souffrances estudiantines et je m'y remets.

Quelques mots sur La garde blanche
J'ai lu ce roman (2 fois) et si l'écriture est parfois surprenante et demande un peu d'efforts au début c'est un bouquin plein d'humour , d'invention et surtout, il nous fait ressentir le vent chaud de l'histoire. Il nous plonge à l'intérieur de la slavitude de l'époque.
Je suis peut-être mal placé pour le défendre car il m'a aussi touché d'un point de vue personnel (Kiev, la révolution, les Cadets "blancs"...) .
Je l'ai chez Laffond mais il est encore dispo en pocket

Sur la photo de l'avatar c'est mon grand-père en 1905 à Kiev avant qu'il n'intègre les cadets de la garde blanche, qu'il se fasse rejeter à la mer (noire) par les rouges et qu'il finisse en France dans un trip méga-réac-faf spécifique aux Russes blancs me semble-t-il

Je rejoins Leutchi pour son commentaire de La garde blanche.
C'est un livre à apprivoiser car le style de l'auteur est particulier. Le livre se réfère continuellement aux grands écrivains russes: Dostoïevski, Gogol, Tolstoi.......
C'est un roman très riche et surprenant. J'aime beaucoup
Je n'ai pas fini de le lire mais je suis déjà conquise!

J'ai lu cinq livres cet été de Boulgakov.
C'est mon coup coeur de l'été! (avec Anais Nin).

J'ai donc lu:
- La garde blanche
-la vie de Monsieur de Molière
- Le roman théâtral
- Le maître et Marguerite

Dans la garde blanche, j'ai beaucoup apprécié la manière dont l'auteur, par un jeu subtil, nous transporte dans les rêves et délires des personnages. C'est époustouflant.
Boulgakov a un style très vivant. On a vraiment l'impression de regarder en coulisse l'histoire.
Je me suis bien amusée avec le Maître et Marguerite: L'histoire du diable et ses amis qui font des tours aux autres.
J'ai lu ensuite les contes du hameaux de Gogol (très bien avec pleins de références à d'autres auteurs russes) et la thématique de Satan est apparemment un thème majeur dans la littérature russe.

J'ai moyennement apprécié la vie de Monsieur de Molière. J'ai la biographie romancée assez plate, mise à part le prologue.

Et qu'as-tu pensé du Maître et Marguerite ? C'est un de mes livres favoris, il est époustouflant
Je suis de ton avis concernant Le roman de Monsieur de Molière; je me souviens qu'il l'appelait souvent "mon héros", ce que j'avais toruvé assez agacant à force .

Citation :

Et qu'as-tu pensé du Maître et Marguerite ? C'est un de mes livres favoris, il est époustouflant

J'ai beaucoup aimé mais je préfère la garde blanche. J'ai un peu de mal avec les histoires "fantastiques". Cependant, je me suis bien amusée, surtout avec Marguerite devenue sorcière. L'histoire est bien construite.

Le maitre et Marguerite est le livre préféré de mon épouse(qui est russe). Je l'ai donc lu, et j'ai beaucoup apprécié!

On se rend compte du non sens du régime de l'époque, surtout que la version que j'ai lu souligne tous les passages qui ont été censurés puis remis dans le texte.

"Le maitre et Marguerite" est un de mes livres guides, livres-criteres, depuis 30 ans. Un roman pareil, dans un pays communiste comme le mien - c'etait sensationnel! L'ordre social n'admettait pas le fantasmes dans l'ecriture, ni certains periodes de l'economie russe apres la Revolution dont Boulgakov se moque dans ce roman.
Dans ce roman, il y a de l'alchimie, il y a le diable, l'ange agrdien, le mystique un peu naif, le social, tant de plans!
Bizarre, la premiere fois que j'ai lu Murakami ("Kafka sur le rivage"), il m'a rappele ce roman de Boulgakov et comme c'est "mon truc", je continue de lire Murakami.
Boulgakov pour moi, est un ecrivain, tres meritable, l'avenir nous dira a quel point.

"Maitre et Marguerite", un vrai bijou!
J'ai pris le nom d'un des personnages du livre comme pseudo...
Mais sinon, personne n'a lu "Coeur de chien?"
Un excellent livre plein d'humour, je le considère comme un des meilleurs oeuvres de la littérature russe.

Mais si, je l'ai lu "Vie de chien" et Cleo aussi d'apres ce que je vois plus haut! C'est une critique impitoyable de la folie de l'epoque de Boulgakov (de Staline).
Ce livre, qualifie de trop sulfureux" a ete censure en 1925, au moment de sa pubblication.
C'est un roman emouvant aux larmes en decrivant la souffrance et l'angoisse, mais on pleure de rire aussi car l'humour noir de Boulgakov est incroyable!