Onetti - [Uruguay]

Demain sera un autre jour

Les petits livres du serpent à plumes, 10 cm sur 7, faciles à glisser dans la poche (je parle de voyage, pas de chourave !) hébergent Onetti avec des nouvelles minuscules de 2 à 3 pages, le temps d'un sourire avant de faire dodo.

Demain sera un autre jour, justement la scène de coucher de la Sonia : il la révèle dans sa vérité, non sans humour.

Le Savon, ou l'odeur du savon, seule certitude du narrateur sur son étrange compagnon ou compagne

Une mention spéciale pour le chat

Le narrateur ramène sa copine à son appartement, bon signe !, elle n'y était jamais venue

surprise du chef : un chat inattendu !

Citation :

Au beau milieu du lit recouvert d'une courtepointe de demoiselle, un grand et gros chat noir. Un chat que je voyais pour la première fois et qui semblait avoir l'habitude de venir ronronner en cet endroit. Les pattes repliées sous la poitrine, il nous a jeté un regard curieux avant de refermer les yeux.

Ki no Tsurayuki

Cette nouvelle raconte les plans de campagne d’Andrade désireux d épouser de riches veuves.. Il avait puisé cette idée

Citation :

« dans la lecture d’un conte poétique de l’écrivain japonais Ki no Tsurayuki publié en 905 et traduit au XXe siècle dans les langues barbares.
Le poète prétendait avoir visité un cimetière dans lequel il avait vu une jolie petite japonaise accroupie qui agitait inlassablement, un grand éventaill sur la terre d’un tombe.

Poussé par la curiosité, mère du savoir et de la poésie, Ki no Tsurayuki s’était approché de la jeune fillette, après avoir fait les trois révérences d’usage, s’était risqué à l’interroger. Aussi bien sans avoir eu besoin de recourir aux mots, avec uniquement l’air interrogateur de son visage.

La fillette - toutes les jolies femmes traversent les années comme d’éternelles adolescentes - mit un terme au va-et-vient de son poignet, leva les yeux tout en arborant un sourire nippon hésitant et figé. Puis elle dit avec tristesse :
« Mon mari m’a fait jurer sur son lit d e mort, d e lui rester fidèle tant que la terre de sa tombe serait humide. Et l’automne a été très pluvieux »

A une tombe anonyme

Un jeune garçon de bonne famille paie l'enterrement d'une pauvresse. A cet enterrement il est seul, trainant un vieux bouc.

Au fil des rencontres entre le narrateur qui se trouvait là par hasard et le jeune Jorge, on va comprendre l'histoire de ce jeune garçon et de cette femme morte. L'histoire ou plutôt les histoires, car dans cette ville imaginaire d'Amérique du sud, rien n'est totalement vrai.

Un peu de fantastique et de poésie, beaucoup de nonchalance et d'observation dans ce court roman d'Onetti.

Quand plus rien n'aura d'importance


On reconnaît les auteurs sud-américains entre 1000 !

Il y a cette indolence, cette pesanteur, voire cet écrasement solaire qui plombent complètement l'ambiance. On ne rigole pas beaucoup avec ces gens là.

Le narrateur s'installe dans un bled qui a valeur de symbole. Un de ces no man's lands poussiéreux, déserts et arides où l'on croise quelques égarés de la vie. Des pauvres, des alcooliques, des brutes, des paumés.

Tout ça fait des gosses, se hait ou se détruit et la vie coule, coule, coule comme du bronze. Métallique, épaisse et sombre.

On est installé dans une sorte d'éternel présent abrutissant et pourtant sublimé par l'écrivain.

Ca ne donne pas le moral mais ça emmène loin d'ici, vers un coin où l'humanité minable et empesée tente de survivre.

Un bon auteur, assurément.