Horacio Quiroga - [Uruguay]

Il n'y a pas encore de fil, il me semble, sur cet auteur. Je me lance puisque depuis des mois je monopolise l'exemplaire de Contes d'amour, de folie et de mort d'Ekwe.
Comme il m'arrive souvent de le faire avec un recueil de nouvelles, je lis les différents récits dans le désordre.
Pour le moment : La poule égorgée, A la dérive, Notre première cigarette, L'oreiller de plumes, Le miel sylvestre, Les bateaux suicide, La mort d'Isolde, Une saison d'amour.

Les deux premiers récits (La poule égorgée et A la dérive) m'avaient bien plu mais sans toutefois m'enthousiasmer plus que ça.
Celui qui m'a surpris par sa force, sa finesse c'est Notre première cigarette.

Quiroga retranscrit parfaitement cette malice à la fois sérieuse, pleine d'innocence et parfois cruelle des enfants. Le sentiment d'injustice aussi. Et puis ce désir d'avoir son abris secret, de faire des expériences hasardeuses. Ainsi que la complicité entre un frère et sa soeur. D'autre part, une chaleur moite imprègne chaque phrase, nous transportant derrière les grands roseaux et dans cette végétation verdoyante ().

Un extrait que j'aime bien, mais si je m'écoutais je vous taperais toute la nouvelle :

Citation :

- Hum !... Me frapper ! marmottai-je, toujours sous les feuillages. Alors je me levai prudemment, je m'accroupis et pris la pipe bien à l'abri entre les feuilles. C'était le moment de consacrer tout mon sérieux à achever la pipe.
La fumée de ce tabac humidifié, séché, et encore humidifié et séché un nombre infini de fois, avait à ce moment-là un goût de piment, d'élixir de Coirre et de suflate de soude, beaucoup plus agréable que la première fois. Je me lançais, cependant dans la tâche que je savais dure, le sourcil froncé et les dents crispées sur le tuyau.
J'ai dû fumer, je voudrais le croire, un quart de la pie. Je me souviens seulement qu'à la fin les roseaux devinrent complètement bleus et commencèrent à danser à deux doigts de mes yeux.

J'ai ensuite enchaîné avec L'oreiller de plumes, autre nouvelle qui m'a époustouflée. Mais là dans un tout autre registre. A la fin, j'étais complètement tétanisée. La dernière image m'a trotté dans la tête un bon bout de temps.

Je vous épargne le récit des autres nouvelles. Néanmoins, Ekwe, je crois que tu vas attendre encore un tout petit peu, le temps que je finisse, avant que je te rende ton livre.

traduit par frederix chambert.

Moon, tu es une bonne "vendeuse", j'ai toujours envie de lire ce dont tu parles !

J'ai toujours l'impression d'être extrêmement vague et de lancer des mots à l'emporte-pièce, mais si je donne envie de lire mes lectures !

Prends ton temps et savoure!

Spoiler:

J'ai moi aussi une faiblesse particulière pour Notre première cigarette, et pour la dernière nouvelle du recueil, La méningite et son ombre. Rotko parlait un jour au bar du bonheur qu'il y a à se laisser terrasser par la fièvre, il me semble que c'est en rebondissant sur ses propos et sur tes moqueries que je t'ai proposé le recueil.

ekwerkwe a écrit:

il me semble que c'est en rebondissant sur ses propos et sur tes moqueries que je t'ai proposé le recueil.

Mes moqueries ? Non. C'était une gentille taquinerie.
Sinon je garde La méningite et son ombre pour la fin justement à cause de ça.

les exilés, d'horacio Quiroga, chez métailié

Ils mènent des drôles de vie, les personnages de quiroga : une vie d elabeur avec l'espoir de retouner mourir au pays (les exilés), ou une fréquente cohabitation avec lamort qui façonne leur corps :

"Van Houten... était belge, d'origine flamande ; on le surnommait parfois ce-qui-reste-de--Van-Houten, car il lui manquait un oeil, une oreille et trois doigts de la main droite. Il avait une orbite vide, bleuie par la brûlure de la poudre. C'était un homme de petite taille, très robuste, au visage envahi par une barbe rousse broussailleuse. Sa chevelure, tout aussi rousse, couvrant de mèches grasses un front étroit.
Il roulait les épaules en marchant, et il était surtout très laid, d'une laideur évoquant celle de Verlaine, dont il partageait presque lapatrie, car Van Houten était né à Charleroi."

Avec un tel physique, on s'attendrait à ce qu'il périsse dans la poudre ou les flammes. Ca a bien failli !
mais la mort n'en voulait pas. Sans doute qu'elle avait d'autres projets (Van Houten).

Difficile de dire si c'est l'auteur ou le destin qui a de l'humour : ainsi pour cet homme à la machette qui, couché dans sa"position préférée", dans une "confortable position" attend...

"Du chalet au toît rouge sortiront sa femme et ses deux enfants, qui viendront le chercher pour le repas de midi. Il entend toujours, avant celle des autres, la voix de son plus jeune enfant, qui veut se libérer de la main de sa mère : Papilou ! Papilou !"

(L'homme mort.)

Je vais peut-être lire son livre Anaconda quelqu'un l'a lu ?

Chaque nouvelle de Anaconda est un labyrinthe hallucinant dans lequel l'homme se débat contre la mort et où le lecteur est aux prises avec l'effroi, la surprise et l'humour. Dans la lignée de ceux de Poe et de Maupassant, ces contes nous entraînent dans un univers obsédant où le danger de la forêt tropicale, peuplée de reptiles et d'animaux étranges, domaine des fièvres et de la chaleur asphyxiante, s'unit aux menaces de la folie des ombres et des cauchemars.

Citation :

Je vais peut-être lire son livre Anaconda quelqu'un

oui, ça me rappelle quelque chose, mais c'était avant la création de GDS* (2005)