Judy Blundell, Ce que j’ai vu ...

Judy Blundell, Ce que j’ai vu et pourquoi j’ai menti, Gallimard-Jeunesse.

1/2

National Book Award 2008 aux Etats-Unis.

Elle n’est sans doute pas aussi jolie que sur la couverture, mais sa mère est « canon », et Joe, le compagnon du moment, a une sacrée allure. Evie, en tout cas, sait raconter, on aime son récit : c’est comme du cinéma, pour qui regarderait les images glamour sans percevoir les dialogues glaçants.

Car derrière l’adolescente qui rêve d’un prince, on voit d’agiter des personnages aux les belles manières mais non sans menace : la promenade en Californie, à Palm Beach, mais hors-saison, ne serait-elle pas une cavale pour fuir des règlements de compte ?

Evie, 15 ans, vit dans sa bulle comme dans cette scène de bal où elle attend un beau cavalier :

Citation :

« Un garçon me remarqua.
C’était le moins séduisant de la salle, laid comme un pou, une tête de fayot, le type qui n’invite aucune fille à danser parce qu’il sait qu’il va se prendre une veste […]
Il y avait pire que de ne pas être invitée à danser : être invitée par un mauvais cavalier. »

Fais gaffe, Evie, tu es prisonnière d’un miroir aux ombres peu reluisantes.

Judy Blundell, Ce que j’ai vu et pourquoi j’ai menti, Gallimard-Jeunesse.

2/2

Les intrigues des adultes passent au-dessus de la tête d’Evie qui, pourtant, s’y trouve sentimentalement mêlée. C’est à mon avis tout l’intérêt de ce livre : nous transmettre une histoire dans un miroir déformant, par l’intermédiaire d’une fillette crédule dont on comprend bien les réactions. Petit à petit ses yeux vont s’ouvrir sur les drames en cours et les personnages qui lui sont proches : la douleur est grande, mais la volonté d’y voir clair et d’assumer sa propre personnalité convainquent le lecteur

Un beau récit donc, où la dupe, jamais ridicule, joue finalement un rôle intéressant. Non dénué de suspens !

Initialement destiné à des lecteurs adolescents, ce livre convient aussi à des adultes qui apprécient une écriture sobre mais piquante, et une économie de moyens. Une réussite, à mon avis.

Pendant l'échange pour le prix des lecteurs, on a noté l'importance du cinéma, celui auquel renvoient les images du livre, les acteurs, actrices, et "le cinema" que se fait la fillette.