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 Léonora Miano [Cameroun]

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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyDim 17 Sep 2006, 21:54

Ce premier livre a été remarqué! Voici les Prix qu'il a reçus:

http://www.prix-litteraires.net/detail_prix_auteur.php?auteur=1151_Leonora_Miano

C'est un livre qui m'aura marquée...
J'ai bien l'intention de lire celui qui vient de sortir "Contours du jour qui vient", mais avec une certaine appréhension car le récit doit être encore violent, tout au moins j'en ai peur.
En Afrique équatoriale, un pays dévasté par la guerre. Une petite fille le fuit, chassée par sa mère, folle. Un chemin semé des pires embûches...et puis le passage de l'ombre à la lumière...
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyJeu 05 Oct 2006, 20:17

un extrait de ce nouveau livre dans Lire du mois dernier
http://www.lire.fr/extrait.asp/idC=50296&idTC=13&idR=202&idG=3
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyLun 26 Mar 2007, 16:13

Leonora Miano, Contours du jour qui vient, Plon

Réquisitoire contre l’Afrique.

A la mort de son père, Musango est, sur les conseils d’une voyante, chassée de sa famille par sa propre mère qui la croit possédée du démon, devant toute l’assemblée du village. Elle échappe de peu à l’immolation par le feu. Mais elle est battue comme plâtre.

Les autres membres de la famille ne veulent pas d’elle, et dans ce « sans famille » africain, elle va connaître tous les fléaux : les enfants soldats, les arnaques spirituelles à but lucratif, la traite des femmes, etc.

Méchanceté et sottise semblent être les « valeurs » les plus répandues.

Musango, en narratrice, adresse de cruels reproches à sa mère, tout en imaginant que sa génitrice elle-même, est à son tour chassée et spoliée. Les autres filles qu’elle rencontre « feront la France », sur les trottoirs.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMar 27 Mar 2007, 04:44

Léonora a la main lourde, la culpabilité est collective :

Citation :
Dans bien des cas, c’était la population du quartier qui scellait le sort de l’enfant banni, sitôt qu’il se trouvait dans la rue. Elle lui faisait passer publiquement des tests. Quelqu’un lui mettait un bout de paille dans la bouche et lui disait : Si tu es un sorcier, ce bout de paille s’allongera. Pris de peur, doutant tout à coup de sa propre nature, le gamin mordait naïvement sa brindille, pour s’assurer qu’elle ne s’allongerait pas. Les adultes s’exclamaient alors : Tu es un sorcier pire que ce que nous pensions ! Tu as raccourci la paille ![…]

Lorsque les épreuves avaient confirmé son essence démoniaque, l’enfant subissait des sévices supposés déloger le mal. Cela durait plusieurs jours. Certains prenaient la fuite. Beaucoup mouraient. D’autres finissaient par croire qu’ils étaient réellement les jouets du Mal et méritaient leur châtiment. Respectueux de leur hiérarchie, ils ne songeaient pas à mettre en doute la parole des adultes.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMar 27 Mar 2007, 16:34

On voit que le procès s’adresse à la collectivité, et l’Afrique toute entière devient l’objet du réquisitoire :

Citation :
Ici, c’est chacun pour soi. Un enfant peut devenir le pire ennemi de ses parents sans même le savoir. Il n’y a plus de vraiment de communauté, papa avait raison. Les gens vivent les uns près des autres, mais pas ensemble. Ils s’épient, se jalousent passionnément et demeurent côte à côte par une habitude plus grégaire que solidaire. C’est cela que nous appelons les valeurs ancestrales de notre peuple : la solitude de groupe.

Plus loin une femme d’origine antillaise dit ce qu’elle pense de son mari, représentant typique de l’Africain.

Citation :
Il suffit de bomber le torse et de parler d’une voix forte pour impressionner le petit peuple. Il n’y a qu’à prétendre qu’on veut accomplir quelque chose pour s’imaginer que c’est fait. C’est tellement facile d’être un homme en Afrique.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMar 27 Mar 2007, 17:44

Là je ne répondrai pas sur le sujet car ma fille a un mari africain, donc j'ai un gendre noir et des petits enfants métis adorables, mais je connais la culture de ce pays, et le prix des mariages mixtes.

Et je ne veux pas me prononcer c'est mieux. no
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMar 27 Mar 2007, 18:02

Je crains que Leonora Miano ne se lance dans une littérature "à effets", c'est-à-dire qu'elle accumule les scènes d'horreur et les jugements dépreciatifs.

Son ton est dur, et j'aurai l'occasion d'y revenir.

Je ne trouve pas cette âpreté du style chez Mabanckou, et il sera interessant de comparer les deux visions et les deux écritures.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMer 28 Mar 2007, 04:57

Tout n'est pas au point chez Leonora Miano : si la construction de ses romans en plusieurs fils est littérairement intéressante, l’accumulation des horreurs plombe le récit :

Citation :
Dans la maison d’Aïda, il y avait plein d’enfants comme moi. Certains avaient été recueillis leur naissance. Ils s’étaient présentés par le siège, et la coutume voulait qu’on leur fracasse le crâne sur le tronc d’ arbre. Ils avaient été trouvés agonisant au fond d’un caniveau, recouverts d’ordures.

D’autres avaient fui les mauvais traitements ou étaient handicapés et inutiles. Enfin tous avaient de bonnes raisons d’être là, et c’était peut-être ces raisons qui poussaient ceux qui les avaient mis au monde à se masser dans les temples. Ils incarnaient les échecs de leurs géniteurs. Ils étaient la ruine et la destitution faites chair.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMer 28 Mar 2007, 15:45

Contours du jour qui vient.

On peut aussi trouver des invraisemblances : comment une fillette de 12 ans, en mauvais état, peut-elle prendre la parole dans une assemblée religieuse et tenir ce discours !

Citation :
Monsieur Colonne, pouvez-vous me dire exactement les Africains ont abandonné le culte de leurs ancêtres et les offrandes faites aux esprits ? Il m semble qu’ils ont toujours pratiqué le mélange de la foi Chrétienne et de leurs religions ancestrales. En quoi diffère-t-elle de ces habitudes ?

Dans sa lancée, elle raconte toute son histoire, retournant l’assemblée des fidèles en sa faveur. Ce récit tient toute la page 115 !
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMar 15 Jan 2008, 06:44

Un nouveau leonora Miano chez Plon

Tels des astres éteints"
est construit comme un album, entre musique soul et jazz. Un intro, cinq parties, et un "outro".

La structure est construite autour de cinq thèmes de jazz : "Afro Blue", "Straight Ahead", "Angel Eyes", "Round Midnight" et "Left Alone". De Thelonious Monk à Billie Holiday en passant par Abbey Lincoln, donc.

On chantera aussi Bashung, Curtis Mauyfield, Grand Master Flash, Bobby Womack.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMer 11 Juin 2008, 14:54

A propos d' Afropean Soul et autres nouvelles flammarion,Leonora Maino dsiat dans un entretien confié à Africultures :

Citation :
Je suis un auteur d'expression française, mais de culture africaine et afro-américaine, les Caribéens étant eux aussi des Américains. J'écris dans l'écho de toutes les cultures qui me composent. Le jazz et la soul m'influencent beaucoup, dans la structuration des textes ou dans le rythme.

Pour comprendre cela, il faut s'intéresser à ces genres musicaux. Cela me semble complexe à expliquer ici, et je rechigne un peu à décrire mon processus créateur : ce n'est pas un travail scientifique, et je ne suis pas un être cartésien…

La soul est un art vocal. Il n'y a pas de soul instrumentale. C'est une esthétique brute et excessive. Je cherche à m'en rapprocher par un phrasé particulier, qui demande souvent une ponctuation peu orthodoxe. Je suis en quête d'un souffle soul, plein d'aspérités, porteur de vérité parce que distant d'une esthétique trop léchée. Dans la cadence des phrases, j'aime à me rapprocher d'une rythmique lourde, qui serait, en musique, celle des fréquences basses sur lesquelles la soul et les musiques noires urbaines reposent. Le jazz est une musique urbaine.

Ce qui m'intéresse dans le jazz, c'est la circularité (la structure basique, dans ce genre, est : AABA), la répétition de motifs, le maintien d'une tension sans nécessaire résolution (même si cela ne s'applique pas à tous les thèmes de jazz qui peuvent avoir une vraie fin), la présence d'un intertexte (2) précis, comme ces musiciens de jazz qui glissent, en jouant un morceau, des phrases musicales tirées d'autres chansons. Comme eux, je travaille sur une structure définie à l'avance, qui me permet d'improviser sans m'écarter de l'histoire. En jazz, c'est sur une grille d'accords que l'improvisation se fait.

La langue française, telle que je l'écris, est matinée d'africanismes, d'anglicismes, de créolismes
.

Spoiler:
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMer 23 Juin 2010, 05:39

J'ai beaucoup aimé "Contours du jour qui vient" et "Tels des astres éteints" pour la richesse d'écriture et d'évocation. Il y avait longtemps que je n'avais pas croisé un style aussi riche et fort.
J'ai été moins convaincu par "les aubes écarlates", un peu l'impression de redites.........en moins bien.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMer 23 Juin 2010, 05:55

Je relis les posts et je viens de voir qu'il est question de Mabanckou. Je viens de terminer "les petits fils nègres de Vercingétorix", et je m'étais également dit qu'il y avait des correspondances dans les thèmes, mais pas dans le traitement des thèmes.

Mabanckou écrit de façon plus classique que Léonora Miano, et plus légèrement aussi. Par plus légèrement, je veux dire que je trouve son style moins riche, moins fort, moins original.

Léonora Miano est plus dans la colère et la revendication, mais me semble, plus proche d'une langue africaine (pour ce que j'en ressens.)
Mabanckou me semble plus "colonisé".

J'ai apprécié les deux auteurs, mais avec une préférence certaine pour Léonora Miano.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMer 01 Juin 2011, 13:44

Je viens de dévorer finir Blues pour Elise.

Beaucoup apprécié, donc.

Car l'auteur brode sur plusieurs niveaux de lectures, malgré une histoire apparemment simple.

L'Afrique, évidemment. Ses traditions, ses complexes, sa prégnance pour celui qui y est né. Un portrait très nuancé par l'auteur.

On suit les aventures sentimentales et familiales d'une famille (Elise étant la mère) et de diverses amies. Toutes différentes de tempérament, d'opinions...

Elise a eu deux filles, traitées très différemment et on apprendra pourquoi en fin de livre où le retour à cette "culture" Africaine retentit comme un coup de poing en pleine face.

Des thèmes très contemporains s'imbriquent. Comme l'homosexualité en milieu Africain. Milieu aux codes virils et bien affirmés. Le chômage, les études, le logement, etc...(tout se passe en France, en gros dans le 2è et le 10è arrondissement).


Mais également, la solitude, la difficulté de la communication (communion ?) amoureuse, etc...


Vraiment, Miano est à lire pour sa lucidité, son absence de parti pris, une belle objectivité dans la description des deux mondes : occidentaux et subsaharien.

Et plus que tout : une très grande sensibilité.


I love you
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMar 23 Aoû 2011, 05:38



Léonora Miano publie, Ces âmes chagrines 280 pages (Ed. Plon).

On y rencontre Maxime et Antoine, deux frères antinomiques qui semblent incarner la version moderne de l'épisode biblique d'Abel et de Caïn.

Né d'un viol au Mboasu, sans papier, Maxime dépend de son frère Antoine pour travailler et pour survivre. Antoine, lui, "est le roi de la magouille", "un égoïste, un "fruit sec" qui rêve de mannequinat et de paillettes".

Un jour, dans ce pays africain imaginaire dont Léonora Miano a déjà foulé les faubourgs, Antoine est promu. Sa banque l'envoie diriger l'une de ses succursales, lui offrant ainsi une liberté inespérée, qui bouleverse l'ordre familial établi.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMar 01 Oct 2013, 14:44


Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 Mi13

« Si leurs fils ne sont jamais retrouvés, si le ngambi ne révèle pas ce qui leur est arrivé, on ne racontera pas le chagrin de ces mères. La communauté oubliera les dix jeunes initiés, les deux hommes d'âge mûr, évaporés dans l'air au cours du grand incendie. Du feu lui-même, on ne dira plus rien. Qui goûte le souvenir des défaites ? »

Léonora Miano revient sur la traite négrière pour faire entendre la voix de celles et ceux à qui elle a volé un être cher;

Citation :
On oublie ces millions d'anonymes à qui quelqu'un a été arraché. Lesmères. Les promises. Les fiancés. Les frères. (...) Tout est devenu tellement abstrait qu'on ne semble plus se souvenir que c'est sur des êtres humains que cette horreur a fondu.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyDim 27 Oct 2013, 16:24

Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 Mi11

je préfère ceux qui mettent lespieds dans le plat au silence conformiste et douillet (dans tous les sens du mot )

La Saison de l’ombre, par Léonora Miano, Grasset, 240 p.,

En ce qui concerne la traite, ce n’est évidemment pas parce que des subsahariens y ont participé que ça minore la culpabilité occidentale. Les Européens n’avaient pas à traiter des humains comme des animaux. Que chacun prenne ses responsabilités. Et nous, Africains, devons affronter nos propres ombres et réfléchir à notre histoire.

Par exemple, il existe au Cameroun d’importantes inimitiés tribales qui datent de la traite. Les gens de l’ouest savent que les populations côtières sont venues capturer les leurs. Ça explique la férocité surréaliste des rapports entre les Africains.


l'article
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMer 25 Déc 2013, 16:26


La saison de l’ombre de Léonora Miano, chez Grasset,

1/

Parler de l’esclavage en termes économiques, avec des statistiques, ou des itinéraires maritimes, n’est-ce pas le rendre cohérent, compréhensible, même si moralement et humainement inacceptable ?

Une autre manière serait d’en faire une aventure mélodramatique, une équipée maritime, au besoin avec une mutinerie, où les futurs esclaves suivront en aveugles un voyage dont le lecteur connaît le point de départ et le lieu d’arrivée, les tenants et les aboutissants.

Tout cela a été fait par des historiens, des romanciers, des cinéastes, tout ce trafic humain est raconté à loisir par des conférenciers.

L’exergue/dédicace de « la saison de l’ombre » indique un autre angle d’attaque :

Citation :
« Aux résidents de l’ombre, que recouvre le suaire atlantique.
A ceux qui les aimaient. »

Tout est vu de l’intérieur du village, il prend des mesures d’urgence pour survivre, ne pas succomber à la sidération devant l’inexplicable.

Citation :
Sitôt après l’incendie, des décisions ont été prises, qui visaient à effacer les traces du drame. On n’en a pas parlé. On n’ a pas su quoi dire.

La tragédie cherche un chœur : Ce seront les femmes qui, au cours de l’incendie nocturne, ont perdu leurs premiers-nés.

la survie du groupe, voilà ce qui importe :

Citation :
Ces femmes sont comme les veuves, qui ne sont autorisées à reparaître en société qu’au terme d’une certaine durée, après s’être soumises à des rituels parfois rudes. Elle ne sont pas des veuves. Il n’y a pas de mot pour nommer leur condition. On n’a pas revu leurs garçons après le grand incendie. Nul ne sait s’ils sont vivants ou morts.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyJeu 26 Déc 2013, 08:12

2/

je repense à cette remarquable ouverture de la saison de l'ombre

l'agression nocturne, sous forme d'incendie, est un traumatisme sans précédent, nourri par la "disparition" d'une douzaine d'hommes jeunes. Les mères sont mises à l'ecart, dans une case collective. Tout est remis en cause : le sommeil est perturbé par les rêves où apparaissent les disparus, l'ensemble des femmes est abattu, certaines figures vont surgir cependant, pour affirmer le deuil et revendiquer le droit à la tristesse.

La disparition du chef spirituel du clan désoriente la tribu, avive des rivalités latentes avec le chef - qui n'a pas vu venir le danger. Les soupçons rôdent, propres à alimenter des guerres possibles avec des tribus voisines.

Derrière ce cadre narratif, on voit à quel point ce qui s'avèrera être la traite négrière, bouleverse les structures fondamentales de la société, les croyances et les rapports inter-ethniques.

un début brillant et douloureux.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyVen 27 Déc 2013, 16:02

3/

Petit à petit, au gré des errances des femmes notamment, l'explication des faits et le mécanisme de la traite seront entraperçus par les victimes.

Toutefois la situation initiale est bien celle de la totale incompréhension : Comment des tribus de l'intérieur, immobiles et renfermées sur elles-mêmes, qui ne connaissent ni l'existence de l'océan - ni même des termes s'en rapprochant, pourraient-elles imaginer les objectifs des agressions nocturnes ?

Tout est fait pour que les captifs perdent tous leurs repères habituels, géographiques et autres, livrés sans aucune possibilité de défense à leurs ravisseurs, et par l'intermédiaire de tribus complices, à un trafic qui dépasse toute imagination ?

Leonora Miano insiste sur les différences de cultures d'une tribu à l'autre, notamment dans l'organisation sociale, sans pour autant idéaliser le monde d'avant l'irruption européenne : les enterrements collectifs d'épouses quand meurt un notable sont des scènes glaçantes.

Le récit montre à quel point toute révolte était impossible, à partir des conceptions locales, et dans l'ignorance des mécanismes mis en place par les Européens.


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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptySam 28 Déc 2013, 14:08

4/

Ce livre, la saison de l'ombre, a décidément bien des qualités.

Il rappelle L'intérieur de la nuit pour des scènes fortes, mais n'assomme pas  le lecteur. Leonora Miano fait attendre son lecteur, conformément aux informations dont disposent- ou plutôt ne disposent pas, ses personnages. Un intérêt tout particulier est réservé aux femmes, à la solidarité muette qu'elles gardent entre elles, et à leur entraide active par la suite.

L'auteur ne tombe pas dans une attitude victimaire, elle montre que d'autres modèles de société se sont créés à cette époque, laissant au lecteur le soin de juger de  l'impact de  la traite sur les sociétés initiales ; la violence est bien partagée, celle des maîtres blancs sur laquelle elle n'insiste pas, repose sur l'argent et le commerce. Celle des tribus relais, sur les coups de force, et l'acheminement du "bois d'ébène".

Une analyse très judicieuse, qui ne doit pas forcément plaire à ses compatriotes, qui confirme aussi des considérations connues sur les "sociétés ouvertes et fermées", définies par Bergson et les anthropologues.

un récit à conseiller, puisqu'il permet de comprendre des faits majeurs de notre histoire, surtout si on habite Bordeaux ou Nantes.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMer 15 Jan 2014, 23:16

J’aurais aimé lire La saison de l’ombre mais, à défaut, j’ai emprunté à la bibliothèque Contours du jour qui vient et je l’ai récemment terminé.
Je dirai d’emblée que je suis surprise qu’un tel livre ait obtenu le Prix Goncourt des lycéens car, s’il offre d’indéniables qualités de style, dans sa conception même, il contient un certain nombre de maladresses, parfois flagrantes.

Je trouve par exemple que le choix d’écriture à la première personne en faisant de l’héroïne Musango, la narratrice s’adressant à sa mère, est une erreur qui sent l'artifice. Pratiquement à aucun moment, on n'a l’impression que c’est une fillette de douze ans qui s’exprime, bien au contraire : elle raisonne, elle analyse, elle commente comme une adulte et, qui plus est, une adulte avertie, cultivée, qui a du recul par rapport à l’Afrique et à la société décrite. Rotko a déjà souligné plus haut  l'invraisemblable et longue prise de parole de la fillette lors d’une cérémonie religieuse. On peut penser bien sûr que son vévu douloureux et sa volonté farouche de survivre malgré tout l’ont mûrie prématurément. Mais il aurait fallu, au moins de temps en temps, qu’elle réagisse comme une enfant ; or, tel n’est jamais le cas, du coup, le lecteur est souvent horrifié par ce qu’elle raconte ou décrit mais n’est guère ému par elle ; je crois bien n’avoir jamais éprouvé de compassion pour elle, je crois qu’en fait ce personnage est à la limite de la crédibilité.

Restent heureusement deux aspects qui, personnellement, m’ont intéressée : d’abord, le mécanisme de terrible déliquescence  à l’œuvre dans ce pays imaginaire mais qu’on n’a aucune peine à situer en Afrique, avec les enlèvements d’enfants, la traite des femmes, les superstitions, le pouvoir des sectes, la cruauté, la misère, etc. (une réserve cependant : l’accumulation finit par être excessive et devient maladresse elle aussi) ; ensuite, j’ai aimé l’écriture particulière de ce roman, avec ses images, ses métaphores, sa poésie, une forme de retenue, une absence de pathos, même dans les  passages les plus terribles.

Sensible aux interrogations sur les relations mère/fille, et à la métaphore du temps, j’ai aimé rapprocher le début du roman :
Citation :
Il n’est que des ombres alentour, c’est à toi que je pense. Non pas qu’il fasse nuit, et que les vivants aient soudain épousé les couleurs du moment. Il aurait pu en être ainsi, si le temps prenait encore la peine de se fractionner en intervalles réguliers : secondes, minutes, heures, jours, semaines… Mais le temps lui-même s’est lassé de ce découpage.
et sa fin :
Citation :
Tu vois, maman, à présent c’est mon tour de vivre. J’ai gravi la montagne. Je me tiens maintenant sur l’autre versant du désastre qui n’est pas, comme je l’ai cru, la totalité du lien qui nous unit. Il était seulement comme mon abécédaire, mon tout premier manuel de vie. J’en lirai d’autres encore. Je prends la main de Mbalé, et c’est le cœur ardent que j’étreins puissamment les contours du jour qui vient.

J’ai aussi remarqué de jolies trouvailles littéraires :
Citation :
Si j’écrivais des livres […] je jetterais sur le papier un suaire syntaxique qui couvrirait une fois pour toutes la peine de n’avoir pas été aimée de ma mère.
Citation :
La vie est une course de fond. La mémoire n’est pas une faculté, mais une valeur. Tels sont les enseignements du roi de la forêt [l’éléphant].
Citation :
Je me réveille à l’heure où la nuit tient la rampe pour monter sur les planches, comme une prima donna tonitruante et autoritaire, afin d’en déloger le jour qui a épuisé le temps imparti à ses péroraisons.

Après réflexion, j’ai le sentiment que ce livre (le second de L. Miano, je crois) contient en germe de futures œuvres plus pleinement réussies que celle-ci.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyJeu 16 Jan 2014, 05:57

bien vu, laisse passer un peu de temps et la saison de l'ombre te plaira sans doute, par davantage de retenue sur les faits violents qui ont lieu - et dont la nature échappe à la réflexion, ce qui n'a rien d'étonnant.
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MessageSujet: Re: Léonora Miano [Cameroun]   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMar 18 Fév 2014, 14:25

Je sors éblouie de La saison de l’ombre. Après la lecture de Contours du jour qui vient, mon intuition que son auteur serait à même de nous proposer des œuvres beaucoup plus abouties se trouve confirmée. Sept ans séparent les deux œuvres.

La maîtrise dont fait preuve L. Miano dans celui-ci m’a frappée. Cette approche originale de la traite négrière, vue de l’intérieur par ceux qui l’ont vécue, d’abord sans la comprendre, est neuve et puissante. Elle redonne à ces hommes et ces femmes leur humanité, leur dignité, leur richesse intérieure et l’ampleur de leur malheur. À nous lecteurs, elle fait toucher du doigt des aspects méconnus et complexes, sans pour autant sombrer dans le misérabilisme ou une forme de voyeurisme malsain.

La progression du roman s’organise à partir du grand bouleversement lié à l’incendie, à la disparition des jeunes hommes et du chef ; peu à peu, au fil du récit, se déroule devant nous le délitement d’une société, de ses croyances, de ses rapports à l’autre jusqu’à ce qui semble devoir s’achever par un anéantissement total, mais…
Citation :
Les ancêtres sont là, et ils ne sont pas un enfermement. Ils ont conçu un monde. Tel est leur legs le plus précieux : l’obligation d’inventer pour survivre.

Sans analyse ennuyeuse, l’auteur montre parfaitement que toute révolte des victimes était inconcevable à cause de leur incompréhension face à ce qui leur arrivait mais aussi à cause des terribles mécanismes mis en place par « les hommes aux pieds de poule » et, sur place, par des tribus complices qui y trouvaient leur intérêt, pour leur faire perdre tous leurs repères.

On perçoit l’empathie de l’écrivain pour les personnages féminins qu’elle a créés : ces femmes suscitent admiration et respect devant leur énergie sans faille, leur finesse d’esprit, leur sens aigu de la solidarité, en même temps qu’on compatit à leur douleur d’épouses et surtout de mères.

Enfin les qualités de style de ce livre m’ont ravie d’un bout à l’autre. J’ai retrouvé l’écriture imagée, cadencée, poétique de Léonora Miaro ; certains passages sont, à mon avis de véritables morceaux d’anthologie, par exemple :
Citation :
La nuit a une texture : celle de la pulpe du kasimangolo, dont on ne peut savourer toute la saveur sucrée qu’en suçant prudemment les piquants du noyau. La nuit est faite pour le repos, mais elle n’est pas si tranquille. Il faut rester sur ses gardes. La nuit a une odeur : elle sent la peau de ceux qui sont ensemble par la force des choses. Ceux qui ne se seraient jamais rencontrés, s’il n’avait pas fallu s’enfuir, courir sans savoir où pour rester en vie, trouver une vie. La nuit sent les souvenirs que le jour éloigne parce que l’on s’occupe l’esprit à assembler les parties d’une case sur pilotis, à chasser, à piler, à écailler, à soigner le nouveau venu, à caresser la joue de l’enfant qui ne parle pas, à lui chercher un nom pour le maintenir dans la famille des hommes. La nuit charrie les réminiscences du dernier jour de la vie d’avant, dans le monde d’antan, sur la terre natale.
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MessageSujet: Leonora Miano-page 4   Léonora Miano [Cameroun] - Page 2 EmptyMer 19 Fév 2014, 22:16

Chers amis, es, l’exotisme de ce fil m’a captivée. J’aime connaître les mœurs et traditions d’autres continents. Même si c’est bien écrit et que de telles horreurs soient vraies, je ne me sens pas capable de digérer cette lecture.
Qui suis-je pour critiquer un auteur que je n’ai pas lu ?
Je lis vos avis et GDS* rempli le vide  merci 
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