| Le coeur cousu de Carole Martinez | |
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+11Laura C. mimi54 Bridget Jones Harelde roilyre index katie Constance nicyrle rotko Hibiscus 15 participants |
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Auteur | Message |
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Hibiscus neophyte
Nombre de messages : 8 Date d'inscription : 15/07/2009
| Sujet: Le coeur cousu de Carole Martinez Jeu 16 Juil 2009, 11:33 | |
| Je viens de le finir, ce livre nous emmène au coeur d'une famille andalouse tout se passe entre le conte et la réalité et on est obligé de se laisser emporter ! Je vous le recommande si vous avez envie d'évasion onirique sans jamais tomber dans le côté guimauve !! | |
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rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Dim 19 Juil 2009, 16:33 | |
| C'est effectivement un livre qui a bonne réputation Voici un extrait - Citation :
- « Dans le patio, Francisca, la vieille, frottait la chemise et le drap de sa fille dans la bassine en bois. Frasquita Carasco, ma mère, alors toute jeune fille, attendait nue, debout dans cette nuit de plein été, tentant, avec un lange, d’arrêter le sang qui lui ravinait les cuisses.
L’eau rougie clapotait autour des paroles de la vieille. « Désormais, tu saigneras tous les mois. Quand viendra la Semaine sainte, je t’initierai. Va te recoucher et ne gâte pas ton autre chemise ! » - Spoiler:
Frasquita couvrit son matelas de paille de la toile de jute que lui avait confiée sa mère et s’allongea dans le silence de la nuit. Le sang coulait sans qu’elle éprouvât la moindre douleur.
Saignerait-elle encore au réveil ? N’allait-elle pas se vider pendant son sommeil comme une cruche fêlée ? Ses cuisses lui paraissaient si blanches déjà... Elle préférait ne pas dormir, se sentir mourir...
L’aube la secoua. Ainsi, elle vivait encore ! Dans l’encadrement de sa petite fenêtre, elle distinguait déjà les autres maisons de Santavela en contrebas légèrement rosies par la timide caresse d’un soleil tout neuf qui peu à peu prendrait de l’assurance. Il faudrait bientôt retenir son souffle, vivre sur ses réserves de fraîcheur, et rester terré derrière la pierre blanchie jusqu’en fin d’après-midi. Alors seulement, on pourrait jouir de la lumière crachée par l’astre moribond, on pourrait le regarder s’empaler sur l’horizon sec et tranchant comme une lame et disparaître lentement derrière le grand couteau des montagnes ensanglantées dans un énorme râle de couleurs.
Puis la nuit coulisserait d’est en ouest, noire, toute mitée par endroits, et un souffle viendrait peut-être agiter l’air brûlant, un souffle chargé de parfums salés, mouillés. Le village entier se prendrait à rêver de cette immense étendue d’eau, bleue de tous les ciels venus s’y mirer, et dont les quelques voyageurs qui s’étaient égarés sur les chemins tortueux jusqu’à Santavela avaient raconté les sursauts, les colères, la beauté.
Frasquita, ma mère, regarda la forêt de caillasses et d’arbres secs qui encerclait son monde en songeant qu’il faisait bon vivre, même là, et son sang continua de couler sans qu’elle eût désormais d’autre inquiétude que celle de se tacher. « Ne mange pas de figues, ni de mûres, pendant tes règles, cela te marquerait au visage. » « Prends garde à ne pas goûter de viande cette semaine de peur que les poils ne te poussent au menton ! » Ne bois pas ci, ne touche pas ça : les recommandations ne tarissaient pas. Certes, on n’en mourait pas, mais la vie était plus simple avant.
Durant les huit mois qui précédèrent le carême, Frasquita ne parvint pas, malgré tous ses efforts, à échapper à la perspicacité de sa mère qui sentait venir le sang avant même que la première goutte ne perlât et qui accourait aussitôt en brandissant les nouveaux interdits glanés pendant trois semaines auprès de toutes les vieilles biques du village.
Ce que la jeune fille appréhendait par-dessus tout, c’était le premier soir des règles. Là, immanquablement, sa mère entrait dans sa chambre au beau milieu de la nuit, lui jetait une couverture sur les épaules et la menait dans un champ de cailloux où, quelle que soit la saison, elle la lavait en murmurant d’énigmatiques prières. Et le lendemain, il fallait faire sa part comme si de rien n’était : se réveiller à l’aube pour traire les chèvres, livrer le lait aux voisins, faire le pain, le ménage, puis partir par les collines avec les bêtes et leur trouver quelque chose à brouter au milieu de toutes ces pierres. Tout cela en évitant bien sûr de manger soi-même ce que la nature pouvait receler de meilleur puisque tout ce qui semblait bon en temps normal devenait soudain fatal lorsque le sang coulait.
Contrairement aux autres filles avec lesquelles elle discutait sur les collines et qui annonçaient à qui voulait l’entendre qu’elles étaient des femmes désormais, Frasquita détestait son nouvel état, elle n’y voyait que des inconvénients et serait volontiers restée une enfant. Mais personne ne parlait jamais de prières nocturnes ou d’initiation lors de la Semaine sainte. Frasquita n’avait pas oublié les mots de sa mère le soir du premier sang et elle sentait que de cela elle ne devait rien dire ».
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nicyrle pilier
Nombre de messages : 5882 Age : 81 Localisation : Tout en bas, sous les orangers Date d'inscription : 05/02/2008
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Lun 12 Oct 2009, 21:35 | |
| J’ai terminé depuis peu Un cœur cousu : un étonnant mélange des genres dans ce roman qui tient du conte, de l’épopée, du poème en prose, avec surtout une trame fantastique si habilement tissée qu’elle en devient réaliste ! 400 pages d’une écriture toute en finesse, si travaillée qu’elle en paraît simple. Carole Martinez a bien du talent. C’est pour moi une découverte très intéressante. | |
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Constance pilier
Nombre de messages : 1650 Date d'inscription : 01/10/2009
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Lun 12 Oct 2009, 23:00 | |
| La comparaison pourra paraître osée, néanmoins j'ai retrouvé le souffle brûlant et lyrique de Garcia Lorca dans l'écriture de C. Martinez... | |
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nicyrle pilier
Nombre de messages : 5882 Age : 81 Localisation : Tout en bas, sous les orangers Date d'inscription : 05/02/2008
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Mar 13 Oct 2009, 04:51 | |
| - Constance a écrit:
- La comparaison pourra paraître osée, néanmoins j'ai retrouvé le souffle brûlant et lyrique de Garcia Lorca dans l'écriture de C. Martinez...
Je partage ce point de vue, osé ou pas ! | |
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katie Animation
Nombre de messages : 1264 Age : 64 Localisation : .... dans mes montagnes .... Date d'inscription : 08/02/2008
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Sam 31 Oct 2009, 18:29 | |
| et moi j'ai eu l'impression de "relire", dans le ton, et dans le style, "La maison aux esprits" d'Isabelle Allende. Très beau livre où la féérie côtoie les esprits. | |
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nicyrle pilier
Nombre de messages : 5882 Age : 81 Localisation : Tout en bas, sous les orangers Date d'inscription : 05/02/2008
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Sam 31 Oct 2009, 19:12 | |
| C'est vrai que ces livres sont de la même veine. J'avais également beaucoup aimé La maison aux esprits, mais je l'ai lu il y a longtemps. Il me semble pourtant que le livre, plus long que Le coeur cousu, offrait davantage de ruptures dans le rythme de la narration, avec des descriptions que j'avais parfois trouvées un peu longues avant de succomber au charme de l'histoire. | |
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katie Animation
Nombre de messages : 1264 Age : 64 Localisation : .... dans mes montagnes .... Date d'inscription : 08/02/2008
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Sam 31 Oct 2009, 19:22 | |
| Je ne pourrais te dire Nicyrle, car je l'ai lu il y a très longtemps | |
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index pilier
Nombre de messages : 186 Date d'inscription : 27/08/2008
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Mar 03 Nov 2009, 17:53 | |
| J'ai commencé Le coeur cousu, mais je n'arrive pas à accrocher. Le sujet ne m'intéresse pas sans doute et trop de longueurs dans les descriptions. | |
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nicyrle pilier
Nombre de messages : 5882 Age : 81 Localisation : Tout en bas, sous les orangers Date d'inscription : 05/02/2008
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Mar 03 Nov 2009, 18:25 | |
| Dommage, index... Peut-être faut-il persévérer ? Dans ce livre, il faut accepter de naviguer entre l’onirique et la réalité. Je crois que les descriptions sont nécessaires pour suivre les personnages sur les chemins qu’ils empruntent au propre comme au figuré. L’intrusion du fantastique surprend au début puis, à mon avis, on tombe sous le charme. Mais ce n’est qu’un point de vue personnel qu'on n'est pas forcé de partager ! | |
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roilyre habitué(e)
Nombre de messages : 21 Age : 63 Date d'inscription : 21/05/2010
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Dim 06 Juin 2010, 06:55 | |
| Je ne suis pas encore très loin dans le livre, mais je lis avec beaucoup d'interêts et de plaisirs...Attendez moi pour en parler..Que je suis lente loll | |
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Harelde pilier
Nombre de messages : 7283 Age : 49 Localisation : Yvelines Date d'inscription : 18/09/2008
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Lun 07 Juin 2010, 07:08 | |
| - roilyre a écrit:
- Je ne suis pas encore très loin dans le livre, mais je lis avec beaucoup d'interêts et de plaisirs...Attendez moi pour en parler..Que je suis lente loll
Tu es en avance sur moi : je n'ai même pas encore le bouquin ! | |
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roilyre habitué(e)
Nombre de messages : 21 Age : 63 Date d'inscription : 21/05/2010
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Sam 12 Juin 2010, 07:10 | |
| J'avance lentement dans le livre, j'avoue que j'ai un peu de mal, cependant il y a des passages qui me donnent de petits coups de fouet ... | |
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nicyrle pilier
Nombre de messages : 5882 Age : 81 Localisation : Tout en bas, sous les orangers Date d'inscription : 05/02/2008
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Sam 12 Juin 2010, 09:39 | |
| - roilyre a écrit:
- J'avance lentement dans le livre, j'avoue que j'ai un peu de mal, cependant il y a des passages qui me donnent de petits coups de fouet ...
Il faut "entrer" dans le livre qui peut surprendre au premier abord mais il vaut la peine que l'on persévère. | |
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rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Sam 12 Juin 2010, 09:47 | |
| oui, Nicyrle a raison, préférer le lire par épisodes assez longs, car il y a un flux de la narration, d'ailleurs bien disposée en chapitres à titres clairs pour qu'on s'oriente bien.
Je l'ai fini hier soir, j'en dirai du bien le moment venu. | |
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Bridget Jones pilier
Nombre de messages : 806 Age : 63 Localisation : Genève Date d'inscription : 09/03/2009
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Sam 12 Juin 2010, 15:38 | |
| Le Coeur Cousu était sur ma pile "en attente" et puisque c'est le livre du mois, je m'y suis attaquée... Excellente surprise! J'en suis au 1er quart, mais ça me plaît beaucoup. On y trouve en effet ce côté fantastique propre aux romans sud-américains. Une écriture presque excessivement poétique, j'espère que ça ne va pas devenir lassant sur la durée. Après avoir quasiment jeté à la poubelle La solitude des nombres premiers, que j'ai trouvé absolument abject (arrêté autour de la page 70), ce livre me réconcilie avec la lecture A suivre... | |
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mimi54 pilier
Nombre de messages : 550 Age : 55 Localisation : nancy Date d'inscription : 11/03/2010
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Sam 12 Juin 2010, 17:46 | |
| je viens de l'emprunter........mais je le commencerai d'ici 10 15 jours | |
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roilyre habitué(e)
Nombre de messages : 21 Age : 63 Date d'inscription : 21/05/2010
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Dim 20 Juin 2010, 05:09 | |
| J'ai terminé le livre, j'ai eu un peu de mal à arriver au bout, mais même si je t'ai pas totalement accroché, il vaut la peine d'être lu | |
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Laura C. pilier
Nombre de messages : 45 Age : 41 Date d'inscription : 20/06/2010
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Dim 20 Juin 2010, 20:02 | |
| J'ai beaucoup aimé ce livre, que j'ai lu en quelques heures. Envoûtant, sa magie nous happe au plus profond de l'Andalousie, et nous porte vers la fin au Maghreb, nous offre un monde en plusieurs teintes qui semble n'avoir jamais existé, une musique andalouse que l'on entend au loin en lisant et qui semble sortir au fond des âges, une sorcellerie à laquelle on voudrait croire. En fermant les yeux, on s'y croirait presque... Un des thèmes centraux pourrait être l'attachement même au delà de la mort d'une mère à ses enfants . | |
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rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Lun 21 Juin 2010, 05:01 | |
| - Laura C. a écrit:
Un des thèmes centraux pourrait être l'attachement même au delà de la mort d'une mère à ses enfants . j'y reviendrai, j'aurais plutôt dit l'évocation de la mère par une enfant qui n'a pas reçu d'elle l'amour souhaité. Il s'agit pour Soledad de " retrouver les traces laissées par ma mère trente ans auparavant dans le sable de ce pays".[...] Elle fait parler sa mère : - Citation :
- mon nom est Frasquita Carasco [..]Soledad, ma fille, sens ce vent sur ton visage. C'est mon baiser. Celui que jamais je ne t'ai donné.
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Harelde pilier
Nombre de messages : 7283 Age : 49 Localisation : Yvelines Date d'inscription : 18/09/2008
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Lun 21 Juin 2010, 07:51 | |
| - rotko a écrit:
- Laura C. a écrit:
Un des thèmes centraux pourrait être l'attachement même au delà de la mort d'une mère à ses enfants . j'y reviendrai, j'aurais plutôt dit l'évocation de la mère par une enfant qui n'a pas reçu d'elle l'amour souhaité. J'avoue que la phrase de Laura me convient bien. Même après sa mort, la mère continue d'influer profondément sur le destin de ses enfants. Ne serait-ce que par l'héritage particulier qu'elle leur à laissé : aucun d'eux n'est totalement comme les autres. Tous ont un don. Et pour achever de les marginaliser, tous sont (et demeurent) les enfants de la couturière. | |
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Aphrodite pilier
Nombre de messages : 1643 Date d'inscription : 05/01/2010
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Lun 21 Juin 2010, 16:51 | |
| J'ai adoré ce livre, je reviendrai plus tard sur des passages qui m'ont particulièrement plu | |
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rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Mar 22 Juin 2010, 09:48 | |
| oui, on t'attend, ainsi que d’autres lecteurs, pour parler du cœur cousu.
J’ai bien aimé ce récit qui fait intervenir discrètement le fantastique, de manière cohérente (la couturière s’exerce sur de multiples supports !), et on sait que, comme dans les bons feuilletons, les dons magiques serviront à point nommé la bonne cause : il nous suffit d’attendre, sans perdre intérêt pour l'histoire, bien au contraire. | |
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mimi54 pilier
Nombre de messages : 550 Age : 55 Localisation : nancy Date d'inscription : 11/03/2010
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Mar 22 Juin 2010, 09:53 | |
| je l'ai commencé hier; j'en suis p 50. Le style est ciselé et travaillé, ce qui n'en fait pas forcément un livre qui se lit facilement, mais il semble que j'accroche bien au sujet | |
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rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez Mar 22 Juin 2010, 11:00 | |
| Que le style soit travaillé n'est pas à mes yeux un obstacle à la lecture, au contraire, et je trouve des formules heureuses dès le début : - Citation :
- « Frasquita se défit de sa mère comme un fruit mûr tombe de l’arbre ».
Elle se mit à « broder ses rêves sur son maigre trousseau » etc. | |
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| Sujet: Re: Le coeur cousu de Carole Martinez | |
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