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| | Umberto Eco [Italie] | |
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Prince d'Aquitaine Animation
Nombre de messages : 2948 Age : 34 Localisation : Maromme, Seine-Maritime Date d'inscription : 29/05/2009
| Sujet: Re: Umberto Eco [Italie] Mar 19 Juil 2011, 18:44 | |
| Le Cimetière de Prague d'Umberto Eco s'inscrit dans la lignée des grandes fresques à la Dumas ou Sue (cités plusieurs fois).
Eco, à travers le personnage imaginaire de Simon Simonini, esquisse un portrait de la deuxième moitié du XIXe siècle, tout d'abord en Italie avec les mouvements garibaldiens et mazziniens, puis en France, où se succèdent les journées de la Commune, les manifestations anarchistes et républicaines... le tout sur fond d'espionnage et de production de faux documents par Simonini, engagé par les services secrets français, allemands et russes.
Mais le livre d'Eco se veut aussi une plongée au cœur de l'antisémitisme grandissant, partant de la lettre du grand-père de Simonini à l'abbé Barruel, pour aboutir à la production des Protocoles des Sages de Sion, un faux document qui a pour but de cristalliser l'antisémitisme autour d'un imaginaire projet de contrôle du monde par les Juifs, qu'Hitler reprendra d'ailleurs dans son Mein Kampf. On croise ainsi les figures d'Osman Bey, de Léo Taxil, d’Édouard Drumont (le père de l'extrémisme français)… Et on se rend compte qu'à l'époque, on insistait sur le lien entre juifs, francs-maçons et satanistes. On comprend donc la polémique qu'a engendrée ce livre, notamment en Italie, puisque les jésuites sont dépeints d'une manière assez désagréable, mais réaliste puisque Eco donne à voir le poids de la Compagnie de Jésus, alliée de Rome. Polémique aussi au vu de l'antisémitisme du "héros" (plutôt un anti-héros), mais les critiques ont sans doute oublié que la fin du XIXe s. était baignée par l'antisémitisme, comme le démontre bien l'affaire Dreyfus.
A part cela, on retrouve les mécanismes romanesques chers au Eco critique, notamment dans les interventions du narrateur.
Le Cimetière de Prague est un bon livre, dans la lignée des grands romans du XIXe s. Eco y fait montre de sa grande érudition et de sa parfaite connaissance du XIXe s. Je dirais que c'est un texte assez marginal dans le paysage romanesque actuel, et Eco semble emprunter les codes du roman du XIXe s. Je me rappelle sur ce point le passage de l'Apostille au "Nom de la rose" où Eco affirme avoir repris de nombreux manuscrits médiévaux pour s'imprégner de l'esprit de l'époque, même si Eco joue ici sur l'anachronisme en mettant dans la bouche de l'un de ses personnages le terme de "solution finale" comme seul moyen d'éradiquer le Juif, ou bien faisant dire à un Russe que les Allemands sont trop mous pour la mettre en œuvre. Ce réinvestissement du passé par l'ironie est pour Eco al définition du postmodernisme (fin de l'Apostille au "Nom de la rose"). | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Umberto Eco [Italie] Sam 23 Juil 2011, 07:21 | |
| As-tu ressenti l'ambiguité des propos que certains avaient cru relever dans l'oeuvre ? Ils prétendaient que l'auteur ne se serait pas assez démarqué des propos tenus par des intervenants fascistes. On est en plein dans cette question avec Deutsches Requiem de Jorge luis Borges | |
| | | Prince d'Aquitaine Animation
Nombre de messages : 2948 Age : 34 Localisation : Maromme, Seine-Maritime Date d'inscription : 29/05/2009
| Sujet: Re: Umberto Eco [Italie] Sam 23 Juil 2011, 09:47 | |
| - rotko a écrit:
- As-tu ressenti l'ambiguité des propos que certains avaient cru relever dans l’œuvre ?
Ils prétendaient que l'auteur ne se serait pas assez démarqué des propos tenus par des intervenants fascistes. Oui, c'est parfois difficile de savoir ce que pense vraiment l'auteur. Le choix de Eco est de laisser parler les personnages, sans vraiment intervenir en son nom. D'ailleurs, il rejoint là sa théorie en affirmant que l'auteur se doit de disparaître du texte pour laisser la place aux personnages. Mais je crois que l'intelligence de Eco réside dans l' "architecture du complot", qui ne cesse de se modifier, changeant d'ennemis en fonction du public visé : c'est une fois les jésuites, une fois les francs-maçons, souvent les juifs... Tout cela vire, au fond, au grand-guignol, et l'antisémitisme apparaît finalement comme une haine sans véritable cause. On voit dans le Juif le grand organisateur de la Révolution française, de l'indépendance italienne, de la Commune... En fait, c'est vraiment n'importe quoi, et je crois que là est le vrai point de vue de l'auteur. - Citation :
- On est en plein dans cette question avec Deutsches Requiem de Jorge luis Borges
Je vais le lire, et posterai dessus | |
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