Comment traitons-nous les animaux ?

« Un éternel Treblinka – des abattoirs aux camps de la mort », de Charles Patterson, éditions Calmann-Lévy

c'est lemague qui soulève le problème à partir de ce livre :

Isaac Bashevis Singer a écrit :

Citation :

« Toutes les autres créatures n’auraient été créées que pour lui procurer [à l’homme] de la nourriture, des fourrures, pour être martyrisées, exterminées. Pour ces créatures, tous les humains sont des nazis ; pour les animaux, c’est un éternel Treblinka »

Citation :

des millions de veaux, de cochons, de moutons sont condamnés à mort, nés pour être découpés, transformés en gigots, en tranches de jambon ou en steaks, ces bêtes n’ont droit à aucune pitié alors qu’elles ont une sensibilité réelle, des sens beaucoup plus développés que les nôtres (odorat, ouïe…).

Pour qui s’est rendu dans un abattoir, il est insupportable de voir ces animaux en alerte, paniqués dans cet univers de sang et de souffrance. Comment soutenir le regard implorant d’un agneau quelques secondes avant son abattage ? Ce regard est insoutenable, non seulement parce qu’il traduit la souffrance mais aussi parce qu’il nous renvoie à notre propre impuissance, voire notre indifférence coupable face à ce génocide animalier.

J'ai gravement maltraité un moustique, ce soir, je dois le reconnaître. je ne sais pas si sa sensibilité était supérieure à la mienne, mais sa résistance n'a pas fait un pli, je l'ai trucidé sans jouissance sadique mais sans l'ombre d'un regret ou d'une quelconque pitié.

J'aime beaucoup Bashevis Singer. Je tiens Le Manoir pour un très grand roman, et ses nouvelles sont élégantes, pleines d'humour, légères.

Par contre, comparer les abattoirs aux camps de concentration, non merci. Faut pas exagérer tout de même.

Pour la forme industrielle, il y a effectivement, à mon avis, une ressemblance. Jean Hatzfeld analyse les différentes formes de génocide et fait la différence entre l'industriel et le rural (Rwanda)

Quand j'ai vu le film "le marché de la faim" avec les différentes étapes de l'abattage et du traitement de l'animal, j'ai été très choqué.

Il paraît que les cochons pris dans la chaîne renâclent et se débattent, comme pour refuser le sort qu'on leur réserve. Ils poussent alors des cris déchirants. Ce n'est pas faire de la sensiblerie que de le dire, et le film "le marché de la faim" parlait des dépressions fréquentes des employés des abattoirs.

C'est vrai aussi que nous sommes plus ou moins touchés par certains animaux. Non par les moustiques et les escargots, mais l'abattage des veaux ou des chevaux est traumatisant.

J'ai fait recemment un cauchemar : la scène était representée comme sur une vieille carte postale. Les hommmes du village étaient dans une pièce, habillés commme au XIXe (voir le film casque d'or et la tenue de Reggiani) et le cheval était introduit, on ne voyait que sa tête.
Face à lui un colosse avec une masse.
Je ne comprends pas du tout comment j'ai pu imaginer une scène pareille, aussi visuelle.

C'était comme ça qu'on tuait les grands animaux (chevaux, taureaux) autrefois. Un homme, en face, les assommait en les frappant d'un coup précis, et se devait d'être habile pour ne pas les faire souffrir.

Les animaux sentent quand on va les tuer. Ceux qui ont une basse cour le savent bien. Il y a une part de stress inévitable, même dans les meilleurs conditions.

Les nazis ont traité les Juifs comme des bêtes, comme un troupeau à abattre, mais les abatteurs d'animaux ne se conduisent pas comme des nazis, ça n'a rien à voir.

GANDHI fut un des premiers à être horrifié des conditions d'abattage.
Que dire du transport !
Allez faire un tour en Bretagne et on en reparle.

Dernière info que tout bon biologiste confirmera : l'animal sait.

TOUS ! De la cocotte au cheval...

Particulièrement le poulain.
Eh oui, les milieux chics ont des sofas en peau de poulain, mignon, non ?

L'analogie camps de la mort et abattoirs ne me gêne pas si on parle de degré de l'horreur. Les êtres vivants ressentent tous la même chose. L'argument peut gêner si on considère que l'homme est supérieur aux autres espèces.

Pour ma part, il y a bien longtemps que je ne crois plus à ce "mythe".

Ecoutez Zazie "Je suis un homme". Bien foutue la chanson...


http://fr.youtube.com/watch?v=DcBIX6ptLmY

Parler de génocide animalier ne me gêne pas non plus.

Citation :

les abatteurs d'animaux ne se conduisent pas comme des nazis, ça n'a rien à voir.

c'est vrai et l'attitude envers les animaux varie d'un pays à l'autre et suivant les époques.

Tuer le cochon ou le veau gras n'était pas le fait de sadiques ou de nazis mais l'occasion d'une fête collective.

Pour l'Aïd, les petits enfants décorent le mouton avec des rubans.

En France il ne faut pas toujours dire que ce qui est dans l'assiette est le lapin qui aimait tant les caresses...

L'analogie me semble excessive.

Je ne parle pas de supériorité de l'homme sur l'animal.

Le génocide humain (quel que soit le pays où la population touchée) est une organisation politique sans autre volonté que de se débarrasser de ceux qui "gênent", assurer son pouvoir, s'approprier le bien de l'autre ... en ajoutant à cela, une bonne dose de torture et de jouissance de cette supériorité.

Le statut de l'animal à l'abattoir est d'un autre ordre.
Soit l'animal est abattu ; oui Arc, ce n'est pas humain, ce n'est pas souvent respectueux de la vie animale. Mais il s'agit de se nourrir, pas de la volonté de faire disparaitre une espèce.

Sur ce sujet, j'ai été beaucoup plus choquée du spectacle des montagnes de carcasses de vaches brûlées en plein air, en Angleterre, au moment de la psychose de la vache folle. Il y avait là un spectacle dantesque qui évoquait plus l'Inquisition ou les génocides humains que le travail dans les abattoirs.

Oui, je comprends l'idée.

Génocide = crime organisé et GRATUIT

Abattoirs = souffrance (nous sommes tous d'accord) pour nourrir les gens.

Mais notre but devrait être de tuer "sans douleur". Tous les (bons) bouchers disent qu'il n'y a qu'une méthode : 1) Assommer D'ABORD 2) Tuer ensuite.

Mais dans un monde où la consommation de viande est massive, évidemment, qui prendra ces "délicatesses" là ?

Un dirigeant d'abattoir est comme n'importe qui : il fait du fric. Ca doit donc aller vite et la sensiblerie n'est pas de mise. C'est un "job" comme un autre (il paraît...).

Reste la solution préconisée par BB : l'anesthésie (à base de gaz) de l'animal.

Marche moyennement.

Bref, ça reste cruel et indigne de l'homme.

Perso, je mange le moins de viande possible. Idem avec le poisson. Mais je ne peux l'éviter à 100 %.

En résumé : tous complices.

J'ai le souvenir d'un ancien employé d'abattoir (pour payer ses études) qui ne mangeait plus aucune viande et refusait même toute sauce agrémentée de bouillon cube.

Renan a écrit de St François d'Assise : "Sa vie est une perpétuelle ivresse d'amour divin [...] Il ne dédaigne rien; il aime tout; il a une joie et une larme pour tout; une fleur le jette dans le ravissement; il ne voit dans la nature que frères et soeurs; tout a pour lui un sens et une beauté."

Il y a l'histoire (symbolique mais pas seulement) du loup de Gubbio mais également les tas d'anecdotes rapportées par son entourage.

Quand on menait un agneau à la mort, il pleurait et s'il pouvait, le rachetait. Tel était François...

Les grands mystiques ont tous - sans exception - défendu et assimilé les animaux à la Création. Voire à l'homme. Un même souffle anime le vivant et ce souffle est sacré.

Dans notre monde actuel, ces idées ne sont que fadaises.

Domination, soumission, pouvoir et pognon définissent les règles du jeu.

Une grande oubliée : la vie.

Saint François, je le connais dans la version Liszt, quand il prêche aux oiseaux.

En version "Giotto" également.
Ce peintre, qui l'admirait, lui a assuré un rayonnement universel.
Au Louvre "St François prêchant aux oiseaux"...

Arc, tu es "bonne pour un fil" sur Saint François

Ah ! Cela me plairait bien.

(Mais seulement après ton post sur Fabert...

Il est un fait qu'il ne faut pas tomber dans la sensiblerie mais nous sommes au 21 ème siècle! des moyens existent pour transporter de la viande réfrigérée dans d'autres pays sans transporter les bêtes dans des camions sans hygiène !
des moyens existent pour tuer sans faire souffrir
mais forcément ça encore ça ne doit pas être rentable?

Sujet brûlant pour moi. Je suis souvent confuse, passant de période végétarienne à d'autres non. J'évite mais pas toujours, j'essaye de consommer mieux (cad sans souffrance) mais ...

Y-a-t-il des végétariens sur GDS* ? ce n'est pas pour juger ou autre, non juste comme ça, peut-être pour le déclic ...
Les coquillages et certains poissons, je n'arrive pas à penser de la même façon, c'est idiot et n'a pas de logique.

Au niveau société (en général mais chacun est responsable en consommant il me semble ?) je pense que les animaux sont maltraités.

Bien ... ce fil

«On peut juger de la grandeur d'une nation par la façon dont les animaux y sont traités.»
[ Gandhi ]

Le Langage des oiseaux

(Farid al-Din ATTAR)

Pour le livre « Un éternel Treblinka – des abattoirs aux camps de la mort », de Charles Patterson, je comprends et partage les réticences que vous émettez sur une comparaison douteuse. Mais sur nos rapports aux animaux on peut reflechir

il faudrait lire l'argumentation de patterson.

On a beaucoup de mal à adopter une idée neuve : cf l'animal machine, etc.

Actuellement on s'étonne et on se scndalise que certaines de nos idées ne soient pas acceptées ou mal perçues par les autres.

Voyez les réticences de nos grands parents (ou parents !) sur la contraception, le refus de la pilule, le divorce, le concubinage, les mères célibataires etc.

la laicité, la séparation de l'Etat et de la religion, les droits de l'homme, sont loin d'être admis partout. Intellectuellement beaucoup refusent ces idées.

Au XVIIIe l'idée d'être heureux sur terre, ici et maintenant était revolutionnaire !

Attar, j'y pensais hier soir mais je n'ai pas osé en parler de peur d'être cataloguée Soufie.

rotko, une chose est de parler d'idées, de concepts.

Une autre, de parler d'être vivants.

Pour le végétarisme, je le suis à 80 %, mais je ne peux échapper aux règles sociales (boulot, famille...). Je me tais sur mes convictions.
Sauf quand je sens une oreille attentive et sensible.

Au fait, Descartes a empoisonné la vie des animaux avec sa théorie ridicule, mais je pense que maintenant, nous sommes dans la phase "homme machine".

Il mange, dort, consomme comme on lui dit. La démocratie est un joli mythe qu'il avale.

Beaucoup à dire...

Rotko: Le titre explicite m'arrête, je n'ai pas envie de lire ce livre. Il n'y a pas de petit combats, et la défense des animaux s'inscrit dans le sens du bien commun idéal (qui est pour la souffrance, la torture, la guerre, l'écrasement volontaire des escargots, l'arrachage d'yeux de lapins, la chasse aux éléphants pour piquer leur ivoire, etc, etc ?) mais le discours mysticobêtifiant des ayatollah de la protection animale m'inspire de la méfiance. C'est assez grave, à mon avis, de ne pas voir de différence profonde entre Treblinka et l'élevage de poules en batterie. ça me choque.

Arc a écrit:

Pour le végétarisme, je le suis à 80 %, mais je ne peux échapper aux règles sociales (boulot, famille...). Je me tais sur mes convictions.

Voilà des convictions bien molles et bien opportunistes. ça demande un tel courage, un tel héroïsme, de repousser la viande ou le poisson sur le bord de l'assiette en disant "je suis végétarienne", ou de choisir à la cafeteria ou au restaurant des plats sans viande ?

Utopie a écrit:

j'essaye de consommer mieux (cad sans souffrance) mais ...

Ah, moi aussi. je ne veux pas souffrir en mangeant un steak trop dur ou un poulet insipide

Sphynx, quand tu es face à ton boss au boulot, tu n'es pas forcément libre sur certains sujets.
On ne peut pas parler de tout au travail (ce n'est d'ailleurs pas recommandé si tu veux garder ton poste.) Ta vision personnelle du monde et de son fonctionnement, ils s'en balancent un peu.

Alors, opportuniste au boulot, oui.
Hormis avec quelques collègues.

Autre chose : Un simple bonbon contient de la graisse animale. Obtenue dans les mêmes conditions que le reste. Pour rejeter toute forme de souffrance animale, il faut vivre hors de la civilisation.

Et encore...