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| | Borges - [Argentine] | |
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Auteur | Message |
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magichit habitué(e)
Nombre de messages : 20 Age : 45 Date d'inscription : 25/05/2011
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Mer 25 Mai 2011, 20:30 | |
| En effet rotko:
>...plusieurs indices que je ne révèle pas, montrent qu’il s'agit d’une illusion...
L'indice, le miroir et l'illusion sont omniprésents chez Borges, son génie c'est d'arriver à nous laisser l'interprétation de l'histoire en évoquant plusieurs pistes. Il m'évoque souvent les paysages phantasmés d'Escher.
+1 sur l'analyse de Crevette, beaucoup plus précise que la mienne. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Jeu 26 Mai 2011, 04:36 | |
| - magichit a écrit:
- Il m'évoque souvent les paysages phantasmés d'Escher.
oui pour l'idée de labyrinthe, et surtout pour l'aspect geometrique de situations recurrentes, similaires, on symetriquement inverses. | |
| | | Prince d'Aquitaine Animation
Nombre de messages : 2948 Age : 34 Localisation : Maromme, Seine-Maritime Date d'inscription : 29/05/2009
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Jeu 26 Mai 2011, 10:42 | |
| El muertoBelle nouvelle, en effet. Ce qui m'impressionne le plus ici, c'est le talent de conteur de Borges, qui surplombe toutes les situations : il voit tout, il sait tout, et laisse traîner des indices de-ci de-là, instaurant une situation de confidence avec son lecteur. Pour moi, la première phrase est une petite merveille. Comme j'ai le livre en espagnol (éd. Alianza Editorial, coll. "Biblioteca Borges"), je peux la recopier*, cela fera plaisir à Amadak - Citation :
- Que un hombre del suburbio de Buenos Aires, que un triste compadrito sin mas virtud que la infatuacion del coraje, se intierne en los desiertos ecuestres de la frontera del Brasil y llegue a capitan de contrabandistas, parece de antemano imposible.
J'ai envie de dire : tout est là. Quant au miroir, il semble être une métaphore de l'histoire, quasi métalittéraire. Comme tu le dis, ça renvoie au narcissisme, mais en même temps il est terni, donc il donne une fausse image. Cela peut aussi symboliser l'illusion de la vie : - Citation :
- porque ya lo daban por muerto, porque para Bandeira ya estaba muerto.
Il y a vie illusoire parce qu'il y a mort. Je crois que ce rapport entre vie et mort est nécessaire, car il hante tous les autres récits. * Désolé pour les accents, je ne les ai pas sur mon clavier | |
| | | Dindon pilier
Nombre de messages : 2737 Date d'inscription : 20/07/2008
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Jeu 26 Mai 2011, 16:06 | |
| Euh... Je ne mérite pas autant d'éloges, moi qui suis l'incarnation de l'ignorance. Pas trop le temps de discuter dans le détail mais comme je suis en vacances la semaine qui vient, je vais me faire un plaisir de ressortir Aleph et de détailler les passages qui m'ont transportée.
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| | | Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: Borges argentine: le mort Lun 30 Mai 2011, 15:16 | |
| merci Prince d'Aquitaine, tes lignes en espagnol me font vraiment plaisir. Je vais lire le conte, Néanmoins Borges a souvent des contes où les couteaux et les morts sont protagonistes. | |
| | | Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: Borges argentine: le mort Mer 01 Juin 2011, 19:46 | |
| bonjour :on va lire "le mort" ou c'est pour plus tard? en même temps que le Aleph. merci | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Jeu 02 Juin 2011, 05:08 | |
| oui, on lit le recueil, j'ai commencé par le mort, vu que c'était le plus court. | |
| | | Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: borges "le mort" Ven 03 Juin 2011, 01:59 | |
| bonsoir, il faut raconter tout le conte? un résumé? J'attendrai que quelqu'un commence et je suivrai. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Ven 03 Juin 2011, 05:09 | |
| non, ne raconte pas ! donne tes impressions sur la nouvelle que tu veux. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Ven 03 Juin 2011, 13:15 | |
| L'immortel in l'Aleph, collection blanche de Gallimard. La littérature et l’univers sont-ils intelligibles ? Commençons par la première, puisque cette fiction de L'Immortel conçue comme un témoignage (Je), est à la fois attestée par un préambule de l’auteur, développée par le narrateur, le fameux Joseph Cartaphilus, et démentie/ou contestée dans le Post-Scriptum. De la fiction elle-même, on voit qu’elle rejoint le mythe, puisque fondée sur l’Odyssée et d’autres variantes, elle met en scène les vivants et les morts, la réalité et le rêve, d’une manière générale ce qui se crée, se croit, et se contredit. L’un des caractères du mythe est bien d’échapper au Temps et à l’Espace, ce qui est le cas de cette fiction qui fait parcourir les époques et les pays, dans une construction qui repose sur l’existence et l’alliance des contraires : - Citation :
- « Il existe un fleuve dont les eaux donnent l’immortalité ; il doit donc y avoir quelque part un autre fleuve dont les eaux l’effacent. »
On notera sans peine, une fois admis ces principes, que dans les constructions matérielles des hommes, tout oppose « l’aveugle empire des noirs labyrinthes » et « la resplendissante Cité des Immortels », à ceci près que cette dernière suscite aussi l’incompréhension et l’horreur. Cité établie par des dieux morts ou des dieux fous ? Comment s’y retrouver ? Les images des labyrinthes, des grottes, des souterrains qui se heurtent à des murs, donc à des impasses, à la fois dans le monde des primitifs, et dans la Cité qu’on serait tenté d’appeler céleste. On franchit alors un saut dans les constructions immatérielles des hommes : le domaine de la pensée qui n’aboutit pas à la compréhension du monde, et celui de la foi ou des religions, reposant à tort sur des concepts immobiles alors que l’image de la roue et des retours cycliques serait plus judicieuse. Borges s’interroge donc, à mon avis, sur les mythes qui sont les « signes » - au sens symbolique du terme, de l’impuissance humaine à concevoir le monde. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Sam 04 Juin 2011, 04:07 | |
| Au Chant XI de l'Odyssée, Ulysse franchit le fleuve des enfers et rencontre les trépassés dont certains lui sont très proches, dont sa mère, et Achille qui lui confie : - Citation :
- "J'aimerais mieux être sur terre domestique d'un paysan,
fût-il sans patrimoine et presque sans ressources, que de règner ici parmi ces ombres consumées..." v 489-491 traduction de philippe Jaccottet, chez La découverte. | |
| | | Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: borges "le mort" Dim 05 Juin 2011, 04:48 | |
| bonjour: avant de commencer avec les contes je me permets d'envoyer quelques choses sur Borges ,puis un poème en espaggnol traduit en français.
Le tango est l’épopée de l’Argentine. Dans la mythologie qui s’est ainsi construite, il existe une figure centrale : celle du compadre qu’on peut approximativement traduire par "l’homme fort", "le dur". C’est souvent un gaucho converti à la vie de banlieue. C’est un personnage impressionnant par sa force et sa bravoure qui a mis l’honneur et le courage au centre de sa vie. Toujours vêtu de noir comme la mort qui l’accompagne, coiffé d’un chapeau à larges bords, il porte une écharpe blanche, un poignard à la ceinture, et sur l’épaule une peau de mouton qu’il enroule autour de son avant bras dans les nombreux combats qu’il est amené à livrer. Nous trouvons ce personnage au centre d’une rencontre : celle de deux monstres sacrés de la culture argentine : Jorge Luis Borges et Astor Piazzolla. Borges, né en 1899 et mort en 1986, est le plus grand écrivain argentin et l’un des sommets de la littérature occidentale du XXè siècle. Il y a dans son œuvre fascinante où les récits et les contes se mêlent aux poèmes un petit livre intitulé "Pour les six cordes" (celles de la guitare) et composé de chansons ou milongas écrites autour de ce personnage mythique du compadre. Astor Piazzolla (1921-1992) qui a profondément renouvelé le tango dans la seconde moitié du siècle a mis en musique certaines de ces milongas. Voici donc la « milonga de Jacinto Chiclana. (Traduction de J. Ancet) a suivre
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| | | Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: le poème de Borges Dim 05 Juin 2011, 04:58 | |
| D'abord en espagnol pour ceux qui connaissent et après une remarquable traduction
Milonga de jacinto chiclana Borges Me acuerdo. Fue en Balvanera En una noche lejana Que alguien dejó caer el nombre De un tal Jacinto Chiclana.
Algo se dijo también De una esquina y de un cuchillo; Los años nos dejan ver El entrevero y el brillo.
Quién sabe por qué razón Me anda buscando ese nombre; Me gustaría saber Cómo habrá sido aquel hombre.
Alto lo veo y cabal, Con el alma comedida, Capaz de no alzar la voz Y de jugarse la vida.
Nadie con paso más firme Habrá pisado la tierra; Nadie habrá habido como él En el amor y en la guerra.
Sobre la huerta y el patio Las torres de Balvanera Y aquella muerte casual En una esquina cualquiera.
No veo los rasgos. Veo, Bajo el farol amarillo, El choque de hombres o sombras Y esa víbora, el cuchillo.
Acaso en aquel momento En que le entraba la herida, Pensó que a un varón le cuadra No demorar la partida.
Sólo Dios puede saber La laya fiel de aquel hombre; Señores, yo estoy cantando Lo que cifre en el nombre.
Entre las cosas hay una De la que no se arrepiente Nadie en la tierra. Esa cosa Es haber sido valiente.
Siempre el coraje es mejor, La esperanza nunca es vana; Vaya pues esta milonga Para Jacinto Chiclana.
suite en français | |
| | | Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: en Français Dim 05 Juin 2011, 05:11 | |
| Je me souviens, il y a longtemps, Une nuit à Balvanera Que quelqu’un a lâché un nom :. C’était Jacinto Chiclana.
Il fut également question D’un coin de rue et d’un poignard ; Les lames croisées, leur éclat, Les années nous les laissent voir
Qui peut savoir pourquoi ce nom Ne cesse pas de me hanter; Moi j’aurais bien aimé connaître Cet homme et ce qu’il a été.
D’un caractère mesuré Je le vois grand et accompli, Et sans un mot plus haut que l’autre Capable de jouer sa vie
Personne qui d’un pas si ferme Ait jamais marché sur la terre ; Personne qui fut comme lui Et dans l’amour et dans la guerre..
Sur le jardin et sur la cour Sont les tours de Balvanera ; Á un coin de rue comme un autre Le hasard de cette mort-là
Il n’y a que Dieu pour savoir De quelle trempe était cet homme ; Messieurs, en ce moment je chante Ce que dit le nom qui le nomme.
L’espérance n’est jamais vaine toujours est meilleur le courage; Cette milonga que voilà Est pour Jacinto Chiclana
Il y a souvent chez Borges ces histoires sur les "compadritos" comme le personnage dans "le mort" qui traversent quartiers et villes munis de courage , d'armes et d'un particulier concept de l'honneur.
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| | | Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: Borges argentine Dim 05 Juin 2011, 21:16 | |
| Je vais lire et donner mon avis sur le conte de Borges :Emma Zunz. C'est important voir à quelle date cette histoire se passe. Ce conte a trouvé une place dans le cinéma. | |
| | | Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: Borges :Emm Zunz Lun 06 Juin 2011, 17:02 | |
| Sur Emma Zunz
Ce conte fait partie du recueil “le Aleph » de Borges Une femme très jeune doit mener une action que le destin exige d'elle. Dès le début nous apprenons que les événements appartiennent à un temps et un espace bien définis. Le 14 janvier 1922 Emma de retour de son travail dans l’usine de tissus , reçoit un lettre qui changera sa vie pour toujours´. Au Brésil ´s’était suicidé son père et ce malheur la combla de peur ,de froid, d’irréalité;
« « Dans l’obscurité envahissante ,Emma pleura jusqu’à la fin du jour le suicide deManuel Maier, qui en une époque heureuse ,révolue, avait été Emmanuel Kunz.
Depuis 1916 elle connaissait la fausse accusation contre son père et savait que le vrai coupable de l’opprobre jeté sur lui était le patron Aaron Loewenthal.. Son plan de vengeance était déjà élaboré, avec le prétexte d’une grève, elle irait parler avec le patron et dénoncer les agitateurs.
[]Rapporter d’une façon relativement conforme à la réalité des faits de cet après- midi serait difficile et peut-être inopportun L’irréalité est un attribut des enfers, attribut qui paraît mitiger les terreurs qu’ils inspirent et qui les aggrave peut-être.
L’esprit de Emma est un épouvantable chaos, mais elle n’arrêtera pas ce plan quelle avait ourdi. Ayant appris que se soir un cargo serait au port , elle va chercher l’inconnu qui lui fournira le moyen d’arriver à son but . Elle va offrir son corps, sa virginité pour pouvoir assouvir sa soif de vengeance.
L’homme Suédois ou Finlandais ne parlait pas espagnol. ; il fut pour Emma un instrument de même qu’elle le fut à son tour pour lui, mais elle servit pour la jouissance et lui pour la justice. Il avait laissé de l’argent sur le chevet qu'elle déchira en morceaux. a suivre
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| | | Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: suite Emma Zunz Lun 06 Juin 2011, 17:17 | |
| Avec sa virginité perdue Emma va à la rencontre de sa victime, représentation tragique d’un être qui mourra sans arriver à comprendre le pourquoi et Emma sait que dieu n’oublie pas.
Ensuite elle prépare la mise en scène pour la police : elle dira toujours les mêmes paroles ; Une chose incroyable s’est passée !! Monsieur Loewenthal m’a fait venir au sujet d’une grève, il a abusé de moi, je l’ai tué.
L’histoire était incroyable en effet, mais elle s’imposa à tout le monde, car en substance elle était vraie. Sincère était le ton d’Emma Zunz, sincère sa pudeur, sincère sa haine, Authentique aussi était l’outrage qu’elle avait subi ; seuls étaient faux les circonstances, l’heure et un ou deux noms propres
]La conclusion au moment d’être formulée acquiert une connotation littéraire .Le lecteur confident du narrateur connaît les faits et pourtant il assume la défense de la jeune fille. Pourquoi ? parce que au-delà des réalités qui peuvent être expliquées il y en a d’autres plus puissantes qui émergent du fond de l’âme et auxquelles notre conscience ne trouve pas d’explications.
Emma a été violée et c’est un fait incontournable. La justice transcendante a détruit le seul et vrai coupable.
Nb : Je n’ai pas raconté tout le conte, il mérite d’être lu.
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| | | Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: Borges :Emm Zunz Lun 06 Juin 2011, 17:32 | |
| mes excuses pour les gaffes qui sont habituelles de ma part, j'avais mis en italique et bleu foncé un paragraphe et voilà ce qui en est sorti. Rassurez vous ,je ne vais pas me sucider. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Lun 06 Juin 2011, 18:30 | |
| Pas de problèmes, Amadak ! S'il y en avait eu, on aurait envoyé Nestor.
Je te suivrai sur ce conte. | |
| | | Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: Borges :Emm Zunz Lun 06 Juin 2011, 21:21 | |
| Pour Rotko: je crois que Nestor ou un ange gardien est venu arranger mon post, j'ai de la chance!! merci à qui que ce soit | |
| | | Dindon pilier
Nombre de messages : 2737 Date d'inscription : 20/07/2008
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Mar 07 Juin 2011, 11:04 | |
| - Amadak a écrit:
- parce que au-delà des réalités qui peuvent être expliquées il y en a d’autres plus puissantes qui émergent du fond de l’âme et auxquelles notre conscience ne trouve pas d’explications.
Bien dit ! Je crois aussi que Borges démonte admirablement cette mécanique du réel. Un réel à plusieurs "paliers". C'est presque une profession de foi. Je crois aussi comme lui que les ressorts secrets des choses, événements, tempéraments nous échappent. On peut nommer tout cela (cet ensemble informe et disparate) : le mystère. Qui ne s'y heurte pas de temps en temps ? | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Mer 08 Juin 2011, 15:14 | |
| - Crevette a écrit:
- Je crois aussi que Borges démonte admirablement cette mécanique du réel.
Emma Zunz in l’AlephAmadak a bien situé le contexte de cette histoire : une vengeance qui se fait sur trois jours, conception et réalisation, tout compris. Comme souvent chez Borges, le Temps joue un rôle capital : deux noeuds immobiles (cf. p. 81 « cet instant hors du temps»). - la nouvelle de la mort du père, elle clôt un épisode du passé. - la vengeance proprement dite, elle clôt l’épisode du « secret », et rétablit la justice au présent. Entre les deux pôles, des passerelles en formes de reflets, ou d’actions analogues, notées explicitement : - Le billet du matelot est déchiré comme la lettre du décès, - Démultiplication dans les reflets : - Citation :
- «Peut-être se vit-elle multipliée dans les glaces, publiée par les lumières »
- la baie vitrée du présent/ les fenêtres du passé - Citation :
- « a des losanges identiques à ceux de la maison de Lanus »
. Le décor crée un effet de labyrinthe, autant architectural qu’intellectuel et mental : - Citation :
- « l’homme la conduisit à une porte puis à un trouble vestibule, puis à un escalier tortueux et ensuite dans une entrée […] et ensuite à un couloir et ensuite à une porte qui se ferma ».
De cette histoire l’auteur donne un froid compte-rendu qui tient du procès-verbal, depuis le diagnostic de symptômes à la réception de l’avis de décès, jusqu’à la reconstitution des opérations et des itinéraires, vécus par le personnage principal, comme à son insu : - Citation :
- « comment rendre vraisemblable un acte auquel ne crut presque pas celui qui l’exécutait, comment ressaisir ce bref moment de chaos que la mémoire d’Emma Zunz répudie et confond ? »
Décor géométrique, situations reproduites mais inversées, - père victime d’une machination du coupable, - coupable victime d’une machination de la fille de la victime. Dans cette construction, les personnages sont des instruments : - Citation :
- « Le Finlandais fut pour Emma une instrument, de même qu’elle le fut à son tour pour lui, mais elle servit pour la jouissance, et lui pour la justice. »
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| | | Amadak pilier
Nombre de messages : 3859 Localisation : Buenos-Aires Date d'inscription : 08/12/2007
| Sujet: Borges :Emm Zunz- page4 Mer 08 Juin 2011, 16:40 | |
| Rotko, chapeau" analyser si minutieusement ce conte de Borges est un travail de grand connaisseur, Crevette a aussi de grandes notions sur Borges. Rotko de la façon dont tu as décortiqué "Emma Zunz" on y retrouve l'esprit de Borges, ses miroirs, ses labyrinthes cachés, si chers à son écriture. Moi j'avoue comme je l'avais dit une fois, j'appartiens au lecteur idiot.Le conte m'a. plu et je le rends tel que je le comprends. Pour arriver à bien connaître Borges , on a besoin de prendre des cours spéciaux, je ne les ai pas faits avant ni maintenant.Il est trop compliqué pour moi. Et voir qu'un Français puisse faire une analyse si lucide, me donne une sensation de fierté et de honte à la fois. Un seul mot Rotko, Je j'arrive pas à tes chevilles. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Lun 20 Juin 2011, 08:21 | |
| Deutches Requiem
1/2
Je ne résume pas cette nouvelle, rapidement lue, et qui pose beaucoup de questions, allemandes ou autres.
- Comment le narrateur de si belle lignée a-t-il pu être sensible à l’idéologie fasciste, comment l’Allemagne, patrie des philosophes, a-t-elle pu succomber à l’enthousiasme mortifère du nazisme ?
- C’est sans doute le rôle des références multiples qui parsèment le texte. La confession (sans remords ni regret) du narrateur rappelle un procédé des histoires extraordinaires de POE : le futur condamné à mort nous dit sa vérité.
Mais ces références culturelles légitiment-elles la prétendue pensée du narrateur : que viennent faire dans cette galère, Lucrèce, Aristote et Platon ? On voit bien le creuset gratis de philosophies dont se parent des idéologies creuses pour tenter se valoriser.
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| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Borges - [Argentine] Lun 20 Juin 2011, 08:28 | |
| Deutches Requiem2/2 - La pensée psycho-rigide du narrateur, qui abolit tout hasard sous le sceau de la nécessité, (rien n’arrive qui soit fortuit) témoigne d’une raideur « toute germanique » qui introduit une sorte de destin à L’Allemagne : elle doit mourir pour renaître. Cette pensée cyclique, variante d’un éternel retour à la Nietzsche, lui aussi appelé en renfort, ferait le bon exemple d’un fascisme à la croix gammée qui tourne et reviendra sous une forme semblable. « Je suis un symbole des générations à venir ». - Comment peut-on adhérer à une idéologie sans regarder avec qui on partage les actions ? : « mes camarades m’étaient odieux ». On retrouve l’idéologie militaire dans des maximes telles que « le couard est mis à l’épreuve au milieu des épées », ce qui pourrait se trouver tel quel dans des écrits de Ernst Jünger comme le lieutenant Sturm, ou des situations d’affrontement vécues dans les lycées par Toerless in les désarrois de l’élève Toerless de Robert Musil.. Au final, le « je veux être compris » du narrateur, correspond à mon sens à « désavouons cet être inhumain », forcené, au point de voir une nécessité entre la coïncidence de deux dates : le 1er mars 42 date de sa blessure, et le 1er mars 43, mort de David Israel. La numérologie pallie les déficiences de la raison. Je ne parle pas des omissions du narrateur dans son triste emploi ... | |
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