Thomas B. Reverdy

Thomas B.Reverdy, les évaporés  chez Flammarion.

- La Société des gens de lettres a décerné jeudi le Grand Prix SGDL au romancier Thomas B. Reverdy pour Les évaporés (Flammarion)

- grand prix Thyde Monnier 2013

l'auteur a écrit:

Les "évaporés", c'est ainsi qu'on appelle au Japon des gens qui décident de disparaître volontairement des écrans-radars de l'administration. C'est une sorte de suicide social. On suit le parcours de l'un d'eux dans le Japon de l'après-Fukushima. On suit aussi sa fille qui le recherche, aidée de son ex-petit ami, un détective et poète californien qui ne comprend pas grand-chose mais qui espère la reconquérir. Un gamin des rues aussi, que le tsunami a jeté sur la route. Des yakusas. Plein de Japonais.

l'auteur a déjà écrit

La montée des eaux Points Seuil

L'envers du monde Seuil.

Le ciel pour mémoire Seuil.

Thomas B.Reverdy, les évaporés, chez Flammarion.

1/2

Chacun notera le ton malicieux du début : « elle avait des cheveux noirs et japonais », et « Richard B. détestait les voyages, mais il adorait les avions ».

Elle, c’est Yukiko, lui, son ex-petit ami, poète, et détective privé, engagé pour retrouver le père de Yukiko, disparu volontaire : on a assisté au Japon à sa fuite, discrète au petit matin.

Voilà pour le roman d’amour, puisque Richard B. veut retrouver, et le père, et l’amour de Yukiko. Tous deux sont dans les nuages, puisqu’ils rêvent et prennent l’avion.

Sur terre, la réalité est plus âpre : y vivent les yakuza, agents du racket local et national, qui sévissent dans le petit commerce et la haute finance ; ils craignent d’être identifiés, donc ils traquent Kaze, le père de Yukiko, au courant des transactions financières, et Akainu, l’orphelin qui les a vus opérer dans la petite boutique.

Voilà pour le roman policier, il nous emmène à la découverte du Japon, passant d’un rêve de poète au sous-sol du pays :

Citation :

« la société japonaise est comme le pays, on est perché sur un volcan au milieu de l’océan, sur une île parcourue par des milliers de ligne de failles, et ça craque de partout. Vous voulez connaître le pays, étudiez son sous-sol. Eh bien, c’est pareil pour la société. D’ailleurs c’est pareil pour les gens. »

Thomas B.Reverdy, les évaporés,  chez Flammarion.

2/2

L’enquête, facile à suivre, serait amusante ou distrayante si elle ne débouchait pas sur la mise  au jour de mécanismes souterrains qui conduisent à un « anti-monde ». On s’interroge d’abord sur les éventuelles intentions de disparaître, avec une liste, clin d’œil à Sei Shonagon :

Citation :

La plus triste : la dépression. Pleurer toute la journée est un symptôme classique de dépression.
La plus bête, l’ennui. Il n’y a que les imbéciles qui s’ennuient.

La plus imitée : la crise de la soixantaine. L’âge est cependant variable selon les pays. Le Japon est l’endroit du monde où il y a le plus de centenaires.
La plus étonnante, la curiosité.

Mais  au Japon, la disparition prend des tours particuliers, notamment pour des raisons économiques…

Les circonstances actuelles s’y prêtent, et l’auteur nous convie à un voyage (il utilise le « Vous » qui prend à témoin).

On visite avec lui l’espace de San’ya, les décharges de Fukushima, telles que décrites dans cet article où  les SDF servent de « liquidateurs » dans les zones irradiées.

Le texte prend alors une autre dimension : différents noms sont donnés aux « Johatsu ». Ils deviennent des « homeless »,  terme international pour désigner les laissés pour compte des sociétés, au Japon certes, mais aussi un phénomène en expansion, dans toutes les sociétés ?

Citation :

Chez les SDF. des sans-abris sont recrutés par des entreprises de nettoyage, financées par les autorités, pour nettoyer et décontaminer la ville de Fukushima.

Car ils sont bien les seuls à accepter ce job, payé au minimum légal, parfois moins. Leurs travaux se concentrent dans les zones les plus radioactives, où ils sont notamment chargés de remuer la terre, couper l'herbe ou nettoyer les maisons proches de la centrale.

 

l'article de l'Express

Les auteurs japonais s'intéressent aussi à ces "évaporés" dont il est question dans O chevaux, la lumière est pourtant innocente de hideo Furukawa