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Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
Sujet: Tristan Corbière Dim 16 Juil 2006, 06:00
Insomnie
Insomnie, impalpable Bête ! N'as-tu d'amour que dans la tête ? Pour venir te pâmer à voir, Sous ton mauvais oeil, l'homme mordre Ses draps, et dans l'ennui se tordre !... Sous ton oeil de diamant noir.
Dis : pourquoi, durant la nuit blanche, Pluvieuse comme un dimanche, Venir nous lécher comme un chien : Espérance ou Regret qui veille. A notre palpitante oreille Parler bas... et ne dire rien ?
Pourquoi, sur notre gorge aride, Toujours pencher ta coupe vide Et nous laisser le cou tendu, Tantales, soiffeurs de chimère : - Philtre amoureux ou lie amère Fraîche rosée ou plomb fondu ! -
Insomnie, es-tu donc pas belle ?... Eh pourquoi, lubrique pucelle, Nous étreindre entre tes genoux ? Pourquoi râler sur notre bouche, Pourquoi défaire notre couche, Et... ne pas coucher avec nous ?
Pourquoi, Belle-de-nuit impure, Ce masque noir sur ta figure ?... - Pour intriguer les songes d'or ?... N'es-tu pas l'amour dans l'espace, Souffle de Messaline lasse, Mais pas rassasiée encor !
Insomnie, es-tu l'Hystérie... Es-tu l'orgue de barbarie Qui moud l'Hosannah des Élus ?... - Ou n'es-tu pas l'éternel plectre, Sur les nerfs des damnés-de-lettre, Raclant leurs vers - qu'eux seuls ont lus.
Insomnie, es-tu l'âne en peine De Buridan - ou le phalène De l'enfer ? - Ton baiser de feu Laisse un goût froidi de fer rouge... Oh ! viens te poser dans mon bouge ! ... Nous dormirons ensemble un peu.
rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
Sujet: Re: Tristan Corbière Ven 15 Déc 2006, 06:45
AU VIEUX ROSCOFF
Trou de flibustiers, vieux nid A corsaires ! - dans la tourmente, Dors ton bon somme de granit Sur tes caves que le flot hante...
Ronfle à la mer, ronfle à la brise ; Ta corne dans la brume grise, Ton pied marin dans les brisans ...
- Dors: tu peux fermer ton oeil borgne Ouvert sur le large, et qui lorgne Les Anglais, depuis trois cents ans.
-Dors, vieille coque bien ancrée; Les margats et les cormorans Les margats et les cormorans Tes grands poètes d'ouragans Viendront chanter à la marée ...
- Dors, vieille fille-à-matelots ; Plus ne te soûleront ces flots Qui te faisaient une ceinture Dorée, aux nuits rouges de vin, De sang, de feu ! - Dors... sur ton sein L'or ne fondra plus en friture.
- Où sont les noms de tes amants... - La mer et la gloire étaient folles ! - Noms de lascars ! noms de géants ! Crachés des gueules d'espingoles...
Où battaient-ils, ces pavillons, Echarpant ton ciel en haillons !... -Dors au ciel de plomb sur tes dunes... Dors : plus ne viendront ricocher Les boulets morts, sur ton clocher Criblé-comme un prunier-de prunes...
- Dors : sous les noires cheminées, Ecoute rêver tes enfants, Mousses de quatre-vingt-dix ans Epaves des belles années... ............................................................. Il dort ton bon canon de fer, A plat-ventre aussi dans sa souille. Grêlé par les lunes d'hyver... Il dort son lourd sommeil de rouille,
- Va : ronfle au vent, vieux ronfleur, Tiens toujours ta gueule enragée Braquée à l'Anglais !.. .et chargée De maigre jonc-marin en fleur
Roscoff, décembre.
Moon Animation
Nombre de messages : 8306 Age : 34 Localisation : Seattle Date d'inscription : 16/12/2006
Va vite, léger peigneur de comètes ! Les herbes au vent seront tes cheveux ; De ton oeil béant jailliront les feux Follets, prisonniers dans les pauvres têtes...
Les fleurs de tombeau qu'on nomme Amourettes Foisonneront plein ton rire terreux... Et les myosotis, ces fleurs d'oubliettes...
Ne fais pas le lourd : cercueils de poètes Pour les croque-morts sont de simples jeux, Boîtes à violon qui sonnent le creux... Ils te croiront mort - Les bourgeois sont bêtes - Va vite, léger peigneur de comètes !
Dernière édition par le Dim 23 Sep 2007, 09:28, édité 1 fois
rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
Ici reviendra la fleurette blême Dont les renouveaux sont toujours passés... Dans les coeurs ouverts, sur les os tassés, Une folle brise, un beau jour, la sème...
On crache dessus ; on l'imite même, Pour en effrayer les gens très-sensés... Ici reviendra la fleurette blême.
- Oh ! ne craignez pas son humble anathème Pour vos ventres mûrs, Cucurbitacés ! Elle connaît bien tous ses trépassés ! Et, quand elle tue, elle sait qu'on l'aime... - C'est la male-fleur, la fleur de bohème. -
Ici reviendra la fleurette blême.
Moon Animation
Nombre de messages : 8306 Age : 34 Localisation : Seattle Date d'inscription : 16/12/2006
J'aime vraiment beaucoup les Rondels pour Après de Corbière. Outre les magnifiques "Petit mort pour rire" et "Male-fleurette", on y trouve également :
Rondel
Il fait noir, enfant, voleur d'étincelles ! Il n'est plus de nuits, il n'est plus de jours ; Dors... en attendant venir toutes celles Qui disaient : Jamais ! Qui disaient : Toujours !
Entends-tu leurs pas ?... Ils ne sont pas lourds : Oh ! les pieds légers ! - l'Amour a des ailes... Il fait noir, enfant, voleur d'étincelles ! Entends-tu leurs voix ?... Les caveaux sont sourds.
Dors : il pèse peu, ton faix d'immortelles ; Ils ne viendront pas, tes amis les ours, Jeter leur pavé sur tes demoiselles... Il fait noir, enfant, voleur d'étincelles !
Rodolphe pilier
Nombre de messages : 149 Age : 39 Date d'inscription : 13/12/2006
Sujet: Re: Tristan Corbière Mar 19 Déc 2006, 21:14
Epitaphe
Sauf les amoureux commençans ou finis qui veulent commencer par la fin il y a tant de choses qui finissent par le commencement que le commencement commence à finir par être la fin la fin en sera que les amoureux et autres finiront par commencer à recommencer par ce commencement qui aura fini par n'être que la fin retournée ce qui commencera par être égal à l'éternité qui n'a ni fin ni commencement et finira par être aussi finalement égal à la rotation de la terre où l'on aura fini par ne distinguer plus où conmience la fin d'où finit le commencement ce qui est toute fin de tout commencement égale à tout commencement de toute fin ce qui est le commencement final de l'infini défini par l'indéfini - Égale une épitaphe égale une préface et réciproquement.
Sagesse des nations.
Il se tua d'ardeur, ou mourut de paresse. S'il vit, c'est par oubli; voici ce qu'il se laisse :
- Son seul regret fut de n'être pas sa maîtresse. -
Il ne naquit par aucun bout, Fut toujours poussé vent-de-bout, Et fut un arlequin-ragoût, Mélange adultère de tout.
Du je-ne-sais-quoi. - Mais ne sachant où; De l'or, - mais avec pas le sou; Des nerfs, - sans nerf.. Vigueur sans force; De l'élan, - avec une entorse; De l'âme, - et pas de violon; De l'amour, - mais pire étalon. - Trop de noms pour avoir un nom. -
Coureur d'idéal, - sans idée; Rime riche, - et jamais rimée; Sans avoir été, - revenu; Se retrouvant partout perdu.
Poète, en dépit de ses vers; Artiste sans art, - à l'envers, Philosophe, - à tort à travers.
Un drôle sérieux, - pas drôle. Acteur, il ne sut pas son rôle; Peintre : il jouait de la musette; Et musicien : de la palette.
Une tête! - mais pas de tête; Trop fou pour savoir être bête; Prenant pour un trait le mot très. - Ses vers faux furent ses seuls vrais.
Oiseau rare - et de pacotille; Très mâle... et quelquefois très fille; Capable de tout, - bon à rien; Gâchant bien le mal, mal le bien. Prodigue comme était l'enfant Du Testament, - sans testament. Brave, et souvent, par peur du plat, Mettant ses deux pieds dans le plat. Coloriste enragé, - mais blême; Incompris... - surtout de lui-même; Il pleura, chanta juste faux; Et fut un défaut sans défauts.
Ne fut quelqu'un, ni quelque chose Son naturel était la pose. Pas poseur, - posant pour l'unique; Trop naïf, étant trop cynique; Ne croyant à rien, croyant tout. - Son goût était dans le dégoût.
Trop cru, - parce qu'il fut trop cuit, Ressemblant à rien moins qu'à lui, Il s'amusa de son ennui, Jusqu'à s'en réveiller la nuit. Flâneur au large, - à la dérive, Épave qui jamais n'arrive...
Trop Soi pour se pouvoir souffrir, L'esprit à sec et la tête ivre, Fini, mais ne sachant finir, Il mourut en s'attendant vivre Et vécut, s'attendant mourir.
Ci-gît, - coeur sans coeur, mal planté, Trop réussi, - comme raté.
Si je le pouvais, je m'en ferais un écusson de ce poème.
Moon Animation
Nombre de messages : 8306 Age : 34 Localisation : Seattle Date d'inscription : 16/12/2006
Sujet: Re: Tristan Corbière Mar 19 Déc 2006, 22:02
J'aime énormement les deux derniers vers
Ci-gît, - coeur sans coeur, mal planté, Trop réussi, - comme raté
Dernière édition par le Dim 15 Juil 2007, 16:29, édité 1 fois
Utopie pilier
Nombre de messages : 11113 Date d'inscription : 12/06/2006
Sujet: Re: Tristan Corbière Jeu 04 Jan 2007, 16:36
Rapsodie du sourd
L'homme de l'art lui dit : - Fort bien, restons-en là. Le traitement est fait : vous êtes sourd. Voilà Comme quoi vous avez l'organe bien perdu. - Et lui comprit trop bien, n'ayant pas entendu.
- " Eh bien, merci Monsieur, vous qui daignez me rendre La tête comme un bon cercueil. Désormais, à crédit, je pourrai tout entendre Avec un légitime orgueil...
A l'oeil - Mais gare à l'oeil jaloux, gardant la place De l'oreille au clou !... - Non - A quoi sert de braver ? ... Si j'ai sifflé trop haut le ridicule en face, En face, et bassement, il pourra me baver ?
Oi, mannequin muet, à fil banal ! - Demain, Dans la rue, un ami peut me prendre la main, En me disant : vieux pot.... ou rien, en radouci ; Et je lui répondrai - Pas mal et vous, merci ! -
Si l'un me corne un mot, j'enrage de l'entendre ; Si quelqu'autre se tait : serait-ce par pitié ?... Toujours, comme un rebus, je travaille à surprendre Un mot de travers... - Non - On m'a donc oublié !
- Ou bien - autre guitare - un officieux être Dont la lippe me fait le mouvement de paître, Croit me parler... Et moi je tire, en me rongeant, Un sourire idiot - d'un air intelligent !
- Bonnet de laine grise enfoncé sur mon âme ! Et - coup de pied de l'âne... Hue ! - Une bonne-femme Vieille Limonadière, aussi, de la Passion ! Peut venir saliver sa sainte compassion Dans ma trompe-d'Eustache, à pleins cris, à plein cor, Sans que je puisse au moins lui marcher sur un cor !
- Bête comme une vierge et fier comme un lépreux, Je suis là, mais absent... On dit : Est-ce un gâteux, Poète muselé, hérisson à rebours ?... Un haussement d'épaule, et ça veut dire : un sourd.
- Hystérique tourment d'un Tantale acoustique ! Je vois voler des mots que je ne puis happer ; Gobe-mouche impuissant, mangé par un moustique, Tête-de-truc gratis où chacun peut taper.
O musique céleste : entendre, sur du plâtre, Gratter un coquillage ! un rasoir, un couteau Grinçant dans un bouchon !... un couplet de théâtre ! Un os vivant qu'on scie ! un monsieur ! un rondeau !...
- Rien - Je parle sous moi... Des mots qu'à l'air je jette De chic, et sans savoir si je parle en indou... Ou peut-être en canard, comme la clarinette D'un aveugle bouché qui se trompe de trou.
- Va donc, balancier soûl affolé dans ma tête ! Bats en branle ce bon tam-tam, chaudron fêlé Qui rend la voix de femme ainsi qu'une sonnette, Qu'un coucou !... quelquefois : un moucheron ailé...
- Va te coucher, mon cœur ! et ne bats plus de l'aile. Dans la lanterne sourde étouffons la chandelle, Et tout ce qui vibrait là - je ne sais plus où - Oubliette où l'on vient de tirer le verrou.
- Soyez muette pour moi, contemplative Idole, Tous les deux, l'un par l'autre, oubliant la parole, Vous ne me direz mot : je ne répondrai rien... Et rien ne pourra dédorer l'entretien.
Moon Animation
Nombre de messages : 8306 Age : 34 Localisation : Seattle Date d'inscription : 16/12/2006
Non... Mon coeur te sent là, Petite, Qui dors pour me laisser plus vite Passer ma nuit, si longue encor, Sur le pavé comme un rat mort...
- Dors. La berceuse litanie Sérénade jamais finie Sur Ta lèvre reste poser Comme une haleine de baiser :
- " Nénuphar du ciel ! Blanche Etoile ! " Tour ivoirine ! Nef sans voile ! " Vesper, amoris Aurora ! "
Ah ! je sais les répons mystiques, Pour le cantique des cantiques Qu'on chante... au Diable, Senora !
Moon Animation
Nombre de messages : 8306 Age : 34 Localisation : Seattle Date d'inscription : 16/12/2006
Sujet: Re: Tristan Corbière Mar 17 Juil 2007, 08:52
Guitare
Je sais rouler une amourette En cigarette, Je sais rouler l'or et les plats ! Et les filles dans de beaux draps !
Ne crains pas de longueurs fidèles : Pour mules mes pieds ont des ailes ; Voleur de nuit, hibou d'amour, M'envole au jour.
Connais-tu Psyché? - Non ? - Mercure ?... Cendrillon et son aventure ? - Non ? -... Eh bien ! tout cela, c'est moi : Nul ne me voit.
Et je te laisserais bien fraîche Comme un petit Jésus en crèche, Avant le rayon indiscret... - Je suis si laid ! -
Je sais flamber en cigarette, Une amourette, Chiffonner et flamber les draps, Mettre les filles dans les plats !
Moon Animation
Nombre de messages : 8306 Age : 34 Localisation : Seattle Date d'inscription : 16/12/2006
Sujet: Re: Tristan Corbière Dim 23 Sep 2007, 09:28
Le crapaud
Un chant dans une nuit sans air... La lune plaque en métal clair Les découpures du vert sombre.
... Un chant ; comme un écho, tout vif, Enterré, là, sous le massif... - Ça se tait : Viens, c’est là, dans l’ombre...
- Un crapaud ! - Pourquoi cette peur, Près de moi, ton soldat fidèle ! Vois-le, poète tondu, sans aile, Rossignol de la boue... - Horreur ! -
... Il chante. - Horreur !! - Horreur pourquoi ? Vois-tu pas son oeil de lumière... Non : il s’en va, froid, sous sa pierre. ..................................................................... Bonsoir - ce crapaud-là c’est moi.
fontelle pilier
Nombre de messages : 2068 Age : 77 Localisation : Anjou Date d'inscription : 15/06/2006
Sujet: Re: Tristan Corbière Dim 23 Sep 2007, 22:08
J'adore les crapauds... J'en ai plein ici, des gros et des tous petits, leurs enfants.... Leur chant la nuit ,en été ,est délicieux, très pur . Et j'en ai pris des dizaines dans mes mains, et jamais eu un seul bouton, contrairement à la légende.
Utopie pilier
Nombre de messages : 11113 Date d'inscription : 12/06/2006
Sujet: Re: Tristan Corbière Jeu 27 Déc 2007, 23:42
Paria
Qu'ils se payent des républiques, Hommes libres ! - carcan au cou - Qu'ils peuplent leurs nids domestiques !... - Moi je suis le maigre coucou.
- Moi, - coeur eunuque, dératé De ce qui mouille et ce qui vibre... Que me chante leur Liberté, A moi ? toujours seul. Toujours libre.
a Patrie... elle est par le monde ; Et, puisque la planète est ronde, Je ne crains pas d'en voir le bout... a patrie est où je la plante : Terre ou mer, elle est sous la plante De mes pieds - quand je suis debout.
- Quand je suis couché : ma patrie C'est la couche seule et meurtrie Où je vais forcer dans mes bras a moitié, comme moi sans âme ; Et ma moitié : c'est une femme... Une femme que je n'ai pas.
- L'idéal à moi : c'est un songe Creux ; mon horizon - l'imprévu - Et le mal du pays me ronge... Du pays que je n'ai pas vu.
Que les moutons suivent leur route, De Carcassonne à Tombouctou... - Moi, ma route me suit. Sans doute Elle me suivra n'importe où.
on pavillon sur moi frissonne, Il a le ciel pour couronne : C'est la brise dans mes cheveux... Et, dans n'importe quelle langue ; Je puis subir une harangue ; Je puis me taire si je veux.
a pensée est un souffle aride : C'est l'air. L'air est à moi partout. Et ma parole est l'écho vide Qui ne dit rien - et c'est tout.
on passé : c'est ce que j'oublie. La seule chose qui me lie C'est ma main dans mon autre main. on souvenir - Rien - C'est ma trace. on présent, c'est tout ce qui passe on avenir - Demain... demain
Je ne connais pas mon semblable ; oi, je suis ce que je me fais. - Le Moi humain est haïssable... - Je ne m'aime ni ne me hais.
- Allons ! la vie est une fille Qui m'a pris à son bon plaisir... Le miens, c'est : la mettre en guenille, La prostituer sans désir.
- Des dieux ?... - Par hasard j'ai pu naître ; Peut-être en est-il - par hasard... Ceux-là, s'ils veulent me connaître, e trouveront bien quelque part.
- Où que je meure : ma patrie S'ouvrira bien, sans qu'on l'en prie, Assez grande pour mon linceul... Un linceul encor : pour que faire ?... Puisque ma patrie est en terre on os ira bien là tout seul...
rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
Sujet: Re: Tristan Corbière Mer 06 Fév 2008, 14:37
Mousse : il est donc marin, ton père . - Pêcheur. Perdu depuis longtemps. En découchant d’avec ma mère, Il a couché dans les brisants…
Maman lui garde au cimetière Une tombe - et rien dedans- C’est moi son mari sur la terre, Pour gagner du pain aux enfants.
Deux petits. - Alors, sur la plage, Rien n’est revenu du naufrage ?… - Son garde-pipe et son sabot…
La mère pleure le dimanche, Pour repos…Moi : j’ai ma revanche Quand je serai grand - matelot ! -
Utopie pilier
Nombre de messages : 11113 Date d'inscription : 12/06/2006
Sujet: Re: Tristan Corbière Mer 19 Mar 2008, 16:08
A l'Etna
Etna - j'ai monté le Vésuve ... Le Vésuve a beaucoup baissé : J'étais plus chaud que son effluve, Plus que sa crête hérissés ...
- Toi que l'on compare à la femme ... - Pourquoi ? - Pour ton âge ? Ou ton âme
De caillou cuit ? ... - Ça fait rêver ...
- Et tu t'en fais rire à crever ! - - Tu ris jaune et tousses : sans doute,
Crachant un vieil amour malsain ; La lave coule sous la croûte De ton vieux cancer au sein.
- Couchons ensemble, Camarade !
Là - mon flanc sur ton flanc malade : Nous sommes frères, par Vénus, Volcan ! ... Un peu moins ... un peu plus ...
Furtif pilier
Nombre de messages : 75 Age : 63 Date d'inscription : 10/03/2009
Sujet: Re: Tristan Corbière Ven 13 Mar 2009, 08:59
Un Corbière lyrique, très musical (et un brin misogyne) :
Bonsoir
Et vous viendrez alors, imbécile caillette, Taper dans ce miroir clignant qui se paillette D’un éclis d’or, accroc de l’astre jaune, éteint. Vous verrez un bijou dans cet éclat de tain.
Vous viendrez à cet homme, à son reflet mièvre Sans chaleur... Mais, au jour qu’il dardait la fièvre, Vous n’avez rien senti, vous qui — midi passé — Tombez dans ce rayon tombant qu’il a laissé.
Lui ne vous connaît plus. Vous, l’Ombre déjà vue, Vous qu’il avait couchée en son ciel toute nue, Quand il était un Dieu !... Tout cela — n’en faut plus. —
Croyez — Mais lui n’a plus ce mirage qui leurre. Pleurez — Mais il n’a plus cette corde qui pleure. Ses chants... — C’était d’un autre ; il ne les a pas lus.
Constance pilier
Nombre de messages : 1650 Date d'inscription : 01/10/2009
Sujet: Re: Tristan Corbière Mar 24 Nov 2009, 17:22
Duel aux camélias
J’ai vu le soleil dur contre les touffes Ferrailler. — J’ai vu deux fers soleiller, Deux fers qui faisaient des parades bouffes ; Des merles en noir regardaient briller.
Un monsieur en ligne arrangeait sa manche ; Blanc, il me semblait un gros camélia ; Une autre fleur rose était sur la branche, Rose comme ... Et puis un fleuret plia.
— Je vois rouge ... Ah oui ! c’est juste : on s’égorge — ... Un camélia blanc — là — comme Sa gorge... Un camélia jaune, — ici — tout mâché ...
Amour mort, tombé de ma boutonnière. — À moi, plaie ouverte et fleur printanière ! Camélia vivant, de sang panaché !
(Les amours jaunes)
Tristana habitué(e)
Nombre de messages : 15 Age : 37 Date d'inscription : 17/08/2009
Beau chien, quand je te vois caresser ta maîtresse, Je grogne malgré moi — pourquoi ? — tu n’en sais rien... — Ah ! c’est que moi — vois-tu — jamais je ne caresse, Je n’ai pas de maîtresse, et... ne suis pas beau chien.
— Bob ! Bob ! — Oh ! le fier nom à hurler d’allégresse !... Si je m’appelais Bob... Elle dit Bob si bien ! Mais moi je ne suis pas pur sang. — Par maladresse, On m’a fait braque aussi... mâtiné de chrétien.
— Ô Bob ! nous changerons, à la métempsycose : Prends mon sonnet, moi ta sonnette à faveur rose ; Toi ma peau, moi ton poil — avec puces ou non...
Et je serai Sir Bob. — Son seul amour fidèle ! Je mordrai les roquets, elle me mordrait, Elle !... Et j’aurai le collier portant Son petit nom.
Kervinia pilier
Nombre de messages : 3822 Age : 35 Localisation : Seine-et-Marne Date d'inscription : 04/04/2010
Sujet: Re: Tristan Corbière Sam 28 Mai 2011, 09:18
J'ai lu Les Amours jaunes ce mois-ci, dans la perspective du CAPES, mais bon, les recueils de poésie et moi... A part Les Fleurs du mal, bien sûr. ^^ Enfin, il faut bien prendre le taureau par les cornes, comme on dit.
Parmi les poèmes qui m'ont le plus marquée, il y a "Duel aux camélias", cité un peu plus haut. ^^
LeBarbu neophyte
Nombre de messages : 4 Date d'inscription : 06/02/2013
Sujet: Re: Tristan Corbière Mer 06 Fév 2013, 00:34
Ah ah ! incroyable ! j'avais déjà cité le poème épitaphe à l'époque (en tant que Rodolphe)
bon allez, j'arrête là la nostalgie, mais j'en profite pour rebalancer mon machin, après tout, il a pleinement sa place ici