Ecrit collectif : Mésaventures érotico-cyclistes

Mésaventures et tribulations érotico-cyclistes dans les landes

Toute ressemblance avec de personnes ou des aventures réelles serait purement accidentelle … c’est le cas de le dire !

Chacun peut poursuivre le récit comme il l'entend.

La journée s’annonçait belle et la tentation cycliste surprit Rodjo dès le réveil. Une demi-heure de préparation, hygiène oblige, et il enfourchait son vélo, gaillard et plein d’entrain.

Les pins sentaient bon, personne sur la piste de Bayonne, et avec un bon petit vent dans le dos, il espérait atteindre et dépasser Hossegor avant 10 heures. Les pneus très gonflés roulaient sans bruit sur l’asphalte, et il avançait régulièrement et sans efforts. Un petit bain laverait l’éventuelle sueur matinale ; Comme tout cycliste méfiant, il mettrait son vélo le plus près possible de l’endroit de baignade.

Les rouleaux de l’Atlantique sont certes toujours à craindre, mais on en prend vite l’habitude : il faut plonger tête baissée dans la vague, ne redresser la tête qu’entre deux rouleaux. Le risque est minime, et l’adrénaline aidant, c’est l’occasion de se découvrir une belle vigueur.

Beau programme !

Toujours soucieux de lutter contre sa phobie des parapluies - oui, car il faut que le lecteur soit éclairé sur le monologue déchirant auquel se livrait notre héros en pédalant - Rodjo ressassait les conseils du Docteur Routagnole, rencontré 6 mois plus tôt à Sainte-Anne, là-haut, chez les Celtes impavides, qui lui avait prescrit un traitement de choc pour traiter la pathologie de la peur des parapluies, appelée parapluviose (savant néologisme inventé par ledit docteur ayant isolé cette maladie mentale rare et discrète), qui préconisaient un affrontement direct avec les éléments naturels : vent, pluie et tonnerre pour traiter le mal par le mal, comme le professait ce docte savant, auteur d'un traité métaphysique sur La force du mental face à la nature.

Absorbé par son souci existentiel, il remarqua à peine la chaussure féminine trônant au milieu du chemin sablonneux qu’il empruntait. Quelques lanières dorées élégantes étincelaient au soleil. Rodjo fut néanmoins arrêté net dans ses pensées par la formidable odeur émanant de l’objet insolite.

Franchement mordante.

« Bon sang, qui a perdu sa godasse par ici ? » s’exclama t-il !

C’est alors qu’il entendit une plainte aiguë (lui rappelant au passage certaines camarades rencontrées à Sainte-Anne, de plantureuses filles un peu bruyantes, mais si imaginatives la nuit…) : « Au secours, au secours, à moi ! »

Une femme appelait…

Il pédalait donc allègrement, son ipod-shuffle sur les oreilles, quand il remarqua au beau milieu de la piste un soulier aux lanières dorées.

Aussitôt lui revint en mémoire le pied, le mollet, la cuisse ... et le visage de Civette, une mytho-megalo-érotomane de Sainte-Anne, connue pendant son dernier stage.

La pauvre fille ! Que pouvait-on faire pour elle ? Rien sans doute, les médicaments l’avaient tellement abîmée...

Il se pencha, ramassa la chaussure sans mettre pied à terre, et la balança dans les fourrés.

Étonnant de voir que pendant ses congés, il pensait encore aux pensionnaires du service de Routagnole… et tout ça pour une chaussure à talon à lanières !

« Aïe ! Mais quel est ce malotru qui m’envoie ma chaussure en pleine face ? » s’exclama Civette !

Clopin clopant, la pauvre fille se leva, les deux genoux tout écorchés car elle venait de voltiger de son vélo.

Un gros caillou avait fait éclater son pneu et Civette n’avait pas eu le temps de redresser la maudite machine.

Se levant avec peine, elle aperçut alors un homme qu’elle connaissait bien : Rodjo !

Abasourdie de retrouver ici un si cher ami, elle l’appela furieusement. D’ailleurs, il semblait que Rodjo n’avait toujours pas réglé ses problèmes d’acouphène, car il ne détourna pas la tête. Notre héros est en effet affligé de nombreux bourdonnements intempestifs, le coupant souvent du reste du monde. (On se demande bien pourquoi il se balade avec un ipod-shuffle, aussi inutile que décoratif…)

Civette s’approcha, enthousiaste, oubliant momentanément son mal : « Rodjo, toi ici ? ».

Muet de stupéfaction, celui-ci réalisa soudain que la chaussure peu odoriférante appartenait à sa camarade, et qu’elle était blessée : « Civette, par exemple ! ».

Rodjo fut étonné de son éclatante beauté. Civette paraissait désintoxiquée et comme libérée de ses diverses psychoses.

Il quitta promptement sa bicyclette pour l’aider à se remettre sur pied. Jetant un œil sur son vélo, il comprit l’origine de la chute.

« Ah ma chère, compte sur moi pour te réparer ça ! »

« Que fais-tu ici ? »

Là-dessus le Rodjo s’empara d’une clé à molette - ou plutôt d’une clé à vélo, pour régler la chaînette de la gisquette découverte à l’éprouvette, je veux dire, à l’improviste.

En lui-même il se rappelait ce qu’on lui avait appris de la civette à l’école : était-ce au cours de SVT ou en initiation sexuelle ? les mots lui revenaient par bouffées :

Citation :

La civette est un animal nocturne et solitaire, qui passe les heures diurnes au sein d'un abri sûr. Malgré ses mœurs discrètes, la civette est connue de l'homme depuis des siècles. L'animal produit un fluide clair, semblable à du miel, sécrété par des glandes à la base de la queue.
Lorsqu'il est dilué, ce fluide, appelé musc, donne un parfum délicat, hautement apprécié en parfumerie. Le terme de civette signifie en fait, en arabe, parfum. Ce parfum a été connu autour de la Méditerranée depuis très longtemps.

Ce parfum excitant, qui n’avait rien à voir avec la chaussure, le remplissait d’émotions et de souvenirs.

Quant à Civette, elle le regardait s’activer, bricoler et besogner sa bicyclette de Civette : quel bricolo, ce Rodjo, question vélo, c’est un pro vraiment costaud, se disait la Minette.

Spoiler:

Quel b, quel bo, quel beau br... bronzage, se bégayait Rodjo

Le troublant parfum de sa peau halée l’empêchait de se concentrer sur les nécessaires réparations à entreprendre sur la bicyclette, mais le détournait – provisoirement – de quelques questions qu’il se posait. Que diable faisait-elle ici, cette Civette qu’il avait connue certes aventureuse, mais tout de même casanière. Et puis, son passage à Sainte-Anne n’avait rien arrangé à sa paranoïa, qui le forçait à exclure toute coïncidence à la trouver ici, échue sur cette route. Une autre question avait vite surgi en rapprochant les pièces : comment donc était-il possible de faire du vélo avec ces escarpins dorés ? Civette nonchalamment assise sur le bas-côté, la courbe parfaite de sa cheville endolorie accentuait l’incongruité de ces petites chaussures. Il savait par expérience, et ses amis cyclistes et randonneurs n’avaient pas manqué de lui rappeler avant son départ que l’essentiel pour un long parcours, ces sont de bonnes chaussures ! Il avait même couru les multiples adresses du Vieux Campeur pour choisir ses chaussures de vélo et de marche. Il les portait avec fierté, comme l’atour qui faisait de lui un touriste pleinement qualifié. Alors, rien d’étonnant à ce que Civette ait fini par tomber, avec de tels souliers !
Quant à elle, elle le regardait s’activer. A mesure que ses mains se couvraient de graisse, elle le trouvait plus séduisant. Rodjo lui paraissait plus viril que jamais. Elle espérait d’ailleurs que ses compétences mécaniques seraient en la circonstance plutôt moyennes, pour profiter du spectacle tout à fait passionnant d’un homme triturant une machine, avec il faut le dire une pointe d’énervement qui commençait à lui plaire. Il tentait de lui expliquer comment il voulait s’y prendre, avec le vocabulaire qui pose son homme ! Mais malgré les mois de juillet de jeunesse que Civette avait passés à regarder le Tour de France, profitant des explications de haut niveau que lui distillait son père, les dérailleurs, braquets, pignons ou cocottes de frein lui restaient de bien mystérieux objets…

Civette contemplait le corps mûr de Rodjo et se disait qu’il était vraiment dommage que sa décision soit irréversible. Elle avait en effet décidé d’entrer au monastère du Mont Saint Polac, un obscur saint hongrois du XIIè siècle, bien connu pour ses turpitudes de jeunesse et sa repentance à 40 ans.

Le bon docteur Routagnole avait en effet traité sa nymphomanie chronique avec une stimulation visuelle à base d’images numériques des icônes de Saint Polac. De sorte, que de temps en temps, quand Civette marchait, elle voyait clignoter des flashs multicolores, lui rappelant son vœu pieu : suivre l’exemple d’ascétisme et d’austérité du débonnaire Polac.

Sur les représentations picturales, le Saint avait des mains immaculées et diaphanes, tandis que celles de Rodjo luisaient de graisse à moteur, qu’on devinait onctueuse au toucher…

Mais ne nous égarons pas.

« Les sens doivent se dompter pour atteindre la transcendance », disait Saint Polac.

On voit bien qu'il n’avait jamais eu de vélo…

Quand Rodjo termina cette réparation, qui parut durer une éternité, Civette tenta de cacher son trouble derrière un visage impassible. Elle s’enquit de la santé de son ami : « Et ta parapluviose, ça va mieux ? ».

La brutalité de la question estomaqua Rodjo, qui, ulcéré, rétorqua :




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Caché derrière un buisson, Bernard Profitendieu, 13 ans selon l’état-civil, 18 ans pour la maturité biologique, adolescent gidien et boutonneux, observait le couple : habitué des plages nudistes qui prolifèrent sur les côtes landaises, il n’était jamais autant ému, et disons-le excité, qu’au moment du déshabillage qui précède ou accompagne l’étreinte.

D’une main il caressait son porte-bonheur, une queue de lapin fermier égorgé la veille par son aïeule polonaise, de l’autre, il se grattait férocement le fondement, à cause qu’ il s’était d’abord assis sur une fourmilière.

Qui dira le martyre de l'ado qui doit rester stoïque sous peine de voir ses projets s’effondrer ?

Bernard se tortillait donc dans tous les sens, immobile quant au haut de son corps à l’affût, ondulant du derrière où les fourmis titaniques ou titanesques - une espèce typiquement landaise, se croyaient sur un vaisseau barbaresque roulant de babord à tribord, et de la poupe à la proue, ce qui irrite l’insecte et lui donne le tournis.

Spoiler:

Crevette a écrit:

[...]Elle s’enquit de la santé de son ami : « Et ta parapluviose, ça va mieux ? ».

La brutalité de la question estomaqua Rodjo, qui, ulcéré, rétorqua :

"Quand tu auras complètement vaincu tes psychoses, et seulement à ce moment, tu pourras parler de la mienne, qui est bénigne !"
La bouille abaissée vers le pédalier, barbouillé de cambouis, Rodjo rêvait d'engloutir une bouillabaisse en compagnie d'une abbesse. Des milliers de grains de sable tapissaient son épiderme, cimentés par sa sueur déferlante ; son sang bouillait de désir culinaire.

Et le sang de Civette bouillait de colère ! Toujours aussi outrecuidant, ce Rodjo !

« Je n’ai plus de psychoses ! Juste quelques doutes parfois et d’ailleurs, je te conseille la lecture des œuvres complètes de Saint Polac, qui pourrait te guérir définitivement de ta phobie. »

Rodjo n’en crut pas ses oreilles : « Tu lis des saints, toi ? »

« Et puis quoi ? »

Cette fois-ci, se dit Rodjo in petto, elle est vraiment malade...

Emoustillé par la vue de ses jambes dorées et parfaitement galbées, il commença à imaginer comment il pourrait faire renaître la Civette d’antan, celle qui folâtrait la nuit avec ses camarades de dortoir et avec le docteur Cugnaisse, en secret, dans le grenier.

Rodjo songea qu’une telle flamme érotique ne pouvait s’éteindre si facilement et proposa à Civette de la raccompagner.

Civette accepta, et invita même Rodjo à déjeuner de la bouillabaisse, faite maison...

« Bouillabaisse, bouillabaise » ricanait intérieurement Rodjo, sûr que j’y goûterai bien à ta bonne bouille…»

Oublions les mauvais jeux de mots de Rodjo, en aparté, certes, mais qui traduisaient bien les désirs libidineux qui le taraudaient.

Un grand froissement dans les fourrés interrompit ses lubriques cogitations : il regarda Civette, et tous deux allèrent voir de quoi il retournait...

Quel spectacle !

Ils trouvèrent Bernard P. la culotte aux chevilles, à examiner on ne sait quoi, et tenant à la main un appendice phalliforme de bonne taille et régulièrement poilu !

« Ça alors ! » s’écria Civette toujours spontanée, bien que très surprise, «  une pareille queue chez un ado, c’est un lusus naturae »

Bernard P. était fort gêné de la situation, et tout rouge, il bégaya

« c’est, c’est mon lapin, eeet les fourmis.. »

Rodjo, suivant son mauvais penchant, osa un clin d’oeil à Civette

« Sans doute, un chaud lapin ! »

« Et qui aurait des fourmis dans sa culotte ! » renchérit la gisquette, hilare.

Tous deux se regardaient tendrement.

Zut et re-zut! Rodjo, pardon Rotko m'a devancée...

Malheureusement, les dieux n’étaient pas avec Rodjo. Des nuages lourds s’étaient accumulés pendant qu’il réparait le vélo de Civette. Cette tâche, qui dans son esprit équivalait déjà à des préliminaires, l’avait tant absorbé qu’il avait oublié de s’inquiéter de la météo. A peine s’étaient-ils mis en marche que les cieux s’ouvrirent, libérant toute la colère divine du mois,que dis-je : du semestre écoulé. En effet, Toutatis et Saint-Polac ne voyaient pas ce rapprochement d’un très bon œil.

Oubliant tout projet de galipette parmi la rouille et les gousses d’ail, Rodjo était torturé entre le désir et la peur de s’emparer du parapluie le plus proche . Civette, quant à elle, y trouvait l’occasion rêvée pour…

Quand soudain se fit entendre un formidable coup de tonnerre !

Nom de Zeus, se dit Civette, la pluie va me décoiffer !
(Mais au moins, elle lavera les pompes fétides de la belle...)

Se retournant pour reprendre son vélo et partir avec Rodjo, elle se rendit compte...qu’il n’était plus là !

Elle appela « Rodjo, Rodjo ».

Personne !

Le brave cycliste avait disparu, comme absorbé par les ténèbres du ciel.

Elle resta seule avec le jouvenceau morveux et boutonneux, mais fort bien membré, et se dit que Saint Polac pourrait pour une fois fermer les yeux sur une petite frasque discrète en rase campagne.

Pendant ce temps, Rodjo, fou de terreur à cause de la pluie, courait comme un dératé, en criant « à l’aide, à l’aide »...

Il commença à suer, puis à suffoquer, et s’écroula convulsivement sur un talus, assailli de visions boschiennes.

Il hurla quand il sentit la présence d'ectoplasmes monstrueux, venus pour l’enlever et le torturer, à n’en pas douter.

Un éclair zébra violemment le paysage.





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Un orage, comment était-ce possible ?



Les éclairs aveuglants de cet orage imprévu, les coups de tonnerre qui résonnaient jusque dans la moelle de ses os, la pluie drue qui le transperçait, tout mettait en transes le pauvre Rodjo.

Devant ses yeux hallucinés passaient en boucle des visions macabres : Saint Polac le poursuivait avec ses lances pointues, une vieille l’injuriait, un couteau sanglant à la main, les cris aigus d’un lapin géant lui vrillaient les oreilles,



puis tout repartait dans l’autre sens ,

le lapin le poursuivait de ses lances, Saint Polac l’injuriait, un couteau sanglant à la main, et les cris de la vieille lui vrillaient les oreilles,

Civette en gros chat levait la queue et l’inondait d’aspersions nauséabondes, elle lui rebondissait sur le ventre, et il entendait ricaner l’ado boutonneux.

Ses jambes se dérobèrent sous lui, il se sentit tomber sans fin dans un puits de ténèbres...

Lorsqu'il revint a lui - il n'avait aucune idée du temps qui s'était écoulé depuis le dernier éclair - il commença par tâter tous ses membres (oui: tous!) et la tête, pour vérifier que tout était là et qu'il n'était pas blessé.

Et soudain, il entendit une petite voix irritée lui dire: "Allons, allons, il est l'heure, tu vas être en retard, rogntudju!"

Rodjo ne savait pas où il était, ne savait plus trop qui il était ni pourquoi ce lapin le houspillait de la sorte. Il se frotta les yeux et le visage pour essayer de mettre un peu d'ordre dans ses idées et c'est alors qu'il se rendit compte qu'il portait une barbe de trois semaines.

Oui, cela faisait déjà trois semaines qu'il dormait, telle la Belle au Bois Eponyme dans ce tunnel perdu au fond des temps. Une barbe fort belle au demeurant, avec de jolis reflets bleutés.

- "Allons, allons!" répéta le lapin
- "Mais où allons-nous?"
- "Mais dépêchez-vous! La Reine de Coeur vous attend! Et vous savez bien qu'elle a horreur qu'on la fasse attendre!"

Un lapin !

Serait-il passé de l’autre côté du miroir ?

Et une barbe !

Lui qui avait horreur des barbus !

Tous ses repères s’étaient fait la malle.

A la vitesse de l’éclair ou d’un coup de foudre…


Que devenait Civette ? Serait-elle « la reine de cœur  »?

- Une malade, oui ! aguichante certes, mais une détraquée sexuelle !

Les interrogations lui donnaient le vertige.

Ce lapin n’avait-il pas été égorgé par la vieille polonaise - pour sa famille ou en sacrifice à Saint Polac ?

Pour en faire quoi ? un civet, ou une Civette de lapin ?

Le malheureux éclata d’un rire qui l’eut fait admettre à Sainte Anne, sans examen préalable...

Pendant ce temps de fantaisie mentale pour notre héros, Civette profita allègrement de la vie avec le boutonneux, qui, fort peu loquace, n'en était pas moins énergique et endurant.

Songeant à quel point le sexe est un gage de bonne santé dans la vie, elle méditait sur son engagement spirituel - carcéral serait plus juste - et projetait de s'en délier.

Elle avait quand même mauvaise conscience d'avoir abandonné sans vergogne son ami Rodjo, en pleine crise et en pleine nature, pour s'adonner aux jeux de Vénus.

Décidée à le retrouver, elle contacta le commissariat du coin.

Quelle ne fut sa surprise d'apprendre que la banque "Le castor vorace" venait d'être attaquée et que le suspect numéro un était...Rodjo !

Recherché par toutes les polices de France, dans quel pétrin était-il allé s'engluer ?

Le livre était tombé sur le sol de la cellule, et on voyait le titre « crime et châtiment » entre les tennis sans lacets du dormeur.

Jusqu’ici, rien ne l’avait perturbé, ni les portes qui claquaient, ni les clés fourrageant dans les serrures.

Un rayon de soleil passant par la lucarne éclaira les oranges qu’il avait reçues. Sa main prit la plus belle, la plus ronde, la plus rose, et il pensa à celle qui était venue la lui apporter…

Sur l‘orange, il posa son front, puis ses lèvres, il la fit rouler sur sa joue, la caressa de la main, du bras, du pied, la jeta en l’air et la rattrapa.

Puis d’un coup de dent il la perça et la déshabilla entièrement, d’un seul mouvement il la débarrassa de sa peau luisante.

L’orange apparut, fraîche et rose, vulnérable, comme consentante. Du bout de sa langue, il sépara un à un, les différents quartiers,…

Elle reposait maintenant sur la table, immobile, ouverte, et offerte à ses appétits.

Il approcha sa bouche, un sourire découvrait ses dents ; il la mordit de sa canine gauche :

elle était agréablement juteuse et il la suçota avec délices.

[ ben dis donc... chapeau rotko! Une scène d'un érotisme torride autour d'une orange...

Ça me rappelle un dessert, dans un restaurant antillais: les yeux de la veuve... ]

Au parloir, Civette attendait. Derrière les vitres incassables, elle voyait défiler les prisonniers. Son regard s'attarda sur l'un d'eux, qui l'attira par son mutisme. Une femme tentait de lui arracher quelques mots à grand renfort de suppliques. Immobile, il semblait l'avoir oubliée. Ses prunelles ambrées croisèrent celles de Civette. Elle frémit et s'agita sur sa chaise.

Etait-ce un sourire qui se profilait sur les lèvres ombrées par une barbe naissante ? A travers le tissu de ses vêtements sales, elle devinait un corps qui n'était pas sans attrait. Son visage amaigri avait des fragrances animales qui éveillaient en elle des pulsions sauvages. Tout endurant qu'il fût, l'adolescent avait décidément été trop gentil à son goût.

Un "bonjour" sonore la fit sursauter. Face à elle, de l'autre côté de la vitre, se tenait Rodjo. Il semblait en forme.

- Tu as de la pulpe d'orange sur la bouche, fut tout ce qu'elle trouva à dire.

- Tu as de la pulpe d'orange sur la bouche, fut tout ce qu'elle trouva à dire.

Elle était là, appuyée le dos au mur, avec sa petite robe de cuir noir qui laissait voir ses cuisses bronzées. Tout son corps respirait le péché.

Il rougit et porta maladroitement sa main à sa bouche, embarrassé.

- Eh bien ! Qu’est-ce qui t’arrive ?

Elle éclata de rire et lui colla un bécot sur le coin de la bouche.

- Tu t’ennuyais sans moi ?

- Oui, c’est-à-dire non, bafouillait le prisonnier, j’avais de quoi lire, oui, mais un peu de mal à fixer mon attention.

- pas grave ! dit-elle, j’ai de bonnes nouvelles pour toi !

Je t’ai trouvé un avocat, mais on n’en aura pas besoin : la banque retire sa plainte, vu que le directeur de l’agence, c’est mon parrain - et qu’il ne me refuse rien.

........

- ben alors ? Tu ne dis rien ? Embrasse-moi donc, idiot !


embrasse-moi, idiot

Rodjo osa un timide baiser sur la joue rose de notre héroïne.

Qui fut déçue de cette soudaine pudeur, bien éloignée des élans ardents qu'elle lui connaissait du temps où ils étaient à Sainte-Anne, là-haut, chez les Celtes.

Civette attendit le temps des formalités et raccompagna son ami au camping où il résidait.

Elle lui avait acheté un livre de ses écrivains préférés, Esparbec.

Curieusement, quand elle le lui remit, Rodjo ne sembla pas si heureux.

Elle sentit une certaine indifférence et fut médusée par les propos de Rodjo :

- Ecoute, Civette, ton attention est délicate, mais tu sais, j'ai changé. Mon séjour derrière les barreaux a été une vraie révélation. J'y ai rencontré la sainteté. Oui, la sainteté. En la personne de mon camarade de cellule : "Dédé la grande chausse". Oui, Dédé, tu vois, c'est comme un béatifié. Un moine. Un pur.
Il m'a ouvert la voie de la Lumière Divine...

Evidemment, Rodjo ne se doutait pas que de son côté, Civette avait accompli le chemin inverse, et quitté Saint Polac pour vivre sans complexe dans le stupre et la luxure.

Curieux ces deux destins qui ne se croisaient jamais.

Elle se sentit gênée...


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« Curieux ces deux destins qui ne se croisaient jamais. » se disait en elle-même la belle cycliste. Elle réfléchit, pesa le pour et le contre, et décida pour forcer le destin d’acheter le mardi matin



un balai paille de riz.


Le soir, la tête recouverte d’un foulard gris poussière, et d’une salopette grenat, elle se rendait à l’église du Vieux-Boucau, se plantait dix minutes près du « second pilier à l'entrée du chœur, à droite du côté de la sacristie », comme Paul Claudel à Notre Dame, et le moment venu, poussait tranquillement la poussière vers le premier confessionnal à l’entrée du déambulatoire.

Là, on eût dit qu’elle briquait les dalles tant elle mettait un soin méticuleux à gratter une surface minuscule. Une araignée tissant sa toile aurait fait plus de bruit. A cette heure on n’entendait que des chuchotements étouffés, mais la Civette à l’ouie fine n’en perdait pas une miette.



C’est là que le nouveau converti confiait à un Franciscain (1) ses fantasmes nocturnes.

Civette n’en croyait pas ses oreilles. Ce que les pires érotomanes n’avaient pas osé imaginer, Rodjo s’y livrait toutes les nuits.

Et aux questions précises de son interlocuteur, il entrait dans les plus infimes détails…

Civette, dans son ébahissement admiratif, laissait son balai, s’agenouillait sur un prie-dieu, et, la tête dans les mains, recueillait religieusement la confession des péchés les plus immondes et des pensées les plus impures.

Trois soirs de rang elle resta deux heures (environ de 17h à 19h) sur le prie-dieu de l’église du vieux Boucau.

Au matin du vendredi, sa décision était prise :, elle inviterait l’obsédé du vélo et de la galipette, à une séance de tandem, le samedi matin.

(1) - on saura plus tard qu’il s’agissait d’un détraqué qui prenait son plaisir à écouter des cochonneries.