Grain de sel - Forum littéraire et culturel
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.


Forum littérature, roman, polar, poésie, théâtre, BD, SF, auteurs et livres du monde entier sur le forum littéraire et tous les arts, cinéma, peinture ...

Une table conviviale pour parler des livres, des spectacles, et goûter aux plaisirs des mots.
 
AccueilPortail*Dernières imagesIndex auteursS'enregistrerConnexion
Le deal à ne pas rater :
Cartes Pokémon 151 : où trouver le coffret Collection Alakazam-ex ?
Voir le deal

 

 Jean Rhys [Dominique]

Aller en bas 
+2
rotko
Moon
6 participants
Aller à la page : Précédent  1, 2
AuteurMessage
Moon
Animation
Moon


Nombre de messages : 8306
Age : 34
Localisation : Seattle
Date d'inscription : 16/12/2006

Jean Rhys [Dominique] - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Jean Rhys [Dominique]   Jean Rhys [Dominique] - Page 2 EmptyMer 03 Juin 2009, 17:01

J'ai écrit un article sur Jean Rhys pour mes cours, je vous le mets en spoiler.

Spoiler:
Revenir en haut Aller en bas
http://lumiereaout.canalblog.com/
Nymphéa
pilier
Nymphéa


Nombre de messages : 1480
Age : 70
Localisation : Nord
Date d'inscription : 28/12/2008

Jean Rhys [Dominique] - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Jean Rhys [Dominique]   Jean Rhys [Dominique] - Page 2 EmptyMer 03 Juin 2009, 18:42

Merci Moon pour toutes ces précisions très, très intéressantes et révélatrices sur cette oeuvre et son auteur. cheers
Revenir en haut Aller en bas
Nestor
Admin
Nestor


Nombre de messages : 1576
Date d'inscription : 25/12/2005

Jean Rhys [Dominique] - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Jean Rhys [Dominique]   Jean Rhys [Dominique] - Page 2 EmptySam 13 Juin 2009, 18:47

Citation :
L'Oiseau moqueur et autres nouvelles. The Whistling Bird
de Jean Rhys chez Denoèl, traduction par Jacques Tournier.

dix-huit nouvelles de femmes au bord du gouffre.

Ces nouvelles sont préfacées par Christine Jordis qui a publié une étude sur Jean Rhys intitulée la prisonnière chez Stock.

Kismet met en scène des doublures de vedettes dans le monde du spectacle, elle perdent pied petit à petit, et même si elles se bercent d'illusions, on sent bien que la déchéance les guette, à moins que.

Avec "J'espionne une étrangère", c'est la conspiration des insulaires contre une étrangère, dans le contexte de la guerre qui favorise rumeurs méchantes et comportemnts paranoiaques.

Dans cette dernière nouvelle, on entend les conversations mêmes qui révèlent la cruauté et l'injustice des ragots. La méchanceté se donne bonne conscience, et Jean Rhys n'a pas besoin d'en rajouter pour soulever notre indignation contre de tels agissements.

Citation :
Jean Rhys ne cessa de décrire au cours de son oeuvre brève et intense[...] l'affirmation de la cruauté humaine, la misère des faibles, et en dépit de tout [la présence] de la beauté et de l'espoir...

C. Jordis.
Revenir en haut Aller en bas
https://grain-de-sel.1fr1.net
rotko
pilier
rotko


Nombre de messages : 69282
Date d'inscription : 26/12/2005

Jean Rhys [Dominique] - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Jean Rhys [Dominique]   Jean Rhys [Dominique] - Page 2 EmptySam 28 Nov 2009, 16:49

En remerciant Moon qui a bien prêché pour Jean Rhys, cheers

Pour Geneviève Brisac dans « la marche du cavalier » l’injustice faite à jean Rhys commence avec une photo qui la représente âgée, moins vivante et séduisante que dans ses textes. L’autre serait de lui tenir à grief des défauts, comme l’alcoolisme, qu’on pardonne aux hommes en les mettant sur le compte de la « virilité ».

Chez elle, les petits bonheurs peuvent créer les grands :

Citation :
« En sortant sur la place de l’Odéon, je me sens heureuse grâce à mes nouveaux cheveux, mon chapeau neuf, au bon repas, à l’odeur de la nuit à Paris »,

ou bien c’est une chanson qui sert de litanie dans Bonjour Minuit, à rôle de prière,

Citation :
Maladie d’amour
Maladie de la jeunesse
Éloigne-toi de moi
Reste loin de moi.

Les femmes ont, semble-t-il, le pouvoir de parler de ces choses naturellement, de leur donner l’importance qu’elles ont, pour traduire un état d’esprit ou masquer une humeur.

C’est pourquoi l’achat d’une paire de chaussures ou la joie de la nouvelle robe, ont tout à fait leur place sur le fil du bar…
Revenir en haut Aller en bas
https://grain-de-sel.1fr1.net/forum.htm
Invité
Invité
avatar



Jean Rhys [Dominique] - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Jean Rhys [Dominique]   Jean Rhys [Dominique] - Page 2 EmptyVen 07 Sep 2012, 16:00

La prisonnière des Sargasses

Le point de départ de Rhys est bien Jane Eyre. Non contente du sort qui est réservé à l'épouse créole Bertha Mason dans le roman de Bronte, elle décide de donner la parole à celle qui était un personnage muet.

Ce projet même est une subtile façon de dénoncer la posture de la littérature britannique au 19ème (et sûrement occidentale dans son ensemble) qui accorde toujours une place à des personnages issus de colonies - ce qui contribue à faire de l'impérialisme une composante normale de la société, un élément parmi d'autres dans le paysage occidental - tout en faisant d'eux des personnages secondaires qui ne peuvent s'exprimer par eux-mêmes et qui se retrouvent à la merci du narrateur qui les fait passer pour tout ce qui lui chante.

Ce texte montre la sensibilité d'une écrivaine, antillaise elle aussi, qui se sent le devoir de réhabiliter les ''siens'' en racontant l'histoire de Bertha, tristement oblitérée, qui devient Antoinette. Elle se fait donc le porte parole de sa vérité afin d'humaniser le portrait, ''racialement'' péjoratif qui est donné de l'épouse dans le classique anglais, lui-même reposant sur un binarisme certainement peu accidentel avec d'un côté, Jane, la vaillante, la douce, la courageuse, la bienveillante et de l'autre Bertha, la sorcière, la meutrière, la folle...La présence de l'Homme blanc, qui ici est une femme, se veut régulateur alors que celle de l'étranger est liée au trouble, au chaos, à la pathologie !

En tant qu'auteur issu de la ''périphérie'', Rhys veut clairement proposer une vérité alternative à cette histoire trop tranchée, elle le fait notamment en déconstruisant les canons littéraires d'un héritage culturel ''blanc''. En effet, elle adopte des schémas narratifs temporels, et esthétiques qui reflètent un certain pluralisme culturel . La structure tripartite du texte prend à revers la progression linéaire du roman victorien, considéré comme le modèle le plus sophistiqué et le plus abouti du genre romanesque. Ceci permet aussi de transformer une mise en scène monolithique des personnages en une présentation qui se veut fragmentaire et pourtant plus complète grâce précisément à cette vision parcellaire. Rhys met l'accent sur le monde intérieur de Bertha/Antoinette et de Rochester, et cette introspection ne peut se faire, si elle veut être véridique, qu'au travers d'impressions. Elle réinvente donc le texte de base grâce à des outils narratifs modernes et postmodernes.

Les principaux thèmes abordés à mon sens sont :

La question de l'identité :

C'était une chanson sur un cancrelat blanc. C'est moi. C'est comme ça qu'ils nous appellent nous tous qui étions ici avant que les gens de leur propre race, en Afrique, ne les vendent aux marchands d'esclaves. Et j'ai entendu des Anglais nous appeler des nègres blancs. Aussi, entre vous tous, je me demande qui je suis, et où est mon pays et à quelle race j'appartiens et pourquoi je suis née du reste.

La thématique identitaire est abordée de façon complexe, nous n'avons pas les blancs d'un côté contre les ''noirs'', comme le symbolise le métissage d'Antoinette : elle est la fille d'un ancien grand propriétaire d'esclaves qui a fait fortune sur l'île et qui s'est suicidé suite à l'écroulement de ses affaires à cause de l'acte d'émancipation de 1833 et d'une femme originaire de la Martinique. Sa famille est rejetée par tous, les autochtones et les britanniques. Comme le dit Rochester :

Des yeux en amande, tristes, sombres, étrangers. Elle a beau être une Créole de pure descendance anglaise, ces gens-là ne sont pas anglais ni non plus européens


La métisse voit tous ses espoirs de vie normale anéantis par son mariage arrangé avec Rochester, un anglais intéressé et libidineux dont la relation avec Antoinette montre tous les clichés racistes d'une Angleterre coloniale. A son contact, elle perd le peu de raison qui lui restait. Rochester, complètement perdu dans cet espace naturel qui lui est hostile, finit par l'emmener en Angleterre. Dès lors, c'est le décor établi par Bronte que nous retrouvons, avec l'épouse enfermée dans la grange. La dernière scène montre la tentative d'incendier le manoir, mais après avoir lu l'histoire d'Antoinette, le lecteur ne peut plus aussi facilement condamner les élans meurtriers de l'héroïne.


l'esclavage :

Il n'est pas uniquement lié à la ''race''. Antoinette semble destinée à l'assujettissement, pas simplement parce qu'elle est créole, l'origine ethnique n'y est pour rien, mais plutôt en raison de sa quête d'amour auprès d'un homme qui ne connaît guère ce genre de sentiments. Rochester ne s'intéresse qu'à son corps, pas à sa vie, son passé, et ses états-d'âme. Lui-même est voué à une certaine dépendance, dominé comme il l'est par ses pulsions sexuelles.

Je ne l'ai pas achetée, c'est elle qui m'a acheté, ou, en tout cas, elle le pense.


Le lien entre folie et féminité:

La folie y est exprimée grâce à des images de chaleur, de feu et de sexe, le tout accentué par un décor de nature luxuriante.
La femme et le désir qu'elle provoque sont présentés comme nocifs. Le personnage de Rochester m'a fait penser à Nietzsche et ce qu'il disait au sujet des rapports hommes-femmes:

L'homme véritable veut deux choses : le danger et le jeu. C'est pourquoi il veut la femme, le jouet le plus dangereux.


Cependant, il ne semble pas bien maîtriser les règles si bien que le jeu, qu'il pense avoir gagné d'avance, finit souvent par se retourner contre lui.

Le mariage est présenté comme une institution folle puisqu'elle contraint les femmes à une dépendance totale et très infantile, à la fois financière et affective, vis-à-vis du conjoint. Antoinette essaie autant que faire se peut de lutter contre les tenants d'un système patriarcal même si ce combat doit la mener jusqu'à la folie.

Je trouve que cette ré-écriture de Jane Eyre, œuvre pourtant considérée comme étant proto-féministe, complique singulièrement le débat sur le sort de la femme et le débat féministe qui en découle. L'attachement qu'Antoinette porte à sa robe rouge est intéressant, c'est comme si elle était le symbole de sa féminité, associée à la fois à la passion et à la destruction. Aussi, le dépendance financière se pose en obstacle et contraint la femme à l'asservissement, pourtant, pour Antoinette, le richesse n'a aucun sens ni aucune importance alors qu'avec Jane, la situation est plus claire, elle est une femme travailleuse, et autonome.

Le texte de Rhys nous montre bien que tout n'est pas si simple, ni l'identité culturelle, religieuse, ou sexuelle et peut-être qu'à trop y réfléchir on finirait comme Bertha/Antoinette, fou à lier.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





Jean Rhys [Dominique] - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Jean Rhys [Dominique]   Jean Rhys [Dominique] - Page 2 Empty

Revenir en haut Aller en bas
 
Jean Rhys [Dominique]
Revenir en haut 
Page 2 sur 2Aller à la page : Précédent  1, 2
 Sujets similaires
-
» Dominique Bauby, le scaphandre et le papillon
» Dominique A
» Dominique Bona
» Dominique Baeyens

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Grain de sel - Forum littéraire et culturel :: FICTION :: Auteurs anglais et anglophones-
Sauter vers:  
Ne ratez plus aucun deal !
Abonnez-vous pour recevoir par notification une sélection des meilleurs deals chaque jour.
IgnorerAutoriser