Henry Miller

Henry Miller, Plexus, France-Loisirs.

Les coulisses d'une vie d'écrivain

Henry Miller raconte sa vie, avec une multitude d'anecdotes, de rencontres, d'épisodes comiques ou pénibles, de rêves et de dures réalités. Le présent, c'est la vie avec Mona, le passé, les souvenirs d'enfance éparpillés, et quelques allusions, récurrentes, à un première liaison et à une fillette invisible. Outre Mona, des individus bohèmes, piliers de bars, vivant d'expédients et de boniments.

On trouve aussi l'amour des livres, des connaissances les plus hétéroclites, et le désir d'écrire, et de "fourguer" pour survivre les modestes productions de son écriture.

Certaines pages inspirées m'ont bien plu, ici un éloge de Van Gogh, là une aventure cocasse.

Mais les longueurs abondent, et les incessantes recherches d'argent ou de logis lassent ma patience. D'autant qu'on ne peut s'empêcher d'avoir une certaine image du personnage : hâbleur, pique-assiette, tapeur, noceur, faux-candide et fin roublard.

Qu'il passe son temps avec des énergumènes pittoresques passe encore, mais de là à nous rapporter leurs histoires in extenso...

Sur la fin du livre, Miller ressent le besoin d'expliquer sa propre conduite, mais sous la forme d'une accusation à peine voilée pour Mona :

Citation :

"Ce que je déteste le plus, c'est cette perpétuelle façon d'emprunter et de mendier, cette façon de se servir des gens comme de poires"

p 521.

Quant à lui-même, il reste, dit-il, bien naïf sur les rapports de Mona avec ses généreux admirateurs :

Citation :

"Mona gagnait plus qu'assez pour nos besoins à tous les deux. Et puis elle rapportait constamment à la maison des cadeaux qu'on pouvait convertir en espèces. Toujours la même histoire. Les gens ne pouvaient résister à l'envie de la couvrir de cadeaux. C'étaient tous des "admirateurs" bien entendu. Elle préférait les appeler "admirateurs" plutôt qu'"amoureux". Je me demandais bien souvent ce qu'ils admiraient en elle, d'autant plus qu'elle ne leur servait que des rebuffades. A l'entendre taper sur ces "crétins" et ces "couillons", on aurait cru qu'elle ne leur souriait même jamais".

p 486.

Pratique de savoir ainsi se dédouaner !

Leçon d'écriture p 117

"

Citation :

Pas de littérature, compris ? je veux que vous racontiez votre histoire exactement comme venez de me la raconter à moi[...] Déversez simplement votre histoire -aisé et naturel- comme si vous la racontiez à un ami..."

Leçon reçue et appliquée par Henry Miller.

C'est bien gentil ces renseignements... On voit que tu es bien documenté! Mais je ne suis pas trop fan de Miller, par contre je vais ouvrir un fil sur un autre auteur américain qui lui m'a bien plu.

Je suis moi-même un grand naïf. Je me suis délecté de la prose millérienne pendant des années sans mettre en doute sa parole, sans esprit critique. C'était sans doute la meilleure manière d'en jouir. Oui, il y a des longueurs chez lui, et des rallonges. Mais aussi de grands moments. Du moins, dans mon souvenir de ces lectures, qui remonte à 15 ou 20 ans (je menais à l'époque une vie un peu "millérienne"). J'ai essayé de relire le Tropique du Cancer il y a 1 ou 2 ans, je l'ai trouvé un peu plat. Reste les envolées lyriques dont il a le secret, des pages et des pages sans retour à la ligne, une vraie diarrhée verbale (les surréalistes sont passés par là). Je dois encore pouvoir retrouver mes notes de lecture de l'époque, agrémentées de citations et de remarques. J'en ressortirai l'une ou l'autre pour ce fil dans les prochains jours.

Je comprends ce que tu veux dire, Alain. Je l'ai lu tôt (donc avant toi ) mais peut-être plus que par l'oeuvre elle-même - que je n'ai jamais réabordée - étions-nous fascinés par le personnage, l'odeur de souffre qui traînait autour de lui, sa présence fascinante à La Coupole, ses rapports avec la toute aussi sulfureuse Anaïs Nin...

Suis pas sûre d'avoir envie de m'y replonger...

Peur de la nostalgie ?

Henry Miller...C'est mon ami et c'est mon Maître, comme disait l'autre....Pour moi, ça restera celui qui m'a donné envie d'écrire...ou plutôt m'a donné le courage de le faire..;Croire Miller ?!....Certainement pas...Sans doute un des plus beau affabulateur que la terre aie portée..;Mais quel Ecrivain !

Je viens du fil sur Steinbeck, ah bien oui Henry Miller en faisait partie, j'ai aimé, ce que j'apprécie c'est certainement ceux qui osent, le côté soufre comme le dit Maïa aussi est attirant, par contre je ne trouve pas Anaïs Nin enfin qu'elle a une vie sulfureuse, mais bon c'est une question de goût, pour moi elle a une vraie vie... normale, remise en question, introspection personnelle et ... féminine, féministe ...
ok ok je sors ... on n'ose plus s'avouer libre de nos jours ... c'est d'une tristesse :silent:

Alain a écrit:

Je suis moi-même un grand naïf. Je me suis délecté de la prose millérienne pendant des années sans mettre en doute sa parole, sans esprit critique.

Oui j'aime bien ça, se laisser énivrer, parfois j'ai dû mal à retourner dans cet état, comme défaut je trouvais que j'étais incrédule, à cause de ? l'âge, le vécu et je n'arrive pas à m'y faire, c'est sympa de s'en laisser conter !

Les passages brillants comme dans le diable au paradis sur rimbaud, tout à fait d'accord. Mais les passages verbeux me font penser qu'il abuse (de) son lecteur. Comment accepter ce passage hypocrite que j'ai déja cité

Citation :

"Mona gagnait plus qu'assez pour nos besoins à tous les deux. Et puis elle rapportait constamment à la maison des cadeaux qu'on pouvait convertir en espèces. Toujours la même histoire. Les gens ne pouvaient résister à l'envie de la couvrir de cadeaux. C'étaient tous des "admirateurs" bien entendu. Elle préférait les appeler "admirateurs" plutôt qu'"amoureux". Je me demandais bien souvent ce qu'ils admiraient en elle, d'autant plus qu'elle ne leur servait que des rebuffades. A l'entendre taper sur ces "crétins" et ces "couillons", on aurait cru qu'elle ne leur souriait même jamais".

Il vivait à ses crochets, inutile de jouer le naif sur ce qu'elle pouvait accorder à ses "admirateurs". Etre cynique ou alors ne pas aborder la question.

rotko a écrit:

Henry Miller, Plexus, France-Loisirs.

Il n'y a pas d'autres éditions ? je ne trouve pas ... :|

Utopie a écrit:

rotko a écrit:

Henry Miller, Plexus, France-Loisirs.

Il n'y a pas d'autres éditions ? je ne trouve pas ... :|

livre de poche 6268 mais gare au texte compact ! j'ai hérité de ce livre qui m'a offert un beau confort de lecture, avec ma petite planchette

Utopie a écrit:

par contre je ne trouve pas Anaïs Nin enfin qu'elle a une vie sulfureuse,

Tu sais Utopie, malgré tes 99 ans, je pense que tu es beaucoup plus jeune que moi

Quand le Journal d'Anaïs Nin a été publié en France, dans les années 70 et même si c'était après mai 68, il a beaucoup choqué...

Heureusement, on est devenus moins pudibonds et tu as parfaitement raison de revendiquer d'être "libre"

maïa a écrit:

Tu sais Utopie, malgré tes 99 ans, je pense que tu es beaucoup plus jeune que moi

Tu en enlèves 50 et après seule toi peut le dire

Oui son texte a choqué... ses textes mais au fond je ne la trouve pas si si si ...euh.. enfin tu vois ? oui elle a mené sa vie, enfin oui je parlais par rapport à aujourd'hui ou même il y a 20 ans.

Je ne sais pas exactement pourquoi cette femme me plaît !

Mais moi aussi, elle me plaît

Et je confirme donc que, hélas pour moi, tu es plus jeune

Utopie a écrit:

ce que j'apprécie c'est certainement ceux qui osent, le côté soufre comme le dit Maïa aussi est attirant, par contre je ne trouve pas Anaïs Nin enfin qu'elle a une vie sulfureuse, mais bon c'est une question de goût, pour moi elle a une vraie vie... normale, remise en question, introspection personnelle et ... féminine, féministe ...
ok ok je sors ... on n'ose plus s'avouer libre de nos jours ... c'est d'une tristesse :silent:

Rien de bien sulfureux dans les livres de Miller et Anaïs Nin, en effet. Enfin, tout est relatif. Dans l'Amérique puritaine, Miller était sulfureux, oui sans doute. Ce qu'on lit dans son oeuvre, c'est la vie, rien de plus, mais surtout, rien de moins. Il en rajoute une couche ici et là.
J'ai essayé de lire le Tropique du Capricorne à 15 ou 16 ans, j'ai arrêté après 200 pages. C'était pas le moment. A 18 ou 19 ans, je m'y suis remis, et là, ça a été la révélation. Dans la foulée, j'ai lu une bonne quinzaine de ses livres. Quelque part, il a écrit: "Je suis un drôle de numéro intellectuel.", une phrase en laquelle je me retrouvais bien.
Le journal d'Anaïs Nin est parsemé de belles réflexions. Je viens d'en retrouver une, notée dans mes carnets: « Comme chaque ami représente un univers en nous, un univers peut-être pas encore né avant leur arrivée, et ce n’est que par cette rencontre que nait un nouvel univers. » (Anaïs Nin, Journal 1934-1939, p. 299)

une petite citation millerienne: "Tout ce que l'homme décide de faire, il le fait. C'est la belle et terrible chose avec l'homme, qu'il ait en lui le pouvoir et la faculté de réaliser ses rêves." (Souvenirs, souvenirs)

et une deuxième, "J'avais toujours faim moi-même, parce qu'il était impossible d'aller au petit déjeuner que l'on prenait à une heure impie le matin, juste au moment où le lit devient croustillant." (Tropique du Cancer)

Citation :

temps à manger, à boire, à dormir, ou à aller au water-closet ? Il serait certes intéressant de savoir ce que ces gens-là veulent dire quand ils parlent de "perdre du temps".

p. 35


Lire aux cabinets, une petite réflexion qui fait aller le cerveau là où on ne l'attendait pas.

Court (57 p.) mais dense, Lire aux cabinets, entre pamphlet et texte humoristique, constitue en fait le chapitre 13 des Livres de ma vie.

Citation :

Le temps, le temps... Je me suis souvent demandé, ce que nous ferions vraiment de notre temps, si on nous accordait subitement à tous le privilège de fonctionner parfaitement. [...] Que ferions-nous de notre temps ? Pour limiter momentanément le problème à un seul de ses aspects - la lecture - essayez, je vous en prie, d'imaginer à quels livres, à quels genre de livres, nous estimerions alors nécessaire ou utile de consacrer notre temps. [...] les raisons pour lesquelles nous lisons : un, pour nous délivrer de nous-mêmes : deux, pour nous armer contre des dangers réels ou imaginaires ; trois, pour nous "maintenir au niveau" de nos voisins, ou pour les impressionner, ce qui revient au même ; quatre, pour savoir ce qui se passe dans le monde ; cinq, pour notre plaisir, ce qui veut dire pour stimuler et élever nos activités et pour enrichir notre être.

p. 30-31

Un sondage sur GDS* ?

Citation :

Pour limiter momentanément le problème à un seul de ses aspects - la lecture - essayez, je vous en prie, d'imaginer à quels livres, à quels genre de livres, nous estimerions alors nécessaire ou utile de consacrer notre temps. [...]

Oui ça j'essaye, c'est passionnant et pas si facile.

Citation :

les raisons pour lesquelles nous lisons : un, pour nous délivrer de nous-mêmes : deux, pour nous armer contre des dangers réels ou imaginaires ; trois, pour nous "maintenir au niveau" de nos voisins, ou pour les impressionner, ce qui revient au même ; quatre, pour savoir ce qui se passe dans le monde ; cinq, pour notre plaisir, ce qui veut dire pour stimuler et élever nos activités et pour enrichir notre être.

Justement depuis quelques mois, je réfléchissais au fait que la lecture peut-être une évasion mais aussi pour certains une fuite, un peu comme le point "un" mais pour se délivrer de la vie, des angoisses, fuir les réalités, le vide etc.

En tout cas merci Seuguh, je vais rajouter ce titre sur ma liste !

Seuguh a écrit:

Un sondage sur GDS* ?

Pourquoi pas ? et justement l'occasion d'en discuter

L'étude a été pour moi le souverain remède contre les dégoûts de la vie, n'ayant jamais eu de chagrin qu'une heure de lecture n'ait dissipé.
Montesquieu

PS: mais cela peut s'interpréter de 2 façons...

le seul que j'ai lu est: jours tranquilles à Clichy
et un spécialiste de Miller m'a dit qu'il avait été écrit par anaïs nin

vous me confirmez?

lelivre a été réecrit en 1956; A voir

Citation :

Anaïs Nin et Henry Miller ont entretenu pendant vingt ans une correspondance passionnée. Commencée en 1932, celle-ci s'achève vingt ans après, en Californie, alors qu'ils sont tous les deux devenus célèbres. Récit d'un amour fou, qui fait place peu à peu à la tendresse, ces lettres retracent également l'évolution de leur oeuvre littéraire, permettant d'accéder à des éléments très instructifs et concrets comme les conseils et les critiques bienveillantes qu'ils pouvaient s'adresser. Cette correspondance constitue un document de première main sur l'époque qu'ils traversent et les personnalités du monde des lettres et des arts qu'ils fréquentent.
Ce texte est resté inédit jusqu'à la mort du mari d'Anaïs Nin. Il propose une réflexion intemporelle sur la complexité du sentiment amoureux.

J'ai craqué! Je viens de l'acheter. Quelqu'un l'a-t-il lu?
J'ai aussi acheter le premier volume du journal d'Anais Nin. Je vous ferai un petit commentaire mais pas tout de suite.... J'ai une pile de livres à lire.