Maya je vais en mettre une autre ici: le chat vaut bien cha
UN AUTRE MOIJulia, les yeux fermés pensait :
« Il me caresse le dos mais parfois sa main pèse sur mes vertèbres et j’ai envie de mordre. Je me retiens bien sûr. Pour lui, il ne s’agit que d’un mouvement naturel me montrant à sa façon son amour pour moi. Je fais entendre seulement des sons de gorge qui lui font dire à qui veut l’entendre :
« Elle est adorable, douce et câline… je me demande comment je réagirais si elle venait à disparaître avant moi. Que voulez-vous je l’adore, c’est tout ce qui me reste de vivant dans cette maison depuis que les enfants sont partis. Elle est gaie, toujours à m’attendre quand je rentre tard. Elle me fait une telle fête que j’en oublie parfois les journées difficiles que je passe souvent depuis la mort d’Elisa.
Bien sûr, elle ne la remplace pas tout à fait mais cette présence permanente près de moi me rassure.
De plus, elle a décidé, il y a peu de temps de venir dormir avec moi, je ne l’y avais pas invitée, ayant pris l’habitude de dormir seul depuis plusieurs années. Mais retrouver cette chaleur dans mon dos, pouvoir la caresser pendant son sommeil, me réveiller en pleine nuit et la sentir, là contre mes reins, si fragile me comble de joie.
Quand je prépare le repas, ou que je vais dans le jardin, elle me surveille, me couve de son regard plein de tendresse mais ce que je préfère avant tout, ce sont les moments du repas partagé : elle en face de moi, attendant que je commence à porter la fourchette à mes lèvres pour lui faire comprendre qu’elle doit goûter aux mêmes mets que moi, alors je craque et lui tend tendrement. Elle s’en saisit délicatement et la voir fermer les yeux pour mieux savourer me comble de bonheur.
Bien sûr, il y a les petits problèmes quotidiens, la toilette qu’elle ne veut faire qu’après déjeuner, alors que moi je prends ma douche dès mon lever. Et puis, elle n’est pas très soigneuse, ne range rien, mais je me dis que je préfère le faire moi-même et qu’elle soit près de moi.
Elle ne change pas de vêtement, toujours le même, elle le nettoie comme elle peut, pas très coquette non plus, mais je ne me fais pas de soucis, quand elle se glisse sur mon lit, elle est plus propre que certaines femmes qui restent des heures devant leur miroir. Elle adore sa robe teintée de beige, marron et noir. Moi aussi j’aime cette robe qui met en valeur son doux regard vert lumineux.
En fait, vous avez compris, je l’aime d’un amour fou, démesuré me disent parfois des amis. Mais que savent-ils de ma solitude ? que savent –ils de la joie éprouvée par ses baisers faits du bout de la langue. Que savent-ils de cette tendresse qu’elle manifeste à chaque instant à mon égard ?
Tenez une histoire encore pour vous convaincre : un jour que je partais seul en voiture, son regard triste qu’elle avait à chaque fois cette fois- là me fit fondre. Je pris donc la décision de l’emmener avec moi. Je n’allais pas très loin, une centaine de kilomètres, chez des amis. Après les avoir prévenus que j’aimerais leur faire connaître Julia, ils furent vraiment sympas :
- Mais bien sûr amène là ! au contraire ! Depuis le temps que tu nous en parles nous n’avons qu’une hâte c’est de la rencontrer, par contre y a –t-il quelque chose qu’elle n’aime pas en ce qui concerne les repas ?
- Elle aime tout du moment qu’elle est avec moi !
- AH c’est bien toi ça ! toujours en train de te vanter, se mit à me plaisanter Yvan, mais tu as raison on fait comme d’habitude, à la bonne franquette, vous mangerez ce qu’il y aura.
- Bon alors nous arriverons vers douze heures trente , ça va ? pas trop tôt ?
- Non non c’est parfait pas de problème.
Quand j’appelai Julia pour m’accompagner, elle accourut, je la pris dans mes bras et lui murmurai : « c’est un grand jour aujourd’hui, tu sais je vais te présenter à Yvan et Martine et cela me fait vraiment plaisir, car ce sont de véritables amis depuis des années.
Comme pour me remercier, elle me déposa un baiser léger et humide sur les lèvres : j’étais aux anges j’adorais quand elle me faisait ces baisers là pleins de tendresse et de douceur.
Le voyage se passa très bien, la circulation était fluide et il faisait très beau. Pas trop chaud, une petite température estivale qui me détendait.
Julia était assise près de moi regardant la route fixement, elle n’aimait pas trop la voiture aussi j’essayais de conduire doucement sans brusquerie pour ne pas l’effrayer mais en toute confiance elle prit le parti de s’endormir.
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Quand nous arrivâmes je lui caressai doucement la tête et lui dis dans le creux de l’oreille en me penchant vers elle :
- « Nous sommes arrivés ma douce »
Elle s’étira, bailla, et se mit debout. Je descendis de voiture, vins lui ouvrir la portière et la pris dans mes bras pour l’aider à descendre.
Devant son air effrayé, je lui parlai doucement, la câlinai et finalement la calmai.
Quand elle aperçut Yvan et Martine se diriger vers nous pour nous accueillir, elle eut un mouvement de recul, mais je la maintins contre moi et la présentai :
- Yvan, Martine, je vous présente ma douce, mon adorable Julia qui est mon trésor et qui a changé ma vie.
- Eh bien on peut dire que tu as fait le bon choix, dit précipitamment Yvan, elle est adorable et charmante et alors ses yeux deux merveilles, n’est ce pas Martine ?
- Oui on peut dire qu’elle est ravissante dit vivement Martine en partant d’un pas rapide vers la cuisine.
- Mais qu’est ce qui lui prend demandai-je à Yvan, pourquoi part-elle si vite ? c’est vexant !
- Non ne te blesse pas, mais en ce moment, elle n’est pas très bien, elle fait une allergie aux foins et elle n’est pas en forme ce n ‘est pas grave ça lui passera, le médecin lui a donné des médicaments. Depuis que je la connais elle fait des allergies à tout et rien ce n’est pas drôle pour elle, car ça la fatigue en plus.
Nous fûmes donc invités à passer à table et là j’ai pendant un instant craint une réaction de Julia, car, très timide je me suis dit qu’elle n’oserait pas déjeuner avec nous. Eh bien si ! au contraire, elle s’installa le plus près possible de moi, et commença à manger délicatement.
- Franchement tu sais Julia est vraiment très belle, insista Yvan. Et en plus cette robe lui va à ravir !
Le repas se déroula sans incident, et tout le monde se détendit si ce n’étaient les éternuements de Martin qui finissaient par nous faire rire malgré nous, ce fut une belle journée.
Le soir venu, ils nous raccompagnèrent à la voiture en nous répétant qu’ils avaient été ravis de faire la connaissance de Julia qui, pas causante ne fit que les regarder de ses magnifiques yeux verts.
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Je pris ma douche, allai me coucher et pendant que je lisais une revue elle, s’allongea près de moi, se mit tout contre moi et très câline me regarda sans bouger.
Je me relevai me mit sur un coude et lui caressai le ventre doucement très doucement : elle écarta les cuisses et ferma les yeux.
J’eus soudain une idée folle ! j’avais envie de la caresser encore plus, de la faire frémir sous mes doigts. Mais je me retins.
Je deviens fou ! pensai- je en moi-même, je deviens fou ! me répétai-je tout haut.
Je me levai précipitamment, enfilai mon pantalon de pyjama et descendit au rez de chaussée boire un verre d’eau pour me calmer. Je ne pouvais pas ne pas me sentir mal à l’aise devant cette pensée qui m’obsédait de plus en plus. Il fallait que j’en parle à quelqu’un mais à qui ? Sylvain et Martine ? ils se moqueraient de moi et ne me comprendraient pas . Un médecin ? pour lui raconter quoi ? que je ne me sens pas bien ? ce serait faux. Que j’ai envie d’être ailleurs ? Ca encore pourrait être vrai, mais que pourrait faire un médecin devant un souhait de ce genre, sinon me dire :
« Monsieur prenez quelques jours de vacances et cela ira mieux vous verrez ! »
J’en étais là de mes réflexions quand j’eus comme un vertige. Oh ! rapide vite dissipé, mais je ne me sentis pas très bien. Je retournai me coucher près de Julia qui ne se réveilla même pas quand je me mis contre elle.
Je m’endormis lourdement, et le lendemain matin, les yeux encore fermés je compris ce qui m’arrivait : je voulais être un chat ! ah si j’étais un chat !
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Je m’assoupis de nouveau et ma vie défila devant mes yeux clos. J’étais un grand matou noir, le poil brillant, doux au toucher et tellement fier de moi ! j’aimais et j’étais aimé ! elle était tellement belle ma Julia, que je ne pouvais passer devant elle sans la mordiller doucement, la lécher vers les oreilles là où elle adorait. Elle ronronnait de plaisir et nous n’avions de cesse de nous câliner, nous frotter les museaux, nous imprégner de nos odeurs. Quel grand amour, nous vivions tous les deux ! A tel point que rapidement, nous décidâmes de fonder une famille, Julia eut ses petits dans une grange et je l’assistai. Je restai près d’elle et au fur et à mesure que les petits sortaient de son ventre j’allais immédiatement les prendre dans ma gueule et les ramenait aux pieds de notre maîtresse Martine.
Elle me fit ce jour là trois beaux bébés : un noiraud comme moi, un magnifique de trois couleurs comme elle et un petit rouquin qui devait avoir pris la robe de sa grand-mère, en effet la maman de Julia était rousse.
Quelle joie nous éprouvions à élever notre petite famille je léchais mes petits quand Julia se levait pour se dégourdir les pattes ou aller manger un morceau de viande que lui avait préparé Martine.
Ensuite, c’était mon tour et ce qui était le plus merveilleux pour nous deux c’est quand nous faisions le tour du jardin avec nos trois garnements. Julia en tête et moi le dernier. Nos trois bébés la petite queue dressée marchant dans les traces des pattes de leur mère et sautillant pour ne pas la perdre surtout ne pas la la cher du regard !
Nos enfants grandirent, nous en eûmes d’autres bien sûr. Julia se fit un peu plus lourde, plus fatiguée aussi. Moi-même prenant de l’âge, je restais plus facilement vautré dans un fauteuil, près d’elle, nos pattes emmêlées et nos museaux joints. Ce qui faisait sourire Martine qui nous regardait tendrement et disait à ses amis :
« J’espère qu’ils partiront ensemble car sinon celui qui restera souffrira terriblement et ne tardera pas à rejoindre l’autre … »
Elle ne pensait pas si bien dire, Julia s’éteignit un jour sans prévenir simplement en douceur, sans un miaulement sans un cri. J’étais près d’elle, perdu, effondré, ne sachant que faire. Je suis allé dans la cuisine et j’ai regardé Martine comme pour l’appeler. Elle comprit à mon regard que quelque chose de grave venait d’arriver. Elle courut derrière moi. Prit Julia dans ses bras et comme je la suivait, elle se retourna et me dit viens on va la mettre là ou elle aimait se reposer.
Elle prit une pioche commença à creuser, elle était très lourde cette pioche et au moment où elle allait l’abattre au sol je me mis à plat ventre à l’endroit où elle allait tomber. Martine ne put m’éviter et je mourus sur le coup, dans un dernier tressaillement. Notre histoire d’amour à Julia et moi s’arrêtait là, nous étions ensemble pour toujours….
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Je me réveillais en sueur, tâtais près de moi immédiatement, quelle peur affreuse, quel cauchemar ! mais Julia était là . Comme d’habitude, elle ouvrit ses yeux qu’elle avait si beaux et en s’étirant et baillant me regarda. Ce regard plein de tendresse me fit fondre en larmes. J’avais cru la perdre, en fait je l’aimais tant que sa disparition me ferait autant de mal que ce que j’avais ressenti quand ma femme était morte. il y a dix ans. Tiens, au fait cela faisait dix ans aujourd’hui qu’Elisa m’avait quitté… n’aurais –je pas fait ce rêve ou plutôt ce cauchemar à cause de ce malheureux anniversaire ou simplement parce que je voudrais être un chat pour pouvoir aimer Julia.
Quand j’étais gamin, je disais toujours à mes parents :
« Oh comme j’aimerais être un chat, je serais souple, agile, rusé, fin et j’aurais toute ma liberté. Je pourrais courir partout sans que l’on m’appelle sans cesse pour déjeuner ou faire ma toilette ! »
Ce matin, je réalisais que mon rêve s’était concrétisé. Cette nuit j’avais vécu, aimé, été père, et surtout était mort d’amour comme les chats peuvent mourir.
Ah si j’étais un chat je crois que je donnerais tout mon amour à Julia encore plus que je ne le fais en tant qu’être humain, car vous l’aviez compris Julia est une magnifique chatte aux beaux yeux verts et elle est à moi………