Frank Conroy

À New York, dans les années quarante, un enfant regarde, à travers les barreaux du soupirail où il est enfermé, les chaussures des passants qui marchent sur le trottoir. Pauvre, sans autre protection que celle d'une mère excentrique, Claude Rawlings semble destiné à demeurer spectateur d'un monde inaccessible.
Mais dans la chambre du fond, enseveli sous une montagne de vieux papiers, se trouve un petit piano désaccordé. En déchiffrant les secrets de son clavier, Claude, comme par magie, va se découvrir lui-même : il est musicien.
Ce livre est l'histoire d'un homme dont la vie est transfigurée par un don. Son voyage, à l'extrémité d'une route jalonnée de mille rencontres, amitiés, amours romantiques, le conduira dans les salons des riches et des puissants, et jusqu'à Carnegie Hall...
La musique, évidemment, est au centre du livre - musique classique, grave et morale, mais aussi le jazz dont le rythme très contemporain fait entendre sa pulsation irrésistible d'un bout à l'autre du roman. Autour d'elle, en une vaste fresque à la Dickens, foisonnante de personnages, Frank Conroy brosse le tableau fascinant, drôle, pittoresque et parfois cruel d'un New York en pleine mutation.

Biographie
Frank Conroy (1936-2005) a enseigné dans plusieurs universités des États-Unis et a été directeur du prestigieux atelier de création littéraire de l'Iowa. Passionné de jazz, il a été lui-même pianiste et a écrit de nombreux articles sur la musique. Il est l'auteur d'une autobiographie (Stop-Time), d'un recueil de nouvelles (Entre ciel et terre) et de deux romans (Un cri dans le désert et Corps et âme).


Si en plus de la lecture, vous aimez la musique, alors n'hésitez plus. Ce livre se dévore, s'écoute. Vous vivez le personnage du début jusqu'à la fin. J'ai été captivée par l'ascension et la progression de ce jeune garçon qui se révèle être un des musiciens les plus doués de son époque. Très belle écriture.
Difficile de le poser avant de l'avoir terminé.

Citation :

Difficile de le poser avant de l'avoir terminé

Je confirme ! J'ai particulièrement aimé le début, c'est-à-dire le moment où il se trouve dans ce soupirail et où il découvre le piano. Après mes souvenirs sont plus flous, mais il y a une histoire de fille, de concert... Très beau livre mais que j'ai peut-être lu un peu trop... rapidement justement.

Un très beau livre, long (pas loin de 720 pages) mais jamais lassant. Pourtant, il comporte des analyses fines, détaillées et très techniques de pages musicales, classiques ou modernes. L’auteur était lui-même bon pianiste (de jazz je crois) et critique musical ; malgré tout, l’écriture de son livre ne peut qu’être le résultat d’une documentation minutieuse. Il en parle d’ailleurs dans une note qui suit le roman et j’ai cru comprendre qu’il lui avait fallu plusieurs années de recherches.
Outre cette évocation, à la fois littéraire et musicale de tout ce qui touche au piano, je trouve étonnant qu’à travers une histoire qui tient du conte de fées, Conroy parvienne d’une part à accrocher et à retenir son lecteur, d’autre part à camper des personnages qui font « vrai ». La psychologie des protagonistes fait d'ailleurs l’objet d’analyses fouillées elles aussi et il y a dans le roman une évocation saisissante de New-York.
Le style est très agréable, mariant la littérature et la musique dans une harmonie unique. Néanmoins, je me demande si la traduction est toujours à la hauteur. J’ai remarqué de temps à autre des sortes de négligences de rédaction en Français qui, à mon avis, ne reflètent certainement pas les choix d’écriture de Conroy.
Un grand merci à Katie, grâce à qui j’ai découvert ce roman et cet auteur.
Il a aussi écrit des nouvelles et une autobiographie (Un cri dans le désert). Quelqu’un a-t-il lu une autre des œuvres de Conroy ?

c'est un de mes nombreux achats de ce weekend

nicyrle a écrit:

Un grand merci à Katie, grâce à qui j’ai découvert ce roman et cet auteur.

Je suis vraiment ravie qu'il t'aie plu

je viens de terminer ce livre qui m'a beaucoup touché. C'est un livre qui m'a semblé d'une grande richesse en raison de toutes les "entrées" que l'on peut y trouver.
C'est un livre sur la musique et la passion de la musique. Conroy a forcément vécu cette passion pour la partager de cette façon. Il y a des parties assez techniques sur la théorie musicale, sur l'analyse de partition, sur le passage à la musique sérielle . Je ne suis pas sûr d'avoir tout compris même si c'est clair et si c'est à petite dose ce qui ne gêne pas la lecture du roman.
Il y a l'entrée du destin, comment une passion vous prend tellement fort qu'elle amène les autres à vous faciliter l'apprentissage.

ll y a l'entrée des relations avec les femmes et les amours impossibles qui se répètent à l'identique ou presque.

C'est un livre écrit comme une partition musicale, un thème que l'on retrouve tout le long, l'enfant prodige, et des variations, de thèmes annexes qui viennent l'enrichir comme des entrées d'instruments.
La mère me fait penser aux timbales et aux percussions avec sa démarche lourde et ses silences, Weisefeld aux violons, les professeurs qui l'aident à des solos d'instruments à vent et les femmes de sa vie aux harpes.

Il y a également la recherche des origines puisque la mère refuse de dévoiler au héros l'identité de son père et que le lecteur ne saura pourquoi qu'à la fin du livre.
Il y a également en filigrane, la dernière guerre mondiale, les difficultés pour survivre matériellement, l'holocauste, l'émigration en Amérique.
C'est un peu le parcours de Martin Eden, de la pauvreté à la reconnaissance sociale, mais sans l'amertume et le désespoir, même si on retrouve le constat que l'origine sociale reste indélébile, comme l'appartenance à une caste, quelle que soit la réussite ultime, dans ce melting pot que sont les USA.
J'y ai retrouvé également des thèmes de la Tache de Philippe Roth.
Tout m'a semblé fluide dans la narration, jamais d'effets faciles, pas réellement de coups de théâtre même quand il y a des coups du sorts, tout est écrit en finesse.

A la fermeture de ce livre, je me retrouve identique à la dernière note d’un concert fabuleux : hébétée, les bas en l’air, incapable d’applaudir tellement ce fut beau et bon. Quelqu’un disait qu’après Mozart, le silence qui suivait était encore du Mozart……….l’après de ce livre est encore le livre.
L’écriture se déroule tel un legato, sans rupture ni temps mort ; l’intensité est modulée au gré des mots et des chapitres.
Les pages s’enchainent, tel un mouvement perpétuel dans lequel le lecteur rentre, sans y éprouver la moindre lassitude, aucun mot de trop, aucune longueur. Tout y est intense, concentré, fort.
Je me souviens particulièrement du passage lorsque Claude déchiffre le concerto pour 2 pianos de Mozart…………..j’en entendais presque les notes………frustrée tout de même de pas avoir l’enregistrement à portée de main pour m’accompagner.
La musique est omniprésente, tel un personnage à part entière. Elle fait corps avec Claude Rawling.
« Aussi singulier ou mystérieux que fût l’environnement (…), où qu’il se trouvât, dès qu’il s’asseyait au piano, le monde qui l’entourait n’avait simplement plus d’importance. Sa relation physique avec le piano était immuable. Tout le reste était là. Ses repères étaient là » p 210
Les références musicales sont nombreuses, sans élitisme. Même non averti dans le domaine, le lecteur ‘y retrouvera.
Quel bonheur de se promener avec Mozart, Chopin, Bach, mais aussi les plus grands jazzmen de l’après guerre……

En dehors de la musique, l’auteur a su donner de la consistance à son autre personnage clé du roman Claude Rawling. Nous faisons la connaissance d’un jeune garçon, pauvre, un peu livré à lui-même, qui vit avec une mère fantasque dans le New York bouillonnant des années 40.Son destin était tout tracé………….sauf qu’à New York, dans ces années là, pour peu que l’on soit un peu ambitieux, et travailleur, tout était possible. Si l’on rajoute à cela un petit coup de pouce du destin, la confiance d’un voisin dans lequel Claude va trouver le père manquant, l’avenir s’ouvre en grand devant lui. Un prodige, très vite conscient de ce qu’il est, va prendre le lecteur et l’accompagner dans son ascension musicale, et sociale ; dans sa vie d’homme, avec ses joies et ses meurtrissures, ses secrets.
Assurément ce livre est un immense coup de cœur.

Je suis en train de le lire, influencée par le concert de louanges.

Mais je n'ai qu'une envie : tout arrêter !(j'en suis à 120 pages)
Pourtant, les avis positifs sont unanimes.

Je trouve l'histoire tirée par les cheveux, de ce jeune garçon remarqué et aidé. Un côté conte de fée auquel je ne crois plus, à mon âge...

Une écriture qui ne m'exalte pas. J'admets pourtant certains passages prenants. La première page par exemple.

?

Ca m'ennuie de passer à côté à ce point là.

Crevette a écrit:

Je suis en train de le lire, influencée par le concert de louanges.

Mais je n'ai qu'une envie : tout arrêter !(j'en suis à 120 pages)
Pourtant, les avis positifs sont unanimes.

Je trouve l'histoire tirée par les cheveux, de ce jeune garçon remarqué et aidé. Un côté conte de fée auquel je ne crois plus, à mon âge...
Une écriture qui ne m'exalte pas. J'admets pourtant certains passages prenants. La première page par exemple.

?

Ca m'ennuie de passer à côté à ce point là.

Ce côté conte de fées existe, il faut, je crois, accepter de se laisser faire, d'autant que cela n'empêche pas une analyse fine des personnages qui peuvent nous toucher et nous faire réfléchir comme s'ils appartenaient à la "vraie" vie.

Je pense également que la thèse de départ de l'enfant surdoué qui rencontre des bienfaiteurs tout au long de sa vie, n'est pas l'essentiel du livre, juste un prétexte pour parler d'autre chose.
Maintenant on n'accroche pas tous au même type de livre, et il n'y a pas de raisons de se forcer à lire un livre qui ne nous plaît pas.

Albert a écrit:

Je pense également que la thèse de départ de l'enfant surdoué qui rencontre des bienfaiteurs tout au long de sa vie, n'est pas l'essentiel du livre, juste un prétexte pour parler d'autre chose.
Maintenant on n'accroche pas tous au même type de livre, et il n'y a pas de raisons de se forcer à lire un livre qui ne nous plaît pas.

C'est vrai, la lecture doit rester un plaisir. Cependant, il me semble qu'on a intérêt à ne pas s'arrêter trop vite car on a parfois d'heureuses surprises qui font revenir sur une première impression mitigée, voire négative.

Je l'ai quand même continué cette nuit. J'en suis à son embauche dans l'hôtel particulier. J'aime comme vous toutes les allusions au bonheur de la musique. Mais l'intrigue (prétexte, certes) ménage si peu de surprises...

Mais ce qui n'arrange rien, c'est que je lis en parallèle Henry James, dont le niveau littéraire atteint tellement les sommets que bien peu de livres tiendraient la route à côté.

La langue de James...

D'accord avec nicyrle.

Je persiste toujours quand ça me plaît moyennement car je me dis que le problème vient de moi, et non de l'auteur.

Une sorte de sensation de culpabilité de ne pas arriver à entrer dans son monde.


Chaque écrivain nous fait un cadeau.

Un don de lui.

Et refuser cela, c'est ingrat.

Il est normal de fournir un minimum d'efforts pour agréer le présent.