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| | Khaled Osman [Egypte] | |
| | Auteur | Message |
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rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Khaled Osman [Egypte] Ven 18 Nov 2011, 18:15 | |
| Il est né en Égypte mais a grandi en France ; il s’est toujours intéressé à la littérature arabe, d’abord comme lecteur, puis comme traducteur vers le français. Après avoir commencé en traduisant Naguib MAHFOUZ, il s’est orienté vers l’œuvre de Gamal GHITANY, dont il a à ce jour traduit une dizaine d’ouvrages, parmi lesquels le chef-d’œuvre, Le livre des Illuminations (Seuil, 2005, prix Laure-Bataillon, prix Amédée-Pichot).
Parallèlement il vient de se lancer dans l’écriture : son premier roman, Le Caire à corps perdu, est paru en septembre 2011 aux éditions Vents d’ailleurs.
Depuis longtemps passionné de photographie, il a une prédilection pour les portraits saisis dans les lieux emblématiques des grandes métropoles (série sur le métro new-yorkais). Sa série « Les cafés du Caire » publié dans la revue meet n°15, met en avant le rôle de ces derniers comme hauts lieux de la sociabilité égyptienneun roman : Le Caire à corps perdu, Khaled Osman, Vents d’ailleurs, 2011 De retour au pays, l'exilé est atteint d'amnésie, avec des résurgences ponctuelles, non de données administratives, bien peu constitutives de l'identité, mais de poèmes, de films et de sensations de l'enfance. Placé dans une pension, il est pris en charge par de jeunes étudiants qui se mobilisent pour l'aider. La présentation du livre permet à l'auteur de rappeler l'importance de la poésie dans le monde arabe (VIe siècle) par rapport au roman d'apparition tardive (XIXe siècle). | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Khaled Osman [Egypte] Ven 14 Déc 2012, 13:08 | |
| le livre est écrit en français, l'auteur vit en France, je le mets ici parce qu'il parle de l'Egypte/
1/3
J’ai fini la première partie du Caire à corps perdu, et j’aime cette prose naturelle, humoristique et chaleureuse, tout en me disant que les Égyptien(ne)s lui trouveraient encore d’autres qualités fondées sur la connaissance du quotidien présent dans le récit.
Quoi de plus naturel que de vouloir revisiter le pays dont on est originaire et qu’on a quitté depuis plusieurs années ? pourtant, à la douane, pour le capitaine Mounir, revenir est suspect : il inclut le risque d’introduire des idées nouvelles dans des pratiques anciennes, de « vouloir changer les choses » !
Le passage à la douane est une petite comédie : on en rit après coup, une fois les tampons obtenus, les frayeurs de l’arbitraire passées.
Khaled Osman n’a pas la plume cruelle qui griffe, elle égratigne seulement les usages, sans nuire aux personnes. Le chauffeur de taxi se conduit comme un voleur, mais qu’auriez-vous fait à sa place ?
L’humour et la verve permettent à l’auteur de placer son héros, devenu amnésique dans une pension de famille : la gentillesse de la patronne, les traditions d’accueil, et les plaisanteries étudiantes font bon ménage. Le récit est donc chaleureux et malicieux, épicé aussi quand le contexte le mérite.
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| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Khaled Osman [Egypte] Sam 15 Déc 2012, 06:40 | |
| 2/3 Le Caire à corps perdu
Que faut-il lire dans les journaux égyptiens ?
la caricature de la page deux : elle donne la clé pour décrypter toutes les informations, c’est la clé de voûte de « l’humour dévastateur et de l’autodérision égyptienne ».
« les faits divers du jour [..] des enquêtes criminelles déjà élucidées (les autres n’avaient pas droit de cité), qui toutes mettaient en avant le dévouement et la perspicacité des policiers autant que l’effroyable absence de moralité des citoyens.
L’objectif était de rendre hommage aux premiers (mais les vertus qu’on leur attribuait étaient tellement à rebours de ce qu’on leur connaissait que plus personne n’y prêtait attention) et de dissuader les seconds (mais comme les lecteurs se débattaient dans des difficultés considérables, ils avaient tendance à s’identifier aux malfaiteurs davantage qu’aux victimes, et voyaient plutôt dans ces récits un réservoir d’idées ingénieuses)»
Voila une bonne connivence qui me décide à aborder de bonne humeur la 2e partie ! | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Khaled Osman [Egypte] Sam 15 Déc 2012, 14:57 | |
| Malheureusement j'ai pas trouve le livre chez moi mais je vais continuer la recherche peut etre c'est disponible dans une autre region. voilà un entretien avec l'auteur à propos de son livre http://www.lelitteraire.com/?p=2384 belle analyse,rotko merci beaucoup et bonne lecture |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Khaled Osman [Egypte] Sam 15 Déc 2012, 16:01 | |
| je suis très intéressé par ce récit qui mêle des poèmes, des passages de romans, des synopsis de films, en parallèle avec des situations du roman. N'oublions pas que l'auteur est traducteur et au courant de la vie culturelle égyptienne.
A la fin de l'ouvrage, les extraits sont identifiés (ils ne peuvent l'être au cours de l'action car le personnage est amnésique, même si des extraits d'oeuvres lui reviennent en mémoire).
Dis-moi, Ginchiyo, si tu le veux, dans quelle région ou dans quelle ville tu vis, pour que je me renseigne sur la présence du livre dans les librairies.
tu pourrais aussi nous parler des bibliothèques auxquelles tu as accès. Nous sommes bien ignorants (moi, en tout cas) sur les pratiques et possibilités de lecture en Egypte - et ailleurs.
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| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Khaled Osman [Egypte] Sam 15 Déc 2012, 18:06 | |
| - Ginchiyo a écrit:
-
Malheureusement j'ai pas trouve le livre chez moi mais je vais continuer la recherche peut etre c'est disponible dans une autre region. En principe, le roman est disponible au Caire à la librairie Oum el Dounia. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Khaled Osman [Egypte] Dim 16 Déc 2012, 19:12 | |
| ok rotko je verrai ce que je pourrai faire,merci |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Khaled Osman [Egypte] Lun 17 Déc 2012, 09:18 | |
| - Citation :
- bonne connivence qui me décide à aborder de bonne humeur la 2e partie !
3/3 Le Caire à corps perdu, Vents d'Ailleurs. Khaled Osman présente, par l’intermédiaire des savoureuses aventures de son personnage, un panorama « légèrement critique » de l’Égypte officielle de Moubarak, prompte à suspecter tout le monde, à l’image du capitaine Mounir, qui hait les « pousse-crayons à l’esprit torturé » : « il avait toujours détesté la littérature, les poètes, les philosophes, les scribouilleurs de tout poil. Et maintenant les traducteurs ! Pour qui se prenaient-ils, ces drogmans tout juste bons à accompagner les groupes de touristes dans leurs promenade en chameau ? »; Il égratigne en passant les fonctionnaires qui se livrent lucrativement au trafic de papiers, les mouchards chargés de surveiller les Égyptiens à l’étranger Alaa el Aswany les mentionnait dans Chicago, chez Actes Sud], les dévots/délateurs obsédés par l’usage de l’alcool etc. L’interdiction de l’alcool dans l’islam, que tout le monde tient aujourd’hui pour acquise n’est pas toujours allée de soi, sinon ce verset du Coran n'aurait pas lieu d'être : « Tenez-vous éloignés de la prière quand vous êtes ivres ... »Au lecteur de percevoir ces critiques, et de s’interroger à la fin du récit sur l’identité de l’exilé par rapport à l’Égyptien résident, comme sur celle du traducteur par rapport à l’auteur ; question pertinente pour Khaled Osman qui, dans ce premier roman je crois, associe à son entrée personnelle en littérature, nombre d’auteurs comme Gamal Ghitani que nous connaissons grâce à lui. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Khaled Osman [Egypte] Mer 19 Déc 2012, 14:22 | |
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L'auteur, Khaled Osman, à El Watan :
c’est un roman sur la quête de l’identité, avec la double particularité que cette quête s’effectue sous la contrainte et dans l’urgence. Puisque le personnage doit retrouver le plus vite possible les éléments de sa personnalité, sous peine de rester dans une indétermination douloureuse, cette urgence et cette nécessité font que la quête s’apparente à une enquête policière.
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| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Khaled Osman [Egypte] Lun 21 Jan 2013, 10:37 | |
| Oui, ce n’est pas une simple promenade au Caire, mais une exploration de la condition de l’exilé, une quête de sa vraie identité, peut-être liée à ses racines, et au sentiment d’une appartenance à laquelle il décide d‘adhérer. J’y vois aussi, mais c’est ma propre optique, le passage réussi d’un traducteur, passeur des écrits de très grands écrivains, comme nous le savons, vers sa propre personnalité littéraire. Khaled Osman fait, avec ce premier roman, son entrée dans la cour des grands. J’ajoute le billet très complet de Mustapha Harzoune - Spoiler:
"Khaled Osman est un traducteur prolixe (Naguib Mahfouz, Gamal Ghitany, la palestinienne Sahar Khalifa ou la saoudienne Raja Alem) et talentueux puisque son travail fut primé notamment en 1988 et en 2005. Avec Le Caire à corps perdu, il livre un premier et riche roman dont [...] la langue, sensuelle et suave, donne à entendre les bruits et les mots de la capitale égyptienne, portés par un populo, bariolé, joyeux, farceur, empathique et gaillard.
Un Egyptien rentre au pays après des années d’exil mais, dans le taxi qui le cueille à la sortie de l’aéroport, notre homme est victime d’un malaise. Sayyed, le chauffeur, le laisse inanimé devant une pension, oubliant dans la précipitation sa veste sur la banquette arrière et sa valise dans le coffre. L’homme se réveille amnésique, ne sachant plus rien de son passé ni de lui-même. Seuls des extraits de romans ou de poèmes affleurent à sa conscience. Son identité se nourrit de ces pages lues et de son présent, au sein d’une pension où la patronne, Sett Baheyya, et les locataires (Faouzi, l’éternel étudiant en médecine, Ibrahim, le gardien, Khadra la femme de ménage et cuisinière, ‘Azza, l’étudiante en économie politique…) font assaut de prévenance, de solidarité et d’amitié pour réconforter et aider, celui qu’ils surnomment Nassi, à retrouver le chemin de son identité perdue.
Cajolé, choyé, Nassi vit de ces marques d’amitié et de ses réminiscences littéraires au point de se dire qu’il n’a peut-être besoin de rien d’autre. Serait-ce une façon de prendre quelque distance avec l’impératif mémoriel, la dictature des sédiments et le fardeau des fausses fidélités qui finissent par écraser les vivants ? « Malgré toute son horreur, cette amnésie provisoire avait tout de même du bon : elle lui permettait de renouer directement avec son enfance en passant outre les idées noires, les angoisses et les appréhensions qui encombraient ordinairement son esprit ».
Des souvenirs lui reviennent, par bribes, réveillés par ses promenades dans les rues et les lieux de l’enfance et par des odeurs de cuisine (le petit déjeuner à la pension, un plat de fèves, le jus de la canne à sucre dans la rue ou le qamareddine…). Pour remonter le fil de la mémoire et du passé, Khaled Osman construit un habile procédé littéraire où les pérégrinations mémorielles de son personnages se double d’une enquête menée par les services de police. Car le capitaine Mounir (et sa zélée Nesrine), veille et surveille ces expatriés qui reviennent au pays pour y semer le désordre, bousculer les ordonnancements politiques, les constructions nationalistes et identitaires. L’émigré-immigré est partout un empêcheur de vivre en rond…
Accompagné de Faouzi, Nassi déambule dans la ville qui elle aussi a perdu ses repères - «alors il n’y a pas que moi qui perd la mémoire, le pays tout entier est en train d’oublier son passé !». Celui lointain, des origines - «à en écouter certains, on pourrait croire que notre civilisation n’a véritablement émergé qu’au septième siècle» - ou celui, plus proche, riche d’une diversité culturelle et humaine, aujourd’hui disparue. Il se tourne vers Raouf Effendi, un vieil archiviste qui, au fond d’un petit café discret où l’on peut siroter un cognac, lui propose trois identités possibles dont celle d’un indic des services ! Nassi, tel un Driss Chraïbi, s’emporte: «Un être humain ne se réduit pas à son parcours (…). Ce qui ne ment pas, en revanche, ce sont les convictions, les valeurs les principaux traits de caractère ! C’est pourquoi je te le dis et le répète : ce type n’est pas moi.»
Nassi pressent qu’il pourrait bien venir de France. Il s’en va interroger les services du consul. Mais voilà, la France, patrie des droits de l’homme et du raffinement, goûte davantage l’antique et les vieilles pierres, un peu moins le pays et son peuple. Là où d’autres candidats à l’exil subissent quotidiennement files d’attente, vexations administratives, condescendance et plus récemment procès en criminalisation, lui, essuie simplement une suspicion polie et une fin de non recevoir. Renvoyé à une non réalité, un bannissement, une absence d’identité, «les vieux démons ressurgissent : sa part d’ombre qu’il a toujours portée comme un fardeau. (…) Cette impression de n’appartenir à aucune collectivité, de n’être chez lui nulle part, d’avoir le mal du pays où qu’il se trouve. Au fond, il n’a jamais su trouver sa place, et ce qui lui arrive en ce moment ne fait qu’entériner tragiquement un état de fait préexistant.»
Le Caire et ses habitants sont l’autre personnage de ce roman. Khaled Osman montre l’humour, le goût pour la dérision, la solidarité, l’entraide, la légèreté et la joie de vivre de la rue cairote malgré la pauvreté et les frustrations. Ainsi, demander son chemin à un Égyptien comporte quelques risques : le natif du cru brille moins par la rigueur que par l’impérieuse préoccupation de rendre service, quitte à vous éloigner de votre destination. Le souci de l’autre importe plus ici que l’exactitude topographique. Ces marques d’attention et ces bonnes intentions ne valent-elles pas mille fois mieux que l’indifférence qui court les rues des capitales occidentales ? D’ailleurs, Nassi se dit fatigué de l’Europe, de son individualisme et des plaintes des nantis. Il avait besoin «de revenir à la simplicité» (un plat de fèves partagé avec une galette de pain baladi), «à l’imprévoyance et au fatalisme». Peut-être que l’auteur force ici un peu le trait sur les qualités respectives et les défauts spécifiques des deux sociétés. A moins qu’il ne s’agisse de montrer, par un effet de contraste, les dérives d’une modernité à la sauce occidentale qui imprègne aussi les identités des sociétés arabes, et ici Le Caire et ses habitants: multiplication des projets immobiliers, individualisme croissant, perte des valeurs et des repères… Pour autant, les amoureux continuent de flirter sur les rives du Nil ou sur les hauteurs du Muqattam où, malgré le moralisme ambiant, ils se retrouvent pour « se déclarer leur flamme » et croire «encore à la vie…».
A la pension, Nassi reste un homme sans nom. L’amnésie, comme la littérature, sont aussi un refuge, une façon de fuir le réel, sa dictature et ses contraintes. Pour retrouver son identité, peut-être devra t-il, lui aussi, croire de nouveau «à la vie»."
Mustapha Harzoune
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