Charles Lassailly

Qui connaît??

Charles Lassailly est un romantique frénétique, né en 1806 et mort en 1843. Secrétaire pendant un moment de Balzac, il sombre dans la folie, fréquente la maison Blanche et meurt dans une autre maison de santé. Il est classé dans les "romantiques frénétiques" pour son seul roman, presque sa seule œuvre, Les Roueries de Trialph, notre contemporain avant son suicide (1833).

Dans ce roman, Lassailly aborde le thème cher aux romantiques : le suicide. Dès le début du livre, le narrateur, Mr Trialph, annonce son prochain suicide. C'est donc ses tribulations jusqu'à son suicide que nous allons suivre, et notamment ses relations avec les femmes et son meilleur ami.

Fascination pour le macabre, noirceur de l'âme, sadisme... c'est tout un pan du romantisme que Lassailly représente dans ce roman. Le prologue est très intéressant par son positionnement par rapport au romantisme, puisque Lassailly en participe mais le critique, et notamment la littérature commerciale comme celle de Balzac ou Hugo. Il critique les inspirations stéréotypées trouvées chez Byron, Goethe... Je conseille vraiment ce roman à ceux qui sont intéressés par le romantisme et la décadence, car on sent parfaitement chez Lassailly les prémices du baudelairisme et des obsessions décadentes.

Je copie ici mon poste du fil sur les biographies, histoire d'étoffer un peu celui-ci

J'ai lu récemment Charles Lassailly (1806-1843) d'Eldon Kaye, alors je poste quand même dessus ^^ Je ne sais pas si ça peut vous intéresser, mais ç'a été édité chez Droz en 1962. Ce n'est plus trouvable que sur internet.

Charles Lassailly est connu uniquement des spécialistes, notamment pour son unique roman : Les Roueries de Trialph, notre contemporain avant son suicide.

Lassailly est l'une des figures par excellence des petits auteurs excentriques de 1830. Originaire de Besançon, il monte à Paris pour s'établir écrivain. Il participe à la bataille d'Hernani en janvier 1830, mais il perd vite ses illusions. Ses poèmes insérés dans la presse sont descendus par la critique, et son roman est pour cette même critique une simple expression de la jeunesse Jeune-France. Ses tentatives littéraires avortent, il ne peut se soumettre au rythme de Balzac qui l'emploie comme nègre.

S'échauffant la cervelle par un Idéal inatteignable et par des amours impossibles, Lassailly devient peu à peu un archétype du bohème. Traîne misère et crève la faim, il mendie auprès de ses amis écrivains, et préfère s'acheter de beaux habits pour plaire à des duchesses plutôt que du pain.

De nature nerveuse, Lassailly finit par perdre la raison, et est interné à la maison de santé d'Esprit Blanche puis dans un autre asile, où il finit par mourir en 1843. Il faut saluer d'ailleurs la générosité de Vigny, qui a permis à Lassailly de pouvoir rester en institut, et sa sœur de pouvoir continuer à vivre. Sur son insistance, on a pu voir Lamartine faire la quête à l'église pour Lassailly.

Fervent partisan du saint-simonisme et du "socialisme" naissant, Lassailly veut une société égalitaire avec un bon niveau de vie pour tous. Intransigeant en politique, il est aussi en littérature, et notamment avec ses critiques où il assassine Victor Hugo (je pense à un article dans L'Indépendant. Furet de Paris en 1835).

Quant à la biographie en elle-même, on y trouve une exploitation remarquable du fonds légué par le vicomte Charles de Spoelberch de Lovenjoul*, ainsi qu'une mise en lumière de Charles Lassailly, tombé dans l'oubli.

* Drôle de figure que celle de Spoelberch de Lovenjoul, bibliophile et bibliographe éminent. On lui doit notamment une Histoire des Œuvres de Théophile Gautier (véritable référence, rééditée chez Slatkine Reprints dans les années 1960) ainsi qu'une Histoire des Œuvres de M. de Balzac. Aujourd'hui à la BNF, sa collection regroupant livres, journaux, lettres et autres documents est une vraie mine d'or.

Prince d'Aquitaine a écrit:

Qui connaît??

Oui, je connais Charles Lassailly auquel Jules Marsan à consacré un article de sa "Bohème romantique".
Outre quelques correspondances, il contient une pièce de vers intitulée "Paganisme" dont voici les premières strophes :

Je ne suis ni Werther, ni Tircis de Virgile
Car je prends mes Lolotte aux bals de l'Opéra.
Mon coeur est trop fripon pour des amours d'idylle ;
Tout naturellement, qui veut mon coeur l'aura.

Les femmes ne sont pas contentes de fadaises :
La bouche la plus prude est prude au bord des dents ;
Leur petite vertu ressemble assez aux fraises :
Lorsque l'on tend la main, elles tombent dedans.

Je ne sens nul mépris pour les faveurs réelles
Des lèvres de velours qui ne refusent rien.
Mon corps n'est pas un sylphe et je n'ai pas des ailes
Pour épouser les vents du monde aérien.

Je ne suis plus aimant des hommes de la terre.
Il est vrai que cela peut nuire à mon prochain :
Je commets quelquefois le péché d'adultère ;
Mais, ainsi que le corps, je mange quand j'ai faim.

Et, pourvu que le loup quitte la bergerie
Sans troubler le berger qui dort indifférent,
Le reste des remords devient bégueulerie :
Ce que quelqu'un néglige, un autre le reprend..."


J'aime assez, entre autres :

"Je ne sens nul mépris pour les faveurs réelles
Des lèvres de velours qui ne refusent rien"