Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu

Paragraphe de "l'immense aquarium", phrase n°6

Citation :

Et le soir, ils ne dînaient pas à l'hôtel où,

Nous passons bien brusquement du moment juste avant le goûter à celui du soir, et puisqu'il y a "où", on va nous parler de l'hôtel, et nous ne saurons rien des quatre, qui de toute façon sortent dîner ailleurs. Magie de la littérature, qui en quelques mots fait disparaître quatre personnes.

Citation :

les sources électriques faisant sourdre à flots la lumière dans la grande salle à manger,

Beaucoup de références à l'aquatique ici. On dirait qu'on remplit la grande salle jusqu'à ce que ...

Citation :

celle-ci devenait comme un immense et merveilleux aquarium

Ah ! Enfin du lyrisme, de la métaphore !

Citation :

devant la paroi de verre duquel

Il faut savoir que cette grande salle présente de grandes fenêtres qui le jour permettent aux mangeurs de jouir d'une vue imprenable sur la mer toute proche.

Citation :

la population ouvrière de Balbec, les pêcheurs et aussi les familles de petits bourgeois,

Ne serait-ce pas eux qui composent "le mystère de la vie ambiante" de la phrase n°4 ?

Citation :

invisibles dans l'ombre,

De même que leur manque de fortune et de nom les maintient dans la partie obscure de la société.

Citation :

s'écrasaient au vitrage

Comme des moustiques !

Citation :

pour apercevoir, lentement balancée dans des remous d'or,

Encore de l'aquatique, et de l'or, qui peut venir de la lumière électrique aussi bien que des bijoux.

Citation :

la vie luxueuse de ces gens, aussi extraordinaire pour les pauvres que celles de poissons et de mollusques étranges

Souvent les écailles des poissons brillent, comme le luxe ? On sent la lenteur des déplacements des riches touristes aux ventres pleins, et leur vulnérabilité, puisque, prisonniers de leur "aquarium", ils sont cernés par le peuple et que les mollusques, plus encore que les poissons, sont des proies faciles.

Citation :

(une grande question sociale, de savoir si la paroi de verre protégera toujours le festin des bêtes merveilleuses et si les gens obscurs qui regardent avidement dans la nuit ne viendront pas les cueillir dans leur aquarium et les manger).

En fait, les riches festoyeurs sont encore plus faibles que des mollusques, puisqu'on peut les "cueillir" comme des fruits ! Maintenant, Proust va-t-il nous emmener sur le terrain de la lutte des classes, du conflit, des cris et des larmes ? La suite à la prochaine et dernière phrase...

Paragraphe de "l'immense aquarium", phrase n°7 (la dernière)

Citation :

En attendant,

En attendant de savoir si la paroi de verre cèdera sous la pression populaire ; d'une pirouette Proust élude la "grande question sociale", je crois même qu'il s'en fout un peu

Citation :

peut-être parmi la foule arrêtée et confondue dans la nuit

En état d'arrestation ? Confondue : on les confond entre eux, ils sont confondus d'admiration ?

Citation :

y avait-il quelque écrivain,

Et pour toi, narrateur, qui souvent me dit que tu vas te lancer dans la littérature, ne serait-il pas temps de t'y mettre, au lieu de draguer toutes les jeunes femmes que tu croises ?

Citation :

quelque amateur d'ichtyologie humaine,

N'en es-tu pas un éminent spécialiste, Marcel, de cette science nouvelle, au vu des nombreux spécimens d'homme-poissons que tu décris dans tes pages ?

Citation :

qui, regardant les mâchoires de vieux monstres féminins se refermer sur un morceau de nourriture engloutie,

Les femmes en prennent encore pour leur grade, l'auteur n'est pas très galant. Notez que "engloutie" fait penser à la déglutition mais aussi aux profondeurs marines.

Citation :

se complaisait à classer ceux-ci par race, par caractères innés et aussi par ces caractères acquis qui font qu'une vieille dame serbe dont l'appendice buccal est d'un grand poisson de mer, parce que depuis son enfance elle vit dans les eaux douces du faubourg Saint-Germain, mange la salade comme une La Rochefoucauld.

C'est sur cette note d'humour que se clôt le paragraphe, et pour les curieux, je vous donne quand même le début du suivant : "A cette heure-là on apercevait les trois hommes en smoking attendant la femme en retard, (...)" : tiens tiens, je les connais ces quatre-là ! Moi qui croyais qu'ils avaient disparu, les voilà qui inaugurent le paragraphe suivant... Je suis curieux de savoir ce qu'ils font le soir... Allez, encore quelques pages et, c'est promis, j'irai au lit.

Citation :

Puis j'entendais le bruissement de la jupe d'Albertine se dirigeant vers sa chambre, car par discrétion et sans doute aussi par ces égards où autrefois dans nos dîners à la Raspelière, elle s'était ingéniée pour que je ne fusse pas jaloux, elle ne venait pas vers la mienne sachant que je n'étais pas seul.

Le narrateur, extrèmement jaloux, ne veut pas que ses visiteurs puissent se trouver en présence d'Albertine, qui apaise son coeur déchiré en ne se montrant pas lorsqu'elle rentre de promenade.
Ce "bruissement de la jupe" me rappela un autre passage de la RTP, situé tout au début de celle-ci, 2061 pages en amont, quand le narrateur encore enfant, à Combray, attendait le bisou de sa maman :

Citation :

Ma seule consolation, quand je montais me coucher, était que maman viendrait m'embrasser quand je serais dans mon lit. Mais ce bonsoir durait si peu de temps, elle redescendait si vite, que le moment où je l'entendais monter, puis où passait dans le couloir à double porte le bruit léger de sa robe de jardin en mousseline bleue, à laquelle pendaient de petits cordons de paille tressée, était pour moi un moment douloureux. Il annonçait celui qui allait le suivre, où elle m'aurait quitté, où elle serait redescendue.

"Et alors ? Simple coïncidence !" me direz-vous, les sourcils froncés. Ce à quoi je vous répondrai que le narrateur explique que dans le besoin qu'il avait de garder Albertine tous les soirs auprès de lui, il y avait :

Citation :

(...) un pouvoir d'apaisement tel que je n'en avais pas éprouvé de pareil depuis les soirs lointains de Combray où ma mère penchée sur mon lit venait m'apporter le repos dans un baiser.

Si tu n'existais pas troglo...sûr...Proust y perdrait quelque chose!...
(Tu dois vraiment t'éclater à faire ça!...et je m'amuse... et m'instruis beaucoup à te lire)

Oui, chère Coline ! Je ne connaissais de la RTP que l'épisode de la madeleine, cité dans les manuels scolaires, et deux petits passages qu'en classe de français on me donna en dictée, mais là je découvre quelque chose d'immense ! Une constellation dans laquelle les éléments parsemés d'un bout à l'autre sont connectés comme les neurones dans un cerveau !

Dommage on ne peut voter qu'une fois , j'aurai bien encore dit oui , moi !

Ah oui...Tu nous lâches pas, hein, Troglo...On tient à toi!

Nous sommes à Paris, en hiver je crois, le narrateur est encore enfant mais déjà amoureux de la petite Gilberte. Les deux vont chez la marchande.

Citation :

J'achetai deux billes d'un sou.

A billes simples et narrateur petit, phrase simple et petite !

Citation :

Je regardais avec admiration, lumineuses et captives dans une sébile isolée, les billes d'agate qui me semblaient précieuses parce qu'elles étaient souriantes et blondes comme des jeunes filles et parce qu'elles coûtaient cinquante centimes pièce.

Mais voilà que déjà il montre un vif intérêt pour la poésie, et l'argent vient seulement en deuxième position. Le titre du tome 5, La prisonnière, est proche de "captives".

Citation :

Gilberte à qui on donnait beaucoup plus d'argent qu'à moi me demanda laquelle je trouvais la plus belle.

Peut-être répondrait-il : "Toi !" s'il n'était timide.

Citation :

Elles avaient la transparence et le fondu de la vie.

Il y a là de quoi méditer, je suis encore jeune pour comprendre.

Citation :

Je n'aurais voulu lui en faire sacrifier aucune. J'aurais aimé qu'elle pût les acheter, les délivrer toutes.

Après ça le lecteur ne s'étonnera pas de te voir désirer tant de jeunes filles souriantes notamment dans le tome 2, A l'ombre des jeunes filles en fleurs.

Citation :

Pourtant je lui en désignai une qui avait la couleur de ses yeux.

Je crois qu'elle va comprendre que je l'aime...

Citation :

Gilberte la prit, chercha son rayon doré, la caressa, paya sa rançon,

Et moi, et moi ? Que deviens-je dans tout cela ?

Citation :

mais aussitôt me remit sa captive en me disant :

Ca y est ! Elle m'a donné son coeur !

Citation :

"Tenez,
elle est à vous,
je vous la donne,
gardez-la comme souvenir."

Elle m'exprime quatre fois qu'elle me donne son coeur ! Quel délice ! Je vais vite placer en lieu sûr cette preuve de son amour !

Un vieil écrivain très malade, désireux de revoir le tableau ci-dessus, sort de chez lui après y être resté longtemps enfermé.

Citation :

Enfin il fut devant le Ver Meer qu'il se rappelait plus éclatant, plus différent de tout ce qu'il connaissait, mais où, grâce à l'article du critique, il remarqua pour la première fois des petits personnages en bleu, que le sable était rose, et enfin la précieuse matière du tout petit pan de mur jaune.

Eclat des bâtiments de l'arrière-plan qui reçoivent la lumière du soleil, trouant le premier plan obscurci par les nuages.

Citation :

Ses étourdissements augmentaient ;

Ils ont commencé à son arrivée à l'exposition.

Citation :

il attachait son regard, comme un enfant à un papillon jaune qu'il veut saisir, au précieux petit pan de mur.

L'artiste ne cherche-t-il pas à saisir quelque chose qui toujours lui échappe ? L'artiste, même à la fin de sa vie, ne garde-t-il pas la fraîcheur de l'enfant ?

Citation :

"C'est ainsi que j'aurais dû écrire, disait-il. Mes derniers livres sont trop secs, il aurait fallu passer plusieurs couches de couleur, rendre ma phrase en elle-même précieuse, comme ce petit pan de mur jaune."

"Disait-il" et non pas "pensait-il" : son émotion est si forte qu'il prononce ses mots. "Mes derniers livres sont trop secs" : peut-être, passés les élans des débuts, son art parvenant à une maturité, à un stade où l'auteur chevronné se complaît dans une confortable routine, ne parvenait-il plus à tenter de nouvelles expériences dans le territoire de l'inconnu, et la contemplation de la façon dont est peint le petit pan de mur jaune est le déclic qui ouvre de nouveaux horizons à son esprit. Va-t-il, de retour à la maison, reprendre ses derniers livres et les améliorer ? Probablement pas, puisqu'ensuite il dit "il aurait fallu", simple expression du regret. "Rendre ma phrase en elle-même précieuse" : ce que sait si bien faire M. Proust ! P.S : la zone lumineuse du tableau me fait penser à la sensation qu'a le vieil écrivain lors de sa découverte.

Citation :

Cependant la gravité de ses étourdissements ne lui échappait pas.

Retour du matériel à côté du spirituel, ce qui appelle la phrase suivante.

Citation :

Dans une céleste balance lui apparaissait, chargeant l'un des plateaux, sa propre vie, tandis que l'autre contenait le petit pan de mur si bien peint en jaune.

"Chargeant"/"contenait" : notez que le premier mot amène la notion du poids, et pas le second.
"Sa propre vie" contre "le petit pan de mur" revêt plusieurs sens. D'abord, prosaïquement, au vu de sa mauvaise santé, la sortie qu'il a effectué pour aller voir ce détail est globalement néfaste. Puis, au vu de sa vocation, il a consacré sa vie à l'art. Puis, au vu de l'émotion présentement ressentie, selon ma supputation, il sent que plus il va admirer le petit pan de mur jaune, plus ses étourdissements vont être forts, et qu'il a le choix entre mourir de béatitude et tenter de survivre en s'arrachant à la contemplation. Puis certainement d'autres sens encore que je ne perçois pas nettement.

Citation :

Il sentait qu'il avait imprudemment donné la première pour le second.

N'est-ce pas "finir en beauté ?"

Le narrateur, encore jeune, au cours d'un trajet campagnard à bord de la voiture d'un docteur, est inspiré par la vue de clochers et il produit son premier écrit.

Citation :

Je ne repensai jamais à cette page,

Pourtant, cette page sera encore plusieurs fois mentionnée dans la RTP : on verra ce qu'en pense un ambassadeur dans "les jeunes filles", et que son auteur attend qu'elle soit publiée dans le Figaro dans "la prisonnière".

Citation :

mais à ce moment-là, quand, au coin du siège où le cocher du docteur plaçait habituellement les volailles qu'il avait achetées au marché de Martinville,

Notez bien que l'endroit où est assis le narrateur est celui des volailles.

Citation :

j'eus fini de l'écrire,

Il écrit tout en roulant.

Citation :

je me trouvai si heureux, je sentais qu'elle m'avait si parfaitement débarrassé de ces clochers et de ce qu'ils cachaient derrière eux,

Se sentir encombré de quelque chose dont seule l'expression amène le soulagement n'est-il pas un signe de l'activité artistique ?

Citation :

que, comme si j'avais été moi-même une poule et si je venais de pondre un oeuf, je me mis à chanter à tue-tête.

Le narrateur est souvent si mordant dans ses piques envers divers personnages que, s'il n'y avait eu un tel exemple d'auto-dérision, j'eus été porté à croire qu'il était bien imbu de sa personne.

Je ne donne pas le contexte pour ne pas dévoiler l'intrigue. Il vous suffira de savoir que c'est tôt le matin.

Citation :

En pensant à tous les paysages indifférents qui allaient s'illuminer et qui la veille encore ne m'eussent rempli que du désir de les visiter,

Le narrateur, pour des raisons sentimentales, se sent obligé de quitter Balbec pour retourner à Paris. "Les paysages indifférents" : paysages de peu d'importance ou bien paysages indifférents à la tristesse ressentie ?

Citation :

je ne pus retenir un sanglot quand, dans un geste d'offertoire mécaniquement accompli et qui me parut symboliser le sanglant sacrifice que j'allais avoir à faire de toute joie, chaque matin, jusqu'à la fin de ma vie,

Qu'est-ce qui fait le "geste d'offertoire" ? Ici encore le sujet est rejeté loin en arrière dans la phrase, ce qui nous fait l'attendre, laissant notre conscience en suspens, nous faisant sentir le poids de ce qui va nous être dévoilé.

Citation :

renouvellement solennellement célébré à chaque aurore de mon chagrin quotidien et du sang de ma plaie,

Sublime passage, lisez-le à voix haute... on dirait que les mots pleurent.

Citation :

l'oeuf d'or du soleil,

Voilà enfin le sujet. "Oeuf d'or" rime avec "aurore", mais sur le plan symbolique, pourquoi l'oeuf ? La fragilité du narrateur ? La naissance, non pas d'un poussin, mais d'un chagrin qui vivra avec lui durant toute sa vie ? Quelque chose de liquide donc mouvant (une relation amoureuse complexe) caché par une forme parfaite et lisse (la discrétion) ?

Citation :

comme propulsé par la rupture d'équilibre qu'amènerait au moment de la coagulation un changement de densité,

Que viennent faire ici, en plein lyrisme, ces termes scientifiques ? Ils se rattachent au mot "mécaniquement" vu plus haut, et, selon moi, ils font sentir que le narrateur est pris dans une sorte de piège aussi rigoureux que les lois de la physique. Dit-on qu'un oeuf "coagule" ? Si oui, je suppose qu'il devra être cassé auparavant. En tout cas, le sang ("sang de ma plaie"), lui, coagule.

Citation :

barbelé de flammes comme dans les tableaux,

Les vieux tableaux, ceux du Moyen-Age je crois.

Citation :

creva d'un bond le rideau derrière lequel on le sentait depuis un moment frémissant et prêt à entrer en scène et à s'élancer,

Cela me fait penser aux larmes qu'on sent monter de notre coeur jusqu'à ce qu'elles crèvent le rideau des paupières, et l'image d'un acteur "frémissant et prêt à entrer en scène et à s'élancer", plutôt euphorique, vient nuancer la tristesse, et me rappelle certains pleurs où l'on ne sait pas trop si l'on est triste ou joyeux, ou bien si les pleurs par le soulagement procuré nous allègent la tristesse. Sortir des coulisses pour entrer en scène c'est aussi comme la naissance d'un nouvel état de la personne, ou bien la claire perception d'un fort sentiment amoureux qui croissait depuis longtemps dans l'insu de nos ténèbres intérieures.

Citation :

et dont il effaça sous des flots de lumière la pourpre mystérieuse et figée.

La carapace du coeur est percée : on aime, on verse des "flots" de larmes et on est ébloui par la "lumière". Mais attention ! Il s'agit d'un amour douloureux !

Je vous le livre tel quel, simplement car il m'a beaucoup fait rire :

Citation :

Le violoncelliste dominait l'instrument qu'il serrait entre ses genoux, inclinant sa tête à laquelle des traits vulgaires donnaient, dans les instants de maniérisme, une expression involontaire de dégoût ; il se penchait sur sa contrebasse, la palpait avec la même patience domestique que s'il eût épluché un chou, [...]

Je vous ai trouvé quelque chose de bien émouvant, dans le tome 6 Albertine disparue :

Citation :

Et parce que derrière ces balustres de marbre de diverses couleurs,

Soit je délire, soit dans l'enchaînement des syllabes il y a comme un hachurage qui m'évoque le rythme vertical des balustres.

Citation :

maman lisait en m'attendant,

Dans "en m'attendant" j'entend le "ma" et le "an" de "maman".

Citation :

le visage contenu dans une voilette en tulle d'un blanc aussi déchirant que celui de ses cheveux

Si son visage est "contenu" c'est parce qu'il tend à "s'épandre", comme nous le verrons dans la suite. Quant au "blanc" il est déchirant de tristesse, mais aussi peut-être déchire-t-il la légère obscurité entourant maman, qui se tient dans le renfoncement d'une fenêtre.

Citation :

pour moi

Pas de virgules encadrant ce "pour moi", lui permettant de s'intégrer pleinement dans l'expression d'un long cri ému.

Citation :

qui sentait que ma mère l'avait, en cachant ses larmes,

Larmes auquelles répondront celles du narrateur en fin de phrase.

Citation :

ajoutée à son chapeau de paille moins pour avoir l'air "habillé" devant les gens de l'hôtel que pour me paraître moins en deuil, moins triste, presque consolée de la mort de ma grand-mère ;

N'est-ce pas un bel acte de la part de cette maman, de penser à la fois à sa mère et à son fils ?

Citation :

parce que, ne m'ayant pas reconnu tout de suite,

Elle lisait, et peut-être est-elle éblouie en regardant, au-delà de son livre, le canal inondé de lumière.

Citation :

dès que de la gondole je l'appelais elle envoyait vers moi,

"Je l'appelais elle envoyait" : peut-on exprimer en moins de mots la rapidité de l'échange ?

Citation :

du fond de son coeur, son amour qui ne s'arrêtait que là où il n'y avait plus de matière pour le soutenir,

"Matière" et "soutenir" pourrait se dire pour un pont, qui est fait de matière pouvant soutenir des piétons, j'y vois encore une utilisation de termes "techniques" qui, associés à l'amour, me font penser à la sujétion du spirituel au matériel. Mais chez cette maman où se situe donc le point d'arrêt de cet amour ?

Citation :

à la surface de son regard passionné qu'elle faisait aussi proche de moi que possible,

Et ce malgré la voilette !

Citation :

qu'elle cherchait à exhausser, à l'avancée de ses lèvres, en un sourire qui semblait m'embrasser,

Ne vous avais-je pas dit que le visage de cette maman tend à "s'épandre" ?

Citation :

dans le cadre et sous le dais du sourire plus discret de l'ogive illuminée par le soleil de midi

Le sourire de la maman, malgré qu'il vienne de derrière une voilette, dans une zone probablement ombragée, est moins "discret" que le sourire de la fenêtre "illuminée par le soleil de midi" ! C'est dire si le sourire de la maman est radieux ! Et par ce sourire commun l'auteur lie fortement la maman et la fenêtre.

Citation :

:

On va maintenant nous parler de la fenêtre, et nous faire savoir la conséquence des deux "parce que" vus plus haut.

Citation :

à cause de cela, cette fenêtre a pris dans ma mémoire la douceur des choses qui eurent en même temps que nous, à côté de nous, leur part dans une certaine heure qui sonnait, la même pour nous et pour elles ;

Citation :

et, si pleins de formes admirables que soient ses meneaux, cette fenêtre illustre garde pour moi l'aspect intime d'un homme de génie avec qui nous aurions passé un mois dans une même villégiature, qui y aurait contracté pour nous quelque amitié,

Citation :

et si depuis, chaque fois que je vois le moulage de cette fenêtre dans un musée,

Citation :

je suis obligé de retenir mes larmes,

Larmes qui répondent à celles de la maman évoquées plus haut.

Citation :

c'est tout simplement parce qu'elle me dit la chose qui peut le plus me toucher :

Citation :

"Je me rappelle très bien votre mère."

oui, il ya des asson an ces et des allite r ations

Désolé Rotko, mais au moment où tu as répondu à mon post, tu n'en voyais que le début car je commis une erreur de manipulation et cliquai sur "envoyer" au lieu de "prévisualiser".

Vous vous rappelez peut-être que me laissait perplexe l'expression suivante :

Citation :

Elles avaient la transparence et le fondu de la vie.

J'ai trouvé plus loin dans ma lecture un passage qui pourrait bien l'expliquer :

Citation :

Pourtant que ce jour ancien, traversant la translucidité des époques suivantes, remonte à la surface, et s'étende en nous qu'il couvre tout entier, alors pendant un moment, les noms reprennent leur ancienne signification, les êtres leur ancien visage, nous notre âme d'alors et nous sentons avec une souffrance vague mais devenue supportable et qui ne durera pas, les problèmes devenus depuis longtemps insolubles qui nous angoissaient tant alors.

J'arrive et m'inquiète? c'est de qui tout ça? de Proust? non? si? je suis nulle!! je n'ai jamais aimé Proustttttttttttttt mais si ce n'est pas de lui , ...... je n'aime pas non plussss

Citation :

Faut pas dire j'aime pas, avant d'avoir goûté

Tante Ernestine (oeuvres complètes)

toute ton éducation est à refaire

amicalement, bien sûr

exact j'ai des classiques que je renie et Proust le pauvre MARCEL en fait partie mais j'ai honte si si ...

Que n'aimes-tu pas chez Proust, Mme Chevalier ?

Hélas tout un ensemble , je ne me suis pas du tout reconnue dans ses écrits que j'ai essayé de lire. Je sais, on va me dire il ne te connait pas!! il ne raconte pas mon histoire ! mais parfois, du moins c'est mon cas, je m'investis à fond et là..rien... pas le moindre petit frisson... pas le moindre sentiment ..rien ... voilà c'est affreux je sais !! mais je me soigne!! je lis d'autres auteurs

J'ai commencé à lire proust par hasard, ie en desordre, c'etait un amour de swann. Je n'etais pas trop enthousiaste, mais quand j'ai lu ses pages sur la musique et l'attente, j'ai plus que dressé l'oreille.

Si on rate l'embarquement, est-ce si grave ? mais je n'ai rencontré personne qui regrette d'avoir lu Proust. Il est vrai que je ne parle pas de lui avec tout lemonde et que, pour faire un clin d'oeil à Bateman, je ne le declame pas sur la place du village

Je pense que'il va falloir que je m'y mette

tiens-moi au courant ! tu me dis ce que tu lis, et je te ferai un bout de conduite, et si d'autres veulent se joindre à nous, ce sera bien.

d'accord pas de problèmes je me déconnecte à demain