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 Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu

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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptySam 03 Juil 2010, 16:40

Harelde78 a écrit:
troglodyte a écrit:
Quant à la guerre, je crois qu'il en a été exempté à cause de sa mauvaise santé.
Il semblerait, oui.

Cela ne l'a pas empêché de sortir pour Paris pendant les attaques allemandes, pour pouvoir en parler dans Le temps retrouvé le mieux possible (sous les reproches de Céleste qui s'inquiétait de son intégrité).
Le bombardement de Paris de 1917 est un des plus "beaux" passages - il se trouvait au Ritz, si ma mémoire est bonne...
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Prince d'Aquitaine
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyLun 02 Aoû 2010, 15:59

Le Côté de Guermantes

Volume de l'initiation mondaine, c'est aussi celui de l'apprentissage du deuil avec le décès de la grand-mère du narrateur. Le plus marquant dans ce volume est l'approche toujours renouvelée de sa vision du "monde". A travers la peinture de trois salons, le narrateur nous montre les différentes échelles de la "bonne" société et surtout la persistance de la noblesse d'Ancien Régime envers et contre tout (le système démocratique et républicain, la noblesse d'Empire...). Proust, comme à son habitude, inclut l'homme dans son rapport au temps et au langage.

Bien sûr, c'est toujours difficile de résumer l'intérêt de Proust, et j'oublie sûrement plein de choses.
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyMar 03 Aoû 2010, 14:06

Pour trouver le texte integral sur le net voici le site indispensable

MARCEL PROUST - A LA RECHERCHE DU TEMPS PERDU

1 : Nouvelle édition électronique bilingue en ligne :

Du côté de chez Swann - Swann's Way
[Combray I - Combray II - Un amour de Swann - Noms de pays : le nom]

[Texte de l'édition originale française, domaine public.
Avec traduction anglaise de C. K. Scott Moncrieff.
Pour toute étude de Proust se reporter au texte de
l'édition Pléiade sous la direction de Jean-Yves Tadié]
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptySam 07 Aoû 2010, 11:28

Quelques bonnes paroles de Céleste Albaret, la bonne de l'écrivain.

Citation :
Souvent il m'a dit :
- Ah, Céleste, si seulement j'étais sûr de faire avec mes livres autant que papa a fait pour les malades !
(Son père était un grand médecin.)

Citation :
Un jour où je lui demandais s'il était retourné à Illiers, depuis, il me répondit :
- Non, jamais.
- Et pourquoi cela, Monsieur ?
- Parce que, Céleste, les paradis perdus, il n'y a qu'en soi qu'on les retrouve.

Citation :
Elle s'appelait Jeanne Pouquet, à l'époque de leur petite bande d'adolescents joueurs. Ils se voyaient aux Champs-Elysées et au tennis. Il existe une célèbre photo, souvent reproduite, montrant M. Proust à ses pieds dans le groupe, où il fait mine de gratter la guitare sur une raquette de tennis, pendant qu'elle est debout comme une reine sur une chaise de jardin.

Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 Marcelproustjeannepouqu.th

Citation :
Boni de Castellane l'avait beaucoup amusé à l'époque. Pour se redorer, il avait épousé une richissime Américaine, Anna Gould, et pour éblouir Paris il s'était fait construire, avec la fortune de sa femme, le célèbre Palais Rose, sur le modèle du Grand Trianon de Versailles. M. Proust n'avait eu de cesse qu'il n'y fût invité et n'eût tout visité. Il me racontait en riant que, en arrivant à la chambre à coucher, il avait eu droit au mot classique de Boni de Castellane, que tout Paris colportait :
- Il a ouvert la porte de la chambre et il a dit : "Voilà le revers de la médaille." Sa femme était très laide, vous savez. Mais la drôlerie était qu'il disait cela sur le ton du guide de musée.

Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 Annagould.th
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyLun 09 Aoû 2010, 12:20



Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 Gros_m10
clic !

Les Aubépines. Les zobs et pines - Le Dico des gros mots cachés dans les mots de Edith

288 pages chez Libre-et-ris ! éditions;
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyMar 23 Nov 2010, 07:00

la petite sonate se fait à nouveau entendre :

A quel compositeur Marcel Proust a-t-il songé pour "sa" Sonate de Vinteuil, référence fictive de musique de chambre qui n'a cessé d'intriguer les lecteurs d'A la recherche du temps perdu ?

Oubliés, les noms de Fauré, Saint-Saëns, Franck ou Lekeu, habituellement cités. Seul compte celui de Claude Pascal, 89 ans, père d'une Sonate dite de Vinteuil que la violoniste Yuri Kuroda et le pianiste Simon Zaoui viennent brillamment de donner en création (devant les micros du label Polymnie) dans la somptueuse salle à manger du Grand Hôtel de Cabourg, l'endroit même où Proust prenait place pour déguster une sole.

Dans un commentaire aussi docte que spirituel, le compositeur explique comment il en est arrivé à écrire une Sonate de Vinteuil en... 1946.

Résidant à la Villa Médicis en qualité de Prix de Rome, il n'a pu satisfaire à la commande de cette oeuvre qu'en faisant abstraction de son lourd parrainage. Pourtant, cette partition récemment découverte par l'historienne de l'art Annie Verger s'impose selon des modalités proustiennes. Séduction, lancinance, intemporalité, activité latente... tout y est, notamment dans un Finale de roman-fleuve qui suscite l'approbation du public expert. Insaisissable, l'écriture thématique de Claude Pascal fait bien écho à la célèbre "petite phrase" de Marcel Proust.

dixit le Monde.
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyDim 23 Jan 2011, 12:33

Vision de Proust...


Aldous HUXLEY - La paix des profondeurs


"Tout ce fardeau d'expérience passée qu'on traîne avec soi ! Il devrait y avoir un moyen de se débarasser de ses souvenirs superflus. Comme je hais le vieux Proust ! Vraiment je le hais !

Et, avec une éloquence comique il se mit à évoquer cet asthmatique chercheur de temps perdu, accroupi, affreusement blanc et les chairs molles, avec des mamelles presque féminines mais garnies de longs poils noirs, accroupi à jamais dans le bain tiède de son passé. Et toutes les eaux de savon rance de ses innombrables récurages flottaient autour de lui, toute la crasse accumulée des ans collait en croûte aux parois de la baignoire, ou en suspensions visqueuses dans l'eau. Et lui, pâle invalide répugnant, ramassant à pleines éponges sa propre soupe épaisse, se les pressant sur la figure, puisant à pleine tasse et roulant dans sa bouche, en connaisseur, la liqueur grise et pleine de sédiment, s'en gargarisant, s'en rinçant les narines, comme un pieu Hindoux dans le Gange..."










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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptySam 29 Jan 2011, 05:48

Un film de Nina Companeez sur Proust passe à la television

La Recherche sera diffusée en deux volets, mardi et mercredi, à 20 h 35 sur France 2

tous les détails dans "La Croix"

voir la bande annonce.
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyJeu 05 Mai 2011, 11:48

entracte : aujourd'hui on délire de lire !

Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 Proust10

96 pages
Editeur : Portaparole

Apparemment, tout les séparait. Elle avait la grâce, l'intelligence, la culture, le raffinement. Lui, c'était plutôt la force, la volonté, le culte de l'effort viril. Elle aimait l'art pictural, et lui l'art martial. Elle était passionnée par la culture, et lui par le culturisme. Elle voulait s'essayer à la sculpture et lui voulait sculpter son corps pour ressembler aux héros des bandes dessinées japonaises. Elle lisait Proust, Stendhal, Flaubert et Maupassant. Lui feuilletait les mangas, connaissait par coeur le Bushidô et ne lisait que des romans de cape et d'épée japonais.
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyMer 14 Mar 2012, 21:09

Je suis bien malheureuse depuis que je l'ai fini. (ce matin quoi). J'aimais lire les confidences de notrejeune narrateur. Alors alors. Je voulais essayer Proust. Et la recherche. J'ai donc eu Du côté de chez Swann que je viens de finir. Comment J'aurais pu deviner que ce livre deviendrait un de me préférés ? Je suis maintenant adepte du JSMP ! (Jamais sans mon Proust). Alors why ? À la base je décide de me mettre à ce livre alors qui ça fait plus d'un an que je l'avais. À cause d'une Bd de mon enfance. Les premières pages sont magnifique sur son sommeil. Puis on lui trouve une véritable sensibilité à notre petit bonhomme. Mais la première partie est assez longue. Même si quand on se laisse emporter il est très dur de s'arrêter. Et arrivé à la deuxième partie... C'est juste magistral. L'idylle de Swann et Odette est complètement torturé, troublante et sublime. Du très très grand art à mon goût. Pis la troisième partie est très courte mais est agréable et légère. Ce qui ne fait pas de mal. Donc oui Proust c'est long, c'est des longues phrases blablabla. Mais moi j'aime la langue. J'aime les belles et longues phrases que Proust manie à merveille. J'aime l'ambiance mondaine et le second empire, J'aime l'art et Proust en fait une bien belle démonstration. Il suffit de débrancher son cerveau et de se laisser bercer par les mots.
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyLun 16 Juil 2012, 09:56

rotko a écrit:
Si j’étais Alain de Botton, je ne me vanterais pas d’avoir écrit « Comment Proust peut changer votre vie » (chez Denoel).

Au départ l’auteur a de la verve et comme on sait rarement résister à l’insolence, on sourit, car le texte est facile, nourri de citations et de faits relativement cocasses.

Puis on pose le livre - et on se gratte la tête. Le titre aurait dû mettre la puce à l’oreille : de quelle vie parle Botton ? Si c’est l’existence d’un « épicier », il est bien évident que Proust ne lui sera d’aucun secours.

On se rend compte que s’appuyer sur un texte littéraire, sur la correspondance, et disons-le, des racontars, pour en tirer de prétendues règles pratiques, c’est faire fausse route.

Alors que Proust ait été un enfant docile, un adulte trop dépendant de sa mère, qu’il ait eu une mauvaise santé et même des maladies imaginaires, que son frère ait été plus vigoureux, son père, plus utile socialement, que nous importe !

Le concours - cité par Botton, qui consiste à faire en 20 secondes le résumé d’un ouvrage de Proust est certes amusant à première vue, mais suivant le même procédé réduire à 40 secondes une sonate de Fauré serait à la musique ce que Botton fait subir à la littérature.

On pourrait dire que le persiflage bottonesque relève de l’humour ? Qu’il critique - à tort - le plat par un décortiquage des ingrédients, mais est-ce bien intellectuellement honnête et satisfaisant ? Pas à mon goût !

D’autant que Botton tombe sur deux écueils fatals :

Le premier, qui sous-tend son discours, celui du bon sens et des idées reçues, autrement dit la méthode Homais.

Le second, une paraphrase lourdingue des phrases de la Recherche, ou d’extraits de correspondance, où éclate tout de suite la différence entre l’artiste et le tâcheron.

Ta critique m'a sincèrement étonné !

J'ai vu là un ouvrage sans prétention à l'humour britannique (ai adoré la comparaison entre Pascal et la publicité pour savon menée à son terme).

J'y ai même appris des choses sur Proust, sur son frère notamment.

Il m'a maintes fois fait rigoler.

Bien évidemment, je n'ai pas pris au sérieux l'injonction de changer ma vie... Laughing
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyMer 25 Juil 2012, 16:30

en direct de Mazel infos, 24h/24.



Marcel PROUST : Sur la lecture - Texte lu par André Dussollier
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyDim 19 Aoû 2012, 09:51

J'ai fini il y a peu de relire La Prisonnière : quel livre, c'est sans doute l'un de mes préférés de la Recherche avec Sodome et Gomorrhe. Je crois que c'est dans celui-là que le narrateur parle le plus de l'oeuvre d'art, et propose de nombreuses réflexions sur l'oeuvre en général (comment se manifeste le sentiment de lire un chef-d'oeuvre, etc.). Je suis un peu moins sensible aux réflexions sur la jalousie, mais je trouve fascinant de savoir qu'il pensait en grande partie à Agostinelli en écrivant son texte...
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyMar 20 Nov 2012, 06:07

textes de jeunesse de M.P

Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 Prou10

160 p. Editions des Busclats

onze textes de Marcel Proust, parus dans la revue Le Mensuel entre 1890 et 1891. Il avait alors tout juste 19 ans, sortait du lycée et du service militaire (1).

« Ces textes étaient publiés sous divers pseudonymes : Etoile filante, de Brabant, Fusain, Y, Bob, Pierre de Touche ». « Dans ces textes, on sent son goût pour les arts, le music-hall, la mode, la peinture. Le jeune Proust est déjà animé par une grande effervescence intellectuelle. Il est aussi insolent et mauvaise langue, bref, très spirituel »

(1) on doit lire certains textes en pensant à Saint Loup...
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyJeu 09 Mai 2013, 18:29



Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 Pr10

96 p. chez Libretto (Livre 392)
ce livre a contribué à sauver quatre cents officiers polonais lors de leur internement en Russie au début de la seconde guerre mondiale. On peut légitimement se poser la question de savoir comment une conférence sur Proust, puisqu'ici nous avons bien à faire à une mini-conférence de Joseph Czapski retranscrite par deux compagnons de bagne, peut sauver la vie de prisonniers de guerre ?

elle leur a permis de s'échapper d'un quotidien trop horrible qui, sans l'aide de quelques abstractions intellectuelles, aurait été insupportable. Dans ces pages, Joseph Czapski expose ses (impressionnantes) connaissances sur la vie et l'oeuvre de Marcel Proust, son « souvenirs de ce monde de découvertes psychologiques précieuses et de beauté littéraire », sans notes, ni référence aucune bien sûr, seulement de mémoire.

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Casus Belli
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyVen 27 Déc 2013, 13:46

voyez tout l'amour que Swann porte à Odette :

Proust a écrit:
« Je te jure, lui disait-il, quelques instants avant qu’elle partît pour le théâtre, qu’en te demandant de ne pas sortir, tous mes souhaits, si j’étais égoïste, seraient pour que tu me refuses, car j’ai mille choses à faire ce soir et je me trouverai moi-même pris au piège et bien ennuyé si contre toute attente tu me réponds que tu n’iras pas. Mais mes occupations, mes plaisirs, ne sont pas tout, je dois penser à toi. Il peut venir un jour où me voyant à jamais détaché de toi tu auras le droit de me reprocher de ne pas t’avoir avertie dans les minutes décisives où je sentais que j’allais porter sur toi un de ces jugements sévères auxquels l’amour ne résiste pas longtemps. Vois-tu, « Une Nuit de Cléopâtre » (quel titre !) n’est rien dans la circonstance.

Ce qu’il faut savoir, c’est si vraiment tu es cet être qui est au dernier rang de l’esprit, et même du charme, l’être méprisable qui n’est pas capable de renoncer à un plaisir. Alors, si tu es cela, comment pourrait-on t’aimer, car tu n’es même pas une personne, une créature définie, imparfaite, mais du moins perfectible. Tu es une eau informe qui coule selon la pente qu’on lui offre, un poisson sans mémoire et sans réflexion qui tant qu’il vivra dans son aquarium se heurtera cent fois par jour contre le vitrage qu’il continuera à prendre pour de l’eau.

Comprends-tu que ta réponse, je ne dis pas aura pour effet que je cesserai de t’aimer immédiatement, bien entendu, mais te rendra moins séduisante à mes yeux quand je comprendrai que tu n’es pas une personne, que tu es au-dessous de toutes les choses et ne sais te placer au-dessus d’aucune ? Évidemment j’aurais mieux aimé te demander comme une chose sans importance de renoncer à « Une Nuit de Cléopâtre » (puisque tu m’obliges à me souiller les lèvres de ce nom abject) dans l’espoir que tu irais cependant. Mais, décidé à tenir un tel compte, à tirer de telles conséquences de ta réponse, j’ai trouvé plus loyal de t’en prévenir. »

Odette depuis un moment donnait des signes d’émotion et d’incertitude. À défaut du sens de ce discours, elle comprenait qu’il pouvait rentrer dans le genre commun des « laïus » et scènes de reproches ou de supplications dont l’habitude qu’elle avait des hommes lui permettait, sans s’attacher aux détails des mots, de conclure qu’ils ne les prononceraient pas s’ils n’étaient pas amoureux, que du moment qu’ils étaient amoureux, il était inutile de leur obéir, qu’ils ne le seraient que plus après. Aussi aurait-elle écouté Swann avec le plus grand calme si elle n’avait vu que l’heure passait et que pour peu qu’il parlât encore quelque temps, elle allait, comme elle le lui dit avec un sourire tendre, obstiné et confus, « finir par manquer l’Ouverture ! » »

quel humour ravageur !

explications

Proust a écrit:
Je te jure, lui disait-il, quelques instants avant qu’elle partît pour le théâtre, qu’en te demandant de ne pas sortir, tous mes souhaits, si j’étais égoïste, seraient pour que tu me refuses, car j’ai mille choses à faire ce soir et je me trouverai moi-même pris au piège et bien ennuyé si contre toute attente tu me réponds que tu n’iras pas.

devinant que s'il lui demandait de ne pas sortir pour le théâtre, elle irait cependant, c'est justement dans l'idée qu'elle refuse de lui obéir qu'il lui demanderait de ne pas aller, montrant par là-même un égoïsme qui ne ferait qu'écho au sien. et il serait bien emmerdé s'il se trouvait qu'elle lui répondrait qu'en effet elle n'irait pas. parce que ça signifierait qu'il aurait fait une erreur de jugement.
(un efferalgan ? c'est rien, relisez.)

Proust a écrit:
Mais mes occupations, mes plaisirs, ne sont pas tout,

le "Mais" prend le contre-pied du si j’étais égoïste ; on s'attend donc à de la bonté de sa part...

Proust a écrit:
je dois penser à toi.

quelle fleur !
l'utilisation du verbe "devoir" souligne déjà qu'Odette fait figure de poids, de contrainte. car s'il l'aimait sans concession, on aurait lu plutôt quelque chose du genre : Mais mes occupations, mes plaisirs, ne sont pas tout : je pense beaucoup à toi. au lieu de "je dois penser à toi". Mais au fait, pourquoi penser à elle, si déjà, on entrevoit qu'elle l'insupporte ? voici qui éclaire :

Proust a écrit:
Il peut venir un jour où me voyant à jamais détaché de toi

projection dans un avenir, où il se voit détaché d'elle, et ce, à jamais. j'veux pas dire, mais pour Odette, ça sent le roussi...

Proust a écrit:
tu auras le droit de me reprocher de ne pas t’avoir avertie dans les minutes décisives où je sentais que j’allais porter sur toi un de ces jugements sévères auxquels l’amour ne résiste pas longtemps.

c'est donc pour palier aux futures objections qu'elle serait en droit d'émettre, qu'il se prémunit déjà de faire comme s'il n'était pas égoïste,... et montrant par là-même qu'il l'est !
Quels sont ces jugements sévères qu'elle encourt ?

[...]

Proust a écrit:
Ce qu’il faut savoir, c’est si vraiment tu es cet être qui est au dernier rang de l’esprit, et même du charme, l’être méprisable qui n’est pas capable de renoncer à un plaisir.

Voilà le critère du jugement : renoncer à un plaisir (en l'occurrence, se rendre à la pièce de théâtre). Odette en sera t-elle capable ?

Proust a écrit:
Alors, si tu es cela, comment pourrait-on t’aimer, car tu n’es même pas une personne, une créature définie, imparfaite, mais du moins perfectible.

Odette : créature imparfaite, indéfinie, impersonnelle, que personne ne saurait aimer ? mais perfectible ?

Proust a écrit:
Tu es une eau informe qui coule selon la pente qu’on lui offre, un poisson sans mémoire et sans réflexion qui tant qu’il vivra dans son aquarium se heurtera cent fois par jour contre le vitrage qu’il continuera à prendre pour de l’eau.

pauvre Odette...

Proust a écrit:
Comprends-tu que ta réponse, je ne dis pas aura pour effet que je cesserai de t’aimer immédiatement, bien entendu, mais te rendra moins séduisante à mes yeux quand je comprendrai que tu n’es pas une personne, que tu es au-dessous de toutes les choses et ne sais te placer au-dessus d’aucune ?

larguée, enterrée six pieds sous terre. réduite au rien.

Proust a écrit:
Évidemment j’aurais mieux aimé te demander comme une chose sans importance de renoncer à « Une Nuit de Cléopâtre » [nom de la pièce de théâtre] dans l’espoir que tu irais cependant.

le doute plane encore néanmoins, il reste un espoir qu'il la considère, puisque ce n'est pas sans importance qu'il lui demande de renoncer : peut-être va t-elle le saisir...?

Proust a écrit:
Mais, décidé à tenir un tel compte, à tirer de telles conséquences de ta réponse, j’ai trouvé plus loyal de t’en prévenir.

en fait, il l'avait déjà jugée, et la prévient même...

Proust a écrit:
Odette depuis un moment donnait des signes d’émotion et d’incertitude.

(et le lecteur aussi !)

Proust a écrit:
À défaut du sens de ce discours, elle comprenait qu’il pouvait rentrer dans le genre commun des « laïus » et scènes de reproches ou de supplications dont l’habitude qu’elle avait des hommes lui permettait, sans s’attacher aux détails des mots, de conclure qu’ils ne les prononceraient pas s’ils n’étaient pas amoureux, que du moment qu’ils étaient amoureux, il était inutile de leur obéir, qu’ils ne le seraient que plus après. Aussi aurait-elle écouté Swann avec le plus grand calme si elle n’avait vu que l’heure passait et que pour peu qu’il parlât encore quelque temps, elle allait, comme elle le lui dit avec un sourire tendre, obstiné et confus, « finir par manquer l’Ouverture ! » »

le couperet tombe : elle est tout ce qu'il a dit.
il l'avait déjà jugée, et sans se tromper : elle ne peut renoncer à sa sortie, peine à démêler le sens du discours, elle nage tel un poisson dans le sens du courant (rattache ce discours à ceux qui sonnent pareils),
et finit même par comprendre l'inverse de ce qu'il profère : qu'il l'aimerait plus si elle lui désobéit.

* * *

une autre tentative, pour nos neurones fatiguées. cette fois en douceur : je quote Proust, sans explanation, juste un syntagme en gras, pour attirer votre attention

Il s'agit de la scène de la grand-mère, sur son lit de mort :

Proust a écrit:
Le médecin fit une piqûre de morphine et pour rendre la respiration moins pénible demanda des ballons d’oxygène. Ma mère, le docteur, la sœur les tenaient dans leurs mains ; dès que l’un était fini, on leur en passait un autre. J’étais sorti un moment de la chambre. Quand je rentrai je me trouvai comme devant un miracle. Accompagnée en sourdine par un murmure incessant, ma grand’mère semblait nous adresser un long chant heureux qui remplissait la chambre, rapide et musical. Je compris bientôt qu’il n’était guère moins inconscient, qu’il était aussi purement mécanique, que le râle de tout à l’heure. Peut-être reflétait-il dans une faible mesure quelque bien-être apporté par la morphine. Il résultait surtout, l’air ne passant plus tout à fait de la même façon dans les bronches, d’un changement de registre de la respiration. Dégagé par la double action de l’oxygène et de la morphine, le souffle de ma grand’mère ne peinait plus, ne geignait plus, mais vif, léger, glissait, patineur, vers le fluide délicieux. Peut-être à l’haleine, insensible comme celle du vent dans la flûte d’un roseau, se mêlait-il, dans ce chant, quelques-uns de ces soupirs plus humains qui, libérés à l’approche de la mort, font croire à des impressions de souffrance ou de bonheur chez ceux qui déjà ne sentent plus, et venaient ajouter un accent plus mélodieux, mais sans changer son rythme, à cette longue phrase qui s’élevait, montait encore, puis retombait pour s’élancer de nouveau de la poitrine allégée, à la poursuite de l’oxygène. Puis, parvenu si haut, prolongé avec tant de force, le chant, mêlé d’un murmure de supplication dans la volupté, semblait à certains moments s’arrêter tout à fait comme une source s’épuise

* * *

Proust : I love you..


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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyVen 27 Déc 2013, 15:11

Casus, le texte (Swann-Odette) que tu as choisi est très beau, représentatif d'un esprit torturé qui se ment à lui-même, mais veut aussi se déguiser pour ne pas tomber sous la coupe de l'objet aimé. Swann exerce une sorte de chantage affectif dont Odette n'est pas dupe.

L'ironie de la situation  viendrait,  selon moi, de la vanité de tous ces efforts, marquée par la réflexion finale d'Odette. Elle sort gagnante de cette scène, qui prouverait une fois de plus chez Proust, que celui qui aime est celui qui souffre le plus. A laisser voir son amour, on s'expose comme vulnérable.

je viendrai plus tard au second texte.
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyVen 27 Déc 2013, 15:46

j'ai essayé de suivre, de mettre mon grain de sel, même ! mais non !  scratch ce Proust m'a toujours donné des maux de tête ! et je dirais même plus ... après le cours, je continuais à réfléchir, à chercher ! vade retro satanas ! evil 
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyVen 27 Déc 2013, 17:15

rotko a écrit:
Casus, le texte (Swann-Odette) que tu as choisi est très beau, représentatif d'un esprit torturé qui se ment à lui-même, mais veut aussi se déguiser pour ne pas tomber sous la coupe de l'objet aimé. Swann exerce une sorte de chantage affectif dont Odette n'est pas dupe.

L'ironie de la situation  viendrait,  selon moi, de la vanité de tous ces efforts, marquée par la réflexion finale d'Odette. Elle sort gagnante de cette scène, qui prouverait une fois de plus chez Proust, que celui qui aime est celui qui souffre le plus. A laisser voir son amour, on s'expose comme vulnérable.

En effet, on peut conclure que la tentative de Swann n'atteint pas Odette.
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyVen 27 Déc 2013, 18:22

la mort de la grand mère

Bel exemple d'une phrase qui épouse la mélodie et le rythme de la respiration ; Proust analyse ses causes éventuelles, les additionne, en montre les composants, la forme musicale générale, et les différentes significations tant pour la grand mère que pour l'auditeur. Du grand art, richesse sans pesanteur, et sentiments mêlés.
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyVen 27 Déc 2013, 19:48

suite de mes impressions proustiennes, en images cette fois :

Proust a écrit:
Le temps dont nous disposons chaque jour est élastique ; les passions que nous ressentons le dilatent, celles que nous inspirons le rétrécissent, et l'habitude le remplit.

à la lecture de ce passage, une célèbre peinture s'est mise à flotter dans mon esprit :

Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 41JQuxGl76L._SX300_

ressentez-vous, comme moi, l'élasticité du temps..?

popularisé sous le nom de montres molles, la peinture s'intitule en fait La Persistance de la Mémoire...
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyDim 29 Déc 2013, 08:29



Citation :

Le médecin fit une piqûre de morphine et pour rendre la respiration moins pénible demanda des ballons d’oxygène. Ma mère, le docteur, la sœur les tenaient dans leurs mains ; dès que l’un était fini, on leur en passait un autre. J’étais sorti un moment de la chambre. Quand je rentrai je me trouvai comme devant un miracle. Accompagnée en sourdine par un murmure incessant, ma grand’mère semblait nous adresser un long chant heureux qui remplissait la chambre, rapide et musical. Je compris bientôt qu’il n’était guère moins inconscient, qu’il était aussi purement mécanique, que le râle de tout à l’heure.

Peut-être reflétait-il dans une faible mesure quelque bien-être apporté par la morphine. Il résultait surtout, l’air ne passant plus tout à fait de la même façon dans les bronches, d’un changement de registre de la respiration.

Dégagé par la double action de l’oxygène et de la morphine, le souffle de ma grand’mère ne peinait plus, ne geignait plus, mais vif, léger, glissait, patineur, vers le fluide délicieux. Peut-être à l’haleine, insensible comme celle du vent dans la flûte d’un roseau, se mêlait-il, dans ce chant, quelques-uns de ces soupirs plus humains qui, libérés à l’approche de la mort, font croire à des impressions de souffrance ou de bonheur chez ceux qui déjà ne sentent plus, et venaient ajouter un accent plus mélodieux, mais sans changer son rythme, à cette longue phrase qui s’élevait, montait encore, puis retombait pour s’élancer de nouveau de la poitrine allégée, à la poursuite de l’oxygène.

Puis, parvenu si haut, prolongé avec tant de force, le chant, mêlé d’un murmure de supplication dans la volupté, semblait à certains moments s’arrêter tout à fait comme une source s’épuise


Bel exemple d'une phrase qui épouse la mélodie et le rythme de la respiration ; Proust analyse ses causes éventuelles, les additionne, en montre les composants, la forme musicale générale, et les différentes significations tant pour la grand mère que pour l'auditeur. Du grand art, richesse sans pesanteur, et sentiments mêlés.

Un vrai plaisir musical avec cette métaphore filée - et si bien construite. A noter que ce point de vue extérieur, esthétique, annonce la souffrance inattendue, et différée, de la perte de la grand mère (épisode du lacet de chaussure).

je n'avais pas pensé à rapprocher Proust de Salvador Dali, en ce tableau. oui, l'élasticité du temps, l'un la rappelle et l'autre la montre (ah ah !)
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyDim 29 Déc 2013, 08:35

dès potro-minet, ton Excellence ? quel réveil !!! driiiiiiiiiiiing ! il est l'heure !
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyDim 29 Déc 2013, 16:39

rotko a écrit:
je n'avais pas pensé à rapprocher Proust de Salvador Dali, en ce tableau.
ou rapprocher Dali de Proust en cette réflexion : le temps est élastique !

**

la métaphore file toujours, quelques lignes après :

Proust a écrit:
Le médecin reprit le pouls de ma grand’mère, mais déjà, comme si un affluent venait apporter son tribut au courant asséché, un nouveau chant s’embranchait à la phrase interrompue
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MessageSujet: Re: Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu   Marcel Proust I : A la recherche du temps perdu - Page 8 EmptyMer 22 Jan 2014, 13:37


 Au fil de ce documentaire, se déroulent différents aspects de la vie de l’écrivain. Son ascension sociale dans le cercle très fermé des salons aristocratiques parisiens, ascension favorisée par la fortune familiale ; son homosexualité, dont son coup de foudre pour Alfred Agostinelli, avec qui il vécut une profonde passion ; son ascendance juive et son positionnement lors de l’Affaire Dreyfus ; son processus d’écriture, ainsi que le rôle de sa gouvernante, Céleste Albaret, qui l’accompagna pendant de nombreuses années et sauvegarda les œuvres de Marcel, avec rigueur. Vous y trouverez aussi de nombreux témoignages de contemporains de Proust : Jean Cocteau, François Mauriac, Paul Morand et Céleste Albaret, et des interventions d’écrivains et critiques comme Roger Shattuck, Shelby Foote et Iris Murdoch. Une réalisation formidable signée en 1992 par Sarah Mondale, agrémentée de carnets raturés et dessinés qui permettent également de se plonger dans le style de l’écrivain, ses phrases longues, son écriture de caractère. Cinquante-neuf minutes et une immersion riche de nombreuses images d’archives sur fond de musique de Franck ou de Fauré. Cinquante-neuf minutes que vous ne verrez pas passer.
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