Leila Sebbar

rotko a écrit:

je lâche le mot : des islamistes fondamentalistes.

Le photographe est attaque par des

Citation :

islamistes fondamentalistes

Mais a Paris

pour Maya: je n'avais pas pensé, mais c'est vraisemblable que cela s'est passé à Paris. Elle prend le métro, où trouverons nous des affiches audacieuses qui laissent indiférents les Parisiens et blessent l'honneur des islamistes: un bon point de vue Maya

Curieux : je n'ai pas douté une seconde que cette nouvelle se situe à Paris, dans le métro ; du coup, je n'ai même pas pensé à en parler !

nicyrle a écrit:

Curieux : je n'ai pas douté une seconde que cette nouvelle se situe à Paris, dans le métro ; du coup, je n'ai même pas pensé à en parler !

Nicyrle, il est possible que pour toi la litterature ait moins de secrets que pour nous. En tant qu'ecrivain, tu as surement une differente maniere s'assimilier la lecture. Pour moi, c'est tout clair, mais maintenant - l'ambiance est bien parisienne.

La fille à la prison

Un nouveau récit de Leila Sebbar que je trouve différent des précédents.
Une prison de femmes, pas des pires, trois femmes qui ne se sont jamais croisées dans la vie et que le malheur rassemble dans une même cellule.

Marinette, la plus moderne, Nadia, l’arabe et Aïché la turque, chacune a commis un délit que les lois punissent. Elles attendent le courrier qui vient avec les lettres et le catalogue
Marinette connaît toutes les grandes surfaces, les Halles, elle était vendeuse et voleuse, voilà pourquoi elle est en prison : elle reçoit deux lettres par mois, on lui pardonne, on lui parle de retourner au pays des montagnes, on veut la marier, elle rit aux éclats : jamais.

Nadia, on ne sait pas ce qu’elle a fait, mais son avocat l’aime, va la sortir de ce trou et se marier avec elle. Elle cherche dans le catalogue le modèle de sa robe de mariée.

Aïché, douce, calme, qui pourtant a commis le forfait le plus grave, on va la transférer à une prison de haute sécurité ; elle refuse de raconter son crime. Toujours le Coran dans ses mains et dans son cœur, elle est conciliante, indulgente avec les autres.
Elle se souvient de son vieux grand-père qui récitait les versets du Coran plusieurs fois par jour et elle les a appris par cœur, et c’est comme si elle savait lire l’arabe. Elle pense souvent à ce grand-père, il serait mort quand elle serait libre.
Dans l’atelier où elles travaillent Aïché brode des prodiges, elle apprend aux autres cet art de nos jours démodé.

Nadia reçoit aussi des lettres de sa famille, on veut la marier, il y a un cousin qui pardonnera tout, n’importe le reste, c’est elle qu’il
veut, la plus belle de la ville, elle ne veux rien savoir, rentrer à la maison : jamais ; elle habite une grande ville et méprise les traditions musulmanes, elle va se marier avec l’avocat et vivra une vie en liberté.

Marinette et Aïché en cachette confectionnent la robe de mariée de Nadia, perles, fleurs d’orangers, paillettes volées à l’atelier, elle est prête pour le jour sacré.

Nadia est comme toutes les semaines au parloir avec l’avocat.
Il est beau, elle parle et parle, un torrent de phrases heureuses sort de sa bouche, lui est incapable d’articuler le moindre mot, elle sait qu’il est timide, c’est pour ça qu’il ne répond pas.

La semaine suivante elle vient au parloir en robe de mariée, la plus belle, elle s’accroche à son bras, crie qu’on ouvre la grille de fer, hurle ; hélas son rêve est fini.

Pendant la nuit, après l’épouvantable échec, les trois filles coupent en fine lamelles la robe de mariée et tressent de gros cordons, cette fois elles ont la certitude que l’échec se transformera en victoire.

Mon avis : une belle histoire toujours marquée par l’illusion, le désir de la liberté ; ce désir qui a fait tomber dans la paranoïa Nadia et pour Marinette le moment venu, l’espoir de recommencer sa vie à son gré.
Pour Aïché, la liberté est la croyance mystique qu’elle trouve dans le Coran.

parfait, Amadak !

merci, Rotko

Tu m'as devancée, Amadak !

La fille en prison, une nouvelle réussie sur tous les plans : la structure, l’écriture, la force du message.
Non pas une mais trois jeunes filles dans une prison en France : Marinette, la Française, Nadia, la Berbère qui vit en France, Aïché, la Turque musulmane pratiquante. Les trois fuient la cruelle réalité de l’enfermement : Marinette rêve grâce aux lettres de Pierrot, son fiancé, mais elle est fragile, elle a des crises de larmes ; Nadia feuillette les pages de catalogues de mode, elle a réussi à se convaincre que son avocat l’aime et qu’ils vont se marier ; Aïché est la plus mystérieuse, nul ne sait quel délit lui vaut d’être là, pas même ses compagnes, mais c’est grave, sa condamnation sera lourde, elle a trouvé refuge dans sa foi retrouvée grâce aux souvenirs liés à son enfance quand elle écoutait son grand-père réciter les sourates du Coran.

Les trois jeunes filles sont unies par la perspective de la somptueuse robe de mariée à réaliser pour Nadia.

Au fil du récit, Aïché devient le personnage central : elle est le point d’ancrage des deux autres qui voient en elle leur « ange gardien », elle incarne la perfection, elle fait tout bien, elle est une brodeuse hors pair, elle a une influence bénéfique sur les autres au point que les surveillantes qui la jugent "efficace" ne « veulent pas la perdre », elle sait calmer ses compagnes, les faire rêver avec des présages heureux. Bien sûr, il y aura quand même l’explosion de folie finale de Nadia et c’est Aïché qui apportera la seule solution possible en découpant la robe de mariée en fines lamelles pour tresser la corde qui les libèrera définitivement de la prison où elles sont, de la prison du mariage imposé, de la prison d’un mariage impossible.

J’ai beaucoup aimé le thème de la langue arabe qu’aucune ne connaît et qui pourtant s’avère magique pour Aïché d’abord, pour Nadia ensuite, pour Marinette aussi, sensible au « miracle » du déchiffrage par Nadia qui, pourtant, ne comprend pas ce qu’elle lit.
Un vent de poésie mystique passe sur cette nouvelle et lui donne intensité et profondeur.

Avec les sept filles, Leila Sebbar fait le tour des dangers dont les femmes sont victimes. En temps de guerre, elles sont des proies, pour le soldat, figure excessive du mâle : aussi le voit-on plaisanter avant le drame, comme si l’ordre naturel faisait de la femme un gibier (la fille dans l’arbre).

La société civile partage la même vision : la femme dont on parle, dont on se passe les photographies, c’est la femme déchue, livrée aux hommes dont elle assure, de gré ou de force, le plaisir. Aussi les mères, sujettes à d’indicibles appréhensions, sont-elles avisées de protéger leurs filles, et rassurées, peut-être à tort, quand celles-ci s’engagent dans un maquis pour une guerre de libération. (la fille aux pataugas)

La liberté de leur corps et de leur comportement ne peut être que de courte durée ; le mariage, consenti ou imposé, signifie l’asservissement (la fille dans les collines), ou comme pour la grand-mère restée au pays (la fille au hijeb), la solitude et/ou la perte des espérances du jeune âge.

A l’intérieur des familles, la jeune fille se rend utile, elle pense, quand les conditions le permettent, à une instruction qui serait une sauvegarde. Mais le contexte de cette scolarisation, en France par exemple, se marque aussi par un isolement, un repli sur soi complexe, parfois accepté, voire recherché, qui convient parfaitement à des traditionalistes désireux de maintenir ce modèle, par la contrainte.

Peu d’optimisme dans la vision de Leila Sebbar, avec ce recueil encadré par la maison close et la prison, où la jeune femme risque toutes les aliénations.

Rotko, c'est un plaisir de lire une telle synthèse
La vision de l'auteur est pessimiste, c'est vrai, mais son talent est indéniable et j'apprécie aussi l'unité subtile de ce recueil de nouvelles.

Parmi les sept nouvelles, j’ai lu : «la fille des collines», « La fille et la photographie», « La fille dans l'arbre », « La fille au hijab » et «La fille en prison».

J’ai lu aussi les commentaires des autres.

Devant vos analyses bien faites et vos réflexions je ne me sens pas capable d’en discuter, néanmoins j’essaye de synthétiser ce que j’ai pu comprendre

L'auteure raconte la douleur et le malheur des femmes dans ces nouvelles.

Le chiffre sept, symbole mystique, qu'on retrouve dans toutes les religions. Mythique aussi (les sept filles d'atlas) et peut être scientifique, Bryan sykes opère un classement génétique de vieux squelettes de sept femmes qu’il considère comme l’origine de l’homme.

Sebbar tente d’élever au rang de sacré cette féminité, maltraitée, mise à mal par les hommes.

C'est dans leurs chairs et dans leurs vies de tous les jours que les femmes endurent les pires sévices.

Les périodes choisies du début du siècle jusqu’à nos jours. L'étendue temporelle du malheur. Un siècle de progrès scientifique, de revendications, de libertés arrachées par la force des bras... en contradiction avec la condition féminine, une perpétuelle tentative d’asservissement, un combat continu pour les femmes. Pessimiste, la vision de l'auteure, elle l'est.

Les lieux de prédilection des nouvelles, deux rives, deux cultures, les mêmes épreuves d'incompréhension.

Un espoir, cette capacité d’adaptation de la femme aux remous qui secoue son parcours, au sein de sa famille, dans la société, au gré des événements (en temps de guerre, en temps de paix).

L’écriture est morcelée, la présence des ellipses. Le vide est sciemment placé pour répondre au besoin de la nouvelle et amener le lecteur à réfléchir mais la cohésion est là, le message est passé.

Bravo Sarabennada Les synthèses sont nécessaires devant une oeuvre finalement complexe et, comme tu le dis très bien, chargée de symboles ; la maîtrise du genre difficile de la nouvelle est remarquable d'autant que ce choix d'écriture est tout à fait en adéquation avec le sujet abordé et ses multiples facettes.

merci beaucoup nicyrle

oui , Sarabennada, belle synthèse de ce recueil sur un thème unique, avec variations, qui offre un interêt a la fois littéraire, historique et humain.

Il nous a donné l'occasion d'échanger sur des problèmes d'actualité, au mahgreb comme en france : les jeunes filles et le sport, les tenues vestimentaires, les rôles et images des femmes dans des sociétés trop souvent immobiles, réticentes, voire hostiles.

pour Saranabbada: chère amie ,je suis ravie d lire ton commentaire, que je suis loin de faire une telle synthèse ou en peu de lignes tu fait un rapport de tout l'univers de Leila Sebbar et son point de vue sur les femmes, soumises luttant pour leur liberté.
reçois mes compliments les plus sincères

j'ai suivis tous vos commentaires sur ce fil et ca m'a beaucoup plu.Un autre auteur que j'ai decouvert grace à vous,merci

Très chère Amadak,

j'ai lu toutes les nouvelles reçues, mais comme j’étais un peu bousculée par le temps, je n'avais pas l'intentions de donner mon avis tout de suite.
crois mois que c'est ton commentaire si riche, si parfait -et dont se dégage une lecture attentionnée- qui m'a poussé à mettre de l'ordre dans ma tête et a revoir le reste des "filles. donc merci a toi pour cette passionnante analyse qui m'a motivé.

par ailleurs il me faut beaucoup de courage et d'audace pour poster après nicyrle ou rotko, alors si c'est les deux ensemble, c'est un suicide (pour moi).

merci à nicyrle et rotko pour leur encouragement.

pour l'effort déployé afin de nous faire découvrir cet auteure, je dis aussi merci

trop parlé, libre à toi de nettoyer par là, Nestor,

Pour Saranabbada:

Chère Saranabbada:, c’est vrai qu’il faut du courage pour échanger avec Nicyrle et Rotko, deux lumières, mais toi , avec ton français parfait, tes connaissances, tu es digne de mériter leur appui. Cette synthèse que tu nous a livré , m’a comblée d’admiration, tu parles de suicide, moi je devrais me cacher sous le lit et ne plus sortir la tête, Reste tranquille, je les connais, les deux ont un cœur chaleureux et toujours prêt à aider celui qui en a besoin, ce n’est pas ton cas Sara, tu es à la hauteur des meilleurs participants, je suis fière que tu sois sur GDS* .

Résumé de l'éditeur : Un soir à La Courneuve, battue par son père pour être rentrée trop tard à la maison, Dalila, beurette de 15 ans, s’enferme volontairement dans la chambre de ses frères. Elle y reste huit jours, le temps de prendre la décision de fuguer. Elle est en rupture de ban avec ses parents, sa mère Fatima surtout. Mais durant sa claustration, lui reviennent les souvenirs des après-midi au square quand elle accompagnait Fatima retrouver les voisines algériennes. Les femmes bavardent, et la parole libre passe de la joie à la détresse, du rire à la complicité. Ensemble, elles affrontent les violences de la cité, l’éducation des filles, les conflits entre leurs croyances et les usages en France.
Peinture réaliste et émouvante des femmes immigrées des années 80, ce roman fait de Fatima et de ses amies, les premières héroïnes littéraires des cités en France.

C'est un très joli livre qui m'attend

80 p. avec des dessins de Sébastien Pignon.

Pour évoquer la figure d'Isabelle Eberhardt (Genève 1877- Aïn Sefra 1904), Leila Sebbar multiplie les regards : les filles du cafetier, un orphelin des rues, un ressortissant des bataillons d’Afrique (Bat d’af), Selem son époux, etc. leurs regards se croisent sur ses différents rôles de taleb, de journaliste, de correspondancière, de cavalière, d’agent semi-officiel, sous les noms divers de Nadia, Si Mahmoud ou Madame Ehni.

« Une femme solide comme un soldat; frugale comme les nomade, et insouciante »

« un jeune homme burnous blanc, chèche enroulé à la façon d’un turban, bottes de filai rouge »

« une dévergondée qui fumait et buvait de l’absinthe »

« ce fils de Caïd n’était pas un fils de la grande tente. C’était une femme, oui, une jeune femme, une aventurière disaient les uns, une espionne au service des bureaux arabes disaient les autres, un agent de la colonisation, une libertine, une Russe convertie à l’Islam ».

Elle suscite l’envie, la méfiance, la considération, l’admiration, l’amour, mais reste insaisissable.

Leila Sebbar, dans cet assemblage de points de vue, fait surgir une personnalité de femme hors du commun, à une époque et en un lieu où les mentalités française comme locales n’étaient pas prêtes à recevoir une  femme d’exception.

Le pays de ma mère, voyages en Frances, 272 p chez Bleu autour, "d'un regard l'autre".

la diversité des Frances, avec des souvenirs .... d'Annie Ernaux, de Kacimi, de Manguel et de trente autres écrivains.

des photos aussi, des cartes postales, des aquarelles, et des rappels par des femmes actives ou feministes des années 70.