Pierre et Jacques Ferrandez

fontelle a écrit:

Sur vos conseils, j'ai battu le rappel des Bencquista dispos à la biblio :

-"L'outre mangeur" excellente BD

le sujet est assez original :

l'histoire débute dans un groupe psychologique où des obèses viennent confier leurs troubles.
On suit un "gros" dont le métier nous surprendra autant que ses pulsions boulimiques.


La nourriture es décidement devenue une idée fixe

Comme Benacquista est auteur de roman policier, on assiste à une enquête, et on sait même à la fin pourquoi ce personnage est devenu"gros".

Le dessin est classique, mais les attitudes sont bien rendues.

Le rythme de la narration fait prendre conscience de l'effort nécessaire à un "gros" pour monter un escalier ou résister devant des devantures appétissantes.

******

Benacquista, Tonino et Ferrandez, Jacques se sont retrouvés dans l'album Victor pigeon, dans la boîte noire, et dans la maldonne des sleepings, chez Futuropolis.

Bon, je ne sais pas trop où placer cet article.. C'est du Benacquista, mais ca n'est pas un polar... C'est du Tardi mais ca n'est pas une BD...

Je parle bien sûr du Serrurier Volant de Benacquista, dans sa version illustrée par Tardi (chez Folio). Une jolie petite histoire (enfin jolie..), des illustrations dont je raffole (mais je suis une inconditionnelle de Tardi donc ca ne compte pas)... Je vous le recommande !

Si je me souviens bien, L'Outremangeur a été adapté au cinéma il y a 4 ou 5 ans, avec Cantona dans le rôle principal.

10 volumes parus, dont j'ai le tome 8 Carnets d'Orient, Tome 8 : La fille du Djebel Amour.

L'introduction est concise et précise, montrant les détournements de mots pour qualifier les pratiques de l'armée française : abondance de vocables lénifiants et cyniques pour les tortures dites "interrogatoires poussés", "rock and roll", "gegène", "brasse coulée", "manivelle".

Le contexte et les manipulations de la guerre psychologique sont mentionnés, éclairant les doubles jeux qu'on voit dans l'histoire. Ils sont dûs à l'historien Michel Pierre.

Ferrandez (BD)

L’album retrace la politique nationale de la France en Algérie, les différents choix algériens, et tout est incarné dans des destins individuels : on voit ainsi des existences partagées entre différentes options, des hésitations, des revirements, des calculs politiques et des choix existentiels.

Le récit repose sur une bibliographie donnée en fin de volume.

La guerre est particulièrement complexe du côté algérien par l’opposition créée entre les Kabyles et les Arabes, les politiques et pratiques différentes du FLN et du MNA, la peur des représailles,

- et du côté de l’armée française par les opérations répressives proprement dîtes, et des opérations alibis des SAS (Sections administratives Spéciales) centrées sur l’enseignement , les soins etc. auxquelles croient les idéalistes partenaires.

La fille du Djebel Amour se termine sur la fraternisation trompeuse du début juin, après le 13 mai 1958.
ferrandez aime citer Camus, dont il a adapté l'Hôte

Pris pas l’histoire, je n’ai pas assez insisté sur le graphisme de Jacques Ferrandez qui fait vire les personnages et leurs embarras ou contradictions .

Les images panoramiques sur les paysages sont tout à fait remarquables.

En exergue à cet album :

Citation :

« Il arrivera un moment où l’armée et le maquis rivaliseront de brutalité et de cruauté, les uns au nom d’une liberté difficile à conquérir l’autre au nom d’un système périmé qu’elle s’acharne à défendre »

Mouloud Feraoun in journal 1955-1962 le Seuil.

Et sur un mur p 25, ce graffiti (une citation de Camus ) qui en dit long :

Citation :

« Bientôt l’Algérie ne sera peuplée que de meurtriers et de victimes. Bientôt les morts seuls y seront innocents. »

c'est l'adaptation de la nouvelle de Camus dont nous avons parlé.

Citation :

L'homme de la colline et son hôte font le choix de la responsabilité et du respect de soi, c'est le seul chemin qui vaille

écrit Boualem Sansal

Voyez le début de cette fable philosophique sur le libre arbitre et le choix, très peu de texte, mais des illustrations qui parlent ! la beauté des paysages, parfois sur une page entière, sa dureté aussi - le froid, le sec.

On pourrait analyser à loisir différents thèmes, le colonialisme, l'ascétisme et la générosité du maître d'école, la route choisie par chacun : Ferrandez comme Camus laisse la parole au lecteur.

un très bel album.

Je vais le suggérer en achat à ma bib, tiens

59 pages, Gallimard - Futuropolis

C'est aussi le titre d'un recueil de benacquista de nouvelles chez Folio.

Ferrandez a donc illustré ce court récit avec son talent habituel, mais j'aurais aimé un peu plus de délire dans les rêves de Laurent Aubier.

Tout débute par un accident de voiture, Laurent Aubier tombe dans un "coma vigile", c'est-à-dire qu'il parle dans son sommeil inconscient, révélant à une infirmière plein de choses sur sa vie passée. Celle-ci, adepte de la psychanalyse, a rempli un cahier avec les propos involontaires de l'accidenté. Celui-ci entreprend une enquête sur les noms prononcés et les phrases sybillines de son sommeil.


Benacquista semble avoir une idée un peu rapide du discours de l'inconscient : il garderait une image fidèle de ce qui a été vu, vécu, puis oublié, et/ou refoulé, si bien que tout est vrai au pied de la lettre, malgré le passage du temps.

Notre personnage va donc éclaircir ce qui était obscur, par exemple une rupture amoureuse traumatisante, et même trouver la Vérité sur son accident.

Alger la Noire, Casterman 2012, 132 pages.


Alger, début 1962. Les cadavres nus de deux jeunes gens enlacés sont retrouvés sur une plage. Elle est française, lui arabe. Il est émasculé et son dos arbore, gravées au couteau, les trois lettres "OAS"...
Rythmée par les plasticages et les règlements de compte, l'enquête de l'inspecteur Paco Martinez le conduira dans les coulisses de la ville blanche, entre passions politiques, affairisme sans scrupule et mœurs dissolues.

Je n'ai pas vraiment accroché : un polar classique parfois tiré par les cheveux, le conflit algérien en filigrane (trop peu présent à mon goût), des personnages stéréotypés (le fils de l'anarchiste espagnol, le juif, le riche pervers, le jeune de l'OAS, etc.), un peu d'amour et de sexe (juste ce qu'il faut, pourrait-on penser), un graphisme beau mais trop classique pour moi.

Pierre et Jacques Ferrandez, , Cuba Père et Fils

Ce matin je me suis rendu au festival du Polar et de la Bd de Drap (06), dans les alpes maritimes...



---Au premier étage de l'espace Jean Ferrat dans une grande salle les auteurs de Polars et de Bd invités y exposaient leurs oeuvres, pour la Bd deux tables seulement, j'ai parcouru les titres et là cela a fait tilt..!!! ceux qui me connaissent vont comprendre tres vite, je suis tombé sur : Cuba Père et Fils de Pierre et Jacques Ferrandez et je n'ai rien vu d'autre dans la pièce...Désolé je ne pourrai vous parler de polars ou d'autres Bd (je me souviens il y avait un Franquin...mais lequel..? ....
Et il y avait Jacques Ferrandez, et nous avons parlé et le temps n'a plus compté, et je suis sur que nous en aurions encore beaucoup à dire...!!!
Avec son accord j'ai pris une photo de l'auteur (le Père):




L'histoire :
La Havane, fin 2007. Luis, vieux révolutionnaire sur le retour, compagnon de route historique du Che, ressurgit au domicile d¹Hortensa, la femme qu¹il a autrefois séduite puis délaissée après lui avoir fait un fils, Reinaldo. Sans vergogne, Luis propose une réconciliation à Hortensa, avec derrière la tête une idée très intéressée : récupérer la Buick 1955 qu¹il a naguère abandonnée, pour toute consolation, à Hortensa. Outrée par tant de cynisme et de désinvolture, Hortensa congédie Luis sans ménagement. Il ne reste à celui-ci, pour parvenir à ses fins, qu¹à prendre la route de Santiago. C'est dans cette ville en effet que Reinaldo, devenu Ronald, gagne sa vie comme taxi à bord de la fameuse Buick 55, rescapée de toutes les vicissitudes de l¹histoire.



----Voilà succintement un apperçu de la Bd (qui n'est pas qu'une bd d'ailleurs, c'est aussi un carnet de voyage...) maintenant je vais la lire, je vais retourner à Cuba en feuilletant ses pages, un Cuba que Jacques et Pierre Ferrandez ont su comprendre, un Cuba que nous partageons...Sincèrement, procurez vous cet ouvrage tout en couleurs qui vous mènera vers un beau voyage...
Je reviendrai vous en parler... Promis, juré....

Jacques Ferrandez est connu sur Grain de sel pour ses carnets d'orient

Cactus Bill a écrit:

Jacques Ferrandez est connu sur Grain de sel pour ses carnets d'orient

j'ai tout fusionné, ainsi que son adaptation en BD de benacquista.

Son adaptation de l'hôte de Camus est ue bonne action qui lui vaut la reconnaissance de Nicyrle. Souhaitons lui de continuer dans cette bonne voie, c'est un auteur qu'on suit avec plaisir. merci Cactus !

Un passage du carnet de voyage contenu dans "Cuba de père en fils" :
"Votre chauffeur de taxi peut être médecin, le serveur de restaurant où vous avez diné possède un diplôme d'ingenieur agronome.
Sans parler de l'étudiante qui drague le touriste pour améliorer l'ordinaire ou acheter du lait en poudre pour son bébé.
"Avant, on luttait contre l'empire americain.
Aujourd'hui, on lutte tout simplement pour pouvoir survivre.
Tout est illégal. Si les policiers te surprennent, tu dois payer une amende et ils te confisquent ta marchandise.
J'ai même vendu de la viande de boeuf.
C'est strictement interdit. Même si tu ne détournes rien, tu es obligé d'acheter à quelqu'un qui a volé.
Il suffit de ne pas se faire prendre"constate amèrement Jorge.
Lors de notre discussion Jacques Ferrandez m'avait déclaré ne pas avoir pu se faire éditer à Cuba et ne pouvoir vendre ses BD dans l'île, je comprend aisément pourquoi, on ne peut pas tout dire à Cuba, et surtout pas la vérité...

L'Étranger de Albert Camus et Jacques Ferrandez.

L'hôte de Camus aussi, était très réussi. Je compte faire un fil spécial sur cette BD qui recense beaucoup de thèmes de Camus ; elle est très riche, et renvoie à plusieurs oeuvres.

Donc une BD marquante, je l'inscris au programme de la BD du mois de février, car elle suscitera, je l'espère, beaucoup de fructueux échanges, notamment parce qu'en lecture accompagnée, on lira le premier Homme.