Sylvie Gracia, le livre des visages (F.B)

Je lirai les nuits d'hitachi 118 p.Gallimard.

"Bosch, porte de Saint-Ouen, Sony, porte de Clichy, Hitachi, porte d'Asnières, la ronde des grandes publicités lumineuses tout autour du périphérique Ouest, Paris cerné de lettres rouges majuscules. La ronde de ces nuits opaques. Jamais je n'allumais la lumière et c'était la nuit du dehors qui venait m'éclairer (...)"


j'ai été piqué de curiosité à l'idée que ce livre des visages chez Jaqueline Chambon, tenait son titre et son contenu de Facebook !

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Sylvie Gracia a décidé d'utiliser le réseau social pour écrire chaque semaines trois à quatre pages de son journal : 2 avantages : se sentir tenue par une echeance hebdomadaire, et avoir presqu'aussitôt des réactions de lecteurs.

En plus desliens avec des lecteurs qui peuvent autoriser une sorte d'interactivité pour ses textes, sielle décide d'y faire figurer des personnes du réseau social dont elle cerne le"profil" sinon le visage.

Trois axes :

- les enfants, ie de grandes filles qui vont quitter la maison,

- une vie personnelle, voire celle de l'immeuble ou du quartier,

- le souci de l'ecriture avec des écrits quand même élaborés,

donc faire

Citation :

" dans le plus intime devant le collectif"

avec des photos (du voyage à Venise ou de son logement) comme déclencheurs.

le livre des visages

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le journal permet une grande liberté d'écriture, avec des textes au présent, mais non sans souvenirs ou projets.

Un souci, la sincérité, aller au fond des choses parce que le corps a aussi sa place, qu'il soit sexuel ou malade, on vit avec lui en permanence.

Par certains côtés, on brise les convenances ou les silences :

le lit a une place dans la chambre de la femme divorcée,

et si certains passages veulent être plus secrets, l'auteur les a envoyés en privé à des personnes de confiance.

Tout cela sous le signe du respect, ce qui a évité à cette femme franche et courageuse d'avoir des réflexions déplacées ou sottes.

le livre comporte les photos initiales, il n'a pratiquement pas été reorchestré car ce feuilleton, sous la tension donnée par la présence du lecteur, a des lignes directrices fortes qui le charpentent.

Sylvie Gracia a décidé

Citation :

de vivre et de raconter l'existence dans ses plaisirs et ses douleurs.

on suivra ses parcours.

Le livre des visages : Journal facebookien 2010-2011


250 pages chez Actes Sud.

Intriguant ce livre, je vais aller fouiller un peu sur le Net pour d'autres informations.

«  Bosch/ porte de Saint Ouen, Sony/porte de Clichy, Hitachi/porte d’Asnières, la ronde des grandes publicités lumineuses tout autour du périphérique-ouest, Paris cerné de lettre rouges majuscules

La ronde de ces nuits opaques. Jamais je n’allumais la lumière et c’était la nuit du dehors qui venait m’éclairer, moi fantôme.. »

C’est peut-être ce passage, suivi de bien d’autres, qui me fait penser à Zone d’Apollinaire, avec les lumières de la ville et ses bruits nocturnes, qui s’incrustent dans le demi sommeil : sonorités, images brouillées de différentes époques, mais perçues par leurs ressemblances ; se lever pour qui ? Répondre à un appel d’enfant, souvenirs familiers, puis d’autres...

La nuit, c’est le moment où surgissent des êtres dont la présence a marqué, ou dont l’absence tourmente, à l’égal de peurs enfouies, ou d’inquiétudes.

Les souvenirs émergent, à demi conscients, ceux de la jeunesse troublée de changer de décor (Aragon n’est pas loin !), et d’aborder des domaines nocturnes ignorés, marqués par des tentures, ou des chaussures qui lâchent.

Les escaliers, on se les rappelle en différentes occasions ; ils nourrissaient les appréhensions ou les attentes, montés avec espoir, puis, colère ou déception, descendus ou dévalés au petit matin..

On passe alors à la chanson du Mal Aimé - ou de la trop aimante, itinéraire marqué d’errances, de trajets en train, de halls de gares, de séjours ensoleillés, avec les réponses improbables de qui l’on voulait rejoindre…Pas facile de parler la même langue au même moment.

Les escaliers, les chambres, les silences du passé…ils habitent la nuit.

Les nuits d’Hitachi, l’arpenteur, Gallimard.

les nuits d'Hitachi

un extrait (p.78) où apparaissent, liés,

- le goût de l’écriture, essentiel,

- l’attente amoureuse,

- les bruits intérieurs et la présence sonore de la ville.

Une nouvelle fois les mots en place des corps

Ils me poursuivent encore tes mots leur absence me fait écrire maintenant que depuis ta maison de Liverpool tu ne me les envoies plus)

Des heures je t’ai attendu, allongée habillée sous le drap dans le froid collant des vêtements portés depuis la veille, dans un demi sommeil habité par l’aspirateur de la femme de ménage, son bourdonnement en pointillés se rapprochant, s’éloignant, cognements brusques contre les cloisons, portes qu’on claque

Le corps abandonné au flot de ce qui monte de la ville fenêtre ouverte, chaque ligne de bruits progressivement distincte, talons de femmes sur le trottoir, petits pas accélérés d’enfants à la traîne, voitures impatientes au feu rouge, pépiements d’oiseaux aussi, et les flèches aigues des mobylettes qui transpercent tout l’espace, et les conversations des passants venant habiter mes yeux fermés, les voix collectives des villes, confuses, incompréhensibles.