Mémoires du duc de Saint-Simon.

Voilà quelques choses extraordinaires au sujet d'un vilain sujet selon St-Simon, l'abbé Dubois :

Citation :

Tous les vices combattaient en lui à qui en demeurerait le maître. [...]
Il excellait en basses intrigues, il en vivait, il ne pouvait s'en passer, mais toujours avec un but où toutes ses démarches tendaient, avec une patience qui n'avait de terme que le succès ou la démonstration réitérée de n'y pouvoir arriver, à moins que, cheminant ainsi dans la profondeur et les ténèbres, il ne vît jour à mieux en ouvrant un autre boyau. [...]
Ce sont les espionnages qui occupaient toutes ses journées, sur lesquels il réglait toutes ses démarches, et à tenir le monde, sans exception, de si court que tout ne fût que dans sa main, affaires, grâces, jusques aux plus petites bagatelles, et à faire échouer tout ce qui osait essayer de lui passer entre les doigts, et de ne le pas pardonner aux essayeurs, qu'il poursuivait partout d'une façon implacable.

NB : Je viens de constater que j'ai posté dans la rubrique FICTION. Oupss !

Citation :

NB : Je viens de constater que j'ai posté dans la rubrique FICTION. Oupss !

pourquoi pas ?

Louis XIV

Ses ministres, ses généraux, ses maîtresses ses courtisans s’aperçurent, bientôt après qu’il fut le maître, de son faible plutôt que de son goût pour la gloire. Ils le louèrent à l’envi et le gâtèrent. Les louanges, disons mieux, la flatterie lui plaisait à tel point que les plus grossières étaient reçues, les plus basses encore mieux savourées. Ce n’était que par là qu’on s’approchait de lui, et ceux qu'il aima n’en furent redevables qu’à heureusement rencontrer et à ne jamais se lasser en ce genre […]

La souplesse, la bassesse, l’air admirant, dépendant, rampant, plus que tout l’air néant sinon par lui, étaient les uniques moyens de lui plaire.
Saint-Simon.

Vive le Grain de Sel Libre !

J’étais demeuré frappé de ce que le président de Maisons m’avait expliqué et montré sur la gabelle, d e l’énormité de quatre-vingt mille hommes employés à sa perception, et des horreurs qui se pratiquent là-dessus aux dépens du peuple.

Je l’étais encore de cette différence de provinces également sujettes du Roi dans une partie desquelles la gabelle est rigoureusement établie, tandis que le sel est franc dans les autres, dont le Roi n’en tire pas moins pourtant, et qui jouissent d’une liberté à cet égard qui fait regarder avec raison les autres comme étant dans la plus arbitraire des servitudes de tous les fripons de gabeleurs, qui ne vivent et s’enrichissent que de leurs rapines.

Saint-Simon.

Une page manuscrite de Saint-Simon (sur le blog de François Bon)
http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article499

A propos de pages manuscrites, Troglo, où en es-tu dans la transcription des Essais de Montaigne ?

J'en suis au chapitre IX du livre I, enfin j'en étais, car j'avais commencé sur un cahier à petits carreaux par un bille, et j'ai recommencé depuis peu sur un cahier tout à fait vierge par plume. Dans la nouvelle version je viens d'achever le premier chapitre du premier livre.
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Il me faut râler de déplaisir au sujet des extraits choisis des mémoires de St-Simon parus chez Folio, en deux tomes dont voici les photos :

Figurez-vous que dans chacun de ces volumes figure la même anecdote, celle de la colère de Louis XIV près du bassin des carpes de Versailles !

Le jeu des représentations mentales.

Ci-dessous un portrait d'une dame par St-Simon. Je ne vous dis pas qui elle est ; laissez planer votre esprit ; laissez se construire l'image tri-dimensionnelle de la personne décrite en vous.
Plus tard je posterai des photos d'oeuvres plastiques représentant cette même personne ; ainsi vous confronterez le produit de votre esprit fécondé par la verve Saint-Simonienne avec le produit de l'observation du vivant par les gens du ciseau et du pinceau !

En bonus je vous fait don du portrait de la même personne - encore enfant - par la princesse Palatine !

St-Simon a écrit:

Régulièrement laide, les joues pendantes, le front trop avancé, un nez qui ne disait rien, des grosses lèvres mordantes, des cheveux et des sourcils châtains bruns fort bien plantés, des yeux les plus parlants et les plus beaux du monde, peu de dents et toutes pourries, dont elle parlait et se moquait la première, le plus beau teint et la plus belle peau, peu de gorge, mais admirable, le cou long, avec un soupçon de goitre qui ne lui seyait point mal, [...]

la princesse Palatine a écrit:

[...] elle a une jolie taille fine comme une vraie petite poupée, de beaux cheveux blonds et en abondance, des yeux noirs, des cils et des sourcils très longs et très beaux, la peau très fine, mais pas très blanche, un petit nez qui n'est ni joli ni laid, une grande bouche et de grosses lèvres, en un mot, elle a tout à fait la bouche et le menton autrichiens.

Tu titilles ma curiosité... serait-ce par hasard

Spoiler:

En tout cas on voit bien que la beauté est subjective..et éminemment politique, dépendant des intérêts de la personne qui écrit!

Varda, merci d'avoir répondu ; je me sens moins seul.
J'ai néanmoins le regret de t'annoncer que tu es en situation d'échec : ta réponse est erronée d'un tout petit poil.

Il s'agissait de

Spoiler:

Pour voir le buste : c'est ici.

Pour voir la peinture : c'est là.

troglodyte a écrit:

Le jeu des représentations mentales.

la princesse Palatine a écrit:

elle a tout à fait la bouche et le menton autrichiens.

J'arrive trop tard pour participer, d'un autre coté je n'aurais jamais trouvé.
La citation de la Palatine ne peut qu'induire en erreur en faisant croire qu'il s'agit d'une habsbourg

troglodyte a écrit:

Varda, merci d'avoir répondu ; je me sens moins seul.
J'ai néanmoins le regret de t'annoncer que tu es en situation d'échec : ta réponse est erronée d'un tout petit poil.

Il s'agissait de

Spoiler:

bah, je ne me suis trompée que d'un demi prénom

difficile de savoir qui croire, en tout cas: le buste et le portrait ne permettent pas franchement de se faire une idée claire que la beauté de la dame...

la princesse Palatine a écrit:

[...] elle a une jolie taille fine comme une vraie petite poupée, de beaux cheveux blonds et en abondance, des yeux noirs, des cils et des sourcils très longs et très beaux, la peau très fine, mais pas très blanche, un petit nez qui n'est ni joli ni laid, une grande bouche et de grosses lèvres, en un mot, elle a tout à fait la bouche et le menton autrichiens.

Qu'est-ce donc qu'une bouche autrichienne ? Cette question a enfin cessé de me hanter ; c'est Brantôme qui m'en a fourni la réponse dans les Dames galantes, lorsqu'à propos de Marie d'Autriche (1509-1558), soeur de Charles Quint, veuve de Louis II roi de Hongrie, gouvernante des Pays-Bas, il écrit :

Citation :

[...] selon ses portraictz que j'ay veu, qui la representent telle [tres-belle], ne luy donnant aucune chose de laid et à quoy reprendre, si non sa grand bouche et avancée, à la mode d'Austriche, [...]"

D'avance je demande pardon à ceux parmi les lecteurs qui pourraient bien se tamponner le coquillard de cette histoire de bouche autrichienne ; j'ai poursuivi ma méditation sur cet obscur sujet et j'ai trouvé un specimen de bouche autrichienne vivant :

La" bouche avancée", disais-tu ? on en trouve aussi en poitou charente

Mémoires du Duc de Saint-Simon collection 10/18, choix et présentation de Paul Galleret.

Un document exceptionnel sur la vie à Versailles. Saint-Simon dit écrire sans se soucier de la forme, mais le récit est vif, caustique, plaisant. Saint-Simon, partial comme tout un chacun n'en est pas moins un observateur prodigieux. Et quand il n'aime pas...il n'aime pas.

A propos de Monseigneur le grand dauphin, fils de Louis XIV :

Citation :

De ce long et curieux détail il résulte que Monseigneur était sans vice ni vertu, sans lumières ni connaissances quelconques, radicalement incapable d'en acquérir, très-paresseux, sans imagination ni production, sans goût, sans choix, sans discernement, né pour l'ennui, qu'il communiquait aux autres, et pour être une boule roulante au hasard par l'impulsion d'autrui, opiniâtre et petit en tout à l'excès, livré aux plus pernicieuses mains, incapable de s'en sortir ni de s'en apercevoir, absorbé dans sa graisse et dans ses ténèbres, et que, sans avoir aucune volonté de mal faire, il eût été un roi pernicieux.

Habillé pour l'hiver, le dauphin !

Au temps pour moi !

Tchipette a écrit:

Mémoires du Duc de Saint-Simon collection 10/18, choix et présentation de Paul Galleret.

le récit est vif, caustique, plaisant. Saint-Simon, partial comme tout un chacun n'en est pas moins un observateur prodigieux. Et quand il n'aime pas...il n'aime pas.

Madame de Villeroy

Citation :

La maréchale était extrêmement petite, la gorge nulle ; d’ailleurs d’une grosseur tellement démesurée, qu’à peine pouvait -elle se remuer. Ses bras étaient plus gros qu’une cuisse ordinaire, avec un petit poignet et une petite main mignonne au bout, la plus jolie du monde ; le visage exactement comme un gros perroquet, et deux gros yeux sortants, qui ne voyaient goutte ; elle marchait aussi tout comme un perroquet. Avec une figure si peu imposante, jamais femme n’en imposa tant.

Saint-Simon II, 1188

une méchanceté bien tempérée.

Il faudrait penser à lire une ou deux pages de St-Simon chaque matin afin de bien commencer la journée. Et puis je vais essayer de me trouver ses Mémoires chez la Pléiade en occasion, mais alors je vais de plus en plus m'enfoncer dans les siècles passés. Voilà déjà à quoi je ressemble à cause de toutes ces lectures d'un autre âge : http://mumin.free.fr/Troglo/IMG_0226.JPG

jamais lu va falloir !

troglo je viens d'aller voir mais cen n'est pas u n blog ni un site c'est quoi?

un gisant sur canapé

Saint-Simon, c'est à mes yeux comme le canard enchaîné : on le goûte d'autant mieux en complicité qu'on est au fait de ce qu'il raconte, et des personnages qu'il met en cause.

or qui actuellement connaît Chamillard ou les ducs de Bauvilliers ou de Chevreuse, ministres de l'époque ?

L'actualité donnait du piquant à ces portraits. L'interêt est actuellement émoussé, sauf amour particulier du style :

Citation :

Monsieur de Bauvilliers, l'homme le plus avare de son temps, et qui faisait des excuses à son cocher s'il n'arrivait pas avec justesse au moment qu'il avait demandé son carrosse, et l'incurie de M de Chevreuse de se faire toujours attendre, dont on a vu en leur lieu des exemples plaisants...

Prends ce style et fais des potins sur Dati, Boutin ou Kouchner, et on te lira avec plaisir : ces portraits étaient les poupées vaudou de l'époque !

ça donne envie de connaitre merci Troglo tu pensais que j'avais du temps de libre ? pour proposer cette lecture? et toi Rotko pour appater avec quelques phrases?

je n'appâte rien ni personne, je tente de montrer le côté relatif du potin hors du contexte historique connu des lecteurs de Saint-Simon, mais non du lecteur actuel.

rotko a écrit:

je tente de montrer le côté relatif du potin hors du contexte historique connu des lecteurs de Saint-Simon, mais non du lecteur actuel.

j'ai pas tout compris mais je te fais confiance
tu veux dire que si l'on potine sur quelqu'un que personne ne connait ça n'intéresse pas?

rotko a écrit:

je n'appâte rien ni personne, je tente de montrer le côté relatif du potin hors du contexte historique connu des lecteurs de Saint-Simon, mais non du lecteur actuel.

Il y a quand même les notes rédigées par des érudits qui permettent de se faire une idée de ce contexte, et c'est pourquoi la lecture des Mémoires devient une entreprise vraiment colossale !

Les jeux joyeux de la cour :

Citation :

Fieubet menait Courtin à Saint Germain au conseil, et on volait fort dans ces temps-là ; ils furent arrêtés et fouillés, et Fieubet y perdit gros, qu'il avait dans ses poches.

Comme les voleurs les eurent laissés, et que Fieubet se plaignait de son infortune, Courtin s'applaudit d'avoir sa montre et cinquante pistoles, qu'il avait fait à temps glisser dans sa brayette. A l'instant voilà Fieubet qui se jette par la portière, à crier après les voleurs et à les rappeler, si bien qu'ils vinrent voir ce qu'il voulait. "Messieurs, leur dit-il, vous me paraissez d'honnêtes gens dans le besoin, il n'est pas raisonnable que vous soyez les dupes de Monsieur que voilà, qui vous a escamoté cinquante pistoles et sa montre" ; et se tournant vers Courtin : "Monsieur, lui dit-il en riant, vous me l'avez dit ; croyez-moi, donnez-les de bonne grâce et sans fouiller." L'étonnement et l'indignation de Courtin furent tels qu'il se les laissa prendre sans dire une seule parole ; mais les voleurs retirés, il voulut étrangler Fieubet, qui était plus fort que lui, et qui riait à gorge déployée.
Il en fit le conte à tout le monde à Saint Germain ; leurs amis communs eurent toutes les peines du monde à les raccomoder.

Les voleurs ont quand même du être un peu étonnés aussi !!!