Quarante mots pour la neige
Un très bon thriller.
Le titre évoque le peuple Inuit, qui paraît-il, possède 40 mots pour décrire la neige. Autant dire qu’ils pourraient nous enseigner l’art de la nuance...
L’intrigue : odieuse et tristement d’actualité (l’été nous en a fourni une abondante moisson). Des enfants sont retrouvés morts et mutilés.
Un flic est chargé de l’enquête. Ordinaire. Révolté. Il est lui-même à un tournant douloureux de sa vie. Une fille partie étudier à Yale et une femme dépressive en clinique psychiatrique. Mais plus que cela, il a une « tache » sur la conscience. Celle d’avoir détroussé un escroc quelques années plus tôt pour subvenir aux besoins de sa famille.
Le flic intègre a cédé à la tentation.
Alors, attraper le salopard qui tue, c’est une forme de rédemption pour cet homme tourmenté de remords.
Le tueur : nauséabond et très bien campé. Il a une complice : une femme laide et boutonneuse, complexée et affligée d’une grand-mère fossilisée. Elle n’a jamais été aimée. Elle est subjuguée par lui. Il en fait sa chose, son esclave et l’initie au Mal, élevé en dogme.
Blunt a admirablement décrit cette relation perverse, faite de fascination, d’adulation folle et soumise. (On pense à l’ascendant que Manson exerçait sur ses « groupies », par exemple).
On atteint Thomas Harris. D’ailleurs, j’y ai souvent pensé en dévorant ce livre. Car l’auteur a travaillé ses personnages, leurs relations tortueuses et pourtant terriblement humaines, et peaufiné l’atmosphère glaciale de ce polar.
Il reste dans une veine très classique pour le genre, mais Blunt a du talent.
Il écrit la détresse.
Celle de tous les jours.
La banalité de nos vies, imbibées de criminels, de justiciers, d’indifférents.
D’égarés.
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