Roberto Bolaño - [Chili]

Le gaucho insupportable



Roberto Bolaño est mort à 50 ans en 2003.

Quelques nouvelles et conférences, parmi les dernières avant sa mort en 2003.

La très étrange Le policier des souris et la dernière nouvelle Le voyage d'Alvaro Rousselot .

Les nouvelles sont très bien, d'un humour caustique, avec, comme c'est le cas dans pas mal de nouvelles sud-américaines, un côté inquiétant/fantastique.


Dans les deux dernières "nouvelles", il s'agit en fait de conférences (?) voire de compte- rendus vis à vis de la littérature sud-américaine, sans parler de l'émouvant discours sur sa propre vie dans les hôpitaux catalans...

Bolaño est drôle mais pas cool.

Il règle ses comptes. Avec la vie, et nous.

Il est publié chez Christian Bourgois, et je lirai un de ses titres car un ami vient de m'en parler avec chaleur : quel titre me conseilles-tu, Tchipette ?

je vois 2666 son dernier roman, mais il fait plus de 1000 pages

Citation :

Roman posthume publié en 2004, conçu en cinq parties lisibles séparement. Un écrivain invisible et génial, Benno von Archimboldi, se rend à Santa Teresa, ville du nord du Mexique où les femmes disparaissent victimes d'un tueur en série...

des putains meurtrières regroupe 13 nouvelles, mais il n'est pas dans ma médiatheque.

Par contre il y a 5 autres titres...

Je ne sais pas trop comment prendre le livre de Roberto Bolano, la littérature nazie en Amérique, traduit par Robert Amutio ; je serais fortement tenté de voir de l’ironie à présenter une pareille galerie de portraits ! des cas désespérants.

"Les fabuleux frères Schiaffino", (Italo et Argento dit le graisseux) ces dingues de football qui s’en prennent violemment aux supporters des équipes adverses, adeptes de toutes les délinquances et dont les qualités littéraires sont ainsi résumées pour la nouvelle l’Autruche :

Citation :

« quelques traits d’humour tout à la fois corrosif, cruel, scatologique et déchaîné, caricatural, parodique, scandaleux, le style Schiaffino en somme »

Amado Couto, le Brésilien dont nul éditeur ne veut, obsédé par Rubem Fonseca qu’il voulait enlever. Faite de réussir ce rapt, il le met dans le dernier mot, récit plein de squelettes grotesques. Le minable auteur finit par se pendre dans une chambre d’hôtel.

Murchinson, alias le Texan, né en 1923 qui finit sa vie dans un pénitencier de l’Oregon en 1979.

Citation :

« Escroc, voleur de voitures, dealer, il parcourut la totalité des du vaste spectre de la délinquance sans se specialiser dans une discipline spécifique »

Ses qualités littéraires ?

Citation :

« Lés récits portant la signature du "Texan" furent grandement célébrés : de caractère burlesque et fantastique, leurs personnages étaient des prisonniers ou d’anciens prisonniers de la Fraternité (1) qui luttaient contre es forces du Mal, incarnées par des politiciens corrompus ou par des aliens arrivés de l’espace extérieur habilement déguisés en être humains »

(1) la Fraternité aryenne.

Dans Les mythes de Cthulhu, dernière nouvelle-conférence du Gaucho insupportable, Bolaño parle de la littérature sud-américaine. Certes, d'aucuns trouvent grâce à ses yeux : Pitol, Borges, Vallejo...mais certains sont habillés pour l'hiver...Coloane, Sepulveda, Vargas Llosa...alors j'imagine ce qu'il donne dans La littérature nazie....

Bolaño sait ne pas être trop gentil, ni trop consensuel

Tchipette a écrit:

Bolaño sait ne pas être trop gentil, ni trop consensuel

Difficile d'avoir une opinion sur des auteurs qu'on ne connaît pas.

Dans cette littérature nazie ou avec auteurs assimilés, on voit de telles crapules que je me demande s'il était vraiment nécessaire de parler d'eux.

Le livre aurait demandé une préface - et des extraits de textes.

Là, on suit à l'aveuglette Roberto Bolano, totalement dépendant de ce qu'il dit.

A la fin du livre, on trouve des références, mais pour connaisseurs.

L'ironie de Bolano fait que pour ces trajectoires monstrueuses et pitoyables, on n'éprouve pas de compassion.

Voici quelques fins de vie et de chapitres :

Citation :

" Il jouit d'une santé de fer jusqu'à un certain midi du mois d emars de l'année 2017 (1) au cours d duquel un jeune Noir du nom appelé Bldwin Rocha lui fit sauter la cervelle."

(1) Tête du chapitre : Rory long: Pittsburg 1952- Laguna Beach 2017

Date qui fait jeter un nouveau regard sur les écrivains dont parle Bolano

Citation :

En 2015, il abandonne la Nouvelle Orléans pour des raisons non élucidées et quelques mois après un ou plusieurs inconnus le tuent dans l'arrière-cour d'un tripot de Détroit.

Citation :

Il s'en alla à Paris et là-bas se pendit dans une chambre
de l'hôtel La Grèce.

Citation :

A mi-chemin, elle s'écrase contre une station d'essence. L'explosion est gigantesque.

Citation :

"Ses livres ne furent jamais réédités. Ses inédits furent probablement jetés à lapoubelle ou au feu par les gardiens de la maison de retraite".

Bolano in la littérature nazie en Amérique

Carlos ramirez Hoffman surnommé « l’infâme » est à mes yeux le portrait le plus intéressant de cette galerie des horreurs.

Il écrit dans le ciel, avec un avion, des poèmes, dans un contexte qui met en en scène Bolano lui-même. On voit à la fois la folie de cette expérience, son horreur et son insanité.

Pourtant Bolano ne charge pas explicitement Carlos Ramirez Hoffman : « L’infâme Hoffman » organise une exposition photographique à laquelle il invite un « gratin » dans le genre. Seules les réactions des invités nous feront comprendre de quoi il est question. Ca nous suffit.

La fin de cet épisode mobilise une fois encore le lecteur : il doit vérifier si la copie est conforme.

Bolano est décidément un drôle d’écrivain, il sollicite sans cesse son lecteur !! Je ne m’en plains pas. J’aime ça.

A lire :
Etoile Distante est un roman magnifique et très abordable, sur le thème de la dictature, de l'art et de l'écriture.
Nocturne du Chili, confession qui possède un souffle incroyable.
J'ai 2666 dans la PAL, je vais l'aborder avec beaucoup d'attention.
Je crois qu'il faut lire tout Bolano, ses mots et ses histoires sont importants.

caroline a écrit:

A lire :
Etoile Distante est un roman magnifique et très abordable, sur le thème de la dictature, de l'art et de l'écriture.

Citation :

« Il ne m’était jamais rien arrivé de pareil, lui avouai-je. Ce n’est pas vrai, dit Romero très doucement, il nous est arrivé des choses bien pires, pensez-y un peu. Peut-être, admis-je, mais cette histoire a été particulièrement atroce. Atroce, répéta Romero comme s’il dégustait le mot. »

Bolano livre un récit original qui nous séduit et nous déconcerte :

Étoile filante, reprend l’histoire d’un personnage déjà présent dans « la littérature nazie en Amérique » , Carlos Weider, alias Alberto Ruiz-Tagle.

On connaît donc sommairement les principaux épisodes de sa vie, ce qui lui donne une existence et l’impression de l’avoir déjà vu.

Tout ce que fait Weider est à la fois spectaculaire et horrible : Pilote d’avion, il écrit des poèmes dans le ciel. Photographe, il présente des clichés « inédits » à un public composé de militaires de Pinochet.

Weider trompe son monde : sa timidité séduit, mais c’est l’assassin des deux sœurs Garmienda - auxquelles Bolano faisait les yeux doux. C’est aussi le poète de la Mort au moment où Pinochet entassait les gens dans des stades. On se doute de la nature de ses "photos".

Bolano avait connu Weider dans le cercle de poésies que fréquentaient les sœurs Garmienda, il apprend les exploits et les forfaits de Weider par le truchement d’amis, témoins plus ou moins fiables, et par des scènes qu’il imagine, mais sans aucune garantie.

Le personnage est entouré de mystères, il disparaît puis reparaît, sous des masques, dans un récit qui accumule les pointillés temporels, au milieu de personnages réels et de faits authentiques.

Le lecteur ne finit pas de s’interroger :

Que doit-il croire ? Qui doit-il croire ? N’est-il pas dans une galerie de miroirs plus ou moins déformants, créateurs d’illusions ?

Les personnages qui entourent Wieder ont eux aussi des destinées tragiques hors du commun,

Sommes-nous dans la fiction, un récit personnel ou un mythe alimenté par des rumeurs ?

Que penser d’un poète meurtrier - membre des « Écrivains Barbares », dont les œuvres paraissent sporadiquement dans des revues de quatrième catégorie ?(« la revue des veilleurs de nuit d’Arras » !)

Chaque lecteur donnera sa réponse.

Nous savons comment se termine le récit et la vie de Carlos Weider,

- même si Bolano ne dit pas tout.

Rassurez-vous, j’en fais autant !

A paraître chez Christian Bourgois,

Le secret du mal , un recueil de dix-neuf contes et récits,

- dont certains sont inachevés.

« Le secret du mal » de Roberto Bolaño, est paru aux éditions Christian Bourgois.



Cette histoire est très simple, mais elle aurait pu être très compliquée. c'est une histoire inachevée, parce que ce genre d'histoires n'a pas de fin.

Ce volume entremêle des récits de pure fiction, des écrits plus ou moins autobiographiques et les textes de discours et conférences.

Il brouille les frontières entre les genres littéraires en vue de les dépasser.

Citation :

Le Secret du mal est à l'image du reste de l'oeuvre de Roberto Bolano : empreint d'une énergie à vivre, à se moquer de ceux qui croient pouvoir se tirer d'affaire sans faire preuve de courage.

dit l'éditeur.

J'ai entendu dire que Detectives sauvages était son réel chef d' œuvre.

Quelqu'un l'a-t-il lu?

Oui, je l'ai lu. Il fait partie des rares romans que je vais relire à coup sûr. Et un peu comme avec Richard Powers, j'ai du mal à mettre des mots sur les sensations procurées par ce livre. Il y a une puissance d'évocation, une richesse, un élan dans cette histoire... Laisse toi tenter, je doute que tu sois déçu.

Tu pourrais nous servir un ou deux passages ?

Je ne l'ai pas avec moi puisque je l'avais emprunté à la médiathèque, mais je t'ai déniché ça sur le net :

Citation :

Le temps d'une seconde de lucidité j'ai eu la certitude que nous étions devenu fous. Mais cette seconde de lucidité a été dépassée par une superseconde de superlucidité (si vous me permettez l'expression) pendant laquelle j'ai pensé que cette scène était le résultat logique de nos vies absurdes. Ce n'était pas un châtiment mais un pli qui s'ouvrait soudain pour que nous nous voyions dans notre humanité commune. Ce n'était pas la constatation de notre oiseuse culpabilité mais la marque de notre miraculeuse et inutile innocence. Mais ce n'est pas ça. Ce n'est pas ça. Nous étions immobiles et eux étaient en mouvement et le sable de la plage bougeait, moins à cause du vent que de ce qu'ils faisaient et de ce que nous faisions, c'est-à-dire rien, c'est-à-dire regarder, et tout ensemble c'était le pli, la seconde de superlucidité. Ensuite rien.

P.693

Citation :

Fin 1977 Ernesto San Epifanio a été admis à l'hôpital parce qu'on devait le trépaner et lui enlever un anévrisme du cerveau. Mais au bout d'une semaine on a dû l'ouvrir de nouveau parce qu'il semblait bien qu'on avait oublié quelque chose à l'intérieur de sa tête. Les espérances des médecins pour cette deuxième opération étaient minimes. Si on ne l'opérait pas il mourrait, si on l'opérait aussi, mais un peu moins. C'est ça que j'ai compris, et j'ai été la seule personne qui ait été avec lui tout le temps. Moi et sa mère, bien que d'une certaine manière sa mère ne compte pas, parce que ses visites quotidiennes à l'hôpital l'ont transformée en femme invisible : quand elle se montrait son calme était si grand que même si en vérité elle entrait dans la chambre et s'asseyait à côté du lit, dans le fond elle ne semblait pas franchir la porte, ou ne jamais finir de franchir ce seuil, silhouette minuscule encadrée par le vide blanc de la porte.

Et là illico, je me dis qu'il faut que j'achète ce roman dare-dare.

Je suis heureuse de trouver un topic sur cet auteur : j'avais beaucoup aimé les nouvelles du Gaucho insupportable et celles de La Putain meurtrière. J'ai aussi lu 2666.
Sa façon de retranscrire les ambiances est admirable. Par contre, je conseille plutôt de commencer par les nouvelles que par 2666, car c'est quand même un livre qu'il n'a pas pu terminer (et c'est bien frustrant).

grimmy a écrit:

un livre qu'il n'a pas pu terminer (et c'est bien frustrant).

Il te reste à lire les romans du début !

Bolano et Porta, Conseils d'un disciple de Morrison à un fanatique de Joyce, chez Bourgois.



Angel Ros aime le danger, Joyce et les Doors. Le temps d'un été à Barcelone, ce jeune écrivain en devenir s'éprend d'Ana, une Sud-Américaine excentrique[...]
Angel réussira-t-il à écrire son roman joycien tandis que résonnent les dernières notes de The End de Jim Morrison ?

Ce roman, écrit à quatre mains par Roberto Bolafio et A.G Porta au début des années 1980, préfigure ce qu'une partie de leur oeuvre ultérieure déploiera : jeu avec l'érudition, noirceur, rage, humour et mélancolie.

Oh merci Rotko ! Il faut absolument que je me procure ce livre, pour voir comment est évoqué This is the end et Joyce (que je connais peu).

Merci merci et merci pour ce conseil de lecture. Je vais aller le commander ce week-end chez mon libraire (ou lui envoyer un mail).

Je suis un tièrs de 2666 et c'est vraiment impressionnant.
Aucune difficulté de lecture, c'est fluide, bien écrit, les point de vue toujours differents cassent ce qui pourrait etre monotone.
Vraiment un excellent.

Tu as dû le terminé depuis, quel est ton avis (je m'étais sentie un peu frustrée à la fin)?

Le Troisième Reich chez Bourgois, est en fait son second roman resté inédit jusqu’à aujourd’hui, écrit en 1989 après Conseils d’un disciple de Morrison à un fanatique de Joyce à quatre mains avec Antoni G. Porta.

Citation :

Udo Berger, vingt-cinq ans, est passionné par les jeux de guerre. En compagnie de sa fiancée, Ingeborg, il part quelques jours sur la Costa Brava, dans l'hôtel tenu par la belle Frau Else. Dans sa chambre, Ugo installe une grande table afin d'établir de nouvelles stratégies pour son jeu, "Le Troisième Reich ". La nuit venue, le couple rencontre deux autres Allemands, Charly et Hanna.

Tout est déjà là. L’ambiance particulière, l’évolution des personnages, la ténuité des existences dans une globalité uniformisante et dévorante, mince fil de vie toujours au bord de se rompre, vague horizon pessimiste, mélancolie profonde.

dit Actua litté.

Une nouvelle librairie polar à ouvert à Nantes et comme le libraire a bon goût, j'y ai dégotté un Roberto Bolaño, Anvers. Je sens que je vais me régaler.

Citation :

Le Troisième Reich chez Bourgois, est en fait son second roman resté inédit jusqu’à aujourd’hui, écrit en 1989 après Conseils d’un disciple de Morrison à un fanatique de Joyce à quatre mains avec Antoni G. Porta.

Tout juste commencé. Acheté au hasard.

Une ambiance assez particulière de huis clos et assez étrange. Je ne sais pas si j'aime. Le style d'écriture ne m'accroche pas pour le moment.

Citation :

Par la fenêtre pénètrent la rumeur de la mer mêlée aux rires des derniers noctambules, un bruit qui est peut-être celui que font les serveurs en rangeant les tables de la terrasse, de temps à autre celui d'une voiture roulant au pas sur le Paseo Maritimo et des bourdonnements sourds et inidentifiables provenant des autres chambres de l'hôtel. Ingeborg dort ; son visage est pareil à celui d'un ange dont rien ne trouble le sommeil ; sur la table de nuit, il y a un verre de lait auquel elle n'a pas touché et qui maintenant doit être tiède et, à côté de son oreiller, à demi recouvert par le drap, un livre de l'enquêteur Florian Linden dont elle n'a lu que deux pages avant de sombrer dans le sommeil. À moi, il m'arrive tout le contraire : la chaleur et la fatigue m'ôtent le sommeil. En général, je dors bien, entre sept et huit heures par jour, de onze heures du soir à sept heures du matin, même s'il est rare que je me couche fatigué. Le matin, je me réveille frais comme un gardon, avec une énergie qui ne faiblit pas au bout de huit ou dix heures d'activité. Autant qu'il me souvienne, il en a toujours été ainsi et c'est dans ma nature. Personne ne me l'a inculqué, tout simplement c'est ainsi que je suis et, en disant cela, je ne veux pas dire que je sois meilleur ou pire que d'autres ; qu'Ingeborg, par exemple, qui ne se lève pas avant midi le samedi et le dimanche et qui a besoin, pendant la semaine, d'une deuxième tasse de café - et d'une cigarette - pour parvenir à complètement se réveiller et à mettre le cap sur le travail. Cette nuit, cependant, la fatigue et la chaleur m'ôtent le sommeil. La volonté d'écrire, aussi, de consigner les événements de la journée, m'empêche de m'étendre sur le lit et d'éteindre la lumière.

Un extrait trouvé sur le net.
Un passage du début du livre, lu avec plaisir.