Yousry Nasrallah , Femmes du Caire.

Yousry Nasrallah
Avec : Mona Zaki, Mahmoud Hemida, Hassan El Raddad, Nahed El Sebaï...

Le Caire, de nos jours. Hebba et Karim forment un couple de journalistes à succès, jeunes, riches et beaux. Hebba anime un talk-show politique, mais sa pugnacité anti-gouvernementale met en danger la promotion qu'attend son mari. Il lui met la pression ; elle promet de mettre un peu d'eau dans son vin.

Son émission troque alors la politique pour des faits divers féminins. Le succès est immédiat : Hebba passionne des millions de spectateurs avec des histoires vraies, pleines de surprises, de violences, de rebondissements, les emmenant des bas-fonds du Caire à la jet-set, impliquant des membres du gouvernement, dans un tourbillon de sensualité et d'inventivité romanesque.

Mais où s'arrête la politique, où commence la question de la condition féminine ? Hebba se retrouve très vite en terrain miné fait d'abus, de tromperies religieuses, sexuelles et... politiques. De conteuse, Hebba devient elle-même une histoire.

Citation :

Si le voile du visage est de tissu, le voile de l'esprit est de fer.

Un film bâti sur un scénario remarquable (intrication de plusieurs histoires) et qui pose des questions dérangeantes sur la société égyptienne, notamment sur le statut de la femme, les inégalités sociales, les rapports de la presse et du pouvoir, etc.
La mise en scène de Yousry Nasrallah (qui fut l'assistant de Youssef Chahine) est admirable et la direction d'acteurs très sûre (avec en tête Mona Zaki, jeune première du cinéma égyptien qui construit un beau personnage de femme indépendante se heurtant aux tabous du machisme et du pouvoir).

« Femmes du Caire » est un film sur la société égyptienne vue au travers des portraits de plusieurs femmes, dans une construction scénaristique pleine de références cinématographiques. Trois femmes vont raconter en direct, à la télévision, leur histoire exceptionnelle à une présentatrice de "talk show". Celle-ci, Hebba (interprétée par Mona Zakki, très connue en Egypte), est contrainte de s'écarter des sujets politiques qu'elle traite habituellement sans complaisance. Et ce, pour ne pas mettre en danger la carrière de Karim, son mari, qui veut être nommé rédacteur en chef de la presse officielle.

Toutes, elles ont refusé l'ordre établi.

La première a dit non au mariage (elle devait porter le voile, faire le ménage, donner son argent, en échange de quoi ? D'un mari qui n'était là que pour...être son mari) et s'est retrouvée en hôpital psychiatrique où, finalement, elle ne se trouve pas si mal. La seconde a refusé de subir l'humiliation et l'indignité et s'est vengée. La troisième a perdu son argent mais gagné son divorce. La présentatrice enfin, en montrant son visage tuméfié à l'antenne, révèle le vrai visage de la société égyptienne.

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« Femmes du Caire »
1/2

Seb a écrit:

Un film bâti sur un scénario remarquable (intrication de plusieurs histoires) et qui pose des questions dérangeantes sur la société égyptienne, notamment sur le statut de la femme, les inégalités sociales, les rapports de la presse et du pouvoir, etc.

En effet partir du couple de réalisateurs de télévision où l’homme avide de pouvoir et de réussite tente de plier son épouse à ses ambitieux projets professionnels, on assiste à trois émissions réalisées par cette dernière sur des expériences emblématiques de femmes du Caire.

Au niveau cinématographique, le film n’est pas exempt de quelques réserves. Certaines séquences sont longues (le film fait 2h 15), et la touche, souvent lourde : violences sanglantes, avortement très explicite etc.

On pourra dire que la reconstitution d’émissions reproduit le quotidien de la télévision égyptienne. Sans doute, et que le spectateur français est moins sensible que le Cairote à ce que, dans le film lui-même, on appelle « le mélo » : il fait pleurer jusqu’à la présentatrice.

Là n’est pas l’essentiel, on en conviendra, d’autant que le film, je crois, fut l’objet d’une interdiction de projection au Caire.

« Femmes du Caire »

2/2

Ces épisodes de la vie des femmes montrent, mis en relief par l’actualité, un régime autoritaire, gangrené par la corruption, le clientélisme, et une obligatoire complaisance des medias. La télévision est aux ordres, et les pressions, insidieuses. Tout cela sur un fond d’injustice sociale criante.

Les trois femmes, objets de l’émission, témoignent de tous les « voiles » qui pèsent sur elles pour les asservir : politiques, sociaux, moraux, qu’il s’agisse des mariages organisés, de pressions familiales, d’opinion publique, de harcèlement sexuel, ou d’un statut juridique qui traite la femme en mineure.

Ce film prêterait bien à un débat, vu que les revendications des femmes ne sont pas les mêmes d’un pays à l’autre, et que ce décalage même montre à quel point ce qui a été obtenu dans le monde occidental reste objet d’enjeux.

Pour être clair, rien n’est insignifiant, et toute concession à des soucis de morale, de religion, ou de société (depuis les mariages arrangés jusqu’aux tenues privées ou publiques) fragiliserait les acquis féminins.

rotko a écrit:

Au niveau cinématographique, le film n’est pas exempt de quelques réserves. Certaines séquences sont longues (le film fait 2h 15), et la touche, souvent lourde : violences sanglantes, avortement très explicite etc.

Je pense que cette violence explicite a été voulue par le réalisateur pour frapper les esprits (je pense notamment à la sanglante scène du meurtre du jeune commis par les trois soeurs). C'est un choix qu'on peut contester, mais il n'en reste pas moins que la scène est filmée avec une virtuosité tout à fait remarquable.
De même, la scène de l'avortement aurait pu être simplement suggérée, mais le cinéaste a visiblement fait le choix de la montrer d'une manière crue car c'est une violence des images qui répond à la violence de la pression qui s'exerce sur les femmes (là et ailleurs).

rotko a écrit:

Ce film prêterait bien à un débat, vu que les revendications des femmes ne sont pas les mêmes d’un pays à l’autre, et que ce décalage même montre à quel point ce qui a été obtenu dans le monde occidental reste objet d’enjeux.

je ne suis pas sûr que ce soit "obtenu" dans le monde occidental, des femmes meurent encore aujourd'hui sous les coups de leur conjoint, et le chiffre des violences conjugales est toujours très élevé.

- On reparlera des violences conjugales en France, on l'a déjà fait, et le sujet peut aussi prendre diverses formes, comme celle soulevée par ce film : le sacrifice professionnel de la femme au profit de la carrière de son mari.

- ah ! ces présentatrices télévisées ! curieusement elles semblent très prisées par les hommes politiques. On n'en deduit rien, mais on a tous des exemples en tête.

- Rania al-Baz, 30 ans, saoudienne, présentatrice de télé a brisé dans son pays le tabou pesant sur les femmes battues. Le film n'a donc rien inventé :

Citation :

Mona Zaki, jeune première du cinéma égyptien qui construit un beau personnage de femme indépendante se heurtant aux tabous du machisme et du pouvoir).

On la compare dans le film à Salma Hayek. Excellente dans ce film ; souhaitons-lui une belle carrière.