Apsaalooke

Je vais ouvrir cette page afin de partager avec vous l'évolution de mon travail. On trouve la motivation là où elle est. Il ne faut pas croire les artistes qui prétendent créer d'eux-mêmes sans l'aide de personne. L'émulation est la meilleure façon de progresser. Elle est essentielle et vitale pour avoir envie de mettre un pas devant l'autre. Le débat que suscite un travail artistique est très enrichissant pour un artiste prêt a défendre son chemin.
Apsaalooke est né d'un très vieux projet sf qui dormait dans mes cartons mais, même s'il reprend les balbutiements de ce qui s'appelait à l'époque "les 7 mondes d'Ishir" et qui était lui-même basé sur un scénario de jeux de rôles que j'avais écris, ce projet est l'aboutissement de 20 ans de réflexions, de doutes et de travail. En fait je pense avoir enfin répondu à l'étonnement de ce journaliste du Soir quand je lui citais dans mes influences Karl Heinz Stockhausen et Jean-luc Godard. A l'époque la question m'avait étonnée mais je n'avais pas de réponse claire à lui donner. C'est à cette impossibilité qu'est sans aucun doute dû le semi échec de mon premier album. La réponse je l'ai maintenant c'est: Apsaalooke.

D'abord quelques dessins qui donneront à voir mon style de dessin

Classe !
Le style de dessin du milieu gagne ma préférence.

Plus qu'interessant ! bravo !

pour les futurs dessins, prends la vignette agrandissable sur un clic, c'est plus léger sur un forum.

Quel est le sens du titre apsaaloke ?

"Apsaalooke" est le nom réel de la tribu des Crows.
Je ne sais pas pourquoi mais j'ai toujours été plus attiré par ces indiens-là que par les Sioux. Peut-être est-ce ma sacro-sainte horreur de faire comme toute le monde? Peut-être que j'ai toujours eu un faible pour les mal aimés, ceux qu'on pointe du doigt, les parias. J'ai toujours préféré l'ombre à la lumière.
Donc, quand je travaillais sur la refonte des "Carnets de la Sécession" je me suis documenté sur ce peuple. Je voulais en parler, les prendre comme cœur de mon univers. Parias aux confins du monde que je vais créer, décrire et utiliser, à la Frontière, le hors-monde.
"Apsaalooke" est une histoire des bordures, des tunnels, une histoire sur le conflit perpétuel entre le Pouvoir en place et les franges les plus "undergrounds" et contestataires de la société.

trois dessins préparatoires au roman-graphique, trois des personnages principaux.
Technique: crayon, marqueur, encre de Chine au pinceau sur papier Schoeller lisse.

ah j'ai l'explication de ton avatar Super !

Je suis comme Confiseur j'aime beaucoup le deuxième dessin dans ton premier post
J'aime beaucoup la façon dont tu parles des crows

Depuis que je dessine j'ai souvent entendu cette question: - comme faites-vous? Elle traduit une interrogation sur la façon dont on crée une bd. Je vais vous montrer pas à pas la réalisation d'une illustration (une étude technique), de sa naissance jusqu'à sa réalisation finale.

Premier dessin: le croquis. L'idée est dans ma tête et germe d'abord sous forme de croquis où je donnerai la direction de mon projet (compo, dessin, équilibre, décor etc...). C'est souvent très succin et jeté. Je ne m'attache pas trop a fixer les choses. Cela viendra ensuite. Je suis d'avis qu'il faut se laisser des portes de sorties et des possibilités d'improvisation. Autre chose, personnellement, et je ne suis pas le seul dans le cas, le croquis n'est pas une œuvre en soi, c'est juste un brouillon. Si certains de ces croquis ne sont pas dénués de qualité, c'est à mon sens une erreur de vouloir en faire la finalisation du travail d'un artiste. Même si certains ont beaucoup utilisé, par la force des choses: pauvreté chez Schiele et interdiction de peindre chez Nolde, ce mode d'expression comme point névralgique, ils ont toujours garder en tête l'idée que ce n'était qu'une étape dans le processus de création.



crayon sur papier Canson 90gr (30*21)

Second dessin: L'illustration encrée (j'ai hélas zappé le scan du crayonné, désolé). Lors du crayonné proprement-dit, l'auteur peut se permettre des changements s'il trouve que le croquis préparatoire ne le satisfait pas. Vous remarquerez que j'ai changé la position des jambes. En effet, hier soir, je me suis lancé dans le crayonné en suivant le croquis. Le dessin ne me gênait pas une fois terminé mais, après avoir laissé reposé le dessin sur ma table j'ai été frappé par le coté non-naturel de la disposition des jambes. Je me suis acharné jusqu'à 02h00 du matin à redessiner la même position. L'angle des jambes, le raccourcis, les muscles, rien ne fonctionnait comme je l'entendais. La feuille a même fait l'expérience du vol en avion. En désespoir de cause je suis allé me coucher, remettant la solution au lendemain. Ce matin en me levant j'ai fais une chose que mon premier professeur de dessin m'a apprise: mimer la position. Alors, dans mon lit, je me suis assis et j'ai pris, naturellement, la position du dessin, sans même tenter de prendre celle du croquis. J'avais résolu le problème de la nuit. Il ne m'a pas fallu longtemps pour gommer et nettoyer la feuille et terminer le crayonné. C'est ensuite posé le problème de la nudité intégrale ou non. Pagne ou pas pagne? J'ai opté pour la nudité en me disant qu'il n'y avait aucune raison, en fonction de ce que je sais du personnage pour qu'elle soit prude. La nudité intégrale est tout-à-fait dans l'ordre des choses. Le crayonné une fois finalisé il a fallu l'encrer au marqueur et au pinceau. J'ai utilisé des marqueurs Artline de plusieurs épaisseurs (0.1; 0.4; 0.5; 0.8, Médium et Épais) ainsi qu'un pinceau en poil de martre n°2 pour l'encre de Chine. Vous remarquerez que par rapport au croquis préparatoire je n'ai pas dessiné la ville derrière la balcon: tout simplement parce que celle-ci sera crée avec Photoshop. Dernière étapes pour le croquis: le scan. Le dessin étant trop grand pour mon scanner A4 (30*42) je l'ai scanné en deux fois à 1200dpi et en niveau de gris. J'ai réunis les deux parties avec Photoshop (on voit sur le bas au centre de l'illustration une ligne grisée qui marque les bords du scan, cette ligne disparaitra dans les prochaines étapes).



Crayon, marqueurs et encre de Chine au pinceau sur Schoeller lisse 200gr (30*42)

Voici deux versions du même dessin.

Je continue donc à progresser sur mon illustration en passant à la phase; couleur. Je préfère travailler en couleur directe qu'au moyen de tirages au bleu comme c'est l'habitude en BD (bien que maintenant beaucoup de couleur se font par Photoshop). La couleur directe est la technique qui consiste a placer la couleur directement sur le dessin. C'est une technique peu prisée des éditeurs qui lui reprochent son coût élevé et, prétendent-ils, est moins appréciée par les lecteurs en faisant chuter les ventes. Ces explications valent ce qu'elles valent et l'importance qu'on veut bien leur accorder. Mais, ce qui est certain, c'est que les auteurs qui en sont capables préfèrent de loin cette technique leur accordant plus de contrôle sur leur travail et leur permettant de se passer d'un bon coloriste, denrée rare et chère. De mon côté j'ai toujours aimé contrôler mon travail de a à z, donc la couleur directe c'est toujours imposée comme un non-choix. Le problème vient plus de savoir quelle technique utiliser: aquarelle, gouache, écoline, pastel sec ou acrylic. Le choix de celle-ci est sujet du sujet et de ce que l'on veut faire passer. Chaque technique a sa spécificité. L'aquarelle fait chanter le papier, la gouache le recouvre, l'écoline crie ses couleurs, le pastel donne un aspect poudreux et l'acrylic un aspect chimique. On peut les marier, ce qui m'arrive souvent. J'ai, par exemple, déjà dilué la gouache avec de l'écoline plutôt qu'avec de l'eau, mais jamais de l'aquarelle; cela détruirait le pigment des pastilles. J'ai préféré pour cette illustration l'aquarelle, même pour la dormeuse, alors que je pensais au départ utiliser l'écoline. Il y a une version sans le meuble en couleur car je pense aussi voir ce que cela donnerait en utilisant des collage avec Photoshop. L'aquarelle est une technique que j'adore car elle souligne et fait respirer le dessin qui est dessous. Les couleurs y sont riches et subtiles et le jeux du pinceau plus libre et fugace. Un caractéristique de mon travail: je ne dessine pas avec la couleur, je peins.




Crayon, marqueurs, encre de Chine au pinceau et aqurarelle sur papier Schoeller lisse (30*42)

On compte sur toi pour analyser le graphisme des bandes dessinées. C'est ce que j'apprécie quand je rencontre un auteur de BD.

Voici l'illustration presque terminée. IL y a juste quelques fignolages à faire.



Crayon, marqueurs, encre de Chine au pinceau, aquarelle sur papier Schoeller lisse, photos travaillées avec PhotoshopCS4

Voici les deux travaux en cours. Recherche personnage et technique:



Crayon, marqueur, encre de Chine au pinceau, aquarelle, photos retouchées par Photoshop sur papier Schoeller lisse



Crayon, gouache, aquarelle sur papier Arches

Pendant une semaine ayant eu mes enfants je n'ai pu continuer mes travaux. Voici donc une nouvelle illustration préparatoire. N'hésitez pas à me dire ce que vous en penser!





Crayon, aquarelle, gouache, marqueur, encre de Chine au pinceau sur papier Arches et photos retravaillées sur Photoshop

Travaillant en ce moment beaucoup plus sur l'écriture que sur le dessin, il m'arrive le soir en écoutant de la musique d'écrire un poème. Voici celui rédigé il y a quelques jours:

Mass II

Vous vous confondez en une seule ombre,
Vous glissez sur les murs,
Sur les chandeliers d'albâtre,
Les sculptures d'obsidienne
Et les masques de bois peint.

Vous êtes deux mais Une,
C'est l'homme au chœur de la femme
Qui se love dans l'esprit de l'homme.

-Ne vous inquiétez pas!-

On vous remarque!
Ils vous dévisagent,
Semblent comprendre une chose que vous pressentez,
Vous attisez le désir car complète.

-Oh, non, vous n'êtes pas image!-

Je sais votre refus de vous conformer,
Je sais votre désir d'exprimer,
C'est une histoire d'exil,
Partout chez vous mais nulle part où aller.
Souvenez-vous, hier, vous étiez de l'autre côté de la frontière!
Jamais tout à fait l'une,
Jamais tout à fait l'autre.


Je surprend votre geste,
La main ouverte au ciel,
La fleur dans votre paume
Et les perles d'eau qui débordent...

Demain la naissance, apprend t’on.

J'aime beaucoup ton univers. Tes écrits ont une grande sensibilité. Et j'aime ta façon de colorer tes dessins. L'aquarelle c'est le bien. Très joli travail en tout cas. On sent que tu as beaucoup de technique.

Hello Layla, merci pour ton commentaire. A bientôt sous l'un de tes poèmes

Merci. J'ai posté mes créations plastiques dans la section art. Ton avis m'intéresse vivement. C'est mon dossier pour le bac.

Je continue le fil de ce projet que j'avais laissé un temps se reposer. Dans mon idée Apsaalooke/Baaxpee/Bahaa forme un tout. Ce n'est pas uniquement une bande-dessinée mais une œuvre qui intégrera autant la peinture, le graphisme que la poésie et la musique. A ce titre je vais partager avec vous deux poèmes. Ce sont les deux mêmes textes mais le premier a été écrit en 1988 et le second retravaillé 24 ans plus tard, cette semaine pour être précis. Je vous laisse apprécier l'écart entre les deux versions.

Lamentations

Tant de sourires drapés de larmes
Tant de peurs aux lèvres des dames
Tant de rires vains sur les visages

Des gens enfantent la douleur des sages
Des mères tètent aux seins des mages
Des pères grondent apeurés sur les plages

Voilà les îles où dansent
Les cascades des flots viles
Et l'on regarde les corps frisquets
Frileux grelottants et laids

Délivrons les crucifiés bruler les croix
Lacérer les esprits affalés et brisés
Ainsi les os lassés de vivre là
Supporterons les grives et les corbeaux irisés.

version 1988

Blut Royale II

Tant de sourires drapés,
Tant de peurs aux lèvres,
Tant de rires vains,

Et enfantent la douleur des sages,
Les mères aux seins de mages.

Voilà les îles où dansent,
Les cascades de flots,
Et l'on regarde les corps grelotant.

Délivrons les crucifiés,
Lacérons les esprits brisés,
Ainsi les os lassés de vivre
Supporteront les grives
Et les corbeaux irisés.

Version 2012

Lliam7 a écrit:

Voici l'illustration presque terminée. IL y a juste quelques fignolages à faire.



Crayon, marqueurs, encre de Chine au pinceau, aquarelle sur papier Schoeller lisse, photos travaillées avec PhotoshopCS4

superbe illustration, je ne sais pas pourquoi cette femme me fait penser à l'héroïne de Millénium (version ciné) que j'ai vu hier soir, peut être le tatouage sur la jambe...

La dernière strophe déchire. On voit l'évolution, même si je l'aurais pas fais les mêmes changement que toi ^^"

J'expliquais au comptoir du bar que j'avais passé ma journée à scanner de vieux dessins. Voici trois d'entre eux. Le sujet est identique mais le traitement a évolué au fil des années.


1990 (écoline, gouache, encre de Chine à la plume sur carton)


2005 (Aquarelle, crayon et marqueur sur papier Arches)


2008 (Aquarelle, crayon et marqueur sur papier Winsor & Newton)

Layla, comme quoi le temps fait beaucoup de choses. Tu peux remarquer aussi dans les dessins, si le sujet est le même (j'appelle cette série : "World"), le traitement par contre en est très différent à chaque fois.
Bill merci mais tu vois ce n'est qu'une première approche de cette technique mixte. Non pas que je ne la maîtrise pas, simplement je tâtonne encore par rapport a ce que je veux réellement donner comme impression.
Entre ce qu'il y a dans ma tête et la réalisation il y a encore une trop grande différence qui tant à s'amenuiser dans les études de personnages qui suivent.

j'aime bien l'aquarelle de 2008 la dernière, beau dessin et belles personnes...Beaucoup de finesse

Moi c'est le premier que je trouve très réussi.
L'ecoline je ne connais absolument pas.

Lliam, je ne suis pas une spécialiste mais j'aime beaucoup tes dessins, surtout les plus récents. Il me semble percevoir une grande maîtrise dans le trait,
Ton poème est très beau ; je préfère également la 2e version, plus épurée et, du coup, plus forte. Félicitations.
Un vrai talent, qui, je te le souhaite, devrait être reconnu un jour ou l'autre.

Nicyrle, merci pour ton commentaire. Un talent qui a traversé une très longue crise (12 ans pour être précis) mais qui, enfin, a découvert la sérénité qui lui faisait défaut.
De longues réflexions qui ont trouvées leur épilogue ces derniers mois.
Ce n'est que maintenant que j'ai découvert le chemin que je voulais emprunter depuis plus de 20 ans et que je me donne les moyens de réaliser ce que j'ai toujours senti sourdre en moi.
Le dessin et la poésie ne sont que deux des facettes de mon travail: la peinture et la littérature en sont les deux autres...
Layla, j'ai toujours trouvé mes anciens dessins plus nerveux que ceux de maintenant. Je n'ai jamais retrouvé cette nervosité qui devait être aussi dans ma vie.
Je suis plus posé mais pas moins déterminé dans ce que je fais. Que du contraire, ce que j'ai perdu en nervosité je l'ai gagné en maîtrise et surtout en souplesse et précision quant à ce que je veux dessiner et faire passer.
Je travaille l'écoline depuis le début de mon apprentissage. J'ai même une mauvaise habitude: celle de diluer ma gouache avec de l'écoline. C'est une hérésie qu'il ne faut jamais commettre mais maintenant que vous me fréquentez depuis quelques temps vous devez bien vous doutez que je me contrefous de cela...

En effet. Tu as gagné en sobriété aussi je trouve.