mathias Enard

Mathias Enard, l’alcool, la nostalgie, chez Inculte.

Un coup de téléphone en pleine nuit réveille l’auteur dans une chambre minable de Moscou : c’est Jeanne, une femme aimée, qui s’est réfugiée dans les bras de Vladimir….

Enard raconte les étapes de son voyage en Russie, avec Vladimir, il se rappelle Jeanne, les cuites prises avec Vladimir, le tout dans un décor triste à pleurer, même quand on ne le voudrait pas..

C’est la nouvelle mode chez les jeunes en quête d’émotions fortes, se suspendre, ça veut dire qu’on te passe une pommade anesthésiante sur les épaules, qu’on te rentre trois crochets de métal dans la peau du dos et qu’on te soulève, on te suspend à un mètre cinquante du sol et tout ton poids repose sur ces hameçons qui t’étirent la peau, il paraît que ça saigne très peu, que la douleur est supportable et finit par provoquer une transe presque mystique : on a la sensation de perdre son corps, paraît-il, de se replier dans ces trois points de douleur et plus rien ne pèse, ….

Ce n'est pas nouveau : voir dans "un homme nommé cheval" la danse du soleil :

Un rapprochement opportun et que j'ignorais. Merci, Bill !

A lire Mathias Enard, la vie est si triste aux différentes étapes de son voyage en train, qu'on ne s'étonnerait pas que cette mode existe, comme il le laisse entendre.

Pour son récit, il use d'un style qui aime la répétition, ce qui donne un ton lancinant, bien accord avec son périple et ses souvenirs.

Dans les soirées au cabaret avec des "effeuilleuses" à la chaîne, il transmet une impression dominante de grande tristesse, proche du désespoir.

De cet auteur je n'ai pas eu d'occasion de le lire, sauf sur GDS* un très bon commentaire de son livre " parle-leur de batailles de rois et d'élephants" une superbe histoire : le voyage de Michel Ange à Constantinople.
Ce nouveau roman dont tu parles est trop dur et incroyable et ne me donne aucune envie de le lire.
Merci Bill pour la vidéo, on apprend des nouveautés!

C'est sûr que d'autres récits seraient plus gais.

l’alcool, la nostalgie raconte un voyage, comme Emmanuel Carrère dans un roman russe racontait un séjour, où tout n'était pas rose. Il y a là tout un passé et une immobilité du présent.

On rapporte des aventures de Babel dans cavalerie rouge où le narrateur fatigué dort sans le savoir entre un grand père mort et sa petite fille...

la nuit tombée d'Antoine Choplin, très bien écrit, n'incite pas à gambader dans les forêts russes irradiées...

J'ai d'abord lu La perfection du tir et j'en ai ete epatee, j'avais jamais pense qu'un auteur puisse plonger si profondement, avec tant de maitrise perturbante dans la psychologie d'un sniper. Je le conseille de tout mon coeur.

Il y a quelques mois, on a raduit en bulgare Parle-leur de batailles, de rois et d'elephants et j'en ai encore ete enchatee par ce "conte" orientale sur Michel-Ange a Constantinople. Beaux et spacieux tableau detaille de l'epoque de sultan Bajazet ou les coups des poignards et les decapitations sur les buchers sont le fond d'une troublante et magique amitie romantique entre le geant de la culture de la Renaissance italienne et un poete de lEmpire ottoman.

J'attends d'autres "rencontres" avec Enard que j'apprecie enormement pour ce que j'ai lu de lui.

Il se lance dans le roman graphique

Actes sud BD.

Tout sera oublié Mathias ENARD, Pierre MARQUÈS - Illustrateur

L'été 1991, les Serbes, les Bosniaques, les Croates commencent à se foutre sur la gueule et vingt ans plus tard on me demande d'imaginer un monument qui ne soit ni serbe ni bosniaque ni croate pour cette guerre oubliée plus que terminée.

Seul un artiste international comme vous peut dessiner quelque chose d'intéressant, on m a dit. Quelque chose qui ne soit pas partisan, on m'a dit. Qui prenne en compte les souffrances de tous les camps, on m'a dit. Drôle d'idée qu un monument à la souffrance, j'ai pensé, Pierre Marquès

C'est alors que commence pour les auteurs une traversée des ruines de cette guerre balkanique, pour qui "les souvenirs, les traces, les marques sur les façades, sur les visages, le passé devient la seule façon de voir le présent." Un roman graphique, premier d une longue série.
Pierre Marquès, dit Mathias Énard, reprend et transforme les grandes problématiques de l'art contemporain, donnant ainsi une signification profonde et engagée à un médium que certains croyaient en dangerd extinction : la peinture.

cliquer sur cette page Actes Sud BD, pour en avoir un aperçu.

Merci, Rotko!
J'ai deja dit que Matias Enard fait partie des auteurs que je n'hesite pas a lire! Roman graphique et Pierre Marques: www.pierremarques.net/
comme illustrateur...

Ce sera un regal !

très intéressant le fil, merci Maya pour la référence sur l'art de Marques.

On s'achemine vers un essor du roman graphique, voir Posy simmons et bien d'autres.

je vais bientôt lire shenzhen de Guy Delisle.

Avec Tout sera oublié, l'éditeur Actes Sud creuse l'idée du roman graphique en mettant face à face le témoignage d'une quête mémorielle impossible et des photos retravaillées à la gouache, comme réminiscences d'un passé douloureux.

Au casting, Mathias Enard, l'une des plumes françaises les plus stimulantes de la littérature actuelle. Et Pierre Marquès, artiste-peintre qui expose en Espagne ou en France. Pas vraiment un roman, encore moins une BD au sens classique, Tout sera oublié tend plutôt vers le roman illustré ou le poème visuel sans l'être tout à fait.

Mission réussie pour ce roman graphique en forme de monument. Car si les pierres finissent par tomber et disparaître, l'écrit, lui, laissera bien une trace indélébile. Une lecture stimulante

Planet BD.

Les deux livres d'Enard que j'ai lus m'ont rendue une de ses admiratrices ferventes. On ne le traduit pas en bulgare et cela me manque beaucoup. Patience.

pour Maya: chère amie lequel as-tu préféré?
moi je regrette beaucoup l'avoir râté à Bs As; en outre de la foire du livre il a été à l'alliance Française, j'aurai pu le voir. J'ai envoyé 2 mails de proteste au directeur de l'Alliance et a la représentante culturelle: mes 20 années d'ancienne élève méritaient plus de respect. Ils encombrent mon courrier de notices sur nouveaux cours,etc.. et l'important ils l'ont négligé. Ils m'ont répondu sincèrement Désolé.
Il avait parlé de "rue de voleurs" et Alcool et Nostalgie" dommage le seul qui a parlé en Français

J'ai lu en francais La perfection du tir, en bulgare - Parle-leur de batailles... et je prefere le second qui est superbe, poetique, passionnant, j'avais l'impression de regarder un filigrane!

Pour Maya, tu as la chance de trouver des livres soit en ta langue,soit en français
Cette histoire de Michel Ange à Constantinople est fascinante

rue des voleurs de Mathias Enard, Actes Sud, 250 p.
 

Spoiler:

 
Au départ un  jeune Marocain de  14-15 ans rêve à Tanger d’aller vers l’Europe,  et d’avoir des contacts avec de jeunes touristes. Mais ce jeune Candide, bientôt répudié par sa famille, se retrouve à la rue, puis repêché par une association altruiste qui lui assure une place de libraire :
 

Citation :

Notre best seller : La sexualité en Islam, j’en ai vendu des centaines, sans doute parce que tout le monde pensait qu’il y aurait du cul, des conseils de position ou des arguments religieux de poids, pour que les femmes admettent certaines pratiques, mais pas du tout, l’acte y était appelé le « coït », le « déduit » ou « la rencontre » et l’ensemble était une compilation commentée de phrases de grands juristes médiévaux pas du tout excitante - une arnaque à mon avis…

En fait il se rend compte - à moins que ce soit le lecteur plus avisé que lui,  des buts de l’association, moins culturels que politico-religieux...
 

Citation :

L’idée était d’obtenir le plus possible d’élections libres et démocratiques pour prendre le pouvoir et ensuite, de l’intérieur, par la force conjointe du législatif et de la rue, islamiser les constitutions et les lois.

mes seules références sur cet auteur sont les commentaires lus sur GDS*.
L'imagination fait le reste!! je me souviens du grand charme éprouvé par la lecture de "parle-leur-de batailles et d'éléphants" image de la renaissance et d'une époque avec un Michel Ange et ses troubles.

L’idée était d’obtenir le plus possible d’élections libres et démocratiques pour prendre le pouvoir et ensuite, de l’intérieur, par la force conjointe du législatif et de la rue, islamiser les constitutions et les lois. a écrit:

citation de Rotko
Intéressant....

Rue des voleurs se situe sur un fond d'actualités, sans en être prisonnier. C'est-à-dire qu'on voit les lignes générales du contexte des printemps arabes, ce qui en dégage les mécanismes. Nous suivons ce jeune Lakhdar/Candide, avec une empathie qui permet la comprehension mais inclut aussi une distance.

Dans un entretien, Enard disait ne pas se laisser "envahir par un personnage qui tendrait à l'autonomie" - thèse soutenue par des romanciers "inspirés", sans doute un peu mediums  , mais le tenir sous contrôle. On sent bien que son art est maîtrisé, que son style est dense car nourri de l'implication du personnage.

Un titre à recommander, vous y viendrez je l'espère.  

L'art du conteur est évident, le lecteur veut savoir la suite des aventures de Lakhdar dans cet univers crépusculaire où l'individu est enfermé dans un bateau, puis dans un port (Algesiras) puis dans une ville, un quartier de Barcelone où vivent les exclus de la société qui peuvent être expulsés à tout moment.

C'est un monde en crise -on vit les émeutes urbaines de Barcelone, et je ne parle pas des différents travaux antérieurs de Lakhdar pour ne pas déflorer l'histoire, mais ils ont leur portée symbolique.

Outre cet aspect prenant de l'histoire, on lui découvre un sens par l'itinéraire du jeune narrateur. on a compris qu'il était en relation avec des islamistes, notamment par son ami Bassam tombé sous la coup de noureddine, et dont les activités nourrissent les pires soupçons, dans le passé, comme dans ses éventuels projets.

Comment évoluera Lakhdar ? il a d'un côté cette spirale de la violence et de la bêtise que constitue le terrorisme, mais il a aussi certains atouts comme la lecture - le vrai sens du lis ! intimé à Mahomet par Gabriel.

Or ses lectures sont de deux ordres : les polars -que Matthias Enard lisait lui-même dans son enfance à Niort, et les oeuvres d'arabe classique (Ibn Battouta) qu'il fréquente pour garder des contacts avec une étudiante espagnole.

La solution qu'il retiendra mérite réflexion, j'en donne un aperçu - qui ne vous dispensera pas de lire le récit :

Citation :

Je ne suis pas un Marocain, je ne suis pas un Français, je ne suis pas un Espagnol, je suis plus que ça.
Je ne suis pas un musulman, je suis plus que ça.

Rue des voleurs un titre à recommander sur plusieurs plans