Des cités et des mâles

oui, très bien. Merci Kervinia.

« La Cité du mâle »

L'accusation de la fixeuse fait ressortir qu'on dupe les intervenants, et que par d'habiles montages on donne d'eux une image erronée qui leur porte préjudice.

Dans ces cas-là, peut-on parler de documentaire ?

Je ne comprends pas. Il est évident qu'elle a voulu souligner certaines choses. Ce n'est pas un secret. ET ce n'est certainement pas son but machiavélique que de transformer tous les petits banlieusards en grands méchants loups : ça, c'est déjà fait, et c'est pas vraiment dans les cordes d'Arte. Comment pouvez-vous parler d'image erronée ? Les mots qu'ils ont dits, ils les ont dits. Et c'est suffisamment terrible pour qu'on y consacre un documentaire, sans s'amuser à dire "mais rassurez-vous les enfants, la plupart des gens là-bas disent s'il vous plaît et merci".

Je n'ai pas vu le documentaire, mais je travaille en partie dans un quartier difficile, très difficile même. Les gens savent, pour la plupart, dire s'il vous plaît et merci, du moins quand on s'adresse à eux poliment.
Le souci, me semble plus être, chez les plus jeunes, dans une image de la femme qui se dégrade, et dans un repli communautariste. Les écoliers de confession musulmane vont suivre des cours à la Mosquée le mercredi, ce qui n'était pas le cas il y a dix ans. Les enseignants notent aussi des tensions blacks/ beurs qui sont nouvelles dans le quartier.

Tout dépend de la manière dont se déroule le tournage et ensuite le montage. Si on part avec l'idée de donner une certaine image, et qu'on utilise tous les moyens pour y arriver, il y a manipulation.

Que ces pratiques aient déja eu lieu à la télévision, je le sais bien, on est d'accord là-dessus. Ces pratiques ont déja été denoncées, en particulier des photos retouchées.

je ne roule pour personne dans cette histoire sinon pour une méthode qui correspond à une deontologie : on écoute les gens, on ne leur fait pas dire ce qu'on veut entendre.

Les personnalités qui se livrent à un entretien, sans doute échaudées, demande à voir la transcription de cet entretien avant sa publication. Elles l'autorisent ou non.

Qu'il y ait un machisme dans certains milieux et sur certains territoires, c'est bien possible, et même très vraisemblable, mais si on interroge un excité pour en faire le porte-parole ou l'échantillon représentatif d'un groupe, il y a tromperie.

Si on m'interroge sur la "douceur feminine", je tiendrai des propos différents selon qu'on me parle d'une agression ou de rapports amoureux.

Kervinia a écrit:

J'ai trouvé ce que je cherchais !
Le passage qui m'intéresse se déroule à partir de 6min50 jusqu'à la fin.

12000 euros par jour. Mais c'est n'importe quoi. Si c'était vrai, même Bernadette Chirac vendrait du shit.

Je n'aime pas quand on manipule les gens interviewés, comme tout le monde. Mais je crois que ce phénomène est une réalité. Je ne sais pas comment s'est passé le reportage. Mais l'Islam radical se répand, c'est chose sûre, dans un monde où de pauvres petits jeunes sans repères sont contents de trouver un modèle, aussi détestable soit-il. Alors je ne vois pas pourquoi on accuserait la réalisatrice... Quand je vais faire un reportage sur l'industrie de la viande, je ne vais pas aller voir les gentils petits fermiers qui font des câlins à leurs vaches. Je vais aller voir là où c'est horrible, et tirer les vers du nez aux employés les plus bavards des entreprises les plus cruelles !

La réalisatrice est accusée de l'intérieur de son entreprise, et si la fixeuse n'avait pas été journaliste au Point, on n'aurait pas eu cette mise en garde : on avalait tout, comme l'ont montré les premiers commentaires.

je comprends ton raisonnement : il faut aller là où ça fait mal, oui,

mais si le trait est grossi par de grandes gueules irresponsables, les autres membres du groupe en conçoivent une juste colère.

J'ai bien compris que la critique venait de l'intérieur même. Mais je comprends vraiment mal cette accusation de "grossir le trait"... J'aimerais bien en savoir plus.

J'aimerais voir le documentaire pour me faire un avis, mais si les accusations de la fixeuse sont vraies, c'est gênant. Gênant, parce le doc peut laisser penser que la vision de la femme visible dans le doc est une vision partagée par les gens des cités, en général. Cela dépend comment le propos est formulé mais si on donne une portée générale aux propos, les raccourcis se font vite ensuite. C'est un peu comme si on n'interrogeait que des gens d'extrême-droite et si on faisait un doc (papier ou non) intitulé les Français sont xénophobes, en prenant donc comme base qu'a priori les personnes interrogées sont représentatives de la société française.
Je ne connais pas la banlieue, les cités, etc. et je suis loin d'être la seule à ne pas en avoir une vision juste, à ne pas "réaliser" comment ça se passe. Or, nous présenter une vision hypernégative ou à l'inverse angéliste pose toujours problème. On peut toujours remettre en question les documentaires mais s'ils ont été réalisés avec, à l'avance, des partis pris et une volonté de manipulation, c'est malhonnête.

C'est sûr. Reste à savoir s'il est dit une fois dans ce documentaire que "c'est comme ça pour tout le monde dans toutes les banlieues". Et puis il est difficile de se faire critiquer, je crois que personne n'est objectif dans cette affaire.

Oui, à voir donc lors de sa diffusion.

Albert a écrit:

Je n'ai pas vu le documentaire, mais je travaille en partie dans un quartier difficile, très difficile même. Les gens savent, pour la plupart, dire s'il vous plaît et merci, du moins quand on s'adresse à eux poliment.

Exactement pareil pour moi. Il y a forcément des exceptions, mais comme partout !

Albert a écrit:

Les enseignants notent aussi des tensions blacks/ beurs qui sont nouvelles dans le quartier.

Je l'ai remarqué également ! Enfin, pas chez mes élèves (avec eux, ça se passe très bien), mais chez des adultes. Des maghrébins qui se plaignaient qu'il y avait trop de blacks. =__=

Sylbao a écrit:

Mais l'Islam radical se répand, c'est chose sûre, dans un monde où de pauvres petits jeunes sans repères sont contents de trouver un modèle, aussi détestable soit-il.

Faut se méfier. Toutes les porteuses de voiles, par exemple, ne sont pas des islamistes radicales ; certaines, aussi bizarre que cela puisse te paraître, le portent pour le fun ou comme objet de séduction. De là le fait qu'elles se maquillent, parfois outrageusement, portent quantité de bijoux, des vêtements moulants, etc. D'autres, aussi, le portent par provocation, et je dirais que d'une façon générale, à force d'être stigmatisés, certains musulmans aiment se complaire dans la provocation. Une façon comme une autre de se défendre.

Je pense que la haine de l'Islam augmente bien plus sûrement que l'islamisme radical...

Je travaille dans un lycée où 90% (au moins !) de la population est musulmane. Et crois-moi, on fait mieux dans le genre islamisme radical...

Chronique de Caroline Fourest.