Réalisé par Dai Sijie (à qui l’on doit Chine ma douleur et Balzac et la petite tailleuse chinoise).
Ce film est un tournant dans le cinéma chinois. Il est inspiré d'un fait divers que le réalisateur avait lu dans la presse chinoise : l'histoire de deux femmes, l'une ouvrière et l'autre infirmière, condamnées à mort parce qu'elles étaient homosexuelles et suspectées d'avoir assassiné le père de l'une d'entre elles.
Le sujet est encore tabou et a subi la censure chinoise. Le réalisateur n’a pas pu compter sur l'administration du pays pour lui fournir le financement et l’emplacement pour planter ses décors.
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Du fait du sujet, nous ne pouvions pas faire appel à une maison de production chinoise : elle n'aurait pas eu l'autorisation de s'investir dans ce film car l'homosexualité est un sujet tabou en Chine". Les investisseurs sont donc Français et Canadiens.
Il a dû poser sa caméra au Vietman. :
"Les décors naturels y sont somptueux et très proches de ceux de la région chinoise où nous comptions filmer : la nature se fiche complètement des frontières !"Min (Mylène Jampanoï), une jeune orpheline aux yeux gris verts, à la beauté métissée, sort de l’orphelinat. Passionnée de nature et de plantes, elle part faire ses études chez un botaniste de renom.
Homme secret, le professeur vit sur une île qu'il a transformée en jardin luxuriant. Il a fait de son territoire un paradis végétal : l’atmosphère est envoûtante avec ses plantes empoisonnées, carnivores et bien ou malodorantes. Le professeur élève sa fille
An (Li Xiaoran) avec des principes rigides.
An accueille avec joie l'arrivée de l'étudiante. Très vite complices, les deux jeunes femmes voient leur amitié évoluer vers une attraction troublante, sensuelle… et interdite. Dans la Chine des années 80, tous les tabous ne sont pas levés. Malgré la mort de Mao, la Chine est encore rongée de tabous et de préjugés. La société codifiée par les hommes laisse peu de place à l’épanouissement sensuel de la femme.
Le vrai sujet du film, c’est la répression de l'homosexualité en Chine .Mentir ou mourir, voilà l’alternative pour Min et An… Incapables de se séparer, elles imaginent un dangereux arrangement pour continuer à partager le même toit.
Le réalisateur juge le sujet de son long métrage intemporel :
"L'important tient dans les rapports qui lient les personnages. Même les rapports entre An et le botaniste sont très classiques : elle ne peut pas quitter son père ni son jardin. Lui le sait et s'en sert. C'est là une autre forme d'amour, de l'amour filial, que l'on rencontre dans toutes les sociétés et à toutes les époques. »On reste ébloui par la beauté des deux actrices. Mylène Jampanoï vit à Paris, son père est Chinois.
Le parti-pris du réalisateur est clairement esthétique.
On reste aussi ébloui par les décors...Jardin luxuriant, nature grandiose, pétales de fleurs, lampions rouges et envol de tourterelles : que c'est beau !…
C’est aussi sensuel, langoureux, plein de charme, de poésie et de délicatesse.
C’est enfin inquiétant car la menace du père autoritaire et du frère violent plane jusqu'à la fin.
(On pense forcément à une sorte de Secret de Brokeback Mountain en version féminine. La passion est vécue, assumée, contre les préjugés, les interdits. )