Gaston Kelman, les discriminations raciales

Je suis noir et je n'aime pas le manioc de Gaston Kelman.

Edité aux éditions Max Milo, ce petit livre se veut être un livre combattant les préjugés. Plein d'ironie et de réalisme, Gaston Kelman nous démontre que le racisme entre blancs et noirs existe, mais qu'il existe aussi entre noirs. Gaston Kelman est l'ancien directeur de l'Observatoire urbain de la ville d'Evry, c'est un bourguignon bien de chez nous qui est cadre : il est noir.

Voilà la quatrième de couverture :

"Un Noir, n'est-ce pas, ce n'est pas très intelligent ni très cultivé. Il a certes de bons côtés : il se nourrit de manioc, il est rieur, enfantin, doué pour la musique (sauvage et rythmée, pas classique), mais c'est surtout sous-développé et ça compense par un membre surdimensionné... Tout le monde le sait.

Or, la France compte un nombre incalculable de ces individus qui font partie inégrante de la nation, comme Gaston Kelman. L'auteur vit depuis vingt ans en France et se définit avant tout bourguignon. Fort de son expérience, il dévide avec une verve féroce les lieux communs qui pèsent sur les Noirs, alternant le sérieux de son propos avec des anecdotes pathétiques, hilarantes et parfois cruelles. En véritable sociologue, il porte aussi un regard lucide sur les Noirs "qui se complaisent trop souvent dans le rôle de victimes".

L'exercice ne doit rien au masochisme : c'est en fait un exposé analytique des bases du racisme ordinaire, lequel frise le niveau intellectuel de l'homme de Néandertal.

Peu d'essais posent aussi brutalement la question à laquelle généticiens et anthroplogues ont pourtant déjà répondu : tous les hommes, enfants de Lucy, viennent d'une même race."

Avec un aplomb hors du commun, Gaston Kelman m'a beaucoup étonné avec ce livre. Les chapitres ont des noms plus qu'évocateurs (Je suis noir et je suis civilisé ; je suis noir et je suis assimilé ; je suis noir et je suis bourguignon ; je suis noir et je suis cadre ; je suis noir et ma fille est marron ; je suis noir et je n'aime pas les Blacks ; je suis noir et j'en ai une petite ; je suis noir et je n'en suis pas fier ; je suis noir et je me soigne.) et l'auteur délivre à chaque début de chapitre une petite anecdote ou une blague pour lancer la réflexion. Il consacre même une partie du chapitre "je suis noir et j'en ai une petite" au florilège des blagues reprenant ces lieux communs mieux qu'un long discours.

Bien écrit et étonnant, ce livre est intéressant pour son approche originale et s'il nous arrive de rire à quelques blagues - comme Gaston Kelman sans doute - ce n'est pas pour leurs contenus véridiques mais pour ce qu'elles transportent de stupide et d'inintelligible. La plupart du temps, c'est jeune que l'on rit, mais qu'est-ce que c'est drôle !

Je ne résiste pas au plaisir de vous glisser deux ou trois petites anecdotes ou blagues que raconte Kelman.

1) Histoire vraie :

"- Alors mon brave, dit un officiel français à un émigré convalescent dans un hôpital de Bamako, toi content repartir en France regagner sous ! Toi faire quoi en France ?
- Je suis Professeur de littérature à la Sorbonne, Monsieur."

Je trouve ça énorme, drôle et véritablement pathétique !

2) Blague :

"Un couple d'Africains trouve une lotion blanchissante. Il se préicpitent dans la salle de bain pour l'essayer et deviennent ainsi tout blancs. Ils appellent ensuite leurfils de sept ans pour lui appliquer la lotion. Mais Hamadou refuse net de passer au lavage, les prières, les menaces, le chantage n'y font rien. Le père se troune alors vers sa femme et dit :
<<- Tu te rends compte ? ça fait cinq minutes qu'on est blanc et il y a déjà un Noir pour nous emmerder !>>"

Terrifiant comme blague, mais réaliste quand on voit la mentalité de beaucoup de blancs aujourd'hui (moi elle me fait bien rire cela dit... Jaune, oui, mais rire).

3) Expérience vécue :

Un jour la fille de Gaston Kelman s'approche de lui et lui demande :
<<- Papa, est-ce que je suis noire ?>>
Là, paniqué le père - qui appelle sa fille maman (??? ???) - lui répond :
<<- Bah oui, maman ! Tu es noire !>>
(Là je cite le livre)
"Ô vous tous pères noirs de France et d'Europe, dites-moi s'il vous plaît, qu'auriez vous répondu à ma place ?
Alors retentit l'un des plus atroces cris de détresse qu'il ait été donné à u père d'entendre.
<<- NAAAAAAn ! Je ne suis pas noire ! Je suis marron, maron-clair !>>
Je crois avoir marmonné quelqu chose du genre : <<Ah oui c'est vrai ! Que je sui bête ! Excuse-moi maman !>>"

Hilarant... et terrible aussi.

Un livre que je vous ecommande chaudement - bien que l'on ne puisse pas dire qu'il soit le plus philosophique qui existe. C'est un essai sans prétention qui veut surtout guérir les lieux communs par l'humour, l'ironie, l'autodérision et le réalisme.

Maeglin entre deux éclats de rire

Citation :

La plupart du temps, c'est jeune que l'on rit, mais qu'est-ce que c'est drôle !

j'aime bien ce lapsus, tu n'as pas voulu tomber dans la couleur

du rire JAUNE et de l'humour NOIR

rotko a écrit:

Maeglin entre deux éclats de rire

Citation :

La plupart du temps, c'est jeune que l'on rit, mais qu'est-ce que c'est drôle !

j'aime bien ce lapsus, tu n'as pas voulu tomber dans la couleur

du rire JAUNE et de l'humour NOIR

Je fais ce lapsus d'écriture à chaque fois que je l'écris sur l'ordinateur... Je corrige pas, ça anime la lecure au moins !

As-tu Nadine Gordimer, Maëglin ?
Si non, fonce !

Je prends note Crevette !

Je connais l'auteur de nom, elle me tente depuis un moment, mais j'ai tendance à privilégier la littérature asiatique en ce moment donc à chaque fois elle ne fait pas partie du choix final.

Bon, alors c'est noté à la prochaine dépense de bouquin, j'en prendrai un. Tu as un titre précis que tu voudrais me conseiller ?

Non, je n'ai pas tout lu d'elle. Mais il y a un fil sur GDS*.

oui, c'est là. Il serait interessant de voir la production des ecrivains sud-africains dans un post-apartheid qui n'est pas idyllique.

je jetterai un oeil sur ce livre de Kelman (je suis noir et je ne mange pas de manioc) qui a aussi ecrit Au-delà du Noir et du Blanc en 2005 chez Max Milo.

Au-delà du Noir et du Blanc en 2005 chez Max Milo

c'est un livre interessant divisé en chapitres tres courts où l'auteur examine certaines questions ethno-raciales, avec des exemples concrets, et sans verser dans des théories "naïves et généreuses" (ce sont ses termes) ou la défense de privilèges fondée sur un hexagonalisme étroit et une attitude colonialiste périmée.

Il cite d'ailleurs Alain Ruscio très présent dans le fil sur le colonialisme et la colonisation;

j'y reviendrai à propos de la discrimination positive qu'il examine d'un oeil neuf.

Jamais je ne lirai le livre de Gaston Kelman. Je suis affreusement raciste, je n'aime pas les

Spoiler:

Kelman examine l’idée de discrimination positive qui date du rapport Schwarz dans les années 80 et qui visait à favoriser les jeunes sans qualifications, les jeunes filles, et les enfants d’immigrés.

Il s’agissait de lutter contre des pratiques discriminatoires dans deux secteurs essentiels : le logement et l’embauche, inégalités de traitement contre lesquelles s insurgent les jeunes issus de l’immigration avec la marche des Beurs.

Actuellement on fait de faux procès aux chefs d’entreprise :

ce serait eux les responsables de la discrimination à l’embauche. Or ils ont hérité des préjugés comme les autres Français, et ont été sensibles à l’image négative véhiculée par les medias (ce qui explique que dans des campagnes où il n’y a pas un seul habitant issu de l’immigration, on voit un vote front national).

Mieux vaudrait s’en prendre à une idéologie « naïve et généreuse » qui a fait l’éloge de la différence, discrédité l’assimilation, et ainsi valorisé le refus des codes au profit de la violence et de la délinquance.

Comment s’étonner ensuite qu’il y ait des attitudes de méfiance diffuse devant des comportements asociaux ou antisociaux ? Et les qualifier « d’attitudes racistes » ?

Ceux qu’il faut féliciter !

Les groupes de femmes qui ont lutté contre les mutilations sexuelles et les mariages forcés, alors que sévissait le dogme irresponsable du soi-disant respect des « cultures ».

On ne peut accepter sans risques, au nom d’une prétendue culture d’origine, ou de la religion, des pratiques régressives contraires à nos valeurs.

A suivre.

Je n’ai pas lu « je suis noir et je n’aime pas le manioc », bien que « au de-là du blanc et du noir » y fasse de fréquentes allusions, avec des mises au point.

Ce qui m’intéresse est notamment dans le chapitre III la nouvelle société des amis des noirs, sous-titrée les « générosités coupables » p 77 à 101 où il situe les problèmes de la culture dans le pays d’accueil... et de vie;

Citation :

« Des hommes et des femmes, guidés par les générosités coupables et inconscientes ont choisi - librement, cela va sans dire - de ne pas apprendre le français. Ils vivent en France depuis des décennies et aujourd’hui, ils on compris à leurs seuls dépens, que leurs amis (comprenez des idéalistes philanthropo-généreux) les avaient conduits vers une impasse »

Ce que je comprends bien.

Kelman poursuit vigoureusement p 96 son attaque des prétendues

Citation :

« libertés liberticides, à la sauce négrophile et xénophobe »

J’isole ce petit passage où il est question de soi-disant héritages des cultures d’origine :

Citation :

« Des hommes et des femmes shootés jusqu’à l’overdose, à des traditions archaïques, ont éduqué lers filles à la soumission ; ont condamné leurs filles à mort parce qu’elle avait flirté avec un mécréant. Des hommes travestissant la pensée religieuse, ont couvert leurs filles de voiles, battu ou répudié leurs femmes, parce qu’ils avaient choisi de respecter cet aspect de leur culture d’origine ».

Il ya d'excellents héritages, et d'autres plus contestables !

Je ne suivrai pas aveuglément Kelman, sur tous les sentiers qu’il parcourt, mais je trouve ces passages marqués du sceau du bon sens.

Kelman dénonce les faux remèdes aux réelles discriminations dont souffrent les minorités d’origine étrangère, bien qu’établies en France pour certaines depuis longtemps.

Ainsi le curriculum vitae anonyme et sans photo n’ a pas d’avenir quand l’entretien révèle ce qui n’a pas été dit : le nom, ou la couleur de peau.

La nomination d’un préfet musulman ne fait pas avancer les pratiques de recrutement des jeunes de banlieue.

Il faut changer les mentalités par des innovations symboliques comme l’ont fait les Américains en introduisant dans leurs films des personnages positifs issus des minorités, contrebalançant ainsi la mythologie blanche des westerns.

Citation :

« En France, les institutions ont le devoir de créer une mythologie nationale dans laquelle se reconnaîtront les minorités ».

A suivre.

kelman souligne l'importance des mariages mixtes qu'il estime àune union sur trois.

Les chiffres sont moins élévés mais importants : on peut les avoir ici en un fichier excel par le site de l'INED.

je donne seulement les chiffres de 2007

Citation :

ensemble des mariages 267194

mariages mixtes 35 838.

Gaston kelman propose donc une politique de rattrapage fondée, non sur le choix d'individus jugés représentatifs, comme actuellement, mais sur la notion de groupe.

Il faut selon lui mettre un frein aux notions de culpabilité et de chatiment qui l'emportent en france (on traque les suspects de discrimination comme les patrons de boites de nuit et les employeurs ou les logeurs) pour mettre l'accent sur des notions de prévention, de pédagogie, et de récompense du mérite.

La notion de discrimination positive avancée généreusement par Sarkozy et dont kelman pensait grand bien n'est manifestement plus à l'ordre du jour, et j'ai cru entendre que les étudiants étrangers seraient soumis à des critères financiers assez stricts.

Or ces étudiants ne sont-ils pas une bonne affaire pour le pays de leurs études où ils restent souvent, à moins que de retour dans leur pays ils n'en conservent une bonne image et des liens fructueux.


tahar Ben jelloun propose au Seuil le racisme expliqué à ma fille, qu'il dit avoir remanié 15 fois pour s'adapter à un jeune auditoire.

Son texte est très accessible et met en gras des notions telles que différences socio-culturelles, différence, discrimination, étranger, ce qui permet de s'orienter facilement vers ces notions.

en annexes, il a mis des courriers de lecteurs qui montrent comment le livre a été reçu et comment les lecteurs réagissent sur certaines notions.

je vais chercher son livre je suis noir et je n'aime pas le manioc, j'adore son humour !

Bablier a écrit:

Je suis noir et je n'aime pas le manioc de Gaston Kelman.
Peu d'essais posent aussi brutalement la question à laquelle généticiens et anthroplogues ont pourtant déjà répondu : tous les hommes, enfants de Lucy, viennent d'une même race."[/i]

J'arrive sur ce site avec un livre dont je dis quelques mots à ce propos, La dialectique de la raison. Ce n'est pas ma tasse de thé la philosophie brute mais il m'importe de savoir, alors de temps en temps je me donne la peine de les lire. Je tiens à répondre aux questions que l'on m'a posées à ce sujet, mais ici, avec cette phrase que je relève, qui se pose comme une question mais qui n'en est pas une, je reste sur ma faim, appréhendant les mêmes rengaines. Que pense l'auteur à ce sujet? Que toute l'humanité, ou que l'humanité est né en Afrique puis s'est dispersée à travers la planète?!? C'est une question que je vous pose. À mon avis, c'est un grossier mythe, et c'est le nerf de ma pensée dont vous allez pouvoir en goûter la logique.

Oui j'ai vu une émission sur ce sujet , apparement , nous descendons tous d'un homme africain.
Les études sont basées sur une recherche de chromosome quasi similaire sur plusieurs individus.
Ainsi , ils ont pu établir les descendants de plusieurs grandes personnalités et ceux jusqu'à Gengis Khan , qui aurait la plus grande descendance , en vue de ses conquètes .
En tentant de regrouper les diverses familles avec des chromosomes similaires, la recherche amène en Afrique , berceau du premier homme .

Quetschup a écrit:

la recherche amène en Afrique , berceau du premier homme .

ah bon ? j'en étais resté à Lucie, elle aussi africaine.

on voit bien que derrière cette naissance de l'humanité se profilent, je crois, des arrière-pensées ethniques teintées de racisme. ça poserait moins de problèmes pour certains si les premiers hommes s'étaient découverts en Ile de france, pourquoi pas entre notre dame et la sainte chapelle

Oui , d'ailleurs si mes souvenirs ne me font pas défaut , ce serait le chromosome universel , que nous possédons tous.