Religions et guerres

Depuis l'antiquité la plus reculée, des millions d'hommes se sont entre-tués au nom de leurs dieux respectifs. De trafic d'esclaves en croisades, de conquêtes en reconquêtes, de colonisations en néocolonialisme, de menées impérialistes en appropriation de marchés, les différentes religions ont été souvent utilisées comme marchepied à la soif de pouvoir et de richesses des uns et des autres. L'histoire n'a pas suivi les mêmes chemins partout. Tout le monde n'a pas connu la Renaissance après avoir subi l'Inquisition. Tout le monde n'a pas ouvert toutes grandes les portes du savoir pour retomber ensuite dans l'obscurantisme. Ainsi va le monde donc, d'une démarche apparemment chaotique, les uns avançant et les autres reculant au gré des vents contraires que souffle l'histoire. On parle ici de l'histoire vraie, celle vécue par les peuples avec ses heures dites glorieuses mais aussi ses heures sombres et non pas de l'histoire idéologique qu'on arrange de façon à se donner systématiquement le beau rôle face à l' "autre", ou plus exactement, contre l' "autre".
Aujourd'hui, une sorte d'internationale fasciste de source théocratique prend forme et cherche à enfoncer des coins dans l'édifice de nos libertés conquises au fil des ans dans des combats parfois très durs contre l'oppression des pouvoirs politiques souvent appuyés par des églises complices, et qui ont coûté beaucoup d'années de prison aux uns et la vie à beaucoup d'autres. Dans nos sociétés laïques, libérées du poids de l'église et de ses tentations inquisitoriales et totalitaires, la pratique religieuse relève, heureusement, du strict champ privé. Chacun est libre de croire ou de ne pas croire, de pratiquer ou de ne pas pratiquer, de critiquer ou de ne pas critiquer. Cela s'appelle la liberté et nous nous devons de la défendre de toutes nos forces.

.Salut ! Pierre

thèse

Citation :

De la gauche comme de la droite, nous entendons monter un discours de plus en plus ouvertement islamophobe, associant à tort Allah, pratique de l'Islam, monde arabe, vision orthodoxe de la foi et terrorisme…

Antithèse

Citation :

Aujourd'hui, une sorte d'internationale fasciste de source théocratique prend forme et cherche à enfoncer des coins dans l'édifice de nos libertés conquises …

On attend ta synthèse !

Bien cordialement à toi.

La liste est longue des exactions commises au nom de la religion ou avec la bénédiction de ses représentants à tel point que certains se sont même fait une spécialité de les classer. On n’a que l’embarras du choix : pillages des Croisés, massacres commis à l’époque des invasions musulmanes au nom du Coran, tortures supervisées par les mandataires de la Sainte Inquisition, tueries en Europe lors des guerres de religion des XVIe et XVIIe siècles, lynchages, attentats, exécutions…

Toutes les religions semblent donc entretenir des rapports plus que troubles avec la violence et la guerre. Rien ne sert de se voiler la face en répétant à l’envi qu’on n’a rien compris et que toutes les religions n’appellent fondamentalement qu’à la paix universelle. Disculper Dieu sous prétexte que les hommes, faibles créatures, ne le comprennent pas et n’en font qu’à leur tête est un peu superficiel. Pour autant, il serait aussi intellectuellement malhonnête de faire comme si ces messages de paix n’existaient pas. C’est justement cette tension entre la violence des faits et le pacifisme des doctrines qui pose question. Et l’on pardonne d’autant moins aux assassins quand ils prétendent agir au nom du vrai Dieu qui n’est qu’amour et douceur, et dont on sait qu’il peut aussi inspirer les actions les plus admirables.

Au choc des attentats terroristes du 11 septembre 2001 au nom d’Allah, en plein cœur de l’hypermodernité new-yorkaise, est ainsi venu répondre l’appel médiéval totalement obsolète à la Croisade lancé par le président états-unien. Autre exemple plus récent : l’hystérie médiatico-religieuse qui a accompagné la publication dans plusieurs journaux des fameuses « caricatures » pseudo-voltairiennes de Mohammed.

Des éditeurs européens se sont mis à publier des opuscules délirants sur l’islam et les musulmans qui valent largement la littérature antisémite du début du XXe siècle. Pendant ce temps, certaines chaînes de télévision arabes interviewent volontiers des spécialistes religieux autoproclamés qui expliquent que le Talmud est un instrument du diable ou que l’Occident chrétien ne cherche qu’à éradiquer l’islam. Le « choc des civilisations » prophétisé au début des années 90 apparaît peu à peu comme une évidence à la plupart de nos contemporains, sommés de choisir leur camp.

On ne compte plus les conflits d’origine économique, politique ou territoriale qui se présentent aujourd’hui comme religieux. Il est vrai qu’on mobilise plus facilement pour Dieu ! Cela fait plus sérieux. Tout ramener au religieux permet ainsi d’occulter les causes multiples de la violence.

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Le débat sur la violence religieuse ne saurait faire l’économie d’un regard critique sur notre perception de la menace en général. Dis-moi de quoi tu as peur et je te dirai qui tu es… Pourquoi le sentiment religieux est-il parfois ressenti comme une menace ? Pourquoi nous sentons-nous agressés par telle religion plutôt que par telle autre ?

On peut avancer trois explications. Tout d’abord, la mutation de la société industrielle du XIXe siècle en une société de l’information au XXe, puis de la communication aujourd’hui. Ce nouveau monde de l’image et du symbole consacre la rencontre entre notre demande d’angoisse et l’offre qu’en proposent les terroristes. La télévision, en particulier, fluidifie parfaitement ce marché de la peur. La victoire de l’islam ne passe pas par les armes, mais par la peur qu’il instille dans le cœur de l’ennemi. Cette information de masse a une autre conséquence : la démocratisation des cibles, puisqu’on est passé du régicide aux attentats aveugles et autres prises d’otages. La cible revêt désormais moins d’importance que l’envergure et la rapidité de l’onde de terreur. Autre vulnérabilité, l’augmentation des inégalités dans le monde. En effet, la (non) répartition de la croissance appauvrit relativement des pans entiers de l’Humanité. Tout le monde connaît ces chiffres et le danger réside surtout dans le décalage qui existe désormais entre ces poches de dénuement relatif et un modèle de société consumériste, médiatisé à l’extrême. Dernière vulnérabilité, une forte sécularisation, qui signifie moins une baisse de la spiritualité qu’une envie de se soustraire au monde, à défaut d’avoir la force de l’accepter comme tel.
Les vecteurs de cette menace de la violence religieuse évoluent également. On trouve ce que tout le monde appelle Al Qaida. Cette « grande enseigne » exerce évidemment un fort pouvoir d’attraction et donne sens à de nombreux passages à l’acte en quête de justifications. Ayant tourné le dos aux dieux, l’homme moderne cherche plus que jamais à justifier sa fragilité. « La violence des hommes éprouve le besoin constant de se justifier », disait Hannah Arendt dans son Essai sur la violence. Déconstruire les discours justificatifs s’avèrerait dès lors l’arme la plus efficace contre cette violence qui se cache derrière les symboles du sacré. Mais il est vrai que ce n’est pas facile. Personne n’est innocent. Personne n’est épargné.