Maïssa Bey [Algérie]

Certes, au départ, l'envie de s'en sortir mais le constat aujourd'hui teinté d'une forme d'amertume poignante et discrète :

Citation :

Et pour tout dire, j’y étais arrivée... enfin... presque... au risque de ... il y a un mot particulier pour dire ça chez nous... un mot intraduisible... pour qualifier ceux qui n’ont plus d’âme, plus de racines, plus de mémoire, qui cherchent par tous les moyens à faire oublier et à oublier eux-mêmes ce qu’ils sont, qui croient ainsi se faire accepter des autres, au risque de se perdre... mais j’ai oublié ce mot...

C'est moi qui souligne des mots et expressions que je trouve saisissants de vérité.

et moi aussi j'avais repéré ces mots qu expliquent si bien! Cela veut dire que l'auteur sait faire partager au lecteur ce qu'elle veut dire et le fait en termes simples.

Moi aussi j’ai apprécié cette nouvelle. Cette femme contente de son teint, qui ressemble à une Française méditerranéenne.
Le scénario vide elle le peuple d’objets, d’une porte, d’un miroir et commence son improvisation, avec son présent, et son passé qu’elle veut oublier, mais qui revient sans cesse.
Son pays, son père, le triste sort de sa mère, elle a fui tout cela, mais il y a beaucoup de regret dans cette fuite.
Une belle petite nouvelle ; Ton post Nicyrle rend l’atmosphère étouffante de pays où les femmes sont soumises et opprimées. 

 Oui, Amadak : un texte riche, qui donne à réfléchir.

De ses pays si cruels, combien de talentueux écrivains sont devenus des témoins fidèdes de leurs avatars.

 
Maïssa Bey, Pierre Sang Papier ou Cendre, chez l’aube, 200 p.
 
L’Algérie et la France, de 1830 à 1962.
 
Ce n’est pas un récit, plutôt un poème [ le titre est de Paul Eluard ] à déclamer dans un spectacle, où le chœur serait représenté par l’enfant, « sentinelle de la Mémoire », et les interventions de récitants, sur le ton du pamphlet, de la litanie ou de la complainte, avec des anaphores, des rengaines, des reprises, des phrases versets etc.
 
Y sont évoqués les débarquements militaires de 1830 qui amènent, au fil du temps, l’occupation des lieux, l’aliénation d’un peuple en tous domaines, par les autorités en place, la francisation des lieux et de l’instruction, jusqu’aux mirages trompeurs d’un orientalisme qui colore une triste réalité.
 
Au nom de la Civilisation et du Progrès, sans craindre les paradoxes et les contradictions, l’Algérie est la victime des massacres de 1945, puis de ses libérateurs FLN à Melouza en 1957, elle à qui avait été enseignée une histoire se réclamant des droits de l’homme et de la liberté défendue depuis Vercingétorix et Jeanne D’Arc ! Vaste tromperie !
 
L’ironie est rude, tant dans les rites, devises, actions et comportements de Madame laFrance, que dans des saynètes où conversent des colons, des militaires, des Européens  installés, y compris de bons samaritains de l’enseignement, ou ceux qui se sont insurgés contre les politiques coloniales. Leurs noms sont cités, comme sur des stèles commémoratives, en des énumérations qui leur rendent hommage.
 
La langue française, « tribut de guerre des Algériens » disait Kateb Yacine, est scrutée dans ses euphémismes et ses masques, les « pudeurs » qui camouflent les termes de « camps » au profit de « cantonnements », de « zones sécurisées », de « centres », etc.
 
Un texte à entendre, qui aurait même besoin d’un public : il le mérite, comme s’en aperçoit le lecteur, sensible à la vigueur du texte et à l’acuité du regard.

Maïssa Bey, Pierre Sang Papier ou Cendre, chez l’aube, 200 p.

Oui c'est vraiment un texte qu'on a envie d'entendre. J'avais assisté à une magnifique  lecture des Indes d'Edouard Glissant par la comédienne  Sophie Bourel, et en lisant ce livre il m'a semblé parfois qu'il en prenait les accents ...

Je lirais ce texte concernant l'Algérie, cela m’intéresse. Je reviendrai probablement en discuter un jour lorsque je serai certaine de ce que je vais écrire là. En effet, je suis, de par ma mère et ma grand mère, descendante de "pieds noirs".

Maïssa Bey, Pierre Sang Papier ou Cendre, chez l’aube, 200 p.

oui, E Caminade, j'ai entendu parler de Sophie Bourel, je me rappelle d'une chose qu'elle avait dit, à propos de la comédie : "la part d'ombre révèle la lumière..." enfin, je ne me souviens pas bien, mais c'est ce lambeau de phrase qui m'est resté. Je l'ai trouvé incroyablement vrai.

Journal intime et politique : Algérie, 40 ans après de Maïssa Bey, Mohamed Kacimi, Nourredine Saadi et Leïla Sebbar.

Pendant trois mois, d'août à octobre 2002, quarante ans après l'indépendance de l'Algérie, cinq écrivains ont tenu leur journal intime et politique. Mohamed Kacimi, Nourredine Saadi, Leïla Sebbar ont écrit depuis la France où ils vivent, Maïssa Bey et Boualem Sansal depuis l'Algérie qu'ils n'ont pas quittée. Deux femmes et trois hommes, écrivains de langue française, en exil ou non, cheminent avec l'Algérie d'hier et d'aujourd'hui. Avec l'Histoire de la France et de l'Algérie si fortement inscrite en eux, chacun, selon ses engagements, ses choix, sa sensibilité, son humour, tisse la trame des jours, le drame des jours...

3 de ces écrivains sont présents sur GDS*. De même que Boualem Sansal, ils se penchent sur l'histoire de l'algérie dont Maissa bey dans pierre sang papier cendres montre qu'elle fut très longtemps un pays occupé : les Romains, les Turcs, les Français etc.

Dans ce dernier titre, on aperçoit Camus au détour d'une conversation. Un livre qui permettra un échange, même si le début, un rien sarcastique pour "Madame Lafrance", ironise cruellement sur l'arrogance metropolitaine, dans sa manière de considérer le pays et ses habitants, vantant son propre rôle.

Maïssa Bey sera ce vendredi 5 juillet à 18 h 30 au Fort Saint-Jean de Marseille en compagnie de Benjamin Stora pour une rencontre débat autour du thème "Pourquoi Camus?" organisée par la librairie du MuCEM.

L'improvisation

du coup, j'ai complètement oublié de donner mes impressions sur cette nouvelle !!! 
A la lire, à la ressentir et à l'exprimer pour les Grains, j'ai touché du coeur sa terrible solitude, son manque de repère dans un monde qui n'est pas vraiment le sien.
Il y a un peu d'agressivité derrière sa souffrance, c'est une va-t-en guerre qui voudrait qu'on l'accepte, mais qui se rend compte qu'elle doit faire des efforts personnels pour que ça marche ! alors elle se sent triste et humiliée.
Quelque part, elle s'en veut de refuser de ressembler à sa mère. Mais c'est  "la vie" qu'a eue sa mère qu'elle refuse de toutes ses forces ! une vie de silence, d'humiliation, de servitude...
quand elle dit : "a-t-elle seulement rêvé ?". Oui, rêvent-elles, ces femmes à qui des hommes interdisent tout ?
Ce texte m'a profondément touchée. Cette impro lui permettait de tenter une approche des autres et m'a fait penser au cri de Much, qui est pour moi l'expression de la plus totale solitude.

Je suis de plus en plus intriguée par l'être humain qu'est Maïssa Bey ! Il me tarde de recevoir son bouquin concernant l'Algérie !

rhooooooooo ! MUNCH pas Much Ysandre !!!

Citation :

rhooooooooo ! MUNCH pas Much Ysandre !!!  

T'inquiète... On avait compris

Arundathi a écrit:

Je suis de plus en plus intriguée par l'être humain qu'est Maïssa Bey ! Il me tarde de recevoir son bouquin concernant l'Algérie !

 
les livres amènent d'étranges rencontres, inattendues.
 
Ainsi le"boucher de guelma" de Zamponi dont Mazel et  moi parlerons bientôt, fait état de griefs communs. Sur le fil de Maissa bey, il est question de la mort de son père. Ces deuils familiaux jouent evidemment un rôle chez certains écrivains, y compris chez Leila Marouane.

Par ailleurs, l'appel du navire de Boris Pahor, parle de l'importance de la langue : l'occupation d'un pays se fait aussi par le vocabulaire, les noms de rues, les personnages auxquels on voue un culte, les cérémonies instituées, et l'école qui implante une culture autre que celle du lieu.

Oui Rotko, Leîla Marouane a une véritable vénération et admiration pour son père et cela se retrouve dans ses écrits et la façon dont elle en gère la disparition (voir autre site)

Darabesque : où est l'autre site dont tu parles?

coucou Amadak

je t'ai répondu en mp
mais tu peux d'ores et déjà aller  voir  ici, car elle a  un fil  

LA

Voila j'ai lu "Pierre Sang Papier ou Cendre".

J'ai passé les plus belles de mes années d'enfance en Algérie, j'allais en vacances là bas et jusqu'à l'age de quatre ans j'ai vécu dans ce pays.  Sur le "Sidi Ferruch" un jour d'été, je devais avoir atteint ma quatorzième années, lorsque j'ai vu les maisons blanches, les arcades du front de mer s'éloigner de la baie, j'ai voulu tout fixer une dernière fois avant que les lignes ne s'estompent dans le lointain. Sanglotante, je me suis effondrée contre le bastingage, je regardais le bracelet que ma marraine m'avait offert, je repensais avec émotion à ce cousin, à nos jeux puérils, à nos rires éperdus, à nos complicités. J'ai su alors qu'une partie de ma vie se terminait.

2013, aujourd’hui sur ce forum, je découvre Maïssa Bay ! Il m'en a fallu du temps pour arriver jusqu 'à toi !

Pardon oh pardon de toute mon ignorance Maïssa !

Mes aïeux maternels ont dérivés un jour vers les années 1840-1850 des cotes d'Italie et d'Espagne respectivement. ils ont émigrés par bateaux, ils cherchaient du travail, ils cherchaient l'espoir, on leur avait promis une terre riche  ...

La suite, je l'ai lu dans ton recueil. J'ai eu réponse à nombre de questions, je me suis opposée à ma mère souvent. Mais elle a vu tant d'atrocités ! Une amie de ma mère, restée paralysée à la suite d'un règlement de compte sanglant a tenue à me laisser un récit ... Mais je me rends compte à l'heure actuelle que le même récit a pu être écrit dans l'autre camp !

Je suis bouleversée chère MaÏssa !

Que dire de la beauté et de l'amour de ton écriture ! Nous français, toi là bas, tu aimes tant la France ! Pardon j'ai aimé ton recueil, j'ai aimé ta manière d'écrire, ta poésie, tes espoirs, tes désespoirs, j'ai tout aimé !

Je n'ai rien d'autres à ajouter si ce n'est que je te lirai encore, merci de ce beau recueil !

"L'enfant est debout sur le rivage.
Il a les yeux ouverts à présent.
Il sait qu'il ne rêve plus."

très émouvant ton message à Maïssa Bay, mon Arun ! tu m'as mis les larmes au bord des yeux.

Arun, Rotko ne me contredira pas nous avons déjà fait cela avec Bernard Clavel
va sur son site

LA

ou envoie- lui un mail et mets les coordonnées de son fil sur GDS

dis- lui ce que tu viens d'écrire là! elle ne pourra qu'être émue
surtout qu'en plus nous sommes plusieurs à avoir apprécié ses écrits
 

pour Arundhati: chère amie: émouvant ton commentaire, il nous touche vraiment.Maíssa Bey sera émue elle aussi en te lisant.
J'ai beaucoup aimé sa petite nouvelle l'Improvisation, que Ysandre avec son talent inné, nous l'a fait parvenir en MP3, on croirait la voir sur la scène. Tu l'as?C'est magnifique

Arun, lis Madame Arnoul de jean Noel Pancrazi un livre bien ficelé et évocateur.

Merci pour l'info rotko !