JP Brighelli - La fabrique du crétin

clmemont a écrit:

Le malaise est grand car on a bien du mal à remettre en cause le collège unique. Idée superbe mais dans les faits, il n'y a pas d'égalité des chances.

Qu'entends-tu par collège unique ou non ?
(Je ne comprends pas car cela fonctionne comme à mon époque ... )
C'est amusant d'ailleurs, l'autre jour je discutais avec des gens plus jeunes qui ont passé leur certificat d'études et moi non cela n'existait pas)

C'est utopique l'égalité des chances non ?

que de questions ... excuse-moi et prend ton temps et bonne préparation de cours !!!

Peut être par si utopique que ça…

"D’une façon générale, les systèmes éducatifs les plus performants sont ceux qui font réussir tous leurs élèves, aussi bien les bons que ceux qui ont moins de facilités ou qui sont moins favorisés socialement. En éducation, on peut concilier qualité et équité, limiter efficacement l’influence du milieu social sur les résultats. Et en la matière, la France a fort à faire."

Petit extrait des résultats d’une enquête internationale qui a été menée sur 41 pays pour juger de l’efficacité des systèmes éducatifs :
http://ecolesdifferentes.info/45POURCENTj.htm

Sousmarin, ce que je remets en cause c'est nos pratiques, nos programmes du collège unique. Les ministres qui se sont succédé depuis 30 ans (le collège unique a été crée en 1975 ou 76 avec la loi Haby) n'ont jamais voulu tirer les conséquences de son échec, car les idéologues qui l'ont mis en place officient toujours au ministère ! Et puis, les syndicats bien en cour ont toujours appuyé en ce sens. Les enseignants, majoritairement, ont tardé à se plaindre. Pourquoi refuser à tout prix des orientations demandées par les élèves ? Préfère-t-on les garder dans un système classique pour qu'ils s'ennuient ? Ils ratent dans certains cas des opportunités ; je ne regrette pas d'avoir envoyé des élèves en troisième professionnelle lorsque j'enseignais au collège. Les consignes étaient de maintenir le plus d'élèves jusqu'en troisième puis jusqu'en seconde, ensuite seuls 20 à 25% des élèves sur l'ensemble du territoire français entrent en première. Des premières d'un niveau médiocre qui peineront à trouver un emploi et ne sauront pas se défendre. Je suis pour un enseignement pour tous mais pas tel qu'il est pratiqué en France. Je ne veux plus avoir en classe des élèves pour qui il faut faire un cours autre que l'on vient voir de temps en temps car cela n'a strictement rien à voir avec ce qu'on fait avec le restant de la classe.
J'ai une idée plus utopique encore, la possibilité pour ceux qui ont choisi de quitter le système scolaire rapidement d'y revenir, d'avoir donc pour quelques uns un enseignement modulaire. Je veux que l'on quitte les oripeaux d'une grammaire de discours pour revenir à celle du texte, que l'on choississe un moyen terme entre le décloisonnement et les exercices répétitifs. Je ne veux plus qu'une élève de 19 ans m'écrive sur l'albatros de Baudelaire que Le poète compare le bateau à un oiseau en plaignant les navires qui ne sont pas libres car ils ne peuvent pas naviguer sans les hommes. Cette erreur n'est pas une blague. Il y en a d'autres...
Notre collège unique est un échec. J'essaye de trouver les documents et je reviendrai les poster. Attention, cependant à ne pas tomber dans le piège de SOS-éducation (mouvement réactionnaire qui a essayé de récupérer "sauver les lettres", tiens ! vous pouvez voir leur sites respectifs)

L’égalité pour moi, ce n’est pas de donner la même chose à tous mais de donner plus à ceux qui ont moins…donc de s’occuper plus des élèves qui ont des difficultés, les bons (s’en servir comme auxiliaire, ce qui éduque civiquement par la même occasion) s’en tirent toujours …cela est certes moins glorifiant pour les enseignants (quoique en y réfléchissant) mais tellement plus efficace pour la cohésion d’un groupe ou d’une nation. C’est pour cela que nous devons imposer une mixité (sociale, financière, des capacités intellectuelles, etc.) le plus loin possible et aussi parce que…l’on a souvent besoin de plus « petit » que soi car ceux qui le sont dans un domaine ne le sont pas partout…

La Finlande réussit beaucoup mieux que nous avec des moyens financiers équivalents par élève.
Leur méthode : moins d’heures de cours par élève ce qui permet moins d’élèves par classe et plus de moyens pour les biens (informatique, livres…). Développement du travail en groupe (ce qui dégage du temps professoral) et assistance (utilisation de ce temps éventuellement en cours particulier) auprès des élèves en difficulté et il y a, comme par hasard, étonnamment peu d’échec scolaire…

Pour l’instant nous avons en France, quoi qu’on en dise, un système élitiste ; et quand on voit l’élite…

De mon temps (ben oui) j'étais dans une école de campagne: filles et garçons de 6 à 14 ans âge du certificat et âge limite aussi avant de poursuivre ou d'aller au boulot.
Ce que je veux dire c'est que nous étions une quarantaine et pendant que les uns participaient par exemple à une leçon d'histoire, nous étions deux ou trois à apprendre à certains autres des trucs pour nous rattraper: genre grammaire par exemple . On se mettait dans u n coin et nous faisions cela. Quelle solidarité ! et cela était faisable parce que nous attendions le certficat d'études en perdant notre temps un peu, étant donné que les collèges n'étaient pas à portée de mains, et bien quelle belle façon de l'occuper ! d'ailleurs cela ne vous étonnera pas si je vous dis que forcément je voulais être institutrice ! j'étais super bien dans cette ambiance.

Intéressante ta proposition Sousmarin mais elle exige une transformation non seulement de l'école mais aussi de la société. Nos angelots sont un peu individualistes. Je tente des travaux de groupe assez souvent, les groupes doivent être formés de manière à ce qu'il y ait tous les niveaux dans un groupe. Quelque fois cela fonctionne,mais pas très bien. Réduire les horaires ? Je dirai mieux les répartir sur l'ensemble du corpus scolaire. Quant à l'orgueil des enseigants, je crois que nous avons mis un mouchoir dessus. L'article auquel il a été fait allusion est certes intéressant mais avait été contesté : l'école est un endroit que les élèves fuient et recherchent.


Question : aucun autre grain ou graine ne veut rentrer dans la danse des réflexions, observations...?

Retour à mon travail dans cinq minutes. Là, c'est pour le latin Comment et pourquoi écrire l'histoire ? (Traduction, commentaire, et lecture complémentaire. Je crains de devoir faire un cours magistral sur l'historiographie romaine car pour un travail de recherche au CDI, il y a trop peu de documents et les documents internet sont soit trop simples soit trop complexes)

Voici une anecdote d'une enseignante de lycée technique qui donne des cours particuliers à un élève de 4e

Citation :

j'hallucine! On leur bourre vraiment la tête avec des conneries inutiles alors qu'il ne sait pas écrire, a 0/20 à toutes les dictées (comme les 2/3 de la classe) et j'en passe.
Aujourd'hui :
"alors t'as fait quoi dernièrement?"
"un truc sur l'arc-en-ciel?
"?!!!!???"
"oui un truc sur l'arc-en-ciel : Dorante est le sujet, et il y a aussi l'adjuvant et le destinateur...."

Et oui le schéma actanciel était pour lui un "arc-en-ciel"!

Et franchement : comprendra-t-il mieux Le Bourgeois Gentilhomme une fois qu'il aura vu le schéma actanciel?
J'en doute....

Et il ne sait toujours pas la différence entre une nature et une fonction, confond participe présent et participe passé.

Et je n'arrive pas à l'aider.

Ce qui me rassure c'est la poésie de la transformation des mots.

je rebondis un peu sur un détail, qui ne concerne pas du tout des élèves de 4e et qui concerne Molière dont on a "un peu" parlé à propos du film.

Pendant des décennies on a attribué à Molière les platitudes et les clichés contenus dans les paroles du "raisonneur", souvent le frère du maniaque : Beralde dans le malade imaginaire ou ariste dans les femmes savantes.

C'était oublier que ce personnage etait le pivot entre deux groupes antagonistes, et non le porte-parole de Molière.

Dans le film de Tirard, on voit Molière déclamer de facon ridicule des vers de tragédie, excitant les rires de la foule, les jets de fruits, ou même les sourires moqueurs de Madame Jourdain, sa maitresse.

Croit-on qu'un homme de théâtre comme lui ne savait pas mettre le public dans sa poche par une diction et un jeu appropriés ?

arc-en-ciel et actanciel, la méprise est jolie

Je préfère l' arc en ciel à l'actantiel

clmemont a écrit:

Je préfère l' arc en ciel à l'actantiel

pas de poesie sur l'actantiel

En guise d'arc en ciel, le dimanche matin...

En guise d'arc en ciel, le dimanche matin,
Neufiesme jour d'octobre apparut une dame :
Son oeil estoit si clair que de sa vive flame,
Il eut pu faire fondre un roc diamantin.

Tout le peuple flechit son courage mutin
Esprit de grand' merveille, et jetta l'oeil et l'ame
Bien hautement en l'air ou l'horison s'enflamme,
De ceste impression que formoit le destin.

Un soleil jeune et beau, malgré l'obscure nue,
En riant luy monstroit sa face revenue,
Apres avoir long temps autre part esclairé :

Il luy communiqua ses lumieres plus belles
Il borda son habit des couleurs naturelles,
De vert, de rouge brun, de jaune et d'azuré.

Guillaume LE BRETON (1550-?)

Un entretien savoureux avec JPB.