Antoine Choplin

L’impasse

Dans une ville qui n’est pas nommée mais qui pourrait être de Tchétchénie, quelques semaines après l’arrêt des combats, parmi les décombres, au fond d’une impasse, s’est organisée la vie des survivants.
Parmi eux, le jeune Timour avec toute sa famille.
Après avoir calfeutré les béances des murs à la veille de l’hiver et ramené un vieux poêle, ils voudraient reprendre la danse et jouer de la musique pour oublier un peu la guerre.

Mais les forces d'occupation, multiplient les exactions à l'égard des civils qui se terrent dans des appartements en ruine. Surgissent dans l’impasse quatre soldats. Sous les ordres du capitaine Kalinski, haineux et impitoyable, ils sont chargés de « nettoyer » l’impasse…de traquer d’éventuels terroristes…profitant de leurs armes pour semer la terreur et commettre des actes d’une grande violence.

Parmi les quatre, un géant, Oleg Youssov, qui semble subir douloureusement les ordres et s’y soumet dans une moindre mesure que les autres, sous les railleries et le mépris du capitaine.

En plein cœur de la guerre, Timour et Oleg, qui ont vingt ans, se sont rencontrés dans une bibliothèque désertée. Ils sont devenus amis. L’un enseignait à l’autre le lancer du poids ; en échange de quoi l’autre enseignait à l’un comment jouer aux échecs. Et tous deux feuilletaient les livres , surtout un consacré à l'oeuvre de Giacometti.

Et voilà que les soldats arrivent à la porte de l’appartement où vit la famille de Timour…

153 pages…
Pour raconter une énième très belle histoire d’amitié au cœur de la guerre. Une de ces histoires où compte plutôt la « chair » que la « tunique »…
Pour montrer les deux visages de l’humain : sa dignité et sa barbarie.
Pour croire qu’avec l’Art, même aux heures les plus sombres, une fleur a des chances de "pousser sur une pierre".
J'ai trouvé ce livre très beau.

Extrait:

"Oleg dit:
Je n'ai pas enviede parler de la guerre. Enfin, pas comme ça. Pas tout de suite. J'aurais plutôt envie, d'abord, comment dire, de me retrouver. Me retrouver, sous lesdécombres. Nous retrouver. Qu'on se souvienne de notre vraie matière d'homme. Je crois que j'ai oublié tout ça.
Pour se retrouver, dit Timour, il faut pouvoir faire le chemin dans l'autre sens. Savoir par où on est passé.
Oleg: moi, j'ai plutôt l'impression que ce serait l'occasion de se perdre à nouveau. De s'enfoncer un peu plus vers les régions sombres. Je préfère croire que la lumièreest encore là, passi loin, à portée de pas et qu'un regard neuf saura la distinguer. J'ai confiance."

J'ai failli renoncer dès la lecture des premières pages...Et puis non, pas du tout...Il y avait de la lumière au coeur de la nuit dans ce livre...
Il est pourtant très dur...

rotko a écrit:

Editeur : La Fosse aux Ours, j'entends parler de cette maison d'edition pour la première fois.

Une maison d'édition lyonnaise...Joli objet...Joli papier...

Pour en savoir plus:
http://www.sfl.com/diffusion/pe-fosse.html

Radeau de Antoine Choplin était déjà édité par La fosse aux Ours.

Très beau livre ,c'est vrai .
J'ai aimé le style à la fois sobre et puissant de l'auteur qui parvient à nous faire ressentir toute la souffrance de cette ville dévastée ,anéantie .Où l'enlisement d'une trève bien fragile permet à quelques-uns de trouver un exutoire à la barbarie qui les gangrène :

<

...Mais au milieu du chaos , l'espoir ...Il faut retrouver cette petite parcelle de vie dans les moindres recoins ,réapprendre à vivre , chercher la part d'humanité et la force qui poussent les hommes à continuer ...:

Nous devons faire face , nous souvenir de la fragilité des choses ,de nos souffles . Et aussi voir combien ils sont précieux . Bien palper tout ça .Nous sommes assez forts ,tu sais .Notre facture d'homme est magnifique . Dans la pénombre ,les pupilles s'agrandissent .et si les yeux nous brûlent ,il y a le secours des larmes .

Il y a de très beaux moments d'amitié aussi entre Oleg ,"le lanceur de poids ",rude et généreux ,et le jeune Timour qui nous laissent sur une note lumineuse à la fin du récit ,et nous nous montrent qu'au travers des pires atrocités ,le seul rempart à la barbarie reste parfois ce lien si intense :

Un livre poignant !

Je vois qu'un des extraits copiés a disparu de mon post ,aussi je me permets de le reciter :

(L'Impasse )
<
Ils étaient partout . En reconnaissance ,en surveillance ,dans les chars et les hélicoptères ,dans les bistrots . Les lois s'édictaient dans l'instant . La menace ,le forfait ,le crime s'étaient trouvé un allié parfait . L'impunité . Le sang rougissait les pierres sans que l'on comprenne pourquoi . Du reste ,avec cette mort de coin de rue ,insolente et facile ,la question ne se poserait bientôt plus .
Avant tout ,c'était cette pertelà qu'il flairait ,Timour ,dans l'air de la cité meurtrie . Celle du sens et qui portait les consciences au seuil du vacillement . De la vie humaine ,l'élan s'était brisé .E lle ne serait désormais que de courte vue ,sans attention possible à autre chose qu'elle-même ,ici et maintenant .Elle irait son chemin à tâtons ,dans l'exiguité des espaces vacants .
Après tout . >>

Choplin

1/2

Pour introduire Cour nord d'Antoine Choplin, édité chez la brune, je vous propose criss cross un joli morceau de thelonious Monk.

Ce livre juxtapose les itinéraires du père et du fils, travaillant tous deux dans une aciérie du Nord.

- Le premier réagit vivement à l'annonce de la fermeture de l'usine : il est depuis 15 jours en grève, et devant une solution sans issue, il entreprend une grève de la faim pour attirer l'attention de l'opinion publique.

- Le fils, passionné de musique, fait partie d'un groupe qui a de solides ambitions.

Sur la grève, comme sur la musique, les deux hommes ont des vues divergentes :

Citation :

La télé est venue et ils l' [mon père] ont interviewé alors qu’il était allongé sur le matelas comme un grand malade. Et puis on s’est réuni autour de lui, enfin surtout les gars du syndicat pour discuter de la conduite à tenir, dans les jours a venir.
A plusieurs reprises le ton est monté entre eux. Je [le fils] me suis tenu longtemps un peu à l’écart, vers l’entrée du hall. On m’a demandé mon avis, comme çà, et toi, qu’est-ce que t’en penses, et j’ai pas su quoi répondre.

Choplin, cour nord.
2/2

Le roman est construit comme un morceau de musique, en quatre mouvements : Thème, variation 1, variation 2, reprise du thème.

- D’un côté, le déclin du père avec la fermeture de l’usine : on sent que c’est son dernier combat,

Citation :

Même José il a lâché l’affaire, a dit encore Gérard. Même José tu te rends compte. Et tu sais quoi ? Nous aussi, on va finir par lâcher. Demain, tout à l’heure même, si ça se trouve. Parce qu’ pas fous, voilà pourquoi. On est des durs, mais on n’est pas des fous. Tu comprends çà ?

Mon père a levé les yeux :[… ]d’une voix pâteuse et mal assurée, il a dit qu’il ne nous reconnaissait pas. Qu’on était plus les mêmes qu’avant. Qu’on avait des sales têtes de vaincus.

ce qui donne à l’auteur l’occasion d’évoquer, en termes sobres, le casier de l’ouvrier dans l'aciérie, et le vide qui succède à la période d’activité et/ou de combat.

- De l’autre les espoirs du fils avec ses projets musicaux, des moments intenses, un avenir prometteur :

Citation :

Tout ce temps, Nadine est restée assise vers le fond, seule, adossée au mur de brique blanchi à la chaux, sous le portrait de Dizzie Gillespie. Elle préféré attendre que la plupart des gens aient quitté l salle pour s’approcher à son tour de la scène. Elle reste là un instant, souriante et silencieuse.

Et puis, cherchant ses mots, elle dit que c’est curieux comme elle s’est laissée emporter par la musique et comme , plusieurs fois, elle a eu envie de pleurer tellement ça la prenait au ventre. Nous on la regarde dire ça, un peu gênés. Je crois bien qu’à cet instant, tous les quatre, on a vraiment envie de l’embrasser..

Antoine Choplin tricote avec habileté ces deux fils, comme dans la scène du café : un journaliste interroge le pianiste après le concert, et on entend aussi ceux qui parlent de la grève à l’usine…des conversations en alternance.

Une lecture intéressante, chez un petit éditeur, La brune.

Cour nord fait partie du défi lecteurs de comités d'établissements : thème, la musique.

Cour nord est le sixième roman d’Antoine Choplin et il serait question d’une adaptation au cinéma par Karim Dridi, le réalisateur de Pigalle et du dernier vol.

Les lecteurs apprécient son style poétique et son écriture concise qui insèrent les personnages dans un environnement , sans pour autant le localiser précisément comme dans le cadre d’un «　roman social　».

Antoine Choplin ne délivre pas un message militant sinon que chaque protagoniste doit trouver sa voie : pour le fils ce sera la musique de jazz, une forme de création affectionnée par l’auteur, puisqu’il en a fait l’architecture de son récit.

L’Art, d’une manière générale, (peinture, sculpture, photographie, et même les échecs) apparaît comme une solution à la recherche individuelle, et un regard sur la vie.

Le pigeonnier du père dans Cour Nord sera un loisir créatif qui donnera un sens à sa nouvelle existence jusqu’alors «　bouffée　» par le travail.

Comment travaille l’auteur ?

Il s’imprégne d’un sujet (lieu/personnages) pendant plusieurs années, puis, la maturation accomplie, il commence le travail d’écriture.

Pour un livre comme cour Nord, il faut compter un an, et s’il écrit une page par jour, c’est une bonne journée.

Il pèse chaque mot, soigne les répliques, voire les silences. C’est un régime monacal fait de concentration : tabac, alcool, ou musique détourneraient son attention.

Plus tard, sa bibliographie, car on n'en restera pas là

Vous avez l'embarras du choix pour connaître les autres livres d'Antoine Choplin

Léger fracas du monde (la fosse aux ours)

Evariste, artiste-peintre singulier, se rend au bord du lac du Bourget. Il veut peindre son ultime tableau. Pourtant, une fois devant sa toile vierge, il est comme impuissant. Ce trouble le renvoie à son histoire dont on devine l'épaisseur et les heures sombres

La Manifestation, édition la dragonne.

Ce matin, monsieur Bobbie quitte la grande maison pour faire sa promenade dans les rues de la ville. La même promenade, très exactement, que tous les jours précédents. Ce qu'il ne pouvait prévoir, c'est le cortège bruyant de la manifestation, cette foule
joliment compacte et les slogans attrayants. Intrigué, il s'approche. Jusqu'à se faire happer. Dès lors, tout bascule pour monsieur Bobbie...

Selon mes sources, ce Bobbie vous redonne le moral, il projette sur lemonde le regard que vous n'avez plus, et c'est tonique

Radeau 134 p. Éditeur : Pocket

1940, un camion bâché sur les routes de France. Au volant, Louis connaît l'importance de sa mission. Avec d'autres employés du Louvre, il est chargé de convoyer les chefs-d'œuvre du musée vers une retraite sûre. Les consignes: ne jamais s'arrêter, ni quitter son véhicule des yeux. Mais comment ne pas proposer son aide à une fille qui marche pieds nus, qui fuit sans but, sans autre famille que ce bébé grandissant dans son ventre ?

Une mention spéciale pour Apnées 112 p. chez La fosse aux ours .


c'est un exercice lexicographique dans le sillage de l'oulipo et du Georges Pérec de Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ?

S'y cotoient plein de mots bizarres (goberger, gaupe, quinaud, girie, bachique, fidéisme, ponceau, morganatique,friselis, cimaise, cipres, myrmidon, nicodème, accordailles, piaculaire, pateline, bornoyer, verbigération, spicilège) nouant des alliances étranges

Ca vous amuse et/ou vous rabat le caquet, à votre convenance : j'attends vos impressions ludiques.

Antoine Choplin, le héron de Guernica, chez la brune.

1/3

Comment rendre compte de la réalité ?

Telle est la question que pose le livre avec deux peintres : Basilio a vécu les événements de Guernica, et Picasso, qui n’était pas sur place, a transmis au monde entier l’horreur de ce massacre.

La rencontre des deux peintres à la fin du livre sonne à mes yeux comme l’échec de Basilio, puisqu’il n’ose même pas présenter au Maître son propre tableau.

Pourtant le cœur du livre montre à quel point Basilio a vécu cette expérience : la rencontre d’un déserteur, l’accompagnement de soldats, une soirée de fête, avant que Guernica ne soit pour l’artiste obstiné un épisode où il perd tout : sa ville, ses amours prévues, et cet ardent désir de rendre vivant ce héron, comme témoignage de ce qui était et de ce qui n’est plus.

Au départ l’approche du héron, cette familiarité créée pour le peindre en donnant une impression de vie est la phase d’attente et d’espoir. Il serait un cadeau à la femme aimée. La suite sera amère, et le héron blessé serait-il la réussite du tableau ?

à suivre.

Antoine Choplin, le héron de Guernica, chez la brune.

2/3

D’autres représentations du drame seraient possibles : les photos des bombardiers que privilégie le curé du village, ou cette bicyclette abandonnée photographiée par Basilio…

On sent bien qu’Antoine Chopin a creusé son sujet, avec une grande économie de mots, ou des alinéas qui renvoient à de pauses silencieuses. Les éventuels dialogues sont minimalistes, et les scènes, brossées avec des éléments picturaux ; à vrai dire, ils renvoient plus au Guernica de Picasso qu’au héron : on y trouve le cheval, ou pour citer des tableaux du récit, les « taurillons étincelants » «  les éclairs blancs. »

Antoine Choplin, le héron de Guernica, chez la brune.

3/3

Beaucoup de lecteurs ont encensé ce livre sur leurs blogs, admirateurs d’une « écriture magnifique ». Difficile de savoir ce qu’il faut entendre par là : s’il s’agit de concision, et de phrases semblables à des traits picturaux, on sera d’accord.

Mais la constante maîtrise du style n’engendre-t-elle pas une certaine froideur, peu compatible avec le sujet traité.

Le paragraphe ci-dessous décrit le bombardement de Guernica avec des phrases très courtes (1), objectives (2)

(1)Une gifle, et une autre encore. Une nuée de poussière envahit la place comme une poignée de confettis. (1) Les bêtes un instant étourdies.

(1)L’une d’elles, celle au halo, peinant à se relever. Se relevant tout de même. Zigzaguant jusqu’au profond cratère de bombe, trébuchant, disparaissant ainsi aux yeux de Basilio.

La course du taureau tout entier dévoré par les flammes s’interrompt au centre de la place. Il s’écroule brutalement, comme touché par une cartouche de gros calibre. Durant un long moment, le feu qui le tenait continue à s’échapper de la masse noire inerte.

(2) La boule de feu portée par le taurillon ventru a gagné en volume. Et pourtant, son allure est moins heurtée que précédemment. (2) Ses cavalcades s’accommodent d’assez longues lignes droites. L’une d’elles se termine du côté de Basilio, par une sorte de révérence, gueule béante.

Deuxième remarque : le héron, même blessé, est-il un symbole à la hauteur du drame ? n'y a-t-il pas quelque chose de dérisoire dans le titre, le héron de Guernica ?

Est ce que le héron est suffisant pour montrer l'horreur de Guernica?

Après avoir lu ce roman de Choplin, j'ai compris que l'horreur pouvait être symbolisée par cet oiseau craintif et solitaire. Il ne demande rien, ne fait de mal à personne! Le personnage principal connait cet oiseau depuis longtemps et l'admire de loin et puis... La guerre... Le héron va représenter la destruction, la mort... Sans doute moins puissant que Guernica mais assez efficace dans son style.

Et puis je pense qu'il y a entre héron et héro qu'une lettre de différence... Peut être simpliste mais il est difficile de se mesurer à Picasso.

oui, cette proximité entre héron et heros m'a traversé l'esprit. Mais qu'en faire ?

une rencontre est prévue avec Antoine Choplin, au plus tard en janvier, et j'ecouterai son point de vue.

je sais déjà ce qu'il dira : seul l'art peut rendre compte de la réalité, mais que fera-t-il du héron et de son peintre ?

bonne idée d'intervenir, kez

Citation :

seul l'art peut rendre compte de la réalité, mais que fera-t-il du héron et de son peintre ?

j'ai mes réponses d'Antoine Choplin :

- le héron a ceci de particulier qu'il reste longtemps immobile, tout en donnant l'impression d'être vivant. C'est pourquoi le peindre représente un défi difficile, celui de donner la vie à l'immobilité.

L'artiste s'attelle donc à une tâche difficile, et quasi desespérée.

- Pour le peintre, Basilio dans l'histoire, s'attacher à "rendre" un héron dans ces circonstances, c'est à la fois dérisoire et désespéré.

- Rendre le réel est complexe, par exemple une situation de dialogue.

L'écriture ne peut s'interesser à la fois aux multiples sensations des différents personnages. Antoine Choplin travaillle beaucoup ses dialogues, soucieux de la façon de parler des protagonistes qui ont moins à respecter la "correction grammaticale" qu'à user de phrases interrompues, ou de silences.

A cet égard, j'ai beaucoup apprécié dans cour Nord les dialogues minimalistes entre le père et le fils : ils se comprennent plus par les attitudes ou des silences que par ce qu'ils disent explicitement.

Dans cour Nord la juxtaposition et l'interférence de deux dialogues dans le café permet de sentir les deux démarches, du père et du fils : un entretien du musicien avec un journaliste permet d'entendre en même temps les conversations des clients sur la grève à l'usine (donc plus ou moins directement des nouvelles du père).

Les Cargos Glissent à l'Horizon des Rues

Editions Cénomane


j'ai écouté ces poésies hiers soir en lecture collective ou alternée. Des photos étaient projetées sur un écran, et des improvisations jazzy de bonne qualité ponctuaient ou accompagnaient les lectures.

C'est une expérience interessante ; je reste toutefois un peu réticent sur les lectures alternées où un récitant dit une phrase qu'un autre prolonge d'un mot ainsi mis en relief.

Un homme sur une moto, à laquelle est accrochée une remorque bringuebalante, traverse la campagne ukrainienne. [...] évoquer un monde à jamais disparu où ce qui a survécu au désastre tient à quelques lueurs d'humanité.

j'ai entendu l'auteur en lire des extraits, et sans rien savoir du thème du livre, le sujet en était très perceptible.

Du coup je voudrais trouver Radeau, roman très court d'Antoine Choplin, que je n'avais pu finir, pris de court par l'horaire de fermeture d'une bibliothèque armoricaine.

L’impasse, 152 p. La fosse aux ours.

Un champ de ruines. 4 soldats russes, d’ après les prénoms, veulent « nettoyer » une impasse. A l’autre bout, une famille, des hommes et des femmes d’âge divers. On devine, on attend, et on craint un affrontement.

Antoine Choplin pose le lecteur dans les actions en cours, avec les paroles en direct, les pauses, les silences, les plaisanteries cyniques censées justifier des actes innommables.

De courts chapitres équilibrent des scènes en montage alterné, d’un bout de l’impasse à l’autre, tandis qu’ un troisième plan établit une passerelle fortuite, entre deux hommes dont les pays respectifs sont en guerre.

Le récit est sobre, concis, brut, même si l’arrière-plan suggère un îlot d’humanité.

Reste que l’impasse est aussi un titre symbolique.

(à suivre) une bonne lecture

Le schéma de cette tragédie - comment un récit intitulé IMPASSE pourrait-il ne pas être tragique ?, est visuellement significatif et facile à retenir.

--------------------------------------------------------- Hélicoptère

Soldats russes >>>>>>>>>>>>>>>>>>IMPASSE>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> famille cachée


Destruction………………………………………....................................................Survie et régénération

OLEG********************** ******** liens d‘amitié ************************* TIMOUR


--------------------------------------------------------- Bibliothèque

Mon petit schéma n'épuise pas le livre, loin de là, mais pourrait servir à lancer un débat entre des lecteurs : Antoine Choplin oppose au monde de la barbarie et de la destruction, le monde de la culture qui ne se réduit pas au livre :

il comprend aussi les pratiques sportives, ici le lancement du poids ou la danse, par les relations qu'ils instaurent entre les gens, la sculpture - il est question de toutes petites sculptures de Giacometti etc.

regardez donc si vous avez du Choplin dans vos bibliothèques, et surveillez l'apparition de la nuit tombée...

La nuit tombée fait son petit chemin, apprécié des lecteurs pour une écriture dense qui traduit les aventures contemporaines, angoissantes, même si elles apparaissent d'abord avec une beauté insolite, comme une "féérie".

Ils n’auraient jamais dû le faire, Gouri l’avait compris peu après. Ils l’avaient fait pourtant, avec enthousiasme et même, une joie vague. Ils étaient venus ensemble, c’était tout près d’ici, Kesnia et lui, au matin du 26 avril. Voir un peu. Le bleu étrange de l’incendie. Les irisations. Cette féérie. Ils avaient même hésité à s’approcher encore. Une chose insignifiante — il ne pouvait se souvenir quoi exactement, une course à faire, un rendez-vous ? — les en avait empêchés. Ils y seraient allés, sinon, mais dans la main.

Encore plus près. Ils se seraient jetés là – dedans pour de bon, père et fille ensemble, pris par l’intensité du spectacle, le sourire, presque, à leurs visages. Comme ces autres enfants rassemblés du côté de la voie ferrée, offrant leurs chants et farandoles au feu d’artifice. Et envoûtés une fois pour toutes. Aujourd’hui, ou demain, disparus. »

Tout près de Tchernobyl.

la nuit tombée fait son chemin, je lis radeau

jeudi 29 novembre : la grande librairie 20h40 F5

Grand reporter, clic ! Annick Cojean évoque avec François Busnel l'essai «Les Proies. Dans le harem de Khadafi», paru chez Grasset.

Lionel Duroy publie «L'Hiver des hommes», chez Julliard, un roman se déroulant dans la république serbe de Bosnie et mettant en scène les acteurs du conflit qui, poursuivant un idéal de «pureté nationale», ont chassé les musulmans et les Croates.

Antoine Choplin publie quant à lui «La Nuit tombée», chez La Fosse aux ours, un road-trip halluciné à travers la zone contaminée de Tchernobyl.