Pierre Guyotat

Pierre Guyotat, Eden, Eden, Eden, L’imaginaire chez Gallimard.

Un mois après sa parution 1970, ce livre est par un arrêté du ministre de l’intérieur signé du directeur de la police nationale, frappé d’une triple interdiction : affichage, publicité, mineurs.

Une pétition internationale, une question orale de François Mitterrand l’assemblée nationale, une intervention écrite du président Pompidou auprès de son ministre de l’intérieur restent sans réponse.

Le 30 décembre 1981, l’interdiction est levée.

Je viens de lire la quatrième de couv. et je comprends mieux ton "état" de ce matin qui m'a réveillée d'ailleurs

J'aurai bien mis le texte (résumé sur la 4ème) mais je ne sais pas si c'est dévoilé ou non... ??? comme tu ne parlais pas du dedans du livre, j'ai été voir dehors.

Tu le trouves en médiathèque ?...
moi ça m'étonnerait... z'ont classé les titeufs au rayon BD ADULTES

ne mets pas la quatrième de couverture. Je donnerai sans doute un aperçu du livre par moi-même. Ceux qui veulent se documenter par eux-mêmes peuvent le faire

oui, je l'ai trouvé en mediathèque.

Eden, Eden, Eden, porte mal son titre, on s’en doutait un peu. C’est l’enfer de Jérôme Bosch mais vu de l’intérieur, un vrai cauchemar.
L’incipit donne le contexte :

Citation :

Les soldats casqués, jambes ouvertes, foulent, muscles retenus, les nouveau-nés emmaillotés dans les châles écarlates, violets : les bébés roulent hors des bras des femmes accroupies sur les tôles mitraillées des G.M.C.; le chauffeur repousse avec son poing libre une chèvre projetée dans la cabine; au col Ferkous, une section du RIMA traverse la piste; les soldats sautent hors du camion; ceux du RIMA se couchent sur la caillasse…

On est donc dans un bordel de campagne, avec les odeurs appropriées, la misère humiliée, les faiblesses violées.
La brutalité est mise à nue, insupportable, l’impudeur, constante, l’homme est devenu un carnassier sexuel, un phallus tueur obscène, monstrueux et omnipotent.

Citation :

Les bergers, vérolés, reposent,le temps d’une chierie d e leurs bêtes,leur lent regard mouillé sur les grillages du bordel des femmes : les putains libres leur sourient, l’écume brille à leurs lèvres gonflées, elles découvrent leurs seins ; les poings des bergers creusent le grillage; entre leurs cuisses, les haillons s’écartent sous la poussée du sexe; au bas de l’escalier, la putain noire dont les lèvres sont enduites de poudre d’amour mouillée aux lèvres du soldat, tire le soldat déboutonné, sexe dressé, par les pieds, jusqu’au seuil de la chambre des passes..

Il y a des passages pires.

Pour traduire cet enfer de sperme et de sang, Guyotat use d’une phrase chaotique, de l’accumulation des détails concrets - odeurs, pilosités, et des scènes bestiales.
A traits rapides et brutaux, il plonge son lecteur dans un bain de foutre ; les corps sont maudits.

Je ne peux pas continuer la lecture.

France culture diffuse ce mercredi 29 avril 2009 20 h-22h

Coma de Pierre Guyotat lu par Patrice Chéreau en direct du théâtre de l'odéon.

20h - 22h SOIREE SPECIALE en direct de l’Odéon Théâtre de l’Europe

Citation :

Sous la direction de Thierry Thieû Niang, Patrice Chéreau, en acteur, défend le grand texte de Guyotat, « témoignage d’une traversée douloureuse vers un inaccessible au-delà du corps individuel, mais aussi comme l’odyssée poétique d’une écriture qui réclame ses livres de chair pour s’incarner en verbe magnifique et douloureux qui parle de la difficulté d'être au monde, de la souffrance de ne plus trouver les mots, de ce que l'auteur nomme lui-même dépression». (Bertrand Leclair)

Guyotat m'a l'air d'un médiocre qui cache sa vacuité littéraire derrière un côté "sulfureux", au peu que j'en ai lu. Quant à l'extrait, je n'y vois aucun style. Si on enlève les ordures cela peut donner ça :

Citation :

Les vachers, enrhumés, reposent, le temps d’une sieste de leurs bêtes, leur lent regard mouillé sur les grillages du quartier des femmes : les employées libres leur sourient, l’or brille à leurs lèvres gonflées, elles découvrent leurs dents ; les poings des bergers creusent le grillage; entre leurs bras, les haillons s’écartent sous la poussée de la chaleur; au bas de l’escalier, l'employée lorraine dont les lèvres sont enduites de crème solaire mouillée etc.

Lisez plutôt Grand-Père de Jean-Louis Costes !
Le personnage de l'auteur (showman trash) paraît douteux, mais je vous assure, c'est le meilleur roman du millénaire... pour l'instant !

Une présentation ici :
http://www.obskure.com/fr/dossier-kulture.php?id=55

Furtif a écrit:

Guyotat m'a l'air d'un médiocre qui cache sa vacuité littéraire derrière un côté "sulfureux", au peu que j'en ai lu.

j'ai été réticent à la lecture, mais je me propose d'ecouter au moins des passages à l'emission de ce soir.
Sans invoquer l'argument d'autorité, je m'aperçois quand même que Guyotat est défendu par de grands noms, je reserve donc mon avis "jusqu'à plus ample informé".

idem pour Houellebecq vers lequel je ne me sens pas attiré, mais je me garde bien de donner une condamnation absolue car j'entends des avis proches qui lui sont favorables. Je reste donc, au moins en théorie, disponible.

Juger sur pièces est ma politique, mais "je diffère et procrastine" .

Furtif a écrit:

Lisez plutôt Grand-Père de Jean-Louis Costes !
Le personnage de l'auteur (showman trash) paraît douteux, mais je vous assure, c'est le meilleur roman du millénaire... pour l'instant !

Donne-nous ton avis, je le connais seulement de nom, et il n'a pas de fil sur GDS*.
Or toi, qui l'as lu et le recommandes, pourrais nous dire en quoi il te plaît personnellement.

Citation :

idem pour Houellebecq vers lequel je ne me sens pas attiré, mais je me garde bien de donner une condamnation absolue car j'entends des avis proches qui lui sont favorables. Je reste donc, au moins en théorie, disponible.

Tu n'as pas lu Houellebecq ?

Citation :

Donne-nous ton avis, je le connais seulement de nom, et il n'a pas de fil sur GDS*.
Or toi, qui l'as lu et le recommandes, pourrais nous dire en quoi il te plaît personnellement.

La poésie ça ne s'explique pas. Mais je vous en copierai une page à l'occasion.
Disons quand même que c'est une langue très personnelle, totalement en accord avec le français vivant. (Dans le même genre : Virginie Despentes.)
Pour ce qui est de la teneur du livre, cela fait rentrer dans l'imagination des hommes qui ont participé aux tueries du siècle dernier. Genre Jonathan Littel, paraît-il (son pavé m'est vite tombé des mains) sauf qu'il est du côté du sans-grade.
(Un bémol à ce livre, la fin.)

Citation :

Sans invoquer l'argument d'autorité,

Bof... les avis des «autorités» en littérature française contemporaine ... trop juges et parties : critiques et écrivains : cacher autant que possible ce qu'on craint être meilleur que soi... Mais ça a toujours été comme ça, sans doute.

Citation :

La poésie ça ne s'explique pas

plus ou moins, quand même. En regardant récemment les écrits d'un concours de poésie régionale, j'ai vite repéré les "faux poèmes" et apprécié quelques écrits de qualité.

Mais on parlait de Costes, et de grand père, apparemment un roman.

Citation :

les avis des «autorités» en littérature française contemporaine ... trop juges et parties : critiques et écrivains :

oui, je disais ne pas invoquer l'argument d'autorité.

Mais si des proches dont j'ai été à même de connaître la fiabilité du jugement, et si des gens de talent comme Patrice Chéreau, vantent une oeuvre ou un écrivain, je reste attentif, et le plus disponible possible.

Il m'est arrivé et de me tromper et de changer d'avis, heureusement !

j'ai été bien inspiré d'ecouter coma ou du moins de larges extraits à la radio, avec la voix frémissante de Patrice Chéreau. Pas un bruit dans la salle du petit Odeon, et ce recueillement attentif passait à l'ecoute.

Un texte prenant : il présente un artiste en crise, proie de la dépression qui ne se voit pas, extérieur aux autres malgré sa présence physique. Il parle aussi de la création artistique, et d'un sentiment de l'univers.

A ecouter certains passages, on aurait pu croire que Van gogh parlait de sa peinture.

Un article à lire

Un extrait :

Citation :

Si la médecine en a fait un « état pathologique, caractérisé par une perte de conscience, de sensibilité et de motilité », l’origine grecque du mot « coma » renvoie au sommeil profond.[...] Ce récit aboutit effectivement à une hospitalisation, à l’hiver 1981-1982, consécutive à « une crise qui m’avait amené au bord de la mort », écrit l’auteur, tombé dans le coma alors qu’il pesait moins de la moitié de son poids normal ; il est aussi le récit d’une longue errance aux confins de la réalité dans un état proche du sommeil profond, celui du rêve ou de l’hypnose, un sommeil de la raison où peuvent surgir les figures de maîtres et d’esclaves qui peuplent ses livres et s’y déploient dans un monde autonome, habitant l’envers ou l’inconscient des représentations communes : la traversée que raconte Coma, jusque dans sa dimension orphique, est à proprement parler poétique.
À la marge de l’œuvre elle-même, Coma éclaire les parages de ce « sommeil profond » hanté par une utopie : celle qui voudrait voir le corps, celui qui au fil des pages s’amaigrit, s’estompe, s’efface, passer chair et sang dans l’écriture, à travers l’œuvre de fiction peuplée de figures qui « naissent de ma langue, de ce rythme, dans son bain ».

Coma chez Folio.

Je l'ai écouté aussi. J'ai trouvé ça sans intérêt. N'est pas Genet ou Artaud qui veut !
Notons que Colette Fellous qui dirige la collection au Mercure de France où a paru ce livre, est aussi productrice à France Culture... Ce qui était dit à l'émission, reconnaissons-le.

Pour en avoir le coeur net, il faudra lire le livre : il fait 200 pages.

on se tient au courant pour le lire à peu près en même temps ? ce serait un peu plus tard car en ce moment, j'ai "du pain sur la planche"

Il n'est pas dans mes projets de le lire un jour, en vérité. Mais on ne sait jamais, je peux changer d'avis, voire me découvrir fan de Guyotat... Quien sabe ?

je fais donc, en quelques minutes, un mini-fil Guyotat, pour réagir sur le mot "féministe" employé par Rotko dans la discussion concernant (à l'origine) Laferrière.

si l'on démarre de ce mot, je renvoie pour le coup, immédiatement à la lecture de Eden, éden, éden (L'imaginaire Gallimard), par laquelle cependant, il n'est pas tout à fait conseillé d'entrer dans (hum) Guyotat si l'on a l'estomac fragile.
la scène se tenant dans un bordel (de femmes, d'hommes) on constatera que le corps des uns et des autres y est traité identiquement (je passe les détails). pas de hiérarchisation dans le désir, dans l'usage du corps de l'autre, des autres.
et lisant ce texte, s'il est bien une chose dont il faut se débarrasser, c'est d'avoir une lecture morale de premier degré (ce qui fut le cas à la sortie du livre, il fut interdit). non pas pour être dans l'air du temps gnagna, mais bien parce que dans cette écriture-là, il n'est pas question de morale dans la manière où on l'entend de coutume.
le sexe se fait avec tous, avec tout. Eden, éden, éden est un long tableau de cruautés, de scènes de sexe ou tout se mélange et s'entrecroise. et il y a, quelqu'en soit le sujet, une véritable prouesse poétique à tenir ce souffle pendant 300 pages.
j'avoue, au début, avoir craint de m'ennuyer au bout d'une centaine de pages, même si la phrase est très belle et le rythme à couper le souffle. bien non.

(à noter qu'à la base, la littérature dite érotique ou pornographique m'emmerde profondément, parce que dans une mécanique horriblement répétitive, là, ce n'est pas le cas. ou, si c'est le cas, mais quelque chose tourne et fait variation même repassant sur les scènes qui s'entrecroisent et se chevauchent comme le font les corps.)

je lis actuellement Tombeau pour cinq cent mille soldats (L'imaginaire, Gallimard). j'y retrouve avec plaisir, le souffle, les images de barbarie, de violence, de sexualité. et peut-être, que dans ce livre-là, moins excessif que le précédent, on peut trouver les questions que posent l'écriture de Guyotat.
cela sent Sade pour la contrainte et la violence dans le rapport au politique.
cela sent Artaud pour la furie, la frénésie et pas que.

pour commencer, avoir son estomac en bon état, parvenir à être touché par l'écriture, l'homme, peut-être faut-il lire Coma (Folio, Gallimard) : journal de dépression, carnet de travail.
et ce livre-là est très éclairant sur le rapport complexe, douloureux de Guyotat avec le corps.
et l'on n'est pas dans le tout organique d'un Bernard Noël, parce que reste tout de même le désir, la chair vivante (merde, ça, ça mérite comparaison des thématiques, mais pas le temps).

sinon, pour les données biographiques, on peut aller voir par là : http://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Guyotat

bon, je cesse, je risque de me mettre en retard. mais promis, je tente de suivre ce fil.

ha zut, il y avait déjà un fil Guyotat.
Rotko, je peux coller mon intervention ici que les chefs du site fassent le ménage...

ha ben c'est fait.

Nestor : no problemo

sinon, je viens de lire le début du fil : Costes, c'est vraiment de la provoc' à deux balles, et les qualités littéraires du type, je les cherche encore (identiquement pour l'avoir vu et entendu dans un bar parisien un soir, pourtant, j'étais bourrée, ça aurait pu altérer mon jugement).

(je me dégage de toute réaction sur Despentes la revencharde grossière, parce que vraiment là, j'ai autre chose à foutre que de parler de cette quiche, sinon pour dire : si vous avez un cerveau, lisez Judith Butler pour les questions féministes !)

Costes, c'est la provoc' pour ado contre papa, et Guyoyat, c'est de la littérature contre bourgeoise (mais c'est vrai, comme Guyotat est plus subtil, on ne s'en rend pas forcément compte).

(sinon, oui, le milieu littéraire est un tout petit monde. mais celui des performeurs ne l'est pas moins. et Costes, quoi qu'il cochon qui s'en dédit, n'est pas mal au niveau relations qu'on dit putassières)

Entretiens de pierre Guyotat avec sylvain Bourneau 1/5

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