Hubert Mingarelli

Quatre soldats a reçu le prix Médicis en 2003, et c’est le dixième roman d’un auteur, Hubert Mingarelli, qui a commencé par écrire « pour la jeunesse ».
L’écriture des quatre soldats est simple, en deçà des émotions ressenties, ce qui donne au lecteur l’impression de recevoir les confidences d’un homme fruste.

Mais ces gens-là et cet auteur-là gagnent être connus.
Un autre titre : « la lumière volée », chez Gallimard, une histoire d’enfants orphelins pendant la guerre, à Varsovie en 1942.

C'est Colbrune qui me l'a fait connaître.

Pour situer Mingarelli, le début du compte-rendu d'un entretien avec l'auteur raconté par le « courrier picard » :

Citation :

Hubert Mingarelli a tout dit. L'école, qu'il a quittée en seconde ("ça ne fonctionnait pas du tout"), sa vie dans la rue "à faire la manche" , ses trois ans dans la Marine, ses voyages avec ses copains, et cette formidable envie de créer, devenir "modestement" un artiste. D'abord en tâtant de la musique, puis de la peinture avant de se jeter corps et âme dans la littérature après avoir découvert "Sur la route" de Jack Kerouac. "ça a été le déclic. Je n'avais jamais lu ça avant. Je ne savais qu'il pouvait y avoir des livres aussi extraordinaires" .

Hubert Mingarelli, Quatre soldats, Seuil.

Il se présente à la première page :

Citation :

« Je suis de Dorotvitsa dans la province de Viatka. Quand mes parents sont morts, j’ai quitté Dorovitsa pour Kaliazine au bord du fleuve, et j’ai travaillé» pour Ouvanès. J’attelais les troncs à un cheval pour les transporter de la berge à la scierie. Je les arrimais à un treuuil et les déposais sur la scie à ruban qu’ Ovanès conduisit. Le soir je donnais l’avoine au cheval et lui étendais de la paille.

Ovanès me louait une chambre au seize de la rue Svevo. Ma fenêtre donnait sur le fleuve. J’avais un lit et un tapis. Je m’étais construit un meuble où je rangeais mes affaires.

J’étais seul dans le monde et le soir je mangeais en regardant le fleuve »;

Suit l’histoire d’un groupe de quatre militaires, fuyant les Roumains, et des menus détails de leur vie quotidienne, où les paroles sont rares, les incidents, banals, racontés succinctement et simplement, mais vécus par tous avec intensité.

Le thème de la solitude vaincue y tiendra une grande place. Un jeune engagé, timide et discret, sera adjoint au groupe, mais on lui trouve une mission inédite qui change toute la face du livre.

Ce petit livre réserve au lecteur des surprises dans la conduite du récit, et, dans sa savante discrétion, il demeure un témoignage poignant du quotidien des humains embarqués dans la guerre.

Grâce à ce fil j'ai lu le livre dont le titre ne m'aurait pas attirée autrement....Merci Rotko
D'accord avec toi sur toute la ligne

Une Rivière Verte et Silencieuse. - Seuil - 128 pages.

Citation :

Un père aime son fils qui aime son père.

Voilà toute l'histoire de ce roman.
Simple, quoi de plus naturel ?
Naïf, certes mais tellement émouvant.
Triste, mais jamais de larmes.

Parce qu'une rivière verte et silencieuse raconte l'histoire d'une relation entre un père (souvent considéré comme un raté, parce qu'il n'arrive pas à subvenir aux besoins de sa famille, chômage et pauvreté, galères de la vie quotidienne) et un fils de 5 ans qui apprend simplement à réver, en se réfugiant dans un tunnel d'herbes hautes dans lequel il pourra imaginer à loisir s'acheter un bras de rivière pour simplement regarder les poissons...

Une rivière verte et silencieuse est le genre de roman que vous lisez en une heure ou deux, mais dont l'histoire restera gravée dans votre coeur à tout jamais.

C'est le genre de roman qui a atterri dans vos mains, sans réellement savoir pourquoi, ni comment, sans connaître ni l'auteur ni même l'histoire.
Pourtant, vous vous sentez obligé de faire partager cette lecture, parce qu'avant tout, c'est le genre de roman qui se partage, qui fait énormément de bien et qui réapprend à tout lecteur à simplement réver un petit peu plus, même lorsque l'enfance est terminée...

Mingarelli, lettre de Buenos-Aires, 180 pages chez Buchet-Chastel.

Citation :

« Il avait débarqué la veille après des années passées en Argentine. Il avançait courbé entre le bassin de radoub et les conserveries en briques rouges, marmonnant contre la pluie et contre lui-même. »

Cette nouvelle qui a donné le titre au recueil présente une arrivée à « bon port », sauf que les jambes du voyageur ne peuvent plus le porter, et qu’il peine à dire quelques mots à un jeune homme secourable.

L’atmosphère du port, la vie dans une scierie, des histoires de rencontre et d’amitié devenues des souvenirs, c’est la fin des errances, après des tentatives avortées de départ..

Mingarelli rapporte les derniers rêves peut-être d’un expatrié. Rien de tel que la houle ressentie sur un bateau pour déstabiliser le personnage et le lecteur : on vit l’histoire, et on sait à la toute fin de la nouvelle qui était le personnage allongé, avec un message dans la poche...

Une excellente nouvelle.