Mémoires d'Hortense et de Marie Mancini (XVIIème siècle)

Fut-il l'initiateur de la politique du regroupement familial ? Toujours est-il que Julio Mazarini, immigré italien en France mieux connu sous le nom francisé de Mazarin, après avoir obtenu un bon poste dans l'administration, s'empressa de faire venir ses nièces afin de tenter de leur procurer de bons partis.

Marie, un temps aimée du jeune Louis XIV, n'en sera pas épousée car son oncle s'y opposera. Elle se mariera avec le connétable de Colonna, un Italien comme elle, qui, après avoir été un bon mari, se révélera jaloux et mesquin, et pour lui échapper elle mènera une vie d'errance, sortant de prisons dorées pour entrer en couvents, et nous livre une prose qui n'est pas sans rappeler celle de Marcel Proust :

Citation :

Mais, pendant que ma calèche, qui m'avait plus fatiguée que les chevaux de poste, courait par les chemins, et que je m'attendais, en marchant toute la nuit, à réparer le temps que j'avais perdu sur la rivière, et lorsque je croyais n'avoir plus rien à craindre et que tous mes sinistres accidents étaient passés, ma calèche ayant versé deux fois, sans me blesser pourtant, pour comble de mes disgrâces et par cette fatalité dont j'ai déjà parlé, qui semblait inséparable de tous mes pélerinages, en arrivant à Montargis, qui fut environ sur le midi, il prit une cruelle colique à Morena, et à Marguein, un mal bien plus dangereux pour moi que pour lui, se remplissant l'imagination de certains soins et de certains égards et faisant plusieurs sérieuses politiques réflexions sur les inconvénients qui pouvaient résulter de mon entreprise, aussi bien pour moi que pour lui, et pour toute sa famille, en arrivant à Paris, contre la volonté et contre les ordres du Roi.

Chez Hortense, qui sera mariée avec un fou furieux, mais qui parviendra mieux à tirer son épingle du jeu, en obtenant asile chez de puissants amants, le discours s'habille de phrases plus courtes mais se révèle plus mordant :

Citation :

Quoi qu'il en soit, il [le cardinal Mazarin] mourut huit jours après, et me laissa la plus riche héritière et la plus malheureuse femme de la chrétienté. A la première nouvelle que nous en eûmes, mon frère et ma soeur, pour tout regret, se dirent l'un à l'autre, Dieu merci, il est crevé. A dire vrai, je n'en fus guère plus affligée ; et c'est une chose remarquable, qu'un homme de ce mérite, après avoir travaillé toute sa vie pour élever et enrichir sa famille, n'en ait reçu que des marques d'aversion, même après sa mort. Si vous saviez avec quelle rigueur il nous traitait en toutes choses, vous en seriez moins surpris. Jamais personne n'eut les manières si douces en public, et si rudes dans le domestique ; et toutes nos humeurs et nos inclinations étaient contraires aux siennes.

Des siècles avant le magazine Voici, on pouvait donc étancher sa soif d'indiscrétion, grâce à la lecture des mémoires des gens célèbres !