Liu Qingbang,

Liu Qingbang, Cataclysme, bleu de chine chez Gallimard .

Nouvel an à la mine, 1ère nouvelle (sur 3) de ce petit recueil, fait vivre un épisode de la vie rurale en Chine : l’épouse et sa petite fille attendent, friandises à l’appui, le retour du travailleur expatrié. Les commérages médisants n’y feront rien, la joie est au programme.

Toutefois la nouvelle tombe par le téléphone public : le père restera à la mine pour les fêtes.

La mère et la fille décident donc d’aller le rejoindre.

Nouvelle réaliste qui abonde en détails quotidiens, Nouvel an à la mine semble s’inspirer du meilleur Maupassant : concision du style, réactions des personnages, et notamment de la fillette, c’est un petit drame doux-amer vécu sur le terrain, et la mise à nu d’une politique industrielle inhumaine.

On ne voit pas la mine, mais ses conséquences sur la vie et le climat familial.

Citation :

« Qui c’est qu’est pas content? fit Yuewen, je suis contente, moi… »

Cette phrase finale vaut une dénonciation !

Françoise Naour, qui a fait la traduction (très soignée), accompagne le texte de références utiles sur les pratiques de fête, les habitudes, les salaires etc.

je relève, un peu en marge de ce récit, ce qui est dit de la mine et des mineurs :

7 millions de mineurs dans les mines les plus dangereuses du monde. Selon les sources 5 à 6 000 décès par an, officiellement 3 700 en 2007, et et pour les organismes indépendants 20.000 par an.


je parlerai plus tard de la nouvelle cataclysme, très belle, et à conseiller.

en attendant je mentionne



152 p. chez Bleu de Chine

Deux compères sillonnent les régions chinoises de production de charbon à la recherche de victimes à dévaliser. Leur technique : repérer l'un de ces millions de paysans parti de son village à la recherche d'un petit boulot, gagner sa confiance, l'assassiner et le dévaliser dans un puits de mine, lieu discret où de fréquents accidents mortels constituent autant d'excellents alibis. La machine à tuer fonctionne parfaitement jusqu'à leur rencontre avec la dernière victime,

Une excellente nouvelle à mes yeux que Cataclysme.

On a encore dans la tête les images du tsunami du Japon, mais aussi les frayeurs des villageois chinois confrontés aux risques des barrages gigantesques : ils sont précisément dans la région où Liu Qingbang situe l’action.

Voici le début :

C’est arrivé comme çà, par l’ouest : des eaux énormes, une muraille liquide qui faisait bien dans les trente mètres de haut, qui avançait et ravageait tout au passage, les rails étaient tordus comme des beignets torsadés, sur les câbles des lignes à haute tension étaient pendues des herbes aquatiques, les vagues charriaient à leur crête des gerbes de blé, les rouleaux de pierre qu’on utilise pour décortiquer le grain, les lourdes meules avec lesquelles on l’écrase, le flot les roulait avec lui, les dispersait sous lui.

Ensuite nous voyons les incidences sur la population et le cadre de vie, j’isole seulement ce passage qui traite des comportements humains ; ici une femme qui «  souffrait d’une maladie incurable  » et que son mari « prépare » à la catastrophe

Aux quatre coins du lit, il planta quatre pieux aux quels au moyen d’une corde, il amarra son esquif ; après quoi, il ligota sa femme sur sa couche, serré-serré, de peur que les eaux ne l’emportent. Cela fait, bien fait, il amena leurs trois enfants pour qu’ils disent adieu à leur maman « allez, fit-il, repose-toi bien ! Dès que ce sera sec, on reviendra te voir ! » Elle n’eut pas une lame mais, avec la dernière élargie d’un ultime sourire, elle exhorta mari et gosses à ficher le camp : « partez vite ! Vous faîtes pas de souci pour moi… »

Cette nouvelle mêle avec bonheur différents tons. On trouve même des dialogues cocasses entre des rescapés, réfugiés au faîte des arbres, et qui s’invitent à partager leurs maigres repas respectifs !!

C’est vraiment avec ce livre la découverte d’un écrivain confirmé.

Cette peinture d'une Chine rurale, peu moderne, où les hommes doivent s'exiler pour trouver du travail, apparaît bien, dans toute sa complexité, avec les Photos et la conférence sur les nationalités minoritaires, entendue à Nantes en mars 2012, dans le cadre d'une animation faite par couleursdechine.org.